Disclaimer: Le Seigneur des Anneaux appartient à J.R.R. Tolkien. Et Final Fantasy7 à Square Enix.
Chapitre 13 :
Le test
Debout dans l'ascenseur, Lowen regardait nerveusement le numéro des étages défiler sur l'écran digital.
Elle jeta un regard à Sephiroth.
Le réveil de la chambre indiquait neuf heures du matin lorsqu'il était revenu au manoir. Il avait annoncé aux quatre enfants qu'ils ne retourneraient pas au laboratoire, qu'ils allaient rester vivre avec lui.
Mais il avait demandé à Lowen de venir avec lui voir quelqu'un pour l'aider à remplir les démarches administratives pour son adoption.
Les garçons, méfiants, avaient demandé à Sephiroth pourquoi. Était-ce un piège ? Voulait-il la séparer d'eux ? Lowen était touchée qu'ils tiennent à ce qu'elle reste avec eux, mais elle partageait leurs inquiétudes.
Sephiroth avait révélé aux garçons qu'ils avaient la même mère. Ils étaient donc frères. Les trois enfants avaient paru surpris, mais ils s'étaient vite réjouis. Apparemment, l'idée d'avoir un frère de plus ne les gênait pas du tout !
Mais Lowen avait peur. Et s'il avait menti pour la ramener aux labos ? Elle n'était pas sa sœur, elle.
Nerveuse, elle serra le collier de Galadriel contre son cœur. Quel soulagement lorsque Sephiroth le lui avait remis, en rentrant !
Du calme ! Il ne me l'aurait pas rendu si je devais retourner au laboratoire, essaya de se rassurer l'enfant.
Enfin, l'ascenseur s'arrêta.
Ils étaient à un étage spacieux, avec de grands murs aux couleurs brunes tirant sur le rouge.
Ils prirent un escalator, puis un escalier, franchirent une porte coulissante et arrivèrent dans ce qui ressemblait à une bibliothèque.
L'immense salle était ronde, avec au plafond un grand dôme dont la lumière éclairait des étagères remplies d'épais volumes. Un tapis rouge recouvrait le sol, étouffant les pas des deux visiteurs.
Un homme assez âgé, en costume de bureau beige, les accueillit en s'inclinant, puis leur fit signe de le suivre.
Ils arrivèrent devant un grand bureau, derrière lequel se tenait assis un vieux monsieur en costume sombre. Chauve, une barbe grise aux reflets bleus recouvrait le bas de son visage.
« Ah, enfin vous voilà ! C'est pas trop tôt », dit-il en avisant les deux visiteurs.
Lowen regarda cet homme quitter son bureau pour s'approcher d'eux. Il se tenait à une canne dotée d'un pommeau doré.
Avisant la petite, l'étranger lui offrit un sourire.
« Enchanté, petite. Je suis le maire de notre magnifique Midgar, la cité mako. Mon nom est Domino », dit-il avec la main sur le cœur.
Lowen fronça les sourcils. Il y avait quelque chose d'étrange chez cet homme, mais elle n'aurait su dire quoi. Quelque chose en lui paraissait… familier.
Réalisant que son silence frisait l'impolitesse, Lowen s'inclina.
« … Enchantée aussi. Je m'appelle Lowen. »
« C'est un joli nom. Mais dis-moi, ma petite, n'as-tu pas un nom de famille ? Vois-tu, ton nouveau tuteur, Sephiroth, ici présent, m'a remis des papiers contenant des informations sur toi et les trois autres garçons. Malheureusement, le tien présente des lacunes. J'espérais que tu pourrais m'aider à les remplir, afin que je crée ton identité. »
« Non », soupira l'enfant.
Sephiroth fut déçu de sa réponse. Elle lui avait donné la même ce matin, mais il avait bien senti qu'elle lui cachait quelque chose. Il y avait trop de mystères non résolus autour de cette fillette pour les ignorer.
Le maire s'approcha d'elle et s'agenouilla pour se mettre à son niveau. Lowen se sentit bizarre en croisant son regard.
Il y avait quelque chose d'étrange dans ses yeux. Son regard semblait renfermer de nombreuses années d'expériences, de découvertes et de périples. Lowen réalisa qu'elle avait déjà vu ça chez les Elfes ! Et bien que d'apparence vieux et faible, il se tenait droit avec une assurance et un calme qui inspiraient une certaine puissance.
« Lowen… Cela signifie fille de la nuit en elfique, si je ne m'abuse ? » demanda le maire d'une voix malicieuse.
En entendant cela, Lowen ouvrit des yeux ronds. Avait-il bien dit le mot elfique ? Mais comment pouvait-il savoir ça ?
« Sephiroth, accepteriez-vous de me laisser seul avec elle, le temps que je finisse de remplir les papiers ? Rassurez-vous, ce ne sera pas long », dit le maire en se redressant.
Méfiant, le Soldat regarda Lowen. Celle-ci surmonta sa surprise pour lui faire signe que ça allait. Sephiroth lança un dernier regard au maire, puis quitta les bureaux en silence.
Le maire fit signe à Lowen de s'asseoir, puis tendit la main vers un service à thé posé à droite de son bureau. Il lui offrit une tasse avant de reprendre ses questions.
« Alors, ma petite, j'imagine que cet endroit doit te sembler bien différent d'Arda. »
« Vous… vous venez d'Arda ? » demanda Lowen d'une voix tremblante d'espoir.
« Eh oui ! N'as-tu pas une petite idée de qui je pourrais être ? »
Il caressa sa canne avec un sourire complice. Lowen eut un déclic.
« Vous êtes… un Magicien ? »
« Exactement ! Mon vrai nom est Pallando. »
« Vous êtes un des Ithryn Luin, les Mages Bleus ? »
« Oui ! Je vois qu'on t'a parlé de nous ? »
« Radagast m'a parlé des autres Magiciens, mais… mais qu'est-ce que vous faites ici ? Et vous n'avez pas un autre collègue qui vous accompagne partout, un certain Alatar ? »
De la tristesse assombrit le visage du maire. Lowen vit clairement qu'elle n'était pas simulée.
« Il est mort, il y a des années. Nous sommes arrivés ensemble dans ce monde, par accident. Nous nous dirigions vers le Nord, en quête de renseignements sur l'Ombre. Nous soupçonnions Sauron, le Seigneur Ténébreux, de ne pas avoir trépassé suite au coup qu'Isildur lui avait porté. Mais nous nous sommes perdus dans les montagnes. Lors d'une violente tempête, vous n'avons senti une étrange magie à l'œuvre. Nous l'avons suivie jusqu'à une grotte, où se trouvait un portail. Nous ne voulions pas le franchir, nous sentions que cela n'augurait rien de bon, mais nous étions affaiblis. La force d'attraction que cette ouverture exerçait autour d'elle a fini par nous aspirer ici. Arrivés sur Gaïa, nous étions en pleine forêt, face à d'étranges créatures que nous n'avions encore jamais vues ! Nous avons combattu tous les monstres qui ont croisé notre route, mais Alatar a fini par recevoir une blessure mortelle. Je n'ai rien pu faire pour lui. »
Lowen regarda l'homme devant elle avec un mélange de bonheur, d'excitation et d'incrédulité. Ainsi, elle n'était pas seule !
« Et… en dehors de nous, il y a d'autres gens d'Arda, ici ? »
« Pas à ma connaissance. J'ai mis du temps à me fondre dans la masse et à me fabriquer une nouvelle identité. Heureusement, je suis arrivé ici avant la création de la Shinra. Au début, je jouais le vieillard qui perdait la mémoire, ce qui m'a permis d'obtenir facilement des informations sur ce monde et comment y survivre. »
« Alors, vous êtes le maire de cette ville, maintenant ? »
« Maire… c'est un titre bien pompeux, car en fait, je ne suis que le responsable des archives de la société. Mais ça me va. J'ai droit à un bureau confortable et isolé, le métier est suffisamment payé pour que je sois à l'abri du besoin. Mais toi, ma petite, comment as-tu atterri ici ? Dis-moi comment les choses vont, chez nous ? »
« C'est une longue histoire… »
« Nous avons le temps. Rassure-toi, Sephiroth ne reviendra pas avant environ une heure, je connais le président. Il n'est pas du genre à lui laisser du répit, surtout le matin. »
Le maire lui tendit une assiette de biscuits. Lowen en prit un et entama son récit: sa vie à Mirkwood, son amitié avec Legolas, son apprentissage avec Radagast, comment elle avait fini par en être chassée du palais, le sauvetage de Talion et sa séparation avec Glorfindel.
« Impressionnant ! » dit Pallando en lissant sa barbe. «Par contre, je suis étonné. Pourquoi Radagast et Gandalf t'ont-ils confiée dès la naissance aux Elfes ? Tu n'avais pas de famille ? »
Lowen se crispa. Comment allait-il réagir en apprenant ses origines?
Voyant qu'elle avait peur, Pallando lui offrit un sourire rassurant.
« Le collier que tu portes est particulièrement précieux, je reconnais le style des Elfes de la Lothlorien. Aurais-tu un parent, là-bas ? »
« Oui. La dame Galadriel. »
Pallando haussa les sourcils.
« Vraiment ? Je ne pensais pas qu'elle aurait un enfant avec un autre que son époux ! »
« Non, je ne suis pas vraiment son enfant, c'est… c'est compliqué. »
Avec un soupir, elle lui raconta son unique rencontre avec la dame en rêve, ainsi que les révélations qu'elle lui avait faites.
Lorsqu'elle eut fini, le Magicien la regardait avec les yeux plissés, ses doigts lissant sa barbe sans s'arrêter.
« Je me doutais que tu avais peut-être un lien avec l'Ombre. Je sens les deux forces qui sommeillent en toi, mais ça… ! Une enfant née d'une fleur, touchée par la Lumière et les Ténèbres…»
« Je ne suis pas du côté de Sauron, je vous le jure ! »
« Oh, je te crois, ne t'inquiète pas ! Ton collier en est la preuve. La dame du Bois Doré ne t'aurait pas fait un tel présent si elle n'avait pas lu dans ton âme. Je peux voir aussi une lumière dans tes yeux. »
« Vous… vous allez faire quoi, alors ? »
« Hum, je pense que nous n'avons pas trop le choix. Tu vas rester vivre avec Sephiroth et les trois autres enfants. Te fondre dans la masse, comme je l'ai fait, jusqu'à ce que les Valars se manifestent. »
« Vous croyez qu'ils le feront ? »
Pallando eut un sourire mystérieux.
« Je pense qu'ils sont loin, mais qu'ils ne nous ont pas oubliés. Bon, il est temps que je remplisse ton dossier ! »
Il tira son clavier devant lui et se mit à taper du texte en scrutant l'écran de son ordinateur.
Lorsque Sephiroth revint un quart d'heure plus tard, Lowen était toujours assise dans son fauteuil, mais elle paraissait plus à l'aise et l'accueillit avec un sourire détendu.
« Tenez, voici les cartes d'identité des enfants. J'ai fini les formalités, tout est en règle », dit le maire.
Il lui tendit quatre cartes blanches avec une bande magnétique noire au dos. Le logo de la Shinra était visible à gauche, à côté de chaque photo des quatre enfants.
Sephiroth ouvrit le dossier de Lowen et regarda les données sur la première page.
« Prénom : Lowen
Nom : Greenrock
Mère : Galadriel
Père : Inconnu
Date de naissance… »
Il haussa un sourcil. Galadriel ? Greenrock ? Tout ça ne lui disait rien. Mais apparemment, le maire avait réussi à gagner la confiance de Lowen et lui soutirer assez d'informations pour créer sa carte d'identité.
Il remercia le maire d'un signe de tête, puis il sortit du bureau avec Lowen.
Le trajet du retour au manoir se fit en silence. Lowen sentit qu'en dépit de son silence, Sephiroth l'observait à la dérobée. Il se demandait sûrement comment l'interroger sur son entretien avec le maire.
L'enfant s'en voulait un peu de ne rien lui dire, mais elle ne le connaissait pas encore assez pour lui faire confiance. Domino – non, Pallando – lui avait conseillé de ne dire à personne qu'elle venait d'un autre monde. Il avait laissé entendre que Sephiroth n'était pas quelqu'un de cruel, mais qu'il avait la fâcheuse tendance à obéir aux ordres quels qu'ils soient. Il valait donc mieux ne pas se confier à lui.
Facile à dire ! Je vais vivre sous son toit, maintenant, pensa Lowen.
Et il y avait les garçons ! Que pouvait-elle leur dire ? Ils avaient accepté Sephiroth comme leur frère d'entrée de jeu. Si jamais ils lui révélaient des choses qu'elle leur aurait d'abord racontées, ça pourrait poser problème.
Non, il valait mieux se taire et se fondre dans la masse, rien de plus.
Tandis qu'ils roulaient en direction du manoir, Lowen regarda la ville à travers la vitre. Toutes ces lumières, toute cette technologie… Quelle différence avec Arda! Comment avait fait Pallando pour s'adapter à ça ? Quoiqu'il avait eu la chance d'arriver avant que la Shinra devienne une réalité. La Shinra… D'après Pallando, cette société n'était pas qu'une vulgaire marque commerciale fournissant l'énergie aux gens de ce monde. C'était une tyrannie faisant pression sur les gens en exploitant leur dépendance à la mako. Sans elle, l'humanité serait renvoyée à l'âge de pierre.
« Comment s'est passé ton entretien avec le maire ? » demanda Sephiroth.
Clignant des yeux, Lowen émergea de ses pensées pour se tourner vers son nouveau tuteur.
« Bien. Il est gentil. »
Elle entendit un vague «Mmmm», mais aucune expression n'apparut sur le visage de Sephiroth.
Génial ! Aussi expressif qu'un Elfe, pensa l'enfant.
Elle fut quand même rassurée qu'il ne pose aucune autre question.
Une fois arrivés au manoir, Sephiroth demanda à Lowen de le suivre, il devait lui parler en même temps qu'aux garçons.
Obéissante, l'enfant le suivit jusqu'à leur chambre. Les garçons étaient assis sur le lit, en train de tripoter des vêtements.
« T'es revenue ! » dit Loz, tout content.
« Je te l'avais dit qu'elle ne risquait rien », dit Yazoo.
« Il a pas arrêté de pleurer en s'imaginant que tu reviendrais jamais », dit Kadaj.
« Même pas vrai ! » protesta Loz.
« Du calme, tous les trois », exigea Sephiroth.
Les enfants se turent aussitôt. Lowen haussa des sourcils admiratifs. Il avait vraiment un don pour parler calmement tout en mettant de l'autorité dans sa voix!
« Vous avez essayé vos uniformes ? » demanda Sephiroth.
Les enfants se tournèrent vers les vêtements sur le lit. Lowen les examina. Il y avait des pantalons gris, des chemises blanches, des vestes rouges et des cravates noires, ainsi que des paires de mocassins. Et dans un coin, une jupe grise ainsi que des chaussettes montantes. Ce devait être des vêtements pour elle.
« On doit vraiment porter ça ? » gémit Kadaj.
« Pour aller à l'école, oui », dit Sephiroth.
« Mais pourquoi on doit aller dans une école de la Shinra ? Je croyais qu'on était libres », gémit Loz.
« Vous l'êtes. Vous êtes libres de ne plus retourner aux labos, à condition de faire ce que la Shinra exige de vous », dit Sephiroth.
« Ouais, autrement dit on est forcés de faire autre chose. C'est pas ça, être libre », dit Kadaj.
Sephiroth plissa les yeux. Lowen, Yazoo et Loz coulèrent un regard inquiet à Kadaj. Ce dernier croisa les bras en signe de protestation, mais ses doigts étaient parcourus de tremblements, signe qu'il n'était pas entièrement rassuré.
« Si tu veux retourner dans les laboratoires, pas de problème, tu peux quitter le manoir tout de suite. Mais ne compte pas sur moi pour te ramener là-bas. »
«T'as pas à nous donner d'ordres ! T'étais où, pendant toutes ces années où on était enfermés dans les labos ? Si t'étais vraiment notre frère, tu nous en aurais sortis il y a longtemps, pour qu'on ait droit à une vie normale, comme tous les autres enfants.»
La sévérité disparut du visage de Sephiroth.
« Si j'avais appris votre existence plus tôt… »
Lowen le vit hésiter. Apparemment, il ne savait pas quoi dire. Cela semblait si nouveau pour lui d'être grand frère. D'après Pallando, il n'avait jamais eu de parents, il avait été élevé par les scientifiques de la Shinra toute son enfance.
« Oui, tu aurais fait quoi ? » insista Kadaj d'une voix narquoise.
Lowen se pencha vers lui pour lui faire signe d'arrêter, mais Kadaj haussa les épaules. Maintenant qu'il était lancé, il n'allait pas s'arrêter.
« … Peu importe », conclut Sephiroth. «Vous savez ce qui arrivera si vous désobéissez. J'ai l'intention de vous aider, mais si vous n'y mettez pas du vôtre, ça ne marchera jamais. »
« D'accord, grand frère », dit Loz.
« D'accord », dit Yazoo.
« Ça marche », dit Lowen.
« … Ouais, d'accord », bougonna Kadaj.
« Bien ! Vous avez vos uniformes, on s'occupera de vous trouver d'autres vêtements pendant le week-end. Haneki vous a montré vos nouvelles chambres ? »
« Oui, à ce propos, on préfère dormir tous ensemble », dit Kadaj.
« Euh… » dit Lowen, gênée.
Elle aimait les garçons, mais à l'idée de ne pas avoir sa propre chambre et son intimité, quand même…
« Vous pouvez dormir tous les trois, si vous voulez, mais Lowen fera chambre à part. D'ailleurs, tu ferais bien d'y aller pour essayer ton uniforme », dit Sephiroth.
« Pourquoi elle reste pas avec nous ?! » s'étonna Kadaj.
Lowen réalisa que le concept d'intimité lui semblait étranger, comme aux deux autres. Et pour cause, ils avaient passé leur vie avec des scientifiques n'ayant aucune gêne à les examiner sous toutes les coutures, sans parler des caméras…
Je sens que ça va être dur de les éduquer ! pensa Sephiroth avec lassitude.
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Le lendemain matin, les quatre enfants étaient en tenue pour l'école et attendaient l'arrivée du bus chargé de les emmener dans leur nouvelle école.
Hier, Sephiroth leur avait fait un rapide résumé de cette école. C'était un établissement Shinra, on veillerait donc à les éduquer de manière à devenir fidèle à la société.
Cela ne plaisait pas à Lowen. Et elle se doutait qu'en dépit de leur silence, les garçons n'aimaient pas cette idée non plus. La Shinra leur avait fait du mal toute leur vie. Et maintenant, ils devaient jouer les bons petits élèves acceptant de se faire endoctriner.
Lowen ne s'inquiétait pas trop. Elle avait beau être une fillette de sept ans en apparence, elle avait plusieurs années de scolarité sur Terre en mémoire. Elle craignait plutôt le fait de s'intégrer dans cette école. Et si jamais elle avait l'air trop bizarre ou trop adulte pour les autres enfants ?
Et les garçons ? Ils n'avaient jamais été dans une école normale ! Yazoo lui avait raconté qu'en général, lorsqu'ils avaient quelques heures d'instruction, ils les passaient assis à des pupitres, à écouter un professeur les instruire sur différents sujets: maths, sciences, géographie…
Elle était inquiète. Et si jamais les enseignants étaient méchants ? Ou les élèves ? Kadaj était d'un naturel plutôt sauvage, si jamais il faisait preuve d'agressivité, cela lui vaudrait-il un retour simple aux laboratoires ? Lowen espérait que non. Lui et ses frères étaient les seules personnes qu'elle connaissait !
En y repensant, ils étaient désormais plus que des connaissances. Elle était pour ainsi dire leur sœur adoptive, puisque Sephiroth la gardait en même temps qu'eux.
Mais moi, je ne suis pas du même sang qu'eux. Ils ont la même mère.
Elle passa la main sous le col de sa chemise pour caresser son collier. Sephiroth lui avait déconseillé de porter un bijou aussi précieux à l'école, mais Lowen refusait de s'en séparer. Ce collier était son seul lien avec Galadriel et la Terre du Milieu.
Valars, faites que tout se passe bien pour notre première journée d'école, pria Lowen.
Un crissement de pneus retentit. Elle ouvrit les yeux et vit qu'un grand car jaune venait de se garer devant leur trottoir. Ses portes coulissantes s'ouvrir, laissant voir un chauffeur bedonnant qui leur fit signe de monter.
Inspirant à fond, la fillette serra les lanières de son sac à dos et monta à la suite des garçons dans le car.
Sitôt qu'ils furent dans le véhicule, les discussions des autres enfants se turent.
Carrant les épaules, Kadaj prit la tête de la file vers le fond du véhicule. Tandis qu'ils avançaient, des murmures et des chuchotements s'élevèrent sur leur passage.
Lowen se demanda en quoi le fait d'avoir quatre nouveaux enfants dans le car pouvait attirer ainsi l'attention. Ces élèves savaient-ils qu'ils venaient d'un laboratoire de la Shinra ? Elle en doutait.
Une fois assis, Lowen et les garçons restèrent silencieux. Les enfants les plus proches de leur siège se retournèrent brièvement pour les observer, mais ils ne le firent qu'une fois.
Lorsqu'enfin le car arriva à l'école, Lowen haussa les sourcils. L'école était tout ce qu'il y a de plus classique: une grande bâtisse en briques claires et au toit en tuiles rouges. Mais un grand drapeau affichant le logo de la Shinra pendait au-dessus de l'entrée.
Et une grille métallique un peu trop imposante, couronnée de barbelés, entourait le bâtiment. Au lieu d'une pelouse, il n'y avait qu'une grande étendue de goudron autour de l'école.
Lowen fit la grimace. Il n'y avait donc aucune végétation à Midgar ?
« On va où, maintenant ? » demanda Loz.
Lowen fit la moue.
« J'imagine qu'on doit se présenter au secrétariat… »
Pourquoi Sephiroth n'était pas venu pour leur première journée d'école ? Il disait qu'il avait du travail, mais quand même ! Un parent ne devait-il pas être là pour leur toute première journée ?
Tandis que les enfants marchaient vers l'entrée, Lowen nota un autre détail: une caméra au-dessus de la porte.
Une fois à l'intérieur, tandis qu'ils cherchaient le bureau d'admission, elle nota d'autres caméras à différents angles des couloirs. Vraiment étrange…
Enfin, ils arrivèrent devant le guichet du secrétariat. Lorsqu'ils se furent présentés, la secrétaire, une femme maigre à l'air revêche, décrocha le téléphone pour demander à un professeur de venir.
Ce dernier ne tarda pas à arriver. Vieux, en costume brun sombre, ses cheveux blancs et son visage émacié lui donnaient plus l'air de travailler pour les pompes funèbres que le corps enseignant.
« Suivez-moi, le test se fait dans une salle privée », dit-il en désignant un couloir dans son dos.
« Le test ? » répéta Lowen.
« Oui, nous devons d'abord évaluer votre niveau avant de vous affecter à une classe particulière. »
En entendant ça, les enfants s'arrêtèrent.
« On n'est pas dans la même classe d'office ? » demanda Kadaj.
« Bien sûr que non, si votre niveau ne le permet pas… »
« Mais… on est ensemble ! » protesta Loz.
« Ouais, on est inséparables ! » renchérit Kadaj.
Lowen se crispa en voyant l'air contrarié du professeur.
« Votre… loyauté est touchante, mais notre école cible le succès avant tout, pas l'esprit de famille. »
« Pourquoi ça m'étonne pas… » dit Yazoo.
« Je vous demande pardon ? »
« Rien », dit le garçon.
Il fit signe à ses frères de se calmer, puis tous suivirent de mauvaise grâce le vieillard jusqu'à une salle remplie de pupitres vides.
Une femme en tailleur bleu pâle les attendait, avec des copies à la main.
Elle attendit qu'ils se soient tous assis pour distribuer les feuilles.
« Vous avez deux heures pour répondre aux questions », dit-elle avant de se rasseoir.
Lowen regarda sa copie. Il y avait des questions dans différentes matières: orthographe, vocabulaire, maths, sciences, géographie, histoire…
La fillette se crispa en réalisant alors un problème: elle ne connaissait rien à l'histoire-géo de cette planète!
Elle regarda les garçons. Ils avaient déjà commencé à remplir les premières questions et semblaient bien concentrés sur leur travail.
Lowen prit peur. Peu importe ce qu'elle mettait, elle doutait fort d'avoir le même niveau qu'eux!
Inspirant à fond, elle saisit son stylo et commença à répondre aux questions dans les matières où elle était sûre de réussir.
Lorsqu'enfin les deux heures écoulées, elle rendit sa copie d'une main tremblante. Plusieurs zones de son questionnaire étaient vides, alors que les feuilles des garçons étaient pleines !
La femme lui lança un regard méprisant, mais ne dit rien.
Lorsque la cloche sonna, les enfants eurent la permission de rejoindre les autres élèves dans la cour de récréation.
Située à l'arrière du bâtiment, elle comportait un vaste terrain goudronné, où des lignes de circulation avaient été peintes.
« Trop facile, ce questionnaire ! J'avais fini en une heure, j'ai passé la seconde à relire et corriger », dit Loz.
« Moi, j'ai un peu galéré en sciences », dit Kadaj.
« Normal, tu détestes cette matière et ça se comprend», dit Yazoo. « Et toi, Lowen ? »
« Moi, je… j'ai eu du mal pour la partie histoire-géo. »
« Ah bon? C'était pas dur, pourtant », s'étonna Loz.
La fillette préféra ne pas lui répondre. Kadaj regarda les autres enfants qui jouaient autour d'eux, insouciants. Personne ne semblait vraiment faire attention à eux… sauf un groupe, isolé dans un coin à gauche de la cour.
Composé de filles et de garçons, tous les regardaient en chuchotant, l'air méfiant, presque mauvais.
Lowen eut un mauvais pressentiment. Ce comportement lui rappelait celui des Elfes lorsqu'elle vivait à Mirkwood. Beaucoup la regardaient ainsi, avec l'air de se demander ce qu'elle faisait sur leur territoire.
Heureusement, la cloche sonna, mettant un terme à cette surveillance désagréable.
Les quatre enfants rejoignirent la salle des tests et s'assirent à leur pupitre, face à la femme et son collègue âgé.
« J'ai corrigé vos copies. Pour vous, messieurs, je pense qu'il n'y a pas grand-chose à dire, vous avez de bonnes bases. »
Les garçons saisirent leurs feuilles. Kadaj avait un score de 88%, Yazoo 90% et Loz 95%.
« En revanche, Mlle Greenrock… »
Elle lui rendit une copie n'affichant que 60%.
« Vous n'avez rien mis aux questions portant sur l'histoire et la géographie. Pourquoi ? »
« Parce que je… je ne savais pas quoi répondre », dit l'enfant, la gorge nouée.
« C'est bizarre… Vous avez pourtant un très bon niveau en orthographe et en vocabulaire, vous n'avez donné qu'une mauvaise réponse en maths et en sciences, votre niveau est normal pour une enfant de votre âge. Où étiez-vous, avant ? Personne ne vous a rien appris sur la géographie de cette planète ? »
« Non. »
« Où viviez-vous ? »
Lowen serra les poings si fort que ses jointures blanchirent. Elle jugea préférable de ne pas répondre. Que dire, de toute façon? Qu'elle avait vécu dans la forêt? Même si elle omettait de préciser que c'était dans un autre monde, elle savait que ça ne servirait à rien.
« Je crains que vous ne puissiez entrer dans la même classe que vos frères. Il va falloir… »
« Ah non ! Elle reste avec nous ! » protesta Kadaj.
« Je vous demande pardon ? » s'offusqua l'enseignante.
Elle n'avait visiblement pas l'habitude qu'on lui manque de respect. Pourtant, face aux yeux de chat brillants du garçon, elle eut un geste de recul.
Craignant que cette attitude ne leur attire des problèmes, Lowen intervint.
« Je… Je comprends, c'est d'accord ! »
Les garçons la regardèrent avec des yeux ronds. Une fois les adultes sortis pour aller s'entretenir avec le directeur de l'école, ils se penchèrent vers elle.
« Pourquoi t'as accepté qu'elle nous sépare ? On va pas se laisser faire, on n'est plus aux labos ! » dit Kadaj.
« Non, mais il y a des caméras partout dans cette école, et je vous rappelle que Sephiroth nous a dit de pas attirer l'attention. On doit obéir aux ordres ! » dit Lowen.
« Mais c'est pas juste ! T'es notre sœur, ils ont pas le droit de nous séparer », gémit Loz, les larmes aux yeux.
Bien que touchée, Lowen haussa les épaules en signe d'impuissance.
« On n'a pas vraiment le choix. »
Kadaj fit la moue. Lowen craignit qu'il proteste de plus belle, mais à part une grimace contrariée, il n'ajouta rien.
Lorsque la femme et son collègue revinrent, ils leur distribuèrent des pages où s'affichait leur emploi du temps.
« Le car de l'école va vous ramener chez vous, ce sera tout pour aujourd'hui», dit la femme. «Demain, vous commencerez les cours avec les autres élèves de vos classes respectives. Ne soyez pas en retard ! »
Les enfants ne répondirent rien. Après tout, que pouvaient-ils dire ?
Ils quittèrent la salle dans un silence morose pour se diriger vers la sortie.
Alors qu'ils attendaient le car, Lowen n'y tint plus.
« Pourquoi vous faites la tronche ? J'ai pas envie d'être dans une classe plein d'étrangers, vous savez ! »
« C'est pas seulement ça, le problème ! On ne connaît rien à l'école, on ne sait pas comment faire pour… pour être comme les autres ! Toi, tu avais l'air à l'aise, comme si tu avais déjà vécu ça auparavant », dit Kadaj.
« Oui, et pourtant, tu as vécu dans la forêt toute ta vie. T'avais pas d'école, là où tu vivais, non ? » demanda Loz.
Lowen se tendit. En effet, elle n'avait jamais été à l'école quand elle vivait chez les Elfes. Mais sur Terre, oui,. Quelle idiote, elle aurait dû travailler son rôle et paraître aussi perdue qu'eux en arrivant ici !
Face à son silence, Kadaj plissa les yeux.
« Tu réponds pas ? »
Mal à l'aise, la fillette ne dit rien. Avec un soupir agacé, Kadaj reporta son regard sur la route.
Lowen se sentit blessée par son attitude. La tête basse, elle soupira quand, à sa grande surprise, Yazoo lui prit la main avec un sourire rassurant.
Légèrement rassérénée, Lowen patienta avec eux jusqu'à ce qu'enfin, le car vienne les chercher.
Tandis qu'il roulait pour les ramener au manoir, la fillette réalisa qu'elle allait devoir, comme les garçons, raconter sa journée à Sephiroth.
Cela ne fit que redoubler son angoisse. Comment allait-elle lui expliquer la décision de l'enseignante de la mettre dans une classe différente des garçons ?
Avec un soupir fatigué, Lowen colla son front contre la vitre.
Je sens que ça va être marrant de vivre sur cette planète !
