Quand je disais que les albatros prenaient beaucoup trop d'importance au fil du récit...
Diri-Chan : Harry va pouvoir péter les plombs :D
Holybleu : Oui, ça sort de la relation Harry-Drago ^^
Yuishifugi : cest Drago : il pourrait tout aussi bien être vexé que les oiseaux soient plus résistants que lui et leur en vouloir comme un pou XD
« Malfoy ! Malfoy, Putain ! Aie ! Mais lâche-moi, toi ! Malfoy ! »
Une main le secouait. Drago ouvrit les yeux. Combien de temps avait passé ? Le soleil avait traversé le ciel, les ombres avaient viré de 180°.
Potter le regardait, et les albatros habituellement aux petits soins pour lui lui pinçaient méchamment les bras et lui hurlaient au visage.
« Malfoy, qu'est-ce que tu… Aie ! Ouste ! Du vent, tous ! Du balai ! » Potter se redressa et chassa une partie des oiseaux en faisant de grands gestes. Drago serra plus fort celui qui, perché sur ses cuisses, lui entourait le dos de ses ailes immenses, comme s'il lui faisait un câlin. La plupart des oiseaux s'éloignèrent sur le balcon mais ne s'envolèrent pas.
« Malfoy… » Potter s'accroupit à ses côtés et chassa un albatros qui s'était posé sur son épaule. L'oiseau le mordit et sauta à terre. Drago se redressa légèrement. Il n'avait pas eu conscience de porter un tel poids.
Potter entreprit ensuite de faire lâcher sa prise à Drago : il tenta de lui décrisper les doigts.
Les doigts.
« Il y avait un Détraqueur, parvint-il à articuler.
– Quoi ? » Le Survivant se figea, fixa Drago avec un regard interdit.
Les albatros se turent enfin. Potter leur jeta un coup d'œil furtif, puis observa à nouveau Drago. Le froid réel, celui de la mer du Nord, revenait à la charge, et ses dents se mirent à claquer et sa peau à se couvrir de chair de poule. L'oiseau sur ses jambes roucoula doucement, et Drago replongea son nez dans les plumes blanches pour sentir son odeur musquée. Comment avait-il pu le trouver malodorant ? Il avait une odeur puissante de mer, de sel, de grand air et de liberté. Ses plumes étaient extraordinairement douces et chaudes. Il était l'une des plus belles créatures qu'il n'ait jamais vues, qu'il évolue sur terre ou dans le ciel et Drago avait été aveugle de ne pas le remarquer.
« Il y avait un Détraqueur », se força-t-il à répéter, le visage dissimulé dans les plumes.
Potter se leva. Il prononça la formule du Patronus, et un superbe cerf argenté sortit de sa baguette. L'animal spectral fit le tour du balcon, réchauffant l'atmosphère, puis galopa vers le firmament. Drago leva la tête.
Potter observait le ciel en marmonnant des sorts et des enchantements. Il utilisait à la fois sa baguette et sa voix, prouvant par là qu'il prenait l'affaire au sérieux. Il avait une prestance incroyable, et pour une fois, le constat ne rendit pas Drago jaloux mais le subjugua.
Au bout d'un moment, une note aigüe, comme un écho lointain, se fit entendre. Le Sorcier et les oiseaux tournèrent tous leur tête vers l'origine du son. Potter poussa un juron et son expression se modifia.
Il poussa une série d'exclamations furieuses, fit un pas dans un sens, revint en arrière, cracha une nouvelle insulte… Puis il revint s'agenouiller aux côtés de Drago.
« Malfoy, déclara-t-il comme s'il s'adressait à un enfant, j'ai besoin que tu rentres. Il faut que tu lâches cet oiseau, maintenant. » Il tenta à nouveau de faire céder les doigts de Drago, mais celui-ci paniqua et serra l'animal plus fort encore. « Okay, d'accord, concéda Potter. Bon, essaye juste de… Voilà, ne le lâche pas, laisse-moi juste t'aider à… »
Il parvint, on ne sait trop comment, à aider Drago à se relever, et celui-ci se retrouva debout et serrant contre son cœur un gros bébé de plus de 10kg. Il poussa Drago à travers la baie vitrée, le dirigea dans le salon, et le fit s'asseoir à côté de la cheminée qu'il ranima d'un Inflammare.
Le Patronus de Potter traversa les appartements et plongea à travers le mur vers le logement voisin, celui de la Major Mullan. Drago eut le temps d'admirer l'animal majestueux avec sa ramure flamboyante et sa silhouette impressionnante.
Potter se rendit dans la cuisine d'où il revint avec une énorme tablette de chocolat. Il en cassa un gros morceau qu'il tendit à Drago.
« Mange », ordonna-t-il. Drago eut du mal à se saisir du bout de chocolat et à la porter à ses lèvres, gêné par la présence de l'oiseau, mais il se débrouilla tant bien que mal. Il avait trop peur qu'on le sépare de l'animal s'il ne parvenait pas a obéir.
Bientôt, on frappa à la porte. Potter n'eut pas besoin de prononcer un mot ou de faire un geste pour que celle-ci s'ouvre et que les Majors Mullan et Runcorn ne pénètrent le salon. Potter fourra le reste de la plaquette de chocolat dans les mains de Drago, et partit expliquer la situation aux deux Surveillants : Une brèche s'était formée dans le dôme magique qui protégeait l'île des forces maléfiques. Au moins un Détraqueur était parvenu à pénétrer l'espace protégé. Il fallait vérifier qu'il n'était pas entré dans le château, effectuer des rondes, s'assurer que personne ne se retrouve sans coéquipier, fermer toutes les issues, interdire l'accès au ferry… Un protocole semblait déjà être mis en place, mais une multitude de détails n'avaient pas été prévus. Mullan insista pour prévenir la Selkie, Runcorn voulut vérifier le nombre des gardiens capables de produire un Patronus corporel, Potter voulait rejoindre les rondes, et apprendre aux Surveillants les plus aptes cette forme de magie…
Au bout d'un moment, ils se mirent à parler de Drago à voix basse, comme s'il était trop traumatisé pour comprendre quoi que ce soit… Et en effet, il devait en avoir l'air, immobile et silencieux sur le canapé, un morceau de chocolat fondant entre ses doigts engourdis et un piaf énorme sur les genoux.
« Est-ce qu'il a subi un baiser ? demanda Runcorn d'une voix blanche.
– Non, répondit Mullan sure d'elle. J'ai déjà vu des hommes à qui l'on avait arraché l'âme. Ils ne sont même plus capables de bouger. La façon dont il caresse l'oiseau, ça veut dire qu'il est encore parmi nous.
– Il m'a parlé, confirma Potter. Mais c'est comme s'il était absent… Pensez-vous qu'on puisse aspirer une partie de l'âme ? Ça s'est déjà vu ?
– Pas à ma connaissance. Est-ce qu'il vous a dit ce qu'il avait vu ? »
Drago hésita à prendre la parole, mais il n'avait pas grand-chose à ajouter aux suppositions. Quant à ce qu'il avait vu, il en avait déjà informé Potter. Il n'y avait rien à dire de plus.
« Mullan, pensez-vous que vous pourriez… ?
– Ce n'est pas tout à fait légal, mais je suppose qu'à situation exceptionnelle…
– Monsieur Potter, intervint Runcorn, je vais me charger de prévenir le personnel. Je reviens immédiatement. »
Drago sentit le canapé se creuser à ses côtés. La Surveillante Major venait de prendre place. Elle affichait une expression de douceur inhabituelle qui la rendait méconnaissable et encore plus effrayante qu'à son habitude.
« Malfoy, annonça-t-elle, je vais pénétrer ton esprit pour voir ce que tu as vu. Il n'y aura pas de douleur, tu dois rester calme, d'accord ? »
Drago jeta un coup d'œil à Potter, puis hocha sagement la tête. Il se savait capable de bloquer l'intrusion si elle décidait de fouiller un peu trop profondément dans ses souvenirs et dans sa mémoire. Il ouvrit tout à fait son esprit pour lui faciliter la chose, et sentit la présence désagréable de Mullan derrière son crâne, comme un fourmillement. Il revit la cape noire, puis la silhouette sombre et imposante, la main grise qui se tendait… Il entendit de nouveau le râle, et se souvint avoir levé la main vers lui. Le souvenir était brouillé par le boucan des albatros, les coups qu'ils lui portaient, la façon dont – il le comprenait maintenant – ils l'avaient protégé comme une bande de minuscules Patronus. Il réalisa que la scène avait duré presque une journée complète. Les râles s'étaient enchaînés, et des visions brèves, quand il avait ouvert les yeux, montraient le ciel qui changeait de couleur, les oiseaux de plus en plus nombreux… Il était resté des heures en compagnie du Détraqueur qui ne l'avait pas touché. Il s'était contenté de tendre le bras et d'attendre. Au bout d'un moment, il était parti. Quelques instants plus tard, Potter débarquait en panique et hurlait son nom.
Mullan quitta sa tête en douceur, et Drago se força à manger un nouveau morceau de chocolat. Il laissa la Surveillante raconter ce qu'elle avait vu au Directeur, et s'obligea, de son côté, à enfin relâcher son étreinte sur l'oiseau. Ses plumes étaient chiffonnées et humides là ou ses mains s'étaient enfoncés. Il le caressa et le recoiffa avec ses doigts tandis que Potter enfourchait son balai pour effectuer une réparation en urgence de la brèche ayant permis au Détraqueur de pénétrer l'île.
Au bout d'un moment, Runcorn revint, et Mullan s'en alla. Puis ce fut Potter qui revint, s'en alla, revint encore, et puis Mullan et Runcorn, et les Surveillants Brigadiers, et un vrai défilé, et puis les chariots qui vinrent se ranger tranquillement aux abords de la table, comme si tout était normal… L'infirmier Nguyen passa également prendre la température, la tension, les constantes de Drago, et ne put que conseiller de continuer à s'empiffrer de chocolat. On lui fourra un mug de boisson cacaotée chaude dans les mains et on le laissa tranquille.
Les chariots repartirent sans que personne n'ait soulevé leurs cloches d'argent.
L'albatros finit par gigoter et s'agiter. Drago se leva, et se dirigea vers la baie vitrée sous les réprimandes du Surveillant qui était dans la pièce à ce moment-là. Drago ouvrit la porte, l'oiseau se dandina et sortit, et, au moment où le gardien agrippait violemment le bras de Drago en lui hurlant qu'il lui était interdit de bouger, lâcha une énorme déjection humide sur le balcon. Drago et l'oiseau regardèrent tous les deux le Surveillant, qui ne fit pas plus de commentaire, mais ramena Drago dans son canapé.
La nuit passa, l'aube se leva. Les chariots du petit déjeuner remplacèrent ceux du souper. Drago sortit du canapé et dressa la table, puis retourna s'asseoir et manger du chocolat. Les chariots s'en allèrent au bout d'un moment, et Drago s'assoupit.
« Malfoy. »
Potter se trouvait agenouillé à ses pieds, lui caressait doucement la joue. On était au milieu de la journée.
« Viens », dit-il simplement.
Drago se leva et suivit Potter dans sa chambre. Il se souvint qu'on était mardi. Ça faisait une semaine depuis la partie d'échecs. Une semaine depuis le pari qui empêchait à Potter de le toucher. Il n'aurait jamais dû gagner ce jeu.
Ils se couchèrent dans le lit, et le Directeur se pelotonna dans le dos du prisonnier, où il se mit bientôt à ronfler. Drago relâcha la respiration qui s'était bloquée dans sa gorge. Il enlaça leurs doigts et porta leurs mains à sa bouche. Il embrassa doucement chaque phalange de l'homme dans son dos, et écouta son souffle. Encore une fois, on aurait dit la mer, les vagues… La liberté. Drago était incapable de dormir.
Potter se réveilla en émettant de petits reniflements de chiot curieux dans sa nuque.
Drago se retourna sur le dos pour le voir ouvrir les yeux, et se fit la réflexion qu'après tout, les lunettes ne lui allaient pas si mal. Sans, son visage manquait peut-être de caractère. Il avait de jolies lèvres pleines, et un menton carré bien défini, mais ses sourcils et ses yeux avaient tendance à disparaître sous ses cheveux en bataille. Les lunettes permettaient au moins de les mettre un peu en valeur, et de dissimuler autant que possible cette hideuse cicatrice.
Les yeux verts papillonnèrent un moment avant de se fixer sur Drago. Une palette d'émotions défila dans son regard.
Drago avala sa salive avant de prendre la parole, mais n'en eut pas le temps : Les lèvres de Potter se posèrent doucement sur les siennes. Il ne l'embrassa pas. Pas vraiment. Ses lèvres le caressèrent, s'attardèrent, articulèrent un mot sans le prononcer, puis s'échappèrent jusqu'à son front où elles déposèrent un baiser léger.
C'était comme le plaid : La preuve qu'il restait quelque chose, une once d'attirance sur laquelle Drago pouvait se reposer et construire quelque chose, mais si ténue…
« Potter, dis-moi ce que je dois faire… » supplia-t-il enfin.
L'interpelé se figea un instant puis s'écarta doucement, se détourna, et s'assit au bord du lit.
« Rien du tout, répondit-il à voix basse et en étirant ses épaules. Repose-toi.
– Potter, je suis désolé de tout ce que je t'ai dit. Je t'ai insulté alors que je ne vaux pas mieux… » Drago se redressa dans un effort désespéré pour diminuer la distance entre eux. « J'aurais jamais dû t'agresser comme ça. Je recommencerai jamais. Je te jure que je me suis senti mal en le faisant, et…
– Quoi ?! Non ! Non, ça n'a rien à voir ! Tu… Je pensais que tu parlais du Détraqueur, mais nous concernant, c'est juste moi qui… » Potter se retourna à nouveau et s'empara des mains de Drago, crispées sur les draps.
Ce n'est pas toi, c'est moi… ça ressemblait au mauvais dialogue d'un roman à l'eau de rose, auquel on aurait ôté toute notion d'amour ou de bonheur.
Une nouvelle fois, Drago vit ses doigts grisâtres, parcheminés, déformés, entre les mains fortes et saines de Potter et se trouva écœurant. Il n'était pas étonnant que le parfait Potter le rejette.
« Malfoy, insista Potter. Arrête de penser à ça, okay ? C'est moi qui ait merdé. C'est pas ce que je voulais quand je t'ai invité la première fois. Je me rends compte que j'ai franchement abusé avec toi, et… Et je suis désolé, je m'en veux, je… C'est pas moi, ça. Je me dégoute, je te jure, c'est pas… »
Il s'interrompit en fixant Drago dans les yeux. Ce dernier avait brusquement relevé la tête quand Potter avait évoqué le dégout.
Comment cet homme parfait, puissant, adulé de tous, à qui tout réussissait pouvait-il éprouver une quelconque forme de dégout envers lui-même ? Ne voyait-il pas qu'il n'avait rien fait de répréhensible ? Bien sûr, il avait violé Drago, l'avait torturé mentalement, et l'avait presque conduit à la mort par manque d'attention, mais il n'était en rien responsable de tout ça. C'était Drago qui avait cherché les ennuis. C'était lui qui, le premier, lui avait jeté un regard méprisant dans le réfectoire, puis s'était exhibé avec Waren, l'avait poussé à bout en refusant de se soumettre totalement…
Drago se souvint, avec un pincement au cœur, que Potter l'avait laissé brandir sa baguette entre eux, il y a une éternité de cela. Drago avait exprimé son souhait de le tuer, et Potter l'avait laissé faire, avait attendu…
« Tu ne voudrais pas, demanda-t-il finalement, qu'on essaye de faire en sorte que les choses redeviennent comme avant ?
– Non, Malfoy, je veux que les choses changent… »
Potter ne pensait pas à mal en disant cela…
Mais Drago reçut les mots comme un coup de poignard.
