En passant : Ah mince, désolée du malentendu ! Pourtant,j'avais fait une recherche google image sans résultat, et je n'avais pas réfléchi plus loin X,) Ca m'apprendra à avoir la flemme de lire ! Et c'est vrai qu'il a une sacrée bouille Mafoyéenne XD

Holybleu : Oui, c'est pour ça que je tenais quand même à écrire tous les chapitres hyper glauques et malsains précédents... Sans eux, ça aurait été difficile (pour moi en tout cas) de faire sentir à quel point il était vraiment brisé et misérable... (et à quel point il est aussi en plein déni la moitié du temps)


Ce matin-là, Drago éteignit son réveil à la première sonnerie stridente, s'habilla en vitesse, et sortit de sa cellule. Au lieu de se diriger vers la gauche et les cuisines, il prit vers la droite. Il fut heureux de constater que les portes des cellules attenantes à la sienne n'étaient pas fermées. Pourquoi l'auraient-elles été ? Il farfouilla un moment dans la réserve de bois et finit par trouver une petite bûche fendue de biais qui pourrait correspondre à ses projets.

Il se rendit ensuite à la cuisine, poussa la porte, et la bloqua en position ouverte en utilisant le bois comme une cale. Il récupéra son chariot, le sortit des cuisines, en prenant soin de le laisser à bonne distance du seuil de la porte, s'y assit à moitié, puis attendit l'arrivée des prisonniers

Il entendit d'abord leurs voix. Pénétrant par une autre porte – les cuisines étaient immenses et Drago avait été loin d'en faire le tour – les détenus gagnèrent leurs postes respectifs en discutant de la levée du confinement. Rapidement, l'un d'eux remarqua la porte ouverte et interpela les autres :

« Hey, c'est nouveau ça ! Vous croyez qu'ils veulent qu'on… Malfoy ?! »

Drago ne connaissait pas l'homme qui lui faisait face. Un roux au visage constellé de taches de son, avec une courte barbe frisée. Il fut rapidement rejoint par plusieurs autres cuisiniers qui s'amusèrent de la porte maintenue ouverte et de la position en retrait de Drago.

Rosier apparut et lui sourit : « Petite souris… Tu es de retour. On commençait tous à s'inquiéter. »

Ackerley rejoignit rapidement l'attroupement et observa Drago en silence, l'air mauvais.

Drago adressa un faible sourire à Rosier, mais c'est à Ackerley qu'il s'adressa :

« Comment va ta main ?

– Viens par ici, je te montre. »

Drago sourit à la menace. Pas du sourire hautain qu'il exhibait habituellement pour montrer son dédain, mais de celui, étourdi et rapide, que Potter faisait naître chez lui lors de leurs joutes verbales.

« Est-ce que tu travailles toujours pour mon père ?

– Ton père est une sombre merde, Malfoy. »

Rosier ricana : « De toute façon, il vaut mieux travailler directement pour le fils. Il a plus de pouvoir. »

Drago hocha la tête, bien qu'il doutât de la véracité de l'affirmation.

Le fait que son père et Ackerley se soient disputés était un évènement auquel Drago ne s'était pas attendu. Il réfléchit et fit le tour des causes probables – le manque de nouvelles, le manque de récompense, la façon qu'avait eu le cuisinier d'espionner leurs échanges… – et des conséquences malheureuses que ce changement aurait sur lui.

« Ecoute, Ackerley, j'ai des infos importantes sur le confinement, des changements dans les rondes des gardiens, des nouvelles règles… Ça vous concerne aussi, aux cuisines : La livraison des aliments ne va plus… »

Il fut interrompu par une douleur soudaine à la cuisse. Drago se redressa aussitôt, trébucha, et se cacha derrière son chariot. Un prisonnier s'était faufilé dans l'attroupement et lui avait jeté un couteau. Il entendit les rires des détenus avant de voir la lame briller sur le sol, à quelques pas de lui.

« Ahahah, joli tir !

– Mec, t'es cinglé, comment tu vas le récupérer, maintenant ?

– Je me suis loupé, je visais le ventre…

– Malfoy ! Renvoie-nous la lame, Malfoy ! »

Un filet de sang rougeoyait sur le métal, et quelques gouttes avaient éclaboussé le sol lors de sa chute. Drago étudia la blessure sur sa cuisse et se rendit compte que l'arme n'avait fait que l'effleurer, déchirant l'étoffe de la robe et la peau, mais n'avait pas pénétré trop profondément le muscle.

Un deuxième couteau fusa et rebondit sur le sol à quelques centimètres de son pied droit. Drago ramena aussitôt sa jambe contre lui et tâcha de se faire le plus petit possible derrière le chariot.

« Merde ! raté aussi !

– Petite Souris, sois mignon, laisse dépasser quelque chose ! »

Drago rit nerveusement en entendant la voix de Rosier.

Précautionneusement, il se retourna, empoigna le bas de son chariot, et le fit glisser vers lui de quelques centimètres.

« Il s'enfuit !

– Attends, je vais tenter un lancer en cloche… »

Eclat de rire moqueur général quand un couteau décrivit un bel arc de cercle avant d'atterrir un bon mètre trop loin. Drago recula légèrement sur ses fesses, tira le chariot, recula, tira, sursauta quand une arme jetée en hauteur lui tomba sur la nuque, heureusement, manche en avant. Il accéléra son mouvement en entendant les détenus s'encourager ou se disputer pour être le prochain à tenter le coup.

Au bout d'un moment, l'un d'eux suggéra : « Vise les produits ménagers, au moins, ça le foutra dans la merde. »

Drago recula plus rapidement encore, faisant effectuer à son chariot des bonds aussi grands et rapides que possible, afin de compliquer le jeu des cuisiniers.

Un nouveau jet en cloche permit à une lame de se loger dans son avant-bras, avant de glisser et de tomber au sol en découpant un morceau de chair. Des larmes apparurent aux yeux de Drago, mais il parvint se retenir de crier.

Il continua de reculer, tirer, reculer, tirer, jusqu'à s'être éloigné d'une dizaine de mètres. Là, il se saisit d'un torchon, dont il noua une extrémité autours de sa cheville, et une autre autours d'un pied du chariot, puis continua de s'échapper en rampant le plus rapidement possible.

Les cris et les rires des prisonniers diminuèrent à mesure qu'il prenait de la distance, et les lames s'éloignèrent de plus en plus de leur cible, mais Drago attendit d'atteindre le monte-charge, de faire sonner sa clochette afin que les portes s'ouvrent, et de se retrouver à l'abri de la cabine pour oser enfin se relever.

Il étudia d'abord les dégâts sur son chariot, et fut soulagé de ne trouver que quelques éraflures sur le métal. Ni le linge, ni les produits ménagers n'avaient finalement été abimés. Il savait la plaie sur sa jambe superficielle. Celle sur son bras, en revanche, saignait encore abondamment.

Rien que Potter n'était pas en mesure de soigner.

Il frappa à la porte du Directeur en ayant conscience d'avoir une belle heure d'avance sur son horaire habituel. Après plusieurs minutes sans réponse, il poussa de lui-même la porte et découvrit des appartements vides : Pas de Potter dans son lit, ni au salon, ni dans la salle de bain… Il finit par se rendre compte que le balai du Directeur manquait également à l'appel, et que la porte de la baie vitrée était fermée, mais pas verrouillée, et devina que l'homme était dehors.

Il sortit à son tour, sentit sa robe claquer au vent et sa peau se couvrir de chair de poule. C'était cependant agréable de se trouver dehors à cette heure matinale : Lors des quatre jours de confinement, il avait pu sortir brièvement sur le balcon pour récupérer des colis ou des courriers, mais les Surveillants lui avaient bien fait comprendre qu'il n'avait pas le droit de s'attarder. Ce matin-là, Le ciel sombre lui rappelait la nuit de l'Aurore, l'air charriait l'odeur de l'océan, et personne n'était là – à l'exception de trois albatros – pour le surveiller ou lui ordonner de se dépêcher – ce dont ils s'abstinrent par ailleurs.

Drago laissa de nouveau ses pensées s'égarer vers le Détraqueur. Seul lui, la Selkie, et Mullan par l'intermédiaire de sa legilimancie l'avaient vu, malgré les nombreuses rondes organisées par Potter. La zone à fouiller était certes immense, mais composée quasi exclusivement d'eau plate, et il était étonnant qu'il soit parvenu à se cacher. En outre, se cacher ne faisait pas partie du comportement habituel de ces créatures.

Drago se rejoua la scène pour la millième fois. L'être – le Non-Être – s'était enfui à l'approche de Potter. Avait-il été effrayé ?

Il se mit à la place de la créature solitaire… Imagina son existence misérable. Être constamment attiré par les zones de malheur, alors que son seul besoin intime et vital consistait à se nourrir de bonheur… Avoir trouvé Drago, l'avoir senti, l'avoir reconnu, l'avoir voulu. L'avoir approché… Et s'être fait rejeter pour une bande d'oiseaux ridicules… A sa place, où serait-il allé ensuite ?

Drago sourit, tant la réponse était évidente. Personne ne l'avait trouvé parce qu'il s'était réfugié sous l'eau. Non pas pour se cacher, mais pour faire taire le bruit incessant, pour éteindre les lumières aveuglantes. Il n'avait pas besoin de respirer, et pouvait rester là des siècles, à espérer que Drago revienne un jour vers lui… Evidemment, que la Selkie avait été la seule à le voir après lui.

Il entendit les battements d'ailes avant de pouvoir distinguer Potter et son escorte d'oiseaux. Il se posa avec grâce sur le sol du balcon, et distribua les friandises et caresses en s'adressant au prisonnier :

« Qu'est-ce que tu fais là, je t'ai dit que tu pouvais rester dans ta cellule.

– Tu m'as dit de faire à ma guise, et j'avais envie de venir… » répondit Drago en s'adossant à la rambarde.

Potter l'observa un moment, puis reprit la parole, et la douleur et la fatigue transparaissait clairement dans sa voix : « Tu as dit que tu n'étais pas à l'aise ici, et que tu ne voyais pas d'intérêt à être là. »

Drago réfléchit. C'était vrai, il l'avait dit, et il l'avait pensé. Pourtant, s'imaginer ne plus pouvoir venir travailler dans les appartements clairs, ne plus pouvoir manger en compagnie de Potter, c'était comme s'imaginer mourir de faim à nouveau, privé de quelque chose de vital.

« Je suppose, répondit-il lentement, que ta compagnie n'est pas si désagréable, après tout… Je ne sais pas quoi te dire. Je pense que j'avais juste envie d'être seul un moment… »

Le silence revint, troublé uniquement par le son des vagues et celui des albatros faisant leur toilette.

« Tu devrais m'emprunter une cape quand tu sors. »

Drago observa ses bras recouverts de chair de poule.

« Je sais que tu aimes bien me réchauffer », répondit-il d'un ton provocateur.

Parfois, Potter s'agaçait des misérables tentatives de séduction de Drago. Parfois, il en riait. Cette fois, il émit un soupir nasal amusé, puis l'invita à rentrer. Dans la lumière des appartements, il remarqua aussitôt la robe ensanglantée et déchirée à la cuisse, et les deux blessures. Son sourire disparut et il sortit sa baguette.

« Je vois que tu es retourné dans les cuisines », insinua-t-il.

Drago ne prit pas la peine de répondre et laissa le Sorcier lui soigner le bras et raccommoder sa manche. Quand il s'agenouilla devant lui pour remonter la robe le long de sa cuisse, il sentit sa respiration s'accélérer, et songea de nouveau au fait qu'il n'était pas dans son état normal, et que ses fantasmes étaient la faute d'un charme ou d'une malédiction. Il sentit la main chaude de Potter sur sa peau et frissonna.

« Ça ne te manque vraiment pas ? demanda-t-il en se faisant l'impression d'être la plus vulgaire des catins.

– Si, répondit Potter en devinant aisément le sujet de la question. Mais je n'ai plus envie de te forcer…

– Tu n'as pas toujours eu besoin de me forcer », rétorqua Drago en le regardant.

Potter leva les yeux vers lui et ils se regardèrent intensément, les pupilles dilatées, la respiration lourde… Il se releva lentement en laissant sa main glisser sur la peau de Drago, et l'étoffe retomber doucement. Ils se retrouvèrent nez à nez, se frôlant presque.

« Je te l'ai déjà dit, Malfoy : Fais ce que tu veux. Va ou tu veux, parle à qui tu veux, fouille ce tu veux. Mais tant que je serai pas sûr et certain de ce que tu veux, je tenterai plus jamais rien sur toi. »

Ils restèrent presque une minute entière, immobiles, à se fixer sans ciller, suffisamment proches pour sentir chacun le souffle de l'autre sur leur peau… Drago savait qu'il lui suffisait d'un geste ou d'un baiser pour que Potter lui appartienne de nouveau, et qu'ils retrouvent la relation qu'ils avaient eue. Mais il était impossible de faire la part des choses entre ce qu'il souhaitait réellement, ce dont il avait besoin, et ce dont la bête dans sa tête était responsable.

Il fit un pas en arrière et se détourna.