C'était un après-midi gris et froid. Les couloirs de Poudlard étaient presque déserts, la plupart des élèves étant partis profiter de leur temps libre dans la Grande Salle ou à l'extérieur pour batailler dans la neige. Yéléna, elle, avait besoin de calme. Les derniers jours avaient été intenses, et elle cherchait un endroit où elle pourrait réfléchir, loin des regards curieux de ses amis.

Elle trouva refuge dans une petite salle inutilisée du troisième étage, son carnet et une plume à la main. Mais en entrant, elle fut surprise de trouver deux silhouettes familières : Régulus Black et Sévérus Rogue, apparemment en pleine conversation.

Régulus, adossé contre une table, tourna la tête à son entrée, ses sourcils se haussant légèrement. Sévérus, qui feuilletait un livre de potions, leva à peine les yeux, mais il marmonna.

« La salle n'est pas réservée, tu peux rester. »

Yéléna hésita. Elle n'avait pas prévu de compagnie, surtout celle de ces deux Serpentards. Mais leur présence ne la dérangeait pas, étrangement. Régulus lui fit un geste de la main vers une chaise libre.

« Viens, on n'est pas si terribles. »

Elle referma la porte et s'assit, posant son carnet sur la table. Un silence confortable s'installa, interrompu seulement par le bruit des pages que Sévérus tournait et les petits gribouillages que Yéléna traçait sur son parchemin.

« Tu écris quoi ? demanda finalement le plus jeune en brisant le silence. »

Yéléna releva la tête.

« Rien d'important. Des pensées… et peut-être quelques idées pour un prochain devoir. »

Régulus hocha la tête, mais un sourire amusé apparut sur ses lèvres.

« Pas sûr que ça suffise à impressionner Slughorn. »

Sévérus grogna sans lever les yeux de son livre.

« Slughorn est impressionné par le paraître. Si tu veux l'impressionner, mets un titre ronflant et quelques formules alambiquées. »

Yéléna ne put s'empêcher de rire doucement.

« Merci du conseil, Sévérus. Je suppose que tu es le mieux placé pour savoir ce qu'il aime. »

Sévérus esquissa un sourire discret, mais ne répondit pas. Régulus, lui, s'installa un peu plus confortablement sur sa chaise, visiblement intéressé par la conversation.

« Tu es douée en potions, non ? Sévérus m'a dit que tu avais un certain talent. »

Yéléna haussa les épaules.

« Je me débrouille. Mon père m'a appris quelques bases avant que je vienne ici. Et puis… c'est une matière qui demande de la précision et de la patience, j'aime ça. »

Le jeune homme releva enfin la tête, posant son livre.

« Si tu veux, je peux te montrer quelques techniques avancées. La plupart des élèves se contentent de suivre les instructions du manuel, mais il y a toujours des moyens d'optimiser les recettes. »

Yéléna hocha la tête avec enthousiasme.

« Ce serait avec plaisir. »

Le jeune Black observa l'échange, une lueur d'amusement dans les yeux.

« Alors comme ça, tu vas recevoir des leçons privées de Rogue ? Je suis presque jaloux. »

Yéléna répondit avec un sourire en coin.

« Je te donnerai des notes, si tu veux. Mais je doute que tu sois intéressé. »

Régulus haussa un sourcil.

« Ne sous-estime pas mon intérêt. Je suis peut-être plus attentif que tu ne le penses. »

Sévérus roula des yeux et reprit son livre, visiblement agacé par l'échange léger entre les deux. Mais Yéléna, elle, se sentait curieusement à l'aise. Malgré leurs personnalités opposées, Régulus et Sévérus formaient un duo étrange mais intrigant.

Ils continuèrent à discuter, passant d'anecdotes sur leurs cours à des sujets plus légers. Régulus, toujours légèrement moqueur mais jamais méchant, faisait souvent des commentaires qui arrachaient des sourires à Yéléna. Sévérus, de son côté, semblait apprécier qu'elle prenne ses remarques sur les potions au sérieux.

Quand l'après-midi toucha à sa fin, Yéléna se leva pour partir.

« Merci pour cette… discussion inattendue. »

Régulus lui fit un signe de tête.

« Tu sais où nous trouver si tu veux plus de conversations intelligentes. »

Sévérus se contenta d'un petit signe, mais Yéléna sentit qu'il appréciait sa présence, à sa manière.

En quittant la salle, elle se rendit compte qu'elle avait passé un bon moment, loin de ses préoccupations habituelles. Et, pour la première fois depuis longtemps, elle se sentait un peu plus légère.

Quelques jours après son après-midi passé avec Régulus et Sévérus, Yéléna traversait les couloirs de Poudlard avec un livre de potions sous le bras. Le jeune potionniste lui avait demandé un exemplaire rare qu'elle possédait, un manuel qu'elle avait hérité de son père. Ravi à l'idée de pouvoir consulter un ouvrage si précieux, il avait insisté pour qu'elle lui prête.

Elle avait accepté, heureuse de pouvoir partager son savoir.

Mais Sirius, qui avait observé de loin cette nouvelle amitié avec méfiance et agacement, avait décidé d'intervenir. Il ne supportait pas de voir Yéléna, qu'il commençait enfin à apprécier, traîner avec des Serpentards, et encore moins avec son frère et Rogue. Dans son esprit, il ne faisait aucun doute qu'ils étaient une mauvaise influence pour elle.

Sous couvert de vouloir aider, Sirius avait proposé de jeter un sort de protection sur le livre pour éviter qu'il ne soit abîmé. Yéléna, bien qu'un peu surprise, n'y avait vu aucune raison de douter de ses intentions.

« Juste un petit sort, avait-il dit avec un sourire innocent. Pour m'assurer qu'il ne finisse pas maltraité dans les cachots humides de Rogue. »

Elle avait accepté sans trop réfléchir.

Dans un coin isolé de la bibliothèque, Yéléna tendit le précieux ouvrage à Sévérus. Régulus, assis sur une chaise à proximité, lisait tranquillement un autre livre, un air nonchalant sur le visage.

« Voilà, comme promis, dit-elle en déposant le livre devant Sévérus. »

Celui-ci leva les yeux et hocha la tête, un rare sourire en coin.

« Merci. Peu de gens possèdent des ouvrages comme celui-ci. »

Il ouvrit le livre, curieux de découvrir son contenu, mais à peine l'avait-il fait qu'un nuage verdâtre jaillit des pages, enveloppant son visage. En une fraction de seconde, des pustules énormes se formèrent sur sa peau, le faisant reculer avec un cri de douleur et de colère.

« Qu'est-ce que… ? »

Sévérus porta une main tremblante à son visage, sentant les cloques se répandre.

Régulus se leva d'un bond, les sourcils froncés.

« Qu'est-ce que tu lui as fait ? demanda-t-il à Yéléna, sa voix froide et tranchante.

_Rien ! Je… je ne comprends pas, répondit-elle, paniquée, ses yeux passant du livre au visage de Sévérus.

_C'était un piège, grogna Sévérus, sa voix tremblante de rage. Quelqu'un a ensorcelé ce livre. »

Yéléna se figea, une boule d'angoisse grandissant dans sa poitrine. Elle comprit aussitôt ce qui s'était passé. Sirius. Il avait ensorcelé le livre, et elle, sans le savoir, en avait été le messager.

Quelques heures plus tard, après avoir aider Sévérus, Yéléna se précipita dans la Grande Salle, les joues rougies par la colère. Elle trouva Sirius dans un coin, entouré de James et de Peter.

« Tu as osé ! cria-t-elle, attirant l'attention de tout le monde dans la pièce.

Sirius releva la tête, feignant l'innocence.

« De quoi tu parles ?

_ Ne joue pas à ça avec moi, Sirius ! Tu as ensorcelé le livre que je voulais prêter à Sévérus. Tu as utilisé ma confiance pour tendre un piège. »

James se redressa, l'air curieux mais aussi inquiet.

« Sirius, dis-moi que ce n'est pas vrai. »

Mais le silence de Sirius confirma ses soupçons.

« Pourquoi ? continua Yéléna, sa voix tremblante d'une colère retenue. Pourquoi tu fais ça ? Est-ce parce que ce sont des Serpentards ? Parce que tu ne supportes pas l'idée que je puisse parler à ton frère ou à quelqu'un que tu n'aimes pas ? »

Sirius, pour une fois, sembla mal à l'aise.

« Je… je voulais te protéger. Rogue n'est pas digne de confiance, et Régulus… il reste un Black.

_Et toi, Sirius ? répliqua-t-elle, les yeux brillant de larmes contenues. Tu es aussi un Black, et pourtant j'ai appris à te faire confiance. Pourquoi eux n'auraient pas droit à la même chance ? »

Sirius baissa les yeux, incapable de répondre.

« Ne t'approche plus de moi, conclut-elle avant de tourner les talons. »

Yéléna passa le reste de la soirée dans un coin isolé de la bibliothèque, les larmes coulant librement sur ses joues. Nevidimyy, perché sur son épaule, frotta doucement sa tête contre la sienne, essayant de la réconforter.

Ce soir-là, elle se sentait plus seule que jamais.

Yéléna ne perdit pas de temps. Dès l'aube, elle descendit dans les cachots, le cœur lourd mais déterminé. Elle devait parler à Sévérus.

Lorsqu'elle arriva devant la salle commune des Serpentards, elle hésita un instant, mais la porte s'ouvrit soudain, et Sévérus apparut, son visage toujours marqué par les restes des pustules.

Il fronça les sourcils en la voyant.

« Tu as encore quelque chose à me dire ? lança-t-il d'un ton acerbe.

_Sévérus, écoute-moi, » dit-elle, les mains jointes devant elle. Je suis venue m'excuser. Je te promets que je n'avais aucune idée de ce que contenait ce livre. Je ne savais pas qu'il avait été ensorcelé. »

Il croisa les bras, son regard perçant scrutant le moindre signe de duplicité dans ses paroles.

« Et je devrais te croire ?

_ Oui, répondit-elle fermement. Parce que je n'ai rien à gagner à te mentir. Sirius a ensorcelé le livre, et je n'étais qu'un pion dans son plan. Je ne l'ai compris qu'après. »

Sévérus resta silencieux un moment, puis hocha lentement la tête.

« Très bien. Je te crois. Mais, Yéléna, si tu veux continuer à traîner avec des imbéciles comme lui, ne t'étonne pas d'être prise entre deux feux. »

Elle baissa les yeux, ses épaules se crispant sous le poids de sa honte.

« Je suis désolée, vraiment. Ça ne se reproduira plus. »

Sévérus la fixa encore un instant avant de répondre, cette fois avec plus de douceur.

« Fais attention, Yéléna. À qui tu fais confiance… et à qui tu donnes ton amitié. »

Près du Saule Cogneur, le vent s'était levé, tourbillonnant autour des Maraudeurs, de Lily et de Yéléna. L'atmosphère semblait lourde, comme chargée d'électricité.

« Yéléna, attends ! cria Lily, courant derrière elle.

Yéléna s'arrêta brusquement, mais ne se retourna pas.

« Quoi encore ? lâcha-t-elle d'une voix froide. Vous êtes là pour quoi, cette fois ? M'humilier encore ? »

Rémus, qui gardait un visage tendu, prit une grande inspiration.

« On voulait juste parler, dit-il calmement, bien que sa voix trahisse une pointe de nervosité.

_Oh, parler ? Yéléna pivota lentement, ses yeux lançant des éclairs invisibles. Vous voulez parler maintenant, après que Sirius ai utilisé ma confiance pour faire du mal à Sévérus ?

_ C'était… une erreur, tenta James.

_Une erreur ? répéta-t-elle, sa voix montant d'un ton. »

Elle fit un pas en avant, et le vent autour d'eux sembla se renforcer. Le Saule Cogneur, qui frappait mollement, sembla hésiter.

« Tu as manipulé ma confiance ! Tu m'as fait croire que je pouvais enfin avoir ma place ici, mais tout ce que tu voulais, Sirius, c'était jouer à tes petits jeux stupides ! »

Un étrange éclat violet apparut dans l'un de ses yeux. L'air vibra, et soudain, le sol se mit à trembler. Des fissures s'étendirent depuis ses pieds, et une énergie palpable envahit l'espace.

« Yéléna, calme-toi ! » s'écria Lily, reculant instinctivement.

Mais Yéléna ne semblait pas entendre. Une aura violette s'était formée autour d'elle, pulsant de puissance. Le vent devint une bourrasque, et le Saule lui-même sembla fléchir sous l'intensité de son pouvoir.

Rémus s'avança soudainement.

« Ça suffit, Yéléna. » Sa voix claqua dans l'air comme un coup de fouet.

Yéléna, encore tremblante de colère, croisa les bras, mais les étincelles autour d'elle diminuèrent légèrement.

« Tu veux quoi, Rémus ? Que je reste calme alors qu'on me traite comme ça ? »

Rémus inspira profondément, essayant de garder son sang-froid.

« Ce n'est pas ce que je dis. Mais regarde autour de toi, Yéléna. Regarde ce que tu viens de faire ! »

Elle suivit son regard, remarquant enfin les fissures sur le sol, les branches brisées du Saule Cogneur, l'air chargé de magie encore instable. Son œil violet brillait toujours, et elle détourna rapidement le visage, comme si elle avait honte.

« Tu ne comprends pas ce que c'est, Rémus, murmura-t-elle, sa voix plus tremblante qu'elle ne l'aurait voulu.

_Non, c'est toi qui ne comprends pas, répliqua Rémus, sa voix montant d'un cran. Il fit un pas vers elle, son regard brûlant de colère et d'inquiétude. Cette magie que tu as libérée… elle a réveillé quelque chose en moi. »

Yéléna fronça les sourcils, surprise.

« Mon loup, Yéléna, continua-t-il, sa voix s'éraillant. Il l'a sentie. Ta magie, cette… puissance brute. Elle l'a appelé, réveillé, et je me suis battu pour ne pas perdre le contrôle. Tu sais ce que ça signifie ? Si j'avais cédé, ici, maintenant, je serais devenu un danger pour tout le monde. Pour toi, pour eux, pour moi. »

Elle ouvrit la bouche pour répondre, mais il la coupa.

« Tu penses que c'est facile, que tu peux simplement laisser éclater ta colère et que tout le monde comprendra ? Ce n'est pas comme ça que ça marche ! Je passe ma vie à me contrôler, à m'enterrer sous des couches de retenue pour que ce… ce monstre en moi ne sorte pas. Et toi, tu viens et tu laisses tout exploser, sans réfléchir aux conséquences. »

Les autres regardaient la scène, figés, ne sachant pas quoi dire.

« Tu crois que c'était volontaire ? rétorqua Yéléna, la voix tremblante d'émotion. Je n'ai jamais voulu faire de mal à qui que ce soit. Mais toi, Rémus, tu sais ce que c'est. Tu sais ce que ça fait d'être… différent, d'être vu comme un monstre. »

Rémus serra les poings, son visage traversé par un mélange de colère et de douleur.

« Oui, je sais. Mais justement, Yéléna, c'est pour ça que je suis en colère. Parce que je sais ce que ça coûte de se contrôler, de se retenir, pour ne pas blesser les autres. Je croyais que toi aussi, tu le savais. »

Un silence tendu s'abattit sur le groupe. Yéléna sentit ses propres mains trembler, mais cette fois, ce n'était pas de colère.

« Rémus… murmura-t-elle, cherchant ses mots. »

Mais il secoua la tête, le regard sombre.

« Tu as mis tout le monde en danger, Yéléna. Pas seulement nous, mais toi aussi. Et ça, je ne peux pas l'accepter. »

Son ton n'était plus dur, mais triste. Il détourna le regard, comme s'il ne pouvait plus la regarder en face.

Elle baissa les yeux, son cœur lourd. Elle savait qu'il avait raison, même si elle ne voulait pas l'admettre. Le silence s'étira, brisé uniquement par le bruissement des feuilles autour du Saule.

« Je ne voulais pas… Je ne voulais pas que ça se passe comme ça, finit-elle par murmurer.

_Peut-être pas, répondit Rémus, sa voix plus douce, mais toujours empreinte de tension. « Mais il faut que tu comprennes que ce que tu fais a des conséquences, Yéléna. Même si tu crois que tu peux tout affronter seule, tu ne peux pas. Pas comme ça. »

Sans attendre de réponse, il tourna les talons, s'éloignant vers le château. Les autres hésitèrent, mais le suivirent à contrecœur, laissant Yéléna seule sous l'arbre. Elle resta là un moment, immobile, la tête basse, avant de s'appuyer contre le tronc, les yeux brillants de larmes qu'elle refusait de laisser couler.