77Hildegard : désolée, j'avais loupé ta dernière review ! Drago aimerait bien revoir le Détraqueur, oui.. Il se sent responsable de ce qui lui est arrivé, il continue d'avoir de l'attachement pour lui X)

En passant : Eh oui, un beau gâchis tout ça... Un beau gâchis dés le départ : S'il avaient discuté entre eux, si Harry avait un peu plus réfléchi, si Drago avait un peu plus communiqué... Je regrette beaucoup de pas avoir fini mon histoire peu après leur rupture : ca aurait dû être le bon moment, avec un drago capable d'affronter l'avenir et un harry puni pour ses actes...
Mais bon, ca aurait été une "bonne" fin, mais une fin trop triste, je pense...

Yza : Pas facile à écrire, ce chapitre ! Essayer de faire en sorte que Harry s'explique sans se justifier, sans se plaindre alors qu'il n'est pas vraiment le plus à plaindre... Mais je suis contente de l'avoir écrit de son point de vue... Ca aurait été compliqué de faire un discours pas trop décousu pour que Drago le comprenne ^^


À croire que la magie avait emporté jusqu'à son amour de la couleur : Les yeux sincères et brillants de Potter lui faisaient autant d'effets que les fades pupilles grises des membres de sa lignée. Il se rappelait avoir aimé leur couleur, leur éclat, la vie qu'ils dégageaient… Il se rappelait que les multiples amants qu'il s'était imaginé au fil de sa jeunesse avaient souvent des prunelles claires et vertes, une couleur qu'il associait à la vie et à l'espoir…

Et rien.

« Très bien, Potter. »

Il termina sa tasse pour se réveiller doucement, puis reposa celle-ci sur le plateau de la table basse. Potter n'avait pas touché à la sienne.

« Tu ne m'apprends pas grand-chose, mais j'apprécie que… »

Entendre les aveux de Potter, son repenti sincère, le fait qu'il assumait ses actes…

Il le savait, mais l'entendre dire provoquait quelque-chose en lui. Un poids qui disparaît, un relâchement quelque-part.

Potter ne prétendait pas regretter quoi que ce soit, et là aussi, l'information avait un il-ne-savait-quoi de réconfortant : il était trop facile de prétendre vouloir changer le passé quand il était impossible de s'y essayer.

« Très bien, Potter », répéta-t-il.

Il poussa un dernier soupir, effleura une dernière fois la porcelaine de la tasse, et se redressa, croisa les bras et considéra Potter d'un oeil méfiant :

« Je suis prêt à entendre tes excuses. »

L'intéressé cligna plusieur fois les paupières, puis se redressa à son tour et sans détourner le regard, affirma :

« Je suis sincèrement désolé de tout le mal que je t'ai fait. »

Drago hocha une fois la tête.

Potter reprit la parole dans un souffle :

« J'espère que tu comptes pas prétendre que c'est pardonné ? »

Drago ricana et se passa une main lasse dans les cheveux. Ceux-ci se coinçaient régulièrement entre les reliefs de sa nouvelle malformation.

« Ce n'est pas mon genre, Potter. La vie ne m'a pas appris l'indulgence.

– Sauf quand tu aimes », sous-entendit Potter dans un sourire.

Drago le considéra avec peine.

« Est-ce-que tu m'aimes encore ? » interrogea-t-il doucement.

Potter réfléchit à la question quelques secondes avant de prétendre :

« Ça va mieux. J'ai encore des sentiments très forts, mais j'ai vraiment tiré un trait sur tout ça.

– Bien, fit Drago, mais il ajouta d'une voix douce : Je ne t'aime pas, mais je ne veux pas que tu souffres par ma faute.

– T'inquiète.

– Tu avais mis longtemps à oublier Ginny Weasley ?

– Ça n'avait rien à voir, ricana Potter. Avec Ginny, on était tous les deux d'accord pour dire que nos sentiments avaient changé. Et puis, j'ai toujours beaucoup d'affection pour Ginny », termina-t-il d'un air rêveur.

Peut-être Draco pouvait-il, dans sa prochaine correspondance avec Weasley, glisser un message à ce propos : le sous-entendu d'un regret, l'assurance d'une nostalgie. Peut-être Ginny Weasley était elle capable de pardonner les coups de folie de son ancien amoureux, elle qui, plus que quiconque, pouvait comprendre ce que cela faisait d'agir contre sa volonté.

« Très bien, Potter. » Pour détendre l'atmosphère, il ajouta : « J'imagine qu'il s'agit du pire anniversaire que tu aies jamais vécu. »

Potter éclata d'un grand rire tonitruant. La plaisanterie n'était pourtant pas très drôle.

« Putain, même pas ! s'exclama-t-il. Je t'ai jamais raconté le jour de mes dix ans, chez les Dursley ? »

L'histoire était longue, Drago dût refaire du thé. Quand Potter l'interrogea à son tour, il afficha un rictus triste eh lui expliquant qu'il ne se rappelait pas ce qu'il faisait lors de ses deux anniversaires passés en tant que prisonnier, mais qu'ils n'étaient probablement pas beaucoup plus joyeux que ce qu'avaient été les siens. Potter enchaîna aussitôt sur une autre histoire plus amusante. Le chariot du dîner du Directeur repartit dans les cuisines sans que Potter ne songe à y toucher et il poursuivit ses explications en se préparant et en engloutissant des toasts de pain de mie, de beurre de cacahuètes et de fromage.

Il mangeait debout, parlait la bouche pleine, perdait le fil de son récit et s'interrompait pour boire ou pour rire.

Tout ce que Drago détestait.

Et pourtant, il y avait quelque-chose de beau en lui, dans sa désinvolture, dans son naturel.

Tout ce que Drago appréciait et admirait, avant, rien de tout cela n'était plus capable de le toucher : la couleur des yeux, les veines sur ses avants-bras, l'écart entre la largeur de ses épaules et celle de ses hanches, la ligne virile de la mâchoire… Il admirait ce genre de détails comme il n'aurait fait devant un tableau, sans être capable de les relier à une personne à aimer.

Mais malgré lui, son regard accrochait d'autres détails, des choses dont il n'avait jamais eu cure : la façon dont il balançait son poids d'une jambe à l'autre, dont la peau glissait sur son cou quand il tournait la tête, les grains de beauté sur son menton…

Comme si une part de lui cherchait des raisons de l'aimer, à nouveau.

Il fallut encore refaire du thé.

Quand les bâillements de Potter commencèrent à durer plus de sept secondes, Drago reposa sa tasse et se releva.

« Tu vas te coucher ? demanda Potter malgré les évidences.

– Oui. Encore désolé pour tous ces… » Drago chercha un mot qui atténuerait la pénibilité de ses changements d'avis, mais sans succès. Après un geste vague de la main, il proposa : « … caprices. Je tâcherai d'être un peu plus constant, à l'avenir.

– Putain, avec plaisir, ricana Potter en se passant une main fatiguée dans les cheveux. Ce sera plus facile d'arrêter de me faire des films et de passer à autre-chose comme ça. »

Drago étouffa un sourire. Il se rendit près de la porte, où il avait abandonné ses chaussures et les réenfila tranquillement.

« Je suis crevé, indiqua Potter. Je te propose pas de te raccompagner.

– Tu ne me proposes ni ça, ni un dernier verre, plaisanta Drago. Tu apprends vite.

– Hey, je suis Harry Potter. Je suis un putain de génie. »

·

L'amour ou l'amitié de Potter ne changeaient pas grand-chose à sa façon de se comporter : Potter restait souriant, à l'écoute, disponible, facile à convaincre… Il avait cessé de le couvrir de cadeaux de manière détournée, mais Drago était de toute façon parfaitement satisfait de l'aménagement actuel de son bureau, et quand il avait besoin de quoi que ce soit, il suffisait de demander.

Durant les cours de Patronus, il traitait Drago comme tous les autres. Il se permettait même, désormais, de le toucher.

Rien d'équivoque, rien de véritablement gênant, mais là où, jusqu'à présent, Potter avait prit garde de traiter son prisonnier comme un petit papillon fragile et aux ailes délicates, il s'autorisait désormais les tapes sur les épaules, les mains dans le dos ou sur les bras pour corriger une position, ou bien sur ses doigts pour vérifier une prise.

Au moins Potter avait-il – contrairement à ses « amis » Rosier et Lucile – la gentillesse de ne pas trop donner l'impression de s'amuser de l'anxiété de Drago.

Quand il aborda le sujet avec Nguyen il mit une éternité à mettre le doigt sur la raison pour laquelle la sensation le travaillait :

« Si je comprends bien, articula l'infirmier en relisant ses notes, ces contacts ne vous gênent pas, ne vous effraient pas, et ne vous émoustillent pas davantage. Pourquoi venons-nous de passer une heure sur le sujet, Monsieur Malfoy ?

– Je n'en sais rien. Il faut bien que je parle de quelque-chose et nous avons fait le tour de ce qui avait de l'intérêt…

– Vous savez bien quels sujets mériteraient notre travail, et vous continuez à les éviter. »

Drago se mordilla les lèvres en triturant une peluche sur le tissu de sa robe.

« Je crois… Je crois que c'est la première fois qu'un homme me touche sans qu'il ne soit animé d'une intention malveillante…

– Hum. Non. Je vous ai déjà ausculté à de nombreuses reprises, et…

– En tant que Soigneur, protesta Drago. Pas en tant qu'homme. Pas en tant que mon égal.

– Je suis presque certain de me souvenir d'une poignée de main entre vous et Monsieur William Weasley.

– Bill ? Bill ne compte pas plus. Il était…

– Le Major Runcorn…

– Très bien, très bien ! obtempéra Drago. Je ne sais pas pourquoi ses gestes à lui m'interpèlent davantage que ceux des autres. Je crois que j'apprécie simplement l'idée qu'il arrêterait si je le lui demandait. »

Nguyen le fixa en silence un moment avant de noter quelque-chose sur son parchemin.

Il n'y avait pas que ça.

Quand Potter s'approchait, Drago pouvait sentir la température de son corps, la puissance de sa magie. Il pouvait savoir si le Survivant avait passé une bonne ou une mauvaise journée. L'empreinte résiduelle de ses doigts restait longtemps incrustée en lui, et Drago, des heures plus tard, seul et à l'abri, touchait sa peau pour raviver ou éteindre la sensation.

·

Le jour où Potter ramena de Londres les ingrédients pour le pudding, Drago se mit à la tâche en se sentant parfaitement ridicule mais en appréciant la texture de la pâte sous ses doigts et les fragrances généreuses des fêtes de fin d'années. Potter avait fait du rangement dans la cuisine pour lui laisser le champ libre. Drago avait trouvé dans la poubelle des dizaines d'ingrédients à la date limite de consommation dépassée ou entamés, et dans un placard, ses réserves de chocogrenouilles alignées dans un carton gris.

Drago mit sa préparation au four et alluma celui-ci avec l'une de ces longues allumettes dont il avait toujours trouvé le maniement élégant. Il se redressa, nettoya ses mains dans un torchon propre et défit le chignon de fortune qu'il avait revêtu, le temps de sa recette.

Puisqu'il avait du temps devant lui, il mit de l'eau à chauffer pour un thé et alla étudier la bibliothèque en gardant l'oreille attentive. C'était un sujet qui le tracassait : il n'avait pas encore osé réclamer à Potter le droit de lui emprunter un nouveau roman moldu. Il n'était pas sûr que l'autorisation soit nécessaire, puisque Potter était du genre partageur, mais n'avait pas vraiment envie de faire sans. Il supposait qu'entre amis, le prêt et l'échange de livres étaient chose courante. Il avait déjà vu Gregory et Vincent s'échanger des bandes dessinées ou des magazines.

Il laissa glisser son index le long des couvertures fines en parcourant les titres des yeux, éliminant mentalement ceux qu'il avait déjà lus et ceux dont le résumé ne l'avait jamais interpellé. Son doigt s'immobilisa quand il se rappela le roman. Le seul à propos duquel Potter lui avait véritablement parlé. Le roman érotique duquel était tirée l'échelle d'inconfort qu'il lui avait imposée.

Drago sentit son visage rougir et sa respiration, après une pause, accélérer son rythme malgré lui..

Ce roman-là, jamais il n'oserait demander à Potter de le lui montrer. S'il voulait y jeter un coup d'œil, c'était l'occasion ou jamais.

Il tira un par un chaque livre inconnu pour vérifier les avertissements sur la couverture en se faisant l'impression d'être un vilain petit chenapan. Il tendait l'oreille, sursautant au moindre bruit de petit craquement de bûche dans la cheminée. Quand la bouilloire se mit à siffler, il eut un tel sursaut qu'il en ricana tout seul, par la suite. Il retourna à la cuisine pour éteindre le feu, verser l'eau dans sa tasse, tout en réfléchissant.

Il se rappelait les huiles de massages dans les tiroirs des tables de chevets. Comment oublier ? Le souvenir était répugnant – il faisait suite à une menace directe de Potter – mais avait aussi quelque chose de fascinant : le soir, la nuit, Potter se branlait en lisant et en pensant à lui. Ou en tout cas, l'avait fait.

Il comptait les minutes en regardant l'eau dans sa tasse devenir de plus en plus sombre, les arômes monter. Quand il eut terminé son compte à rebours, sa décision était prise. Il se réempara du torchon pour pouvoir prétendre qu'il comptait nettoyer la fenêtre si par malheur il se faisait surprendre et se rendit dans la chambre à coucher.

Comme lors de sa dernière vérification, il remarqua que le désordre, ici, résistait aux efforts du propriétaire des lieux. Il trottina jusqu'à la première table de chevet, l'oreille toujours aux aguets, ouvrit le tiroir et reconnut la collection de flacons équivoques. Il referma rapidement la pièce à conviction et partit vérifier l'autre tiroir. Rebelote. Il vérifia sous les oreillers sans plus de succès, puis ses yeux parcoururent les étagères qui habillaient les murs. C'était lui qui avait aligné la plupart des objets qui se trouvaient là, et peu avaient changé de place. Certains s'y étaient ajoutés.

Il repéra une boîte en carton gris qui ressemblait à celle de la cuisine, et après une courte hésitation, décida de vérifier son contenu.

Il ne put s'empêcher de pousser un hurlement de terreur.

Il lâcha la boîte et tomba à la renverse. Une fois sur le sol, il rampa en marche arrière sans cesser de crier. Le contenu du carton s'était répandu sur le sol. Terré dans un coin de la chambre, il se recroquevilla sur lui-même en gémissant.

De vieilles épluchures de mandarines restaient inertes sur le parquet ancien, et Drago n'avait jamais rien vu d'aussi affreux.