NON ! VOUS NE RÊVEZ PAS !
Oui, c'est bien un nouveau chapitre xD
Je vais tenter de me concentrer sur la suite, il n'en reste que cinq, et j'ignore encore si je vais tenter les thèmes alternatifs. On verra bien.
Merci d'être encore là !
Bonne lecture !
(À la base, c'était sensé être un peu drôle. Oups)
— Euh… il lui arrive quoi au vieux ?
— Un peu de respect pour ton grand-père, siffla Blue.
— Des clous. Il est à vous, ce vieux, pas à moi.
Pressentant le débat aride qui allait survenir s'il les laissait faire, Vio attrapa la main de Shadow, l'invitant à se reculer et à garder ce genre de commentaire pour lui.
Qu'il dise la vérité ou non n'était pas important dans la situation, si on pouvait juste éviter la migraine générale, ça plairait à tout le monde.
Loin d'avoir conscience de ce qui se déroulait à quelques mètres de là, le vieux forgeron fixait sa tasse, les sourcils froncés, comme s'il tentait d'en comprendre le fonctionnement. Peut-être lui avait-elle parlé ?
Au travers de leurs aventures, ils avaient face à des situations plus invraisemblables qu'une tasse parlante. Ils avaient l'esprit très ouvert.
Massés près de l'entrée, ils attendaient le retour de Red, parti chercher le médecin royal, le plus à même de pouvoir gérer leur grand-père.
Il y avait une petite trotte jusqu'au château donc personne ne sera là avant sans doute une bonne heure, et peut-être plus. Tout dépendait d'à quel point l'hylien comprendrait rapidement la situation et la dose de persuasion nécessaire à le convaincre de venir au plus vite.
Bien sûr, ils s'inquiétaient tous pour lui, mais ils s'inquiétaient aussi pour eux. Leur grand-père était bien leur seule famille, à bien des égards, et jamais n'avait-il été maltraitant envers eux et avait sans doute était celui qui les avait le mieux accueilli lors de leur retour à quatre. Mais ça restait un forgeron bourru qui utilisait plus ses mains que les mots et plus d'une fois s'étaient-ils fait botter les fesses quand il estimait cela nécessaire.
Peut-être pourrait-il leur balancer leur tasse aux visages ?
Malgré la prise de Vio sur sa main, Shadow se rendit compte qu'il se retrouvait finalement en première ligne, les autres Link se tassant dans son dos.
Vexé, il se tourna vers eux :
— Z'êtes pas sensé être des héros du courage ou un truc dans le genre ?
— C'est pas Vaati, là, c'est notre grand-père.
— Et vous craignez plus un vieux décrépi que le prince du mal ? Vous êtes sûrs que c'est lui qui a un problème ?
Son sourire moqueur était pile ce qu'il fallait pour taper sur les nerfs de Blue qui semblait bouillonner sur place, la main de Green sur son épaule paraissant être la dernière laisse capable de le tenir en place.
— Ce n'est pas comme tu risquais d'avoir mal s'il se décide à nous balancer des trucs, signala celui en vert.
À nouveau vexé, Shadow plissa le nez et fronça les sourcils.
— Ce n'est pas parce que je suis né de votre ombre que j'en suis toujours une. Je décide quand je suis intangible et quand je ne le suis pas. Et ça fait quand même mal quand un truc me traverse, ronchonna-t-il.
— Chut ! l'interrompit Green.
À cet instant, le vieux forgeron avait arrêté d'observer sa tasse et s'était tourné vers eux, les ayant sans doute entendu.
— Qu'est-ce que vous foutez là ? leur lança-t-il. Vous n'avez pas mieux à faire, p'tits merdeux ?
Serrant les dents sur des réponses toutes aussi cinglantes, les trois concernés rentrèrent la tête dans leurs épaules, quittant leur refuge pour rentrer plus franchement dans la cuisine, restant collés l'un à l'autre. Ils feraient face au danger ensemble !
— On vous a volé votre langue ? C'est comme ça que vous vous comportez avec votre maître d'apprentissage ?!
Ils échangèrent un regard, le plus discrètement possible, mais ce ne fut pas suffisant. L'aîné frappa violemment sur la table, les faisant autant sursauter que la tasse, celle-ci finissant par se renverser, ce qui n'était pas pour apaiser l'humeur du forgeron.
— Vous voulez garder le silence ? Très bien, ce n'est pas comme si le travail à la forge nécessitait de l'éloquence ! Mais je vais vous faire bosser aujourd'hui, comme jamais, en contrepartie. Vous allez rentrer pleurer dans les jupons de vos mères ce soir, je vous en fais le serment !
Un malaise commun les fit frissonner. Sans être un tabou, le sujet de leur mère était très peu abordé. Ils savaient comment elle s'appelait, qui elle était, à quel point elle les avait aimé, bien sûr, mais personne n'en parlait volontairement. Et jamais leur grand-père ne se serait permis ce genre de commentaire.
— Papy ?
Red était absent depuis trop longtemps. Il saurait peut-être comment gérer leur grand-père sans le brusquer, l'amener à être plus aimable, ce genre de truc…
Ce n'était pas la première fois qu'ils se rendaient compte de la valeur de leur petit frère, qui serait sans doute capable de demander à une montagne de se déplacer sans avoir à batailler pour cela ! Mais ils avaient préféré l'envoyer chercher le médecin, pour le protéger. Ils avaient beau avoir tous seize ans, maintenant, et en avoir vu et vécu plus que n'importe qui à leur âge, ce n'est pas pour autant qu'ils avaient envie que leur Link le plus sensible ait à supporter ça. Mais c'est sûr que, par extension, ils ne pouvaient pas lui demander d'arrondir les angles pour eux.
— DU RESPECT ! s'emporta le vieil homme.
Prenant appui sur la table, il se leva, sa chaise se renversant derrière lui, les faisant sursauter.
Même Shadow n'en menait pas large, s'agrippant à Vio. Prêt à le protéger de la moindre agression comme de se planquer derrière lui, selon la situation.
On le répète : ce n'était pas lui la partie héroïque, alors merci de le laisser tranquille !
De leur côté, les lesdites parties héroïques n'en menaient pas large. Certes, ils avaient affronté bien pire, que ce soit en ennemis ou en situations dangereuses, mais là, ce n'était pas un chevalier manipulé ou une créature invoquée, c'était leur grand-père. Aucun d'entre eux ne se sentait capable de lever leur poing contre lui. Fuir n'était pas vraiment dans leur habitude, et ils se sentaient de toute façon comme pétrifiés, les semelles de leurs chaussures comme collées aux dalles du sol.
Sous leurs yeux écarquillés, le vieux forgeron s'approchait d'un pas alourdi par les ans, l'air menaçant.
Distraitement, Vio se demanda s'il pourrait le défaire de son verbe, mais sa langue paraissait fusionnée avec son palais, incapable de se mouvoir, et plus encore de formuler la moindre syllabe.
Lorsque la porte s'ouvrit violemment derrière eux, ils ne purent s'empêcher de sursauter, le cœur battant à tout rompre et sur leurs gardes, persuadés qu'ils se trouvaient pris en tenaille entre deux ennemis.
Mais ce n'était que leur frère, accompagné du médecin royal et, curieusement, de leur père. Ce n'était sûrement pas prémédité car il étrennait encore son armure, alors qu'il l'a laissé d'ordinaire dans ses quartiers quand il venait leur rendre visite.
— Père !
Mais l'interpellé ne réagit pas, comme s'il ne comprenait pas être la personne ciblée, s'approchant toujours plus des quatre adolescents dont l'attention était partagée entre leur père et leur grand-père.
Que devaient-ils faire ? Se réfugier derrière le chevalier et le laisser la situation ? Rester entre eux et servir de tampon, au risque d'en sortir blessé ? Ils pourraient aussi se masser derrière leur grand-père, mais ils n'en voyaient pas trop l'intérêt.
— Sors du chemin, le chevalier ! Mon apprentissage ne regarde pas l'armée !
Il y avait trop d'informations, et pas assez à la fois. Heureusement pour eux, Red fut le plus prompt à réagir et il s'empara des poignets de Blue et Green pour les tirer à sa suite hors de la maison. Il les lâcha aussitôt pour y retourner afin d'y récupérer Vio et Shadow, mais il en fut empêché.
Laxharaull secoua la tête, l'air résigné.
Cette expression, plus que tout le reste de la situation précédente, les glaça. Mais ils avaient encore deux de leurs frères au milieu de ce bazar et ils refusaient qu'ils soient des victimes collatérales de… de… peu importe de ce qui se passait actuellement, il en était juste hors de question.
Le médecin royal n'en menait pas large et ne fut pas un obstacle de taille, ils le dépassa rapidement, retournant dans l'entrée, prêt à jouer des coudes et des poings afin de forcer leur route.
Mais ils changèrent d'avis lorsqu'ils parvinrent à destination, assistant à une autre scène.
Face à son père, Leon protégeait Vio et Shadow de son corps, les coups assénés rebondissant sur son armure dans des fracas assourdissants. Il ne portait pas son heaume, ce qui permit à ses fils de reconnaître le regard qu'il arborait. C'était celui du capitaine des chevaliers, ce bleu glacial qu'il portait sur les ennemis de la couronne, une promesse de mise à mort immédiate.
Et il le portait sur son père.
Plus encore que lorsqu'ils avaient face à leur grand-père en rage un peu plus tôt.
Pressés l'un contre l'autre, les deux adolescents avaient l'air plus que jamais en détresse. Il ne fallut pas longtemps pour qu'ils croisent les yeux des autres. Green leur fit signe de les rejoindre, mais ils étaient comme pétrifiés, incapables d'esquisser le moindre geste.
Énervé par la situation qui leur échappait, Blue leur fonça dessus, les attrapant n'importe comment et les tirant après lui, écumant de rage à son tour. Une fois dehors tous les cinq, Laxharaull ferma la porte derrière eux après leur avoir fait signe de partir.
Le calme de l'extérieur et la petite bise fraiche les surprirent et ils eurent l'impression d'être enfin capables de respirer, comme s'ils avaient été en apnée depuis des heures.
— Que… Que s'est-il passé ? murmura Vio.
Il s'était laissé tomber à terre, les jambes trop tremblantes pour rester debout, alors qu'il évacuait enfin ce qui venait de se passer.
Il ne resta pas seul bien longtemps, les autres le rejoignant.
Ils restèrent ainsi, amassés devant la porte de ce qui avait été leur foyer pendant de longues années, mutiques. Tout avait été tellement rapide qu'ils peinaient à comprendre.
Pour une fois, c'était Red qui avait la réponse et c'était Vio qui l'ignorait.
— Le docteur m'a vaguement expliqué, commença-t-il.
Quatre paires d'yeux se rivèrent sur lui, alors qu'il triturait des brins d'herbes.
— C'est l'âge. L'esprit se perd dans l'espace et le temps. Ce n'était pas à nous qu'il parlait, c'était à des fantômes de son passé. Nous…
— Nous n'existions pas, acheva Vio à sa place. Il était dans un passé où nous n'étions pas encore né.
Ils restèrent là où ils se trouvaient, glissant dans un câlin collectif, remplissant un besoin de réconfort qu'ils n'osaient pas formuler. Leurs attentions étaient rivées sur la porte de la maisonnette, ignorant s'ils voulaient la voir s'ouvrir ou rester fermée.
Il y avait parfois des ennemis contre lesquels on ne pouvait lutter, tout héros qu'on soit…
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