Disclaimer : Plus que jamais, les personnes trans sont plus courageux·ses que Godric lui-même, n'en déplaise à Celle-dont-on-ne-peut-plus-prononcer-le-nom.
Attention : Rated M et relation M/M. Thématique du suicide, de la dépression et de l'addiction. Vous lisez en connaissance de cause.
Des mercis et des bisous à Feufollet, LaraBlack, Tiph l'Andouille, Miss MPREG, Jyel, Marine0409 et Sun Dae V (x2) pour leur review. Vos mots ne manquent jamais de me remotiver! Keur:keur:keur sur vous!
RàR:
Lara Black:
Coucou ! Merci beaucoup pour ta review! Trop contente que tu ais aimé le dernier chapitre! T'inquiète, Alexis est une des stars de cette partie (j'adore ce gamin!). Je te laisse avec la suite! Bonne lecture!
Bonjour à toutes et à tous !
Comment va la vie de votre existence?
Les vacances se terminent et je me suis dit que si je ne mettais pas à jour maintenant, et bien ça serait sans doute pas avant les prochaines (la Vie est cruelle et se dresse entre moi et mes mises à jour xD)
Depuis la dernière fois, j'ai à peine eu le temps de commencer 14 de la suite (AKA Mars 1997) mais c'est parce que ce côté-ci de l'histoire avait besoin de quelques corrections (historie d'allonger un peu plus le bidule, un Ordre du Phénix, c'est presque trop peu!). Souhaitez-moi bonne chance, mon ado terrible n'aime pas rester le banc trop longtemps xD
Je vous laisse avec la suite qui, si je m'en tiens aux réactions de ma bêta, devrait vous surprendre wink:wink:wink! Bonne lecture!
Une fois n'est pas coutume, un grand merci à Sun Dae V pour la relecture et ses retours enthousiastes ! Je vais donc redire une fois de plus: sa fic La Course au Chien Sauvage est un must-read si vous aimez Sirius Black !
Dans le dernier chapitre: Regulus est rattrapé par ses démons quand les Mangemorts font parler d'eux après la finale de la Coupe du Monde de Quidditch. Alexis et Fleur n'arrangent quand ils décident de faire partie de la délégation de Beauxbâtons pour le Tournoi des Trois Sorciers.
Gravity
Chapitre 20
Autumn 1994
Halloween arriva bien trop vite. La délégation de Beauxbâtons passa les trois semaines qui les séparaient du grand départ à suivre des cours d'anglais deux fois par jour. Alexis et Fleur profitèrent d'avoir un britannique à portée de voix pour s'entraîner pendant les weekends. Le couturier, Oscar Lamartine, compléta l'uniforme éphémère de Beauxbâtons par une vraie cape d'hiver, des gants et des écharpes, ainsi qu'un trousseau de pulls. Cela n'empêcha pas Alexis d'emmener des vêtements moldus dans sa malle et de choisir une tenue de bal moderne.
Le départ de l'énorme carrosse, tiré par douze chevaux polominos, fit la une de la presse française.
Il essayait de contempler avec philosophie l'idée qu'il allait devoir s'intéresser à ce qu'il se passait au Royaume-Uni pour les mois à venir et il se rassurait comme il pouvait en se répétant que Fleur était une excellente sorcière.
Si Lucie reçut la première lettre en provenance de Poudlard dès le lendemain de l'arrivée d'Alexis, celle qui relata la décision de la Coupe de Feu leur parvint le dimanche matin dans leur maison en Bretagne, avant qu'aucun d'eux n'ait eu le temps d'allumer la radio pour découvrir le nom des trois champions.
Raphaël donna un morceau de toast au hibou de Poudlard puis se dévoua pour faire la lecture.
- «Papa, Regulus». Même pas un bonjour. Cet enfant n'a rien retenu des leçons de politesse de sa grand-mère.
Il prit une gorgée de son thé en secouant la tête.
- «J'espère que vous allez bien et que vous ne vous ennuyez pas trop sans moi ce weekend.»
Raphaël releva un regard pénétrant vers lui, face auquel il refusa de rougir et qu'il ne releva même pas. S'ils s'étaient levés tard – plus tard que d'habitude, du reste –, c'était parce qu'ils avaient passé une bonne partie de la matinée à faire l'amour. De son point de vue, c'était la meilleure façon de commencer la journée.
Et peut-être de lutter contre l'ennui.
Raphaël se pencha pour l'embrasser délicatement. Il le repoussa avant qu'ils ne perdent le fil, tous les deux.
- Continue ta lecture.
Raphaël souriait largement quand il se redressa. Avec ses cheveux encore ébouriffés, sa légère barbe et ses yeux brillants de bonheur, il était particulièrement magnifique.
- «Bon, sans surprise, Fleur est la championne de Beauxbâtons. Je crois que tout le monde était à peu près résigné à l'idée dans le carrosse et qu'à part un ou deux mecs qui pensaient encore avoir leur chance, ils sont plus venus pour le voyage que pour la compétition.»
Cela avait beau être attendu, il se crispa tout pareil. Les organisateurs de ce maudit Tournoi avaient intérêt à avoir bien réfléchi aux trois épreuves, parce qu'il leur ferait payer le prix fort si quoique ce soit arrivait à sa nièce.
- Je suis étonné que mon frère n'ait pas appelé à la minute où il a appris ça.
- Oui, c'était ce que je craignais, aussi ai-je veillé à débrancher cet objet de malheur hier soir.
Raphaël eut une exclamation indignée, seulement à moitié sincère vu la façon dont il semblait retenir un sourire.
- Slyzerin.
- Tu ne sais même pas ce que cela veut dire. Et on savait tous depuis le début qu'elle allait être choisie. J'espère même qu'elle va gagner.
Ce fut au tour de Raphaël de secouer la tête. Il lui fit un signe du menton pour l'inciter à reprendre sa lecture.
- «C'est un peu la même chose pour Durmstrang puisque Viktor Krum (l'Attrapeur préféré de Regulus) a été choisi.»
Raphaël salua la moquerie de son fils par un ricanement satisfait. Il lui jeta la serviette de table à sa droite au visage en représailles. Raphaël réussit à l'éviter et à attraper sa main, ce qui ne fit qu'accentuer son hilarité.
- Ce gamin réussit à être irritant même à l'autre bout du Royaume-Uni!
- Ah, je lui ai transmis mon don et Lucie lui a transmis le sien!
- Par Adèle, termine cette lettre!
Raphaël passa d'hilare à surpris puis à inquiet en l'espace de quelques secondes. Il se racla la gorge.
Il n'aimait pas sa moue sérieuse.
- «La situation est un peu plus délicate pour Ogwarts car ils ont réussi le tour de force d'avoir deux champions! (Mme Maxime est furieuse). Le premier est un Ufflepuff de septième année: Cédric Diggory. Le deuxième n'est personne d'autre qu'Arry Potter. On ne sait pas comment il s'y est pris pour passer la limite d'âge de Dumbledore et si j'ai bien tout compris de ce que Fleur m'a raconté (elle était enragée à un niveau Vélane hier soir, je n'ai pas pu rester longtemps avec elle), il semblerait qu'il ait enchanté la Coupe pour lui faire croire qu'une quatrième école était en lice. Enfin, lui, ou quelqu'un d'autre. La rumeur veut qu'Arry Potter manque de mourir tous les ans au mois de juin depuis son arrivée à l'école. Dans tous les cas, il avait l'air sacrément surpris d'être appelé hier soir. Soit c'est un très bon comédien, soit il n'y est pour rien.»
Raphaël passa une main à travers ses cheveux et sembla relire en silence le dernier paragraphe.
Il serra brièvement les paupières, maudissant Dumbledore et tout le ramassis d'incapables qui travaillaient au Ministère en silence. Si la vie d'un gamin de quatorze ans et de sa nièce n'avaient pas été en jeu, il ne se serait pas gêné pour faire remarquer à Raphaël qu'il avait eu raison de craindre le pire.
Remettre au goût du jour le Tournoi des Trois Sorciers était une mauvaise idée qui allait se terminer par une catastrophe.
- Penses-tu qu'un sorcier de quatorze ans ait pu ensorceler la Coupe?
Raphaël savait très bien qu'il n'avait pas pu résister à la tentation de se renseigner sur l'artefact censé choisir les champions dans l'espoir de déterminer les chances de Fleur. La Coupe de Feu avait été étudiée en long, en large et en travers par de nombreux sorciers depuis sa création, au XIIIème siècle. Les savants derrière l'invention de cet artefact – commandé par le Royaume de France pour éviter toute tricherie – s'étaient appuyés sur de l'ancienne magie, celle-là même qu'on attribuait à Merlin et au sortilège qui avait emprisonné Excalibur.
Harry Potter allait peut-être devenir le plus puissant sorcier de sa génération – peut-être même depuis Merlin – mais il n'était qu'un quatrième année. Sa magie était immature. Passer la limite d'âge de Dumbledore était une chose, ensorceler la Coupe de Feu en était une autre.
Il ne possédait pas tous les éléments, mais cela semblait peu probable.
- J'en doute. En revanche, il va être obligé de participer.
Mettre son nom dans la Coupe de Feu revenait à signer un contrat magique avec l'artefact. Si Harry Potter refusait de se soumettre aux épreuves, il prenait le risque de perdre sa magie ou de mourir.
Raphaël passa une nouvelle fois sa main dans ses cheveux.
- Pauvre gosse, marmonna-t-il, avant de reprendre sa lecture. «A part ça, le banquet d'Alloween était vraiment sympa. On a bien mangé, il y avait plein de sucreries. Je crois qu'ils ont essayé de nous impressionner parce qu'ils n'y sont pas allés de main morte sur la décoration. On a même eu le droit à un spectacle de la part des fantômes.»
Puisqu'il avait toujours eu une dent sucrée, et qu'il avait été sommé de rentrer pour les fêtes de fin d'année, il gardait de bons souvenirs du banquet d'Halloween. Bien sûr, la chute de Voldemort quatorze ans plus tôt suivi par l'arrestation de Sirius avaient changé la donne. Il avait fait trop de cauchemars pour continuer à apprécier cette fête.
C'était une excellente chose que les Français ne la célèbrent pas.
- «Sinon, le château n'est pas aussi moche que ce à quoi je m'attendais. Ce n'est pas le palais de Beauxbâtons, mais les environs sont vraiment beaux. On s'est baladé un peu avec les autres et on s'est perdus plusieurs fois. Entre les escaliers qui changent tout le temps, l'esprit farceur qu'on nous a déconseillé d'approcher et les tableaux qui ne savent pas indiquer les chemins… Je me demande un peu comment les élèves font pour arriver à l'heure en cours. On a quand même réussi à trouver la bibliothèque: je suis assez d'accord, elle est pas mal.»
S'il fermait les yeux, il pouvait encore revoir les étagères qui couraient jusqu'au plafond, sentir l'odeur entêtante du parchemin et du cuir, et retrouver la table à laquelle il s'installait toujours...
- Nostalgique, mon amour?
Il sourit doucement.
- Peut-être. Que raconte-t-il de plus?
Raphaël serra sa cuisse.
- «Pour le moment, j'ai surtout parlé aux Ravenclaws (on mange avec eux). Ils sont gentils pour la plupart, même si certains sont assez imbus d'eux-mêmes.» Ah, je comprends un peu mieux pourquoi tu m'as fait croire pendant si longtemps que tu avais été réparti dans celle-ci!
- On verra bien ce que ton fils aura à dire des Hufflepuffs.
Raphaël agita ses sourcils.
- Que des choses biens, parce qu'on sait tous les deux que c'est la meilleure maison de tout Ogwarts!
Il eut beau lever les yeux au ciel, il était obligé de reconnaître que c'était la maison qui avait produit le moins de sorciers malfaisants au fil des siècles.
«J'ai aussi repéré Alya Lestrange et Draco Malefoy. Ils sont bien à Slyzerin tous les deux. La fille a l'air très sérieuse et le garçon est tout le temps en train de se faire remarquer. Arry Potter est assez banal finalement. Je pensais qu'il serait super populaire, mais il est toujours avec les deux mêmes personnes et il se fait discret. Ceux de Durmstrang mangent avec les Slyzerins et ils ont passé la majorité du temps sur leur bateau. Je pense qu'on sera amené à les fréquenter un peu plus quand les cours commenceront.»
Bien sûr qu'Alexis n'avait pas pu résister à la tentation de jouer les fouineurs. Il ne lui donnait pas un mois avant qu'il n'adresse la parole à au moins l'un de ses deux petits cousins.
Une part de lui avait assez hâte qu'il le fasse. Peut-être même regrettait-il de ne pas avoir mentionné sa possible nièce. Si elle était encore en vie – il en doutait – et qu'elle avait grandi au Royaume-Uni, alors elle devait être en troisième année, elle aussi. L'empathie d'Alexis aurait pu permettre de la percer à jour.
- «Je crois que je n'oublie rien. Ne vous attendez pas à recevoir une lettre toutes les semaines, écrire prend vachement plus longtemps que passer un coup de fil. Je vous embrasse. Alex.». Quel ingrat! J'espère que Fleur se montrera un peu plus généreuse avec son oncle préféré.
- Promis, je te le dirais si je reçois des lettres de sa part.
Il ne manqua pas de se moquer de l'expression scandalisée de son mari.
…
Winter 1995
Il devait reconnaître que Raphaël savait y faire quand il s'agissait d'organiser des voyages. L'océan Pacifique s'étalait à perte de vue, les vagues venaient s'échouer sur des plages au sable blanc, les feuilles des palmiers se découpaient dans un ciel aussi bleu que dans un dessin d'enfant. Il avait mis à profit sa forme Animagus pour survoler les environs, et s'il trouvait que les constructions humaines avaient un peu trop dénaturé la nature, cela ne l'avait pas empêché de trouver plus de criques aux eaux cristallines qu'il n'était capable de se souvenir.
Détail non négligeable, il savait qu'à l'heure actuelle, il faisait déjà nuit à Paris et il avait neigé la veille de leur départ.
Il ferma les yeux pour savourer un peu plus les rayons du soleil sur sa peau, avant de tourner la tête vers Raphaël quand son mari siffla, appréciateur.
Il mit quelques secondes à comprendre que l'objet de sa fascination n'était rien d'autre que la dizaine de motos toutes de cuir et d'acier rutilant alignées à bonne distance d'un bar – une baraque en bois, au toit de tôle, qui dénotait au milieu des autres commerces plus touristiques –.
Il croisa les bras sur sa poitrine en secouant la tête tandis que Raphaël tournait autour de ces monstres en métal. Son mari lui adressa un sourire éclatant, bien qu'un peu moqueur.
- J'ai toujours rêvé de monter sur une Harley.
- Hors de question. Ces engins sont plus dangereux encore que les voitures.
Et il savait de source sûre – Walburga – que Sirius n'avait pas manqué de compléter sa panoplie de rebelle avec une telle machine.
Volante.
A la façon dont l'expression de Raphaël devint suspicieuse, il sut que ses émotions l'avaient encore trahi.
- You two! Step back!
La mise en garde venait d'un colosse au crâne rasé, à la barbe impressionnante et aux bras recouverts de tatouages. Il avançait dans leur direction sans se presser, comme pour leur donner le temps de s'éloigner. Un deuxième homme, plus petit, une casquette vissée sur la tête qui dissimulait une partie de son visage, et peut-être un peu éméché, le suivait à quelques pas de distance.
Il recula par prudence – il n'avait pas traversé la moitié du globe pour s'attirer des ennuis – mais Raphaël choisit de ne pas bouger.
- I'm sorry, I was just admiring... Zose are beautiful! Which one is yours?
Sa réponse laissa le colosse de marbre. Il s'arrêta devant la première moto, croisa ses bras sur sa poitrine et sembla grogner. Si Raphaël avait dans l'idée de jouer de son charme naturel – et peut-être de son empathie – pour convaincre ce moldu de le laisser monter sur sa moto, ça semblait mal parti.
Par réflexe, il vérifia que sa baguette magique était bien dans la poche intérieure de sa chemise. Il avait fréquenté assez de brutes épaisses pendant la guerre pour savoir que la discussion pouvait mal se terminer.
- Do I know you?
Accaparé par l'échange entre son mari et le colosse, il n'avait pas remarqué que le deuxième homme s'était rapproché de lui. Il le dévisageait avec intensité, son expression mauvaise – proche d'un rictus de haine même –.
Il fit un pas de plus en arrière.
- I really doubt it.
Après tout, Raphaël et lui étaient arrivés trois jours plus tôt par Portoloin puis ils avaient passé son anniversaire et la nouvelle année dans leur chambre d'hôtel. A l'exception d'un dîner et d'une baignade, c'était la première fois qu'ils mettaient le nez dehors pour visiter un peu.
Sa réponse ne sembla pas plaire au moldu.
- You're british?
Il avait beau vivre en France depuis près de quinze ans, il n'avait encore jamais entendu quelqu'un mettre autant de haine dans sa façon de dire britannique.
- No, mentit-il, essayant de lisser son accent.
Le rictus du moldu s'accentua, découvrant ses dents. Il fit l'erreur de chercher Raphaël des yeux – il était l'expert des résolutions de conflit –. Il devina le geste brusque de l'homme du coin de l'œil.
Trop tard.
Une douleur aiguë explosa sur le côté droit de son visage. Il perdit l'équilibre. Tout juste eut-il le temps d'amortir sa chute à l'aide de ses bras.
- What the fuck, Burt!
- Par Adèle, Regulus!
Il était un peu sonné. Le côté droit de son visage pulsait. Il avait un goût métallique dans la bouche. Il se redressait quand quelque chose percuta ses côtes, le projetant à nouveau au sol, le souffle coupé cette fois.
- You son of a bitch! You killed my daughter! I'm going to kill you!
Trop occupé à faire rentrer de l'air dans ses poumons, il perdit le fil de la bagarre. Il eut vaguement conscience de sentir comme un courant d'air glacial, suivi d'un bruit sourd, puis le visage de Raphaël fut au-dessus de lui. Il le fit basculer sur le côté avec douceur.
- Ça va aller?
Son visage pulsait toujours et l'air faisait un drôle de bruit dans sa gorge, mais il était presque sûr qu'il n'avait rien de cassé.
La douleur était supportable.
Il hocha la tête, son souffle encore trop court pour des mots.
- What the fuck did you do to him?!
- Essaye de respirer doucement, lui souffla Raphaël avant de se redresser.
Il n'écouta que d'une oreille la fin de l'altercation. Il lui sembla que Raphaël n'hésita pas à menacer le moldu de lui jeter un maléfice, et peut-être qu'il y eut d'autres éclats de voix au loin, mais tout ce qui compta fut que son mari revienne auprès de lui, sa baguette à la main.
- Je vais nous faire transplaner.
L'espace d'un battement de cils, la lumière aveuglante de l'extérieur céda la place à la pénombre de leur chambre d'hôtel. Encore un peu sonné par la tournure des événements, il se laissa faire tandis que Raphaël l'aidait à se redresser, puis commença à l'examiner, ses gestes précis.
Plus que les coups, c'étaient les mots du moldu qui l'avaient frappé en plein cœur.
Do I know you?
Il était certain de n'avoir jamais croisé un tel duo.
You killed my daughter!
Ou peut-être avait-il seulement oublié? Ses derniers souvenirs de la guerre avaient plus de quinze ans. Entre l'accident de la grotte, son coma, les cauchemars et le reste, sa mémoire n'était pas aussi fiable qu'elle aurait pu l'être. Il avait tué des femmes de sa propre main – trois – et les attaques auxquelles il avait pris part avaient fait des centaines de morts.
Il ne se souvenait pas, mais c'était possible.
Raphaël appuya un peu fort sur sa pommette, le tirant de ses pensées. Son mari resta de marbre face à son regard sombre.
- Tu n'as rien de cassé.
Puisqu'il avait été Attrapeur dans l'équipe de Serpentard et qu'il avait été percuté par son lot de Cognards, il savait assez bien que les coups qu'il avait reçus n'avaient pas été assez puissants pour causer de véritables dommages.
- Tu vas mettre de la glace, et j'irais acheter de quoi éviter que tu sois défiguré pour toute la durée de nos vacances.
Raphaël l'aida à s'installer sur le lit, puis disparut dans la salle de bain. Il revint avec un gant de toilette et une serviette humide. Il comprit vite qu'il les avait enchantés parce que l'eau n'était pas aussi froide.
- Ça va aller?
Il grogna. Raphaël haussa un sourcil.
- J'ai connu nettement pire. Je devrais survivre.
- Oh, je sais qu'il en faut un peu plus pour t'arrêter mais ce n'était pas exactement ma question non plus.
Il serra les dents.
Merlin en soit témoin, s'il avait – souvent – pensé que Raphaël était pénible à toujours vouloir tout discuter, c'était bien pire depuis qu'il étudiait la psychologie moldue. Ses nouvelles connaissances, alliées à son empathie, le rendaient encore plus redoutable qu'avant. Il estimait désormais s'en sortir à bon compte s'il acceptait de différer la discussion.
Quelque chose dans l'expression décidée de son mari lui soufflait que ce n'était même pas la peine qu'il essaie.
Raphaël caressa sa joue indemne avec douceur.
- Regulus, tu viens de te faire agresser. Parle-moi…
Il serra les paupières une brève seconde, juste pour mettre la voix de ce moldu en sourdine et peut-être trouver un moyen pour gagner du temps.
- Je ne suis pas bien sûr d'avoir compris ce qu'il vient de se passer, éluda-t-il.
Ce n'était même pas un mensonge. Ils étaient censés se promener le long de la plage d'Honolulu dans l'anonymat le plus total puisque même leur hôtel se trouvait dans le monde moldu. S'il était tout à fait honnête, il aurait été moins surpris de se faire passer à tabac parce qu'il était homosexuel que parce qu'il avait été reconnu par la famille – le père? – d'une de ses victimes après toutes ces années.
Raphaël ébouriffa ses cheveux, ce qui lui fit plisser les yeux.
- J'ai peut-être une théorie, mais j'aimerais entendre la tienne avant.
- Qui te dit que j'ai une théorie?
- Ta culpabilité et ta résignation?
Une part de lui voulut fuir – se lever et transplaner ou même se fondre dans sa forme Animagus et s'envoler vers l'horizon – parce que Raphaël avait beau lui affirmer que les actes qu'il avait commis pendant la guerre ne l'empêcheraient jamais de l'aimer, il n'avait jamais été confronté à ce que cela signifiait.
Il y avait quelqu'un sur cette île qui l'avait vu tuer – sans doute torturer aussi –. Le souvenir de son visage avait tourmenté cet homme comme celui de Bellatrix hantait ses cauchemars.
Merlin, il l'avait aussitôt reconnu plus de quinze ans plus tard!
Son passé n'en finirait jamais de le poursuivre et il savait que c'était tout ce qu'il méritait.
Quand il déglutit, sa pomme d'Adam lui donna l'impression d'avoir triplé de volume.
- Si j'ai vraiment tué sa fille, beaucoup diraient que je m'en sors trop bien, non? marmonna-t-il en se détournant un peu.
Raphaël attrapa sa main gauche. Il fit tourner l'alliance à son annulaire du bout des doigts, avant de pencher la tête pour croiser son regard.
- Pas moi.
Peut-être qu'un jour, il comprendrait enfin ce qu'il avait fait pour mériter un homme tel que Raphaël. En attendant, il accepta de se blottir contre lui quand son mari s'installa à sa gauche, calant la serviette glacée entre leurs corps.
- Tu penses vraiment que c'est possible? Leur accent n'était pas britannique. Leur allure non plus, d'ailleurs.
- Ça ne veut rien dire. Ils se sont peut-être exilés, eux aussi. Un accent, ça se perd et ça se gagne. Et dans tous les cas, ce n'est pas impossible.
Raphaël resserra son bras autour de ses épaules, sans insister pour le convaincre du contraire.
- Quelle est ta théorie?
- Elle risque de ne pas te plaire, et je n'ai aucune preuve.
Sa prudence lui fit tourner la tête pour le dévisager. L'empathie de Raphaël était une informatrice redoutable. Il se trompait rarement.
- Je ne crois pas que ce soit toi qui aies tué la fille de ce moldu.
Il ouvrit la bouche pour le contredire.
- Parce que je crois que c'est ton frère.
Il referma la bouche si brusquement que ses dents s'entrechoquèrent.
- Come again?!
Raphaël grimaça, puis lui donna l'impression de rassembler ses arguments avant de reprendre.
- Jusqu'à preuve du contraire, ils sont tous les deux américains. Celui avec lequel je parlais a tout de suite deviné qu'on était des sorciers. L'homme qui t'a attaqué te haïssait vraiment.
Jusque-là, il était d'accord et il ne voyait pas en quoi cela l'innocentait en défaveur de son frère. Non pas que Sirius n'avait pas de sang sur les mains – il n'avait peut-être pas tué Pettigrow et ces douze moldus, mais il n'avait pas pris plus de prisonniers que Bellatrix pendant la guerre –.
- Et quel est le rapport avec Sirius?
Raphaël lui jeta un nouveau regard prudent.
- Les prénoms Judith et Maellyn tatoués sur leurs avant-bras.
Les événements s'étaient trop précipités pour qu'il ait eu le temps d'analyser les tatouages des deux moldus. Les deux prénoms étaient douloureusement familiers.
- Tu es sûr?
- Certain, parce que je me suis fait la réflexion avant que la situation ne s'envenime. Et puisque tu ressembles quand même beaucoup à ton frère et que tu es aussi britannique… Ce n'est pas impossible que, l'alcool aidant, il ait cru reconnaître ton frère.
Depuis juin dernier, la possibilité que Sirius ne soit plus coupable de tout ce qu'on lui reprochait avait fait son chemin dans sa tête – et dans son cœur -. C'était, en tout cas, la seule explication qui faisait à peu près sens. Corollaire de tout cela, Bellatrix était sans doute responsable du meurtre de cette américaine, ce qui signifiait qu'elle avait aussi tué l'enfant. Il préférait donc éviter de penser à toute cette histoire et, jusqu'à aujourd'hui, il ne s'était même pas demandé si Judith Adler avait encore de la famille quelque part.
Toutefois, s'il avait dû parier, il aurait quand même misé sur des moldus. Que ces derniers aient une forte inclinaison pour les motos, les tatouages et la violence allait presque de soi.
- Ça serait quand même une sacrée coïncidence!
Raphaël fit un geste vague de la main.
- Si tu veux mon avis, vous avez vexé le destin avec votre lubie de vous nommer d'après des étoiles. Évidemment qu'il a fallu que tu tombes sur la famille moldue de ta nièce pendant nos vacances. Je suis même surpris qu'on n'ait pas encore croisé Sirius Black en personne.
C'était loin d'être la première fois que son mari se moquait des tendances dramatiques de la famille Black et, en vérité, il ne pouvait pas tellement le lui reprocher. Après tout, il était censé avoir trouvé la mort dans cette grotte et Sirius avait été accusé à tort, sans oublier les horreurs commises par Bellatrix ou le scandale causé par le mariage d'Androméda. A en croire Alexis, même Alya Lestrange et Draco Malefoy avaient hérité du talent familial pour la mise en scène et les histoires impossibles.
De là à dire que le destin était responsable de leur rencontre avec ces deux moldus, il exagérait un peu.
- Ou peut-être que je me trompe.
Son air trop neutre semblait pourtant vouloir dire qu'il était déjà convaincu d'avoir raison.
- Tu vas demander à ta mère si elle a des informations sur la famille américaine de ma nièce, n'est-ce pas?
Cette fois, un bref sourire malicieux lui échappa, ce qui était un aveu comme un autre.
Il leva les yeux au ciel.
- Tu ne devais pas aller acheter des potions ou que sais-je? dit-il, en se libérant de son étreinte, un peu agacé par les certitudes de son mari.
Fidèle à son habitude, Raphaël ne se laissa pas impressionné par son regard sombre. Il embrassa sa joue.
- Si et je vais y aller avant que l'apothicaire soit fermé.
Il attrapa son menton pour pouvoir planter son regard brun dans le sien.
- OK?
C'était une excellente question. Il doutait au moins autant de la théorie de Raphaël qu'il était convaincu d'avoir mérité les coups que ce moldu lui avait porté. Que cela soit le cas ou non, il avait connu nettement pire et il ne serait pas contre un peu de solitude pour faire le tri dans sa propre tête.
Il hocha la tête. Raphaël l'embrassa rapidement.
- Je me dépêche, d'accord? Essaye de garder le froid, c'est encore ce qu'il y a de plus efficace pour éviter un hématome.
La porte de leur chambre se refermait à peine qu'il se débarrassa des deux serviettes. La peau de son flanc gauche était rouge et glacée, ce qui faisait encore plus ressortir ses cicatrices. Le moldu n'avait pas dû frapper si fort, parce qu'il n'avait même pas mal quand il respirait.
Pour ce qui était de son visage, c'était une autre histoire. Le miroir dans la salle de bain lui apprit qu'il était déjà trop tard pour éviter l'hématome. Il avait de la chance de ne pas avoir un œil au beurre noir en prime.
You killed my daughter!
Un long soupir tremblant lui échappa. Il serra les paupières pour retenir les larmes qu'il sentait monter, ce qui ne servit qu'à conjurer les visages des personnes qu'il avait vraiment tué pendant la guerre. Chaque année qui s'écoulait rendait leurs traits plus flous mais leurs cris, eux, étaient intacts.
La culpabilité revint, écrasante.
Sa gorge devint tapissée de milliers d'aiguilles. Son moignon se mit à pulser dans sa prothèse, la crampe en chemin.
You killed my daughter!
Peut-être que Raphaël avait raison, mais cela ne changeait pas la vérité: quelque part, il y avait des pères qui pleuraient encore leur fille assassinée.
Et c'était de sa faute.
Il échoua à contenir les larmes. Il les sentit glisser le long de ses joues, brûlantes, tandis que les remords l'étouffaient.
Il méritait tellement plus que quelques coups, même si cela ne ramènerait personne à la vie, pas plus que cela n'effacerait le mal qu'il avait fait. Il ne pouvait que se repentir, encore et encore et pour toujours.
En l'absence de Raphaël, il s'autorisa à se haïr et à souhaiter avoir trouvé la mort, il y avait toutes ces années. Cela ne fit qu'alourdir sa culpabilité. Il se sentit sombrer, exactement comme ce jour-là, dans la grotte.
Ses poumons étaient en feu. Sa vision était trouble. Ses cicatrices de nouveaux ouvertes, si elles s'étaient un jour refermées.
Il ignora combien de temps il resta agrippé aux rebords du lavabo, mais les larmes eurent le temps de se transformer en sanglots tandis que les souvenirs qui se succédaient sur l'écran noir de ses paupières étaient autant de coups qu'il méritait de recevoir.
Raphaël revint bien avant qu'il n'ait eu le temps de reprendre le dessus sur ses émotions. Une fois de plus, il le prit dans ses bras sans un mot et, une fois de plus, la combinaison de sa présence, de son odeur, des mots tendres chuchotés à son oreille, fut comme un Patronus taillé sur mesure pour repousser ses démons dans les limbes où il les retenait prisonniers le reste du temps.
Peu à peu, le poids sur sa poitrine s'allégea, il réussit à reprendre des respirations profondes et son cerveau devint trop engourdi pour jouer contre lui.
Les mains chaudes de Raphaël sur sa peau semblaient capables de réchauffer jusqu'à son âme.
Raphaël embrassa sa joue.
- Tu n'avais pas besoin de te mettre dans un état pareil à cause d'un malheureux bleu. Je te promets que tu ne vas pas rester défiguré.
Il ignorait comment il faisait pour toujours savoir quoi lui dire pour le faire rire dans ces moments-là, même si les plis sur son front et ses yeux plissés semblaient lui promettre qu'il lui demanderait ce qu'il s'était passé, plus tard.
A défaut de pouvoir trouver une réplique inspirée, il guida ses lèvres vers les siennes, priant en silence pour que Raphaël sente sa reconnaissance et tout son amour pour lui.
La vague de chaleur qui le traversa le fit pencher pour oui.
Raphaël le laissa mettre fin au baiser, puis le guida sur la terrasse. Il lui désigna l'une des chaises longues à l'ombre d'un immense parasol, avant de s'installer à ses pieds, un pot en verre dans la main.
Il l'empêcha de passer une main lasse sur ses yeux bouffis et embrassa le bleu sur sa joue avec délicatesse.
- D'après la sorcière qui m'a vendu ce truc, tu ne devrais même plus avoir de marque demain.
- Tu as l'air sceptique.
Raphaël commença à appliquer le baume épais sur sa pommette blessée, ses gestes doux et précis.
- Tu le serais aussi si c'était la promesse que te faisait chaque représentant des labos de potion.
Il eut l'impression que Raphaël étalait de l'eau fraîche du bout des doigts. La douleur s'atténua aussitôt. Le baume sentait bon le monoï, ce qui changeait des remèdes de Madame Pomfresh. Raphaël s'occupa ensuite de ses côtes, puis il s'allongea à son tour sur la deuxième chaise longue. Il le laissa faire quand il attrapa sa main gauche.
- Tu ne vas pas te baigner?
Leur chambre était au rez-de-chaussée, ce qui signifiait que la terrasse donnait directement sur la plage privée de l'hôtel. Raphaël embrassa le dos de sa main, puis ferma les yeux.
- Peut-être plus tard.
Il s'avéra qu'ils firent surtout une longue sieste à l'ombre du parasol et que ce ne fut rien d'autre que la sonnerie du téléphone qui les tira de leur torpeur.
Raphaël se dévoua pour répondre – parce que, statistiquement, c'était pour lui –.
- Bonne année à toi aussi, Lucie.
L'identité de l'interlocutrice le décida à rejoindre la chambre. Il se glissa derrière Raphaël et l'enlaça, son menton sur son épaule, assez proche du combiné pour suivre la conversation.
- Il n'est pas très tôt à Paris?
Lucie sembla soupirer.
- Clélia a fait un cauchemar et elle refuse de se rendormir. Je me suis dit que j'allais en profiter pour prendre de vos nouvelles…
Il orienta le combiné vers lui.
- Bonne année, Lucie.
- Bonne année à toi aussi, Regulus! Et bon anniversaire en retard! Faites-moi un peu rêver, c'est comment, Hawaï?
Il fut reconnaissant à Raphaël de passer sous silence leur mésaventure d'aujourd'hui.
- Vous me désespérez à rester enfermés à l'hôtel quand vous êtes dans l'un des endroits les plus paradisiaques au monde!
Il releva les yeux vers Raphaël au moment où il lui jetait un regard en coin. Son mari agita les sourcils puis ricana d'une façon qui ne manquait jamais de lui donner un air vraiment idiot. Il sourit malgré lui, resserra sa prise autour de sa taille et embrassa son épaule nue. Il se fichait d'être ici ou ailleurs, du moment qu'il était avec Raphaël. Le soleil était toutefois plus agréable que les tempêtes bretonnes à cette période de l'année.
- Il y a douze heures de décalage horaire et on a plus vingt ans! On a encore huit jours pour visiter.
Lucie éclata de rire.
- Le décalage horaire, bien sûr…
Il n'écouta que d'une oreille leur chamaillerie bon enfant, jusqu'à ce que Lucie prononce les mots magiques.
- J'ai reçu une lettre d'Alexis hier, vous voulez que je vous la lise?
Raphaël accepta avec enthousiasme. Il colla son oreille contre le combiné pour ne rien louper. Alexis n'écrivait pas souvent – il semblait s'être arrangé avec Fleur pour envoyer une lettre chacun leur tour, mais ce n'était pas pareil – et ils ne les reverraient pas avant les vacances de printemps.
Puisque Louis habitait à Bordeaux, il ne voyait pas Fleur si souvent que cela, mais il s'était toutefois habitué à retrouver Alexis un weekend sur deux, voire même un peu plus quand Lucie se joignait aux déjeuners dominicaux des Delacour.
Le jeune homme lui manquait beaucoup.
Lucie se racla la gorge.
- Je vous préviens, elle n'est pas très longue. «Maman, Charlie, Sophie et Clélia, J'espère que vous allez bien et je suis très content que mes cadeaux vous aient fait plaisir. Les vôtres étaient supers, alors merci beaucoup! (Fleur vous dit aussi merci). Je vous souhaite une bonne année. On espère tous et toutes que Fleur gagne dans le carrosse!»
Il sourit doucement. Pour le moment, Fleur avait toutes ses chances. Elle s'en était très bien sortie face à son dragon, utilisant avec beaucoup d'à-propos son héritage Vélane. Il savait que ses talents en hypnose lui permettait parfois d'aider Alexis à reprendre le contrôle sur son empathie quand il était submergé, mais il avait quand même été très impressionné qu'elle réussisse à envoûter un dragon adulte.
Toutefois, il ne décolérait toujours pas qu'elle ait dû affronter une telle créature magique pour récupérer un Œuf d'Or! Entre ça et la participation surprise du fils Potter, il avait de plus en plus de mal à croire Simone quand elle lui soutenait que le Tournoi ne se terminerait pas en drame.
Parce que si la première tâche impliquait un dragon, qui pouvait prédire les dangers qu'affronteraient les quatre champions lors des deux suivantes?!
- «Puisque ce sont encore les vacances, il ne se passe pas grand-chose à Ogwarts, mais Sophie voulait «tous les détails» sur le bal de Noël, alors je m'exécute (même si Fleur aura sans doute plus de chose à dire que moi).»
Il ne cesserait jamais de trouver touchant la façon dont Alexis pouvait se plier en quatre pour ses deux petites sœurs. Si Sophie continuait à lui vouer un culte, Clélia avait bien compris qu'elle pouvait tirer profit de la situation.
- «Déjà, je dois reconnaître qu'ils avaient mis le paquet niveau décoration. On se serait cru dans une forêt enchantée de conte de fée. Tout le monde était sur son trente-et-un. Les élèves de Durmstrang avaient tous mis leur uniforme de cérémonie et le style des robes anglaises datent du siècle dernier, donc ça n'a pas été très dur pour nous d'être les mieux habillés.»
Bien sûr, Raphaël salua la pique de son fils par un ricanement. Il leva les yeux au ciel. Alexis avait le même sens de la mode qu'un paon: il fallait du spectaculaire et du coloré. Évidemment que la sobriété de la mode britannique lui déplaisait.
- «Contrairement à d'habitude, on pouvait commander ce qu'on voulait pendant le repas et, bien sûr, les Bizars Sisters ont mis une super ambiance. Ça n'a pas empêché la majorité des Slyzerin de valser...»
Il avait assisté à trop de fêtes Sang-Purs pour être surpris. A leur place, il aurait sans doute fait pareil.
Adèle en soit témoin, il aurait été tenu d'accompagner une jeune fille de bonne famille – peut-être même sa fiancée – et de respecter l'étiquette Sang-Pur à la lettre. Le bal de Noël n'aurait rien eu de distrayant. Cela aurait été une corvée de plus à laquelle il aurait dû se plier parce qu'il était Regulus Arcturus Black et que c'était ce que l'on attendait de lui.
Raphaël emmêla ses doigts au sien, embrassa sa paume, le ramenant dans le moment présent avec douceur.
- «Bon, bien sûr, je n'ai pas pu rester aussi longtemps que ce que j'aurais aimé, surtout que Fleur était occupé avec son Roger, mais j'ai quand même réussi à passer une bonne soirée!»
Raphaël se tendit et ce fut à son tour de le rassurer en le serrant un peu plus contre lui.
Les élèves de la délégation de Beauxbâtons ne reviendraient pas en France avant les vacances de printemps, ce qui signifiait qu'Alexis allait encore passer trois mois sans avoir la moindre opportunité de reposer son empathie quand son pouvoir était plus sollicité que jamais entre Poudlard et les événements liés au Tournoi. Il n'était pas sans savoir que deux crises de migraines intenses avaient mené le jeune homme à l'infirmerie et qu'il était désormais obligé de prendre du Filtre de Paix plusieurs fois par semaine.
Puisque les exacts mêmes symptômes avaient poussé Raphaël à se droguer pour supporter son don, il savait aussi que son mari était inquiet que la même chose arrive à son fils.
- Il se plaint de plus en plus de son empathie...
- Ce n'est qu'une impression, Raphaël. Il nous le dirait s'il commençait à perdre le contrôle et on sait tous les deux que Fleur veille sur lui.
- Il est raisonnable, darling, ajouta-t-il doucement.
Raphaël hocha la tête, sans pour autant se détendre complètement. Alexis allait recevoir une lettre de son père à ce sujet.
- Je continue: «Puisque je sais que Regulus va aussi lire cette lettre, une question pour lui: est-ce que c'est vraiment vrai que les héritiers Sang-Purs se fiancent dès leurs quatorze ans? Parce qu'apparemment, le fait qu'Alya Lestrange soit habillée en blanc alors qu'elle était accompagnée par un certain Nott, c'était comme s'ils avaient officialisé leurs fiançailles. J'ai trouvé ça un peu exagéré, surtout que je crois qu'Alya a treize ans, mais ma cavalière avait l'air assez sûre d'elle. Paraîtrait même que la rumeur de leur fiançailles court depuis l'année dernière ou un truc du genre.» Regulus, dis-moi que c'est une blague!
Il serra brièvement les paupières. Sa petite cousine avait décidément attiré l'attention d'Alexis car il la mentionnait presque à chaque fois. D'après lui, ses émotions étaient presque aussi fortes que les siennes et elle était constamment en colère – ce qui ne l'avait pas surpris étant donné le caractère de Bellatrix –.
- Non. Alya Lestrange doit être l'une des héritières les plus en vue du pays et la tradition veut effectivement qu'elle puisse être courtisée à partir de ses quatorze ans.
En règle générale, les familles attendaient quand même que leurs enfants en aient au moins seize pour commencer à conclure des alliances. Toutefois, on parlait d'Archibald Nott. S'il avait décidé que son fils épouserait Alya Lestrange, cela lui ressemblait beaucoup de prendre les devants. Ce qui était plus surprenant, en revanche, c'était que Narcissa ait accepté de marier sa filleule aussi jeune.
- Par Adèle, elle n'a que deux ans de plus que Sophie!
- Elle est l'héritière Lestrange avant d'être une enfant.
D'après Alexis, des fiançailles n'étaient même pas le plus gros problème d'Alya, puisque deux de ses cousins faisaient partie de la délégation de Durmstrang et qu'ils semblaient décidés à lui nuire. Alexis étant le fils de Raphaël et le petit-fils de Simone, il n'avait pas hésité à user de son empathie pour les décourager, mais cela ne signifiait pas qu'ils ne tenteraient pas autre chose. Elle ne serait pas la première à être victime d'un complot sur fond de querelles familiales.
- Plus Alexis nous parle d'elle, plus je comprends pourquoi tu t'es fait passer pour mort, Regulus.
Il eut un sourire dur. Raphaël serra sa main doucement.
- Enfin bref. «Je lui ai fait coucou le soir du bal et elle m'a répondu par un regard assassin, donc je crois qu'elle m'aime bien.»
Cette fois, il leva les yeux au ciel et Raphaël ricana à nouveau. Alexis était vraiment le fils de son père.
- «On a aussi fêté la nouvelle année dans le carrosse. Madame Maxime nous a laissé quartiers libres jusqu'à deux heures du matin et je suis presque sûr qu'elle a passé la soirée avec le garde-chasse. Il est très amoureux d'elle et il fait n'importe quoi dès qu'il la voit, c'est assez drôle. Je crois que je n'ai rien oublié. Un joyeux anniversaire à Regulus un peu en retard (j'espère que Papa lui a bien donné mon cadeau) et une bonne année au reste de la famille (il est hors de question que j'écrive à tout le monde). Vous me manquez quand même beaucoup. Bisous. Alex.»
Une autre fois, il aurait pu se moquer du silence étrange de l'autre côté du combiné ou du reniflement humide de Raphaël, mais sa gorge se serra aussi, alors il préféra embrasser la joue de son mari avec douceur.
Ils savaient tous les trois qu'Alexis était très content d'être à Poudlard, et pas seulement parce qu'il s'était mis en tête de trouver le plus de passages secrets possibles ou parce qu'il avait pu voir des dragons en vrai lors de la première tâche. Il se confrontait à d'autres façons de penser entre la culture de l'internat à Poudlard et la rigueur militaire des élèves de Durmstrang. Il vivait une aventure.
Il leur manquait quand même beaucoup aussi.
Raphaël finit par se racler la gorge.
- Encore trois mois, c'est ça?
- Cent jours tout pile d'après Sophie.
Raphaël laissa échapper un long soupir.
- Vous croyez qu'on a la moindre chance de le convaincre de ne pas repartir?
- Peut-être si Gabrielle, Sophie et Clélia se liguent contre lui. Et que tu utilises ton empathie. Il faudra sans doute que tu pleures un peu, Regulus.
Il rit doucement, ce que Lucie et Raphaël imitèrent.
- Allez, je vais vous laisser parce que ma très chère fille cadette réclame son chocolat chaud. Profitez bien de vos vacances, les amoureux. Et n'oubliez pas de nous ramener des cadeaux.
- Je vais finir par croire que tu restes amie avec moi seulement pour les souvenirs de voyage.
- Ne sois pas ridicule, Raphaël. Je ne suis pas amie avec toi, mais avec Regulus.
Cette fois, ce fut à son tour de ricaner un peu bêtement et à Raphaël de lever les yeux au ciel.
- Je te promets que je vais te ramener quelque chose que tu vas vraiment détester, Lucie.
- C'est ça. Je vous embrasse.
Il y eut le bip caractéristique qui marquait la fin de la communication. Raphaël raccrocha à son tour, puis pivota pour lui faire face. Il fronça les sourcils, puis caressa sa joue blessée.
- Tu n'as presque plus rien.
Ce n'était pas plus mal, parce qu'il ne voulait pas repenser à ces deux moldus à chaque fois qu'il se regarderait dans le miroir.
Il ne voulait plus repenser à ces deux moldus tout court.
A la façon dont Raphaël plissa les yeux, il ne put que se crisper, certain qu'il était bon pour une nouvelle discussion à ce sujet.
Son mari lui sourit doucement.
- Que dirais-tu d'un dîner du côté sorcier suivi d'un bain de minuit?
- Excellente idée.
Il n'était pas stupide, ce n'était que partie remise, mais pour ce soir, il voulait suivre le conseil de Lucie et profiter du fait qu'ils étaient dans l'un des endroits les plus paradisiaques au monde.
Juste Raphaël et lui.
…
AH HA! Vous pensiez pas qu'on retrouverait Burt et Grant par ici, hein?! (Moi non plus, promis j'avais rien prémédité, contrairement à ce que pourraient dire les mauvaises langues! xD)
Curieuse de lire vos hypothèses et vos retours, en particulier sur:
- Regulus, qui est obligé de garder un œil sur le Royaume-Uni puisque Alexis se trouve en Ecosse.
- Ce même Alexis qui vit sa meilleure vie à Poudlard ! (Vous ai-je dit récemment à quel point j'adorais ce garçon?)
- Le retour tant attendu (bien qu'éphémère) de Burt White et Grant Adler (le monde est si petit!) (J'en connais un qui pairais très cher pour avoir cette info!)
- Regulus face à sa culpabilité.
- Raphaël, toujours là pour soigner le corps et le cœur de son chéri.
La prochaine MàJ sera pour Supernova (quand, me direz-vous? Peut-être pour les prochaines vacances, si les étoiles s'alignent!)
Avis à celleux qui ont un compte, il faut désormais cocher un truc pour recevoir les alerts et le reste… Pensez bien à le faire si vous ne voulez pas passer à côté du prochain chapitre (ici ou chez les collègues).
Je suis toujours sous le même pseudo du côté d'AO3! (et pour info, aussi, vous retrouverez trois textes inédits là-bas, c'est le moment de vous créer un compte sur ce merveilleux site!).
Ah, et je reposte Black Sunset hebdomadairement là-bas, si jamais l'envier de relire le début de l'histoire vous intéresse!
A bientôt!
Orlane.
On n'oublie pas de laisser une review avant de fermer la page! Sans déconner, ça prend deux minutes!
Mis en ligne le 02/03/2024
