Candice arriva au volant de sa Suzuki bleue toute neuve et se gara à proximité d'un cinéma d'art et d'essai. Elle ne regrettait absolument pas le choix de sa nouvelle voiture. Si elle avait pu, elle l'aurait bien prise rose, un joli rose poudré. Mais bon, niveau crédibilité c'était pas terrible. Déjà qu'elle détonnait pas mal dans la police avec ses robes roses et ses talons, pas besoin d'en rajouter …

Nouvelle maison et nouvelle voiture, décidément, autant de nouveauté ne lui ressemblait pas. Mais qu'est-ce que c'était agréable, zéro regret ! Et avec l'arrivée d'Antoine chez elle, elle était servie en ce moment ! Elle pensa quelques instants à son adjoint, qui normalement devrait être là, assit sur le siège passager avec elle. Ils se chamailleraient sûrement, lui, lui reprochant sa conduite sportive et elle ronchonnant face à la circulation dense d'un samedi soir sur Sète. Mais là, elle était toute seule et elle espérait que ses enfants ne mèneraient pas la vie trop dure à Antoine en son absence. Encore dans ses pensées, elle sortit de sa voiture.

Pendant ce temps à la maison, Antoine s'était bien reposé. Bon, au début, il avait eu du mal à trouver le sommeil dans sa nouvelle chambre. En effet, ici, TOUT lui rappelait Candice. Il était gêné d'être sur son lit, au milieu de ses affaires et fixé par cette photo d'elle et ses enfants sur le bureau. Alors, plutôt que de tourner en rond dans « son lit », il avait fait le tour de la chambre, admirant ici et là une photo, un collier ou bien une robe lilas. Il ne s'était bien sûr pas aventuré plus loin, ne voulant pas violer l'intimité de Candice. Elle devait lui faire suffisamment confiance pour avoir laissé ici toutes ses affaires, mêmes les plus intimes comme ses bijoux ou ses albums photos. Soudain, la fatigue devint plus forte que la gêne et Antoine avait sombré dans un profond sommeil. Il n'avait d'ailleurs pas aussi bien dormi depuis un moment ! Depuis… que Candice s'était invitée chez lui suite à sa défonce au cannabis. Rien qu'en y repensant, il avait le sourire aux lèvres. Il n'avait pas pu s'empêcher de lui faire croire que quelque chose s'était passé entre eux, elle qui avait l'air si catastrophé. Enroulée nue dans son drap, elle avait été si belle, si sensuelle sur sa terrasse. Il en avait eu le souffle coupé. Il avait donc fait preuve d'humour pour détendre la situation et arrêter de la regarder bouche bée. Même si cela n'avait pas été facile, Candice étant assez câline quand elle était défoncée, il s'était comporté en parfait gentleman et avait dormi sur le canapé. C'est là, après l'avoir observée un long moment dormir dans son lit, une couronne de cheveux blonds sur son oreiller, qu'il s'était rendu compte de ses sentiments pour elle. Sentiments qui dormaient en lui depuis un moment sûrement mais qui venaient d'éclore à ce moment-là. C'est en repensant à ce moment qu'il sorti de la chambre de Candice, prêt à retrouver la petite famille.

Candice de son côté, avait retrouvé Christelle et Aline sur les lieux du crime. C'était une vieille salle de cinéma, de petite taille, aux sièges défoncés. On devinait ici, les milliers de séances diffusées et les nombreuses personnes assises en ces murs. Elle adorait ces lieux, chargés d'une émotion certaine, ayant une âme. Même si elle n'était pas très cinéphile, elle se sentait bien ici. Enfin, elle se serait sentie mieux si un cadavre n'était pas assis quelques sièges plus bas…

« Salut les filles, qu'est-ce qu'on a ? les apostropha Candice.

- Salut Candice, répondit Christelle. Comment va Antoine ?

- Oh, à l'heure qu'il est, il doit être en train de se faire assaillir de questions par les jumeaux qui le vénèrent depuis ses conseils précieux aux jeux video, répondit Candice en regardant sa montre.

- Oh, un qui ne va pas s'ennuyer chez les Renoir ! répondit avec amusement la légiste. Bon sinon, moins drôle, l'ouvreur du cinéma nous a appelé cet après-midi après avoir trouvé le corps. Il ouvrait pour la séance de 15h30 lorsqu'il a vu le corps.

- Je te présente Sacha Tregan, 38 ans, directrice de casting. Elle avait toutes ses affaires sur elle, papiers, sac à main et portable. Donc pas compliqué de déterminer son identité, annonça Christelle en n'osant pas regarder le corps.

- Ok, ok … répondit Candice, qui au contraire avait les yeux rivés sur cette pauvre femme. Aline on connaît les causes de la mort ? C'est à cause de ses yeux ?

- Non, non, cela a eu lieu post mortem et pas ici. Sinon, il y aurait plus de sang autour d'elle. Elle a été étranglée avec une fine corde, expliqua Aline en dévoilant les traces autour du cou de la victime.

- L'étrangler ok mais lui crever les yeux pourquoi ? C'est quand même archi glauque comme geste ! Il y a de ces tarés en ville quand même… se lamenta la lieutenante.

- Et oui … et notre rôle à nous, c'est d'arrêter le salopard qui a fait ça ! Bon Aline, appelle moi quand tu en sais plus et Cristelle, trouve moi ses proches. On ira les voir. En attendant je vais discuter un peu avec l'ouvreur.

- Ok cheffe ! répondirent à l'unisson Alice et Christelle un léger sourire aux lèvres »

En arrivant dans le salon, Antoine découvrit le mot de Candice. Mot qui le fit légèrement flipper… Candice appelée sur les lieux d'un crime, il allait se retrouver tout seul avec 4 enfants. 4 enfants pleins de vie, aussi espiègles et bavards que leur mère. Il avait l'habitude d'une Renoir, pas de 5 ! Inspirant un grand coup, il se dirigea vers l'escalier et appela les enfants.

« Les enfants ! Vous pouvez descendre quelques minutes s'il vous plait ! héla Antoine.

- Qu'est-ce qu'il y a ? Je regarde un épisode de Masterchef, répondit Jules.

- Et moi, je suis au téléphone avec Sarah, ajouta Emma.

- Ca ne prendra pas longtemps promis, annonça Antoine »

4 enfants avec une tête de 3 pieds de long, visiblement coupés dans leurs activités, vinrent se planter devant lui. Ils le regardaient avec insistance, attendant ce qu'il allait leur dire.

« Votre mère a été appelée au boulot, nous sommes tous les 5 ce soir. Je ne connais pas encore bien la maison pour m'aventurer en cuisine et surtout, je ne veux pas vous rendre malade dès le premier soir. Je n'ai pas les talents culinaires de Jules… Alors si on commandait des pizzas ?

- Oui, oui, on sait, maman m'a passé un coup de fil dans la voiture. Et on voulait pas te réveiller pour te dire de commander des pizzas, répondit Emma. Alors, j'ai commandé 6 pizzas. Je ne connaissais pas tes goûts, alors je t'ai pris une reine, classique. Elles devraient arriver dans 15 minutes.

- Oh parfait ! Merci beaucoup Emma, tu gères ! répondit avec soulagement Antoine. Les jumeaux, vous m'aider à mettre la table ? Je ne sais pas où tout se trouve …

- Ok mais après, en attendant les pizzas, on fait une partie de Fifa !

- Deal ! approuva Antoine.

- On a pris une pizza pour maman, on lui laissera au frigo, dit Jules »

De son côté, Candice était en pleine discussion avec l'ouvreur du cinéma qui devait être aussi vieux que le cinéma lui-même. L'homme était d'une pâleur extrême et se tenait la tête entre les mains, répétant encore et toujours la même phrase « Mais c'est pas possible ! En 35 ans, ça n'est jamais arrivé ! C'est vraiment horrible ! »

« Calmez-vous … Bernard, lu Candice sur son badge. Je sais que la situation est peu commode mais j'ai besoin de vous !

- Si j'étais arrivé à l'heure habituelle, j'aurais pu arrêter le meurtrier !

- Si vous aviez surpris le tueur, vous seriez sûrement dans le même état que cette pauvre femme ! Où étiez-vous ? Pourquoi étiez-vous en retard ?

- Mère ne se sent pas bien en ce moment, alors je suis passé à la pharmacie lui prendre ses médicaments et lui apporter chez nous.

- Vous vivez ensemble ? ne put s'empêcher de demander Candice.

- Oui, je ne suis jamais parti de la maison. Et à la mort de mon père, cela lui faisait une compagnie…

- Ok très bien. Revenons à notre meurtre. Vous arrivez à quelle heure habituellement ? Et là, c'était quelle heure aujourd'hui ?

- Normalement, j'arrive à 13h pour procéder aux derniers réglages et préparer les confiseries. Aujourd'hui, c'était 14h30.

- Qui était au courant de votre retard ?

- Pascal, le gérant de la salle, je pense que c'est tout.

- Ok ok… Ce sera tout pour le moment. Je vous demande de rester à disposition de la police et malheureusement, le cinéma sera mis sous scellés.

- Je comprends… J'aurais plus de temps pour m'occuper de Mère comme ça »

Candice rejoignit Christelle dans le hall du cinéma. La jeune femme avait trouvé que la victime était mariée et qu'elle vivait avec sa femme sur les hauteurs de la ville. Candice lui relata de son côté sa conversation avec l'ouvreur. Elles ne pourraient rien faire de plus ce soir et Candice proposa à Christelle de se rendre demain matin à la première heure chez la famille de la victime.

Regagnant sa voiture, la commandante pris le chemin de sa maison. Il était tard, elle ne savait pas s'il y aurait âme qui vive chez elle… Mais en avançant vers la porte, Candice vit que le salon était allumé. Antoine était assis sur le canapé, plongé dans un roman. Candice ne put s'empêcher de le dévorer des yeux quelques instants.