Encore chamboulé par sa conversation avec Chrystelle, Antoine avait envoyé un message à JB pour savoir si ce dernier souhaitait venir déjeuner avec lui. Il avait à lui parler. Candice fuyant la maison comme la peste et les enfants à l'école, ils seraient tranquilles pour discuter. Sur les coups de midi, son meilleur ami arriva à la maison, une bouteille de coca et un paquet de bonbons à la main.

« Tu viens pour une soirée pyjama ? demanda Antoine surpris.

- Bah oui, je m'attendais à te voir en petite nuisette sexy ! C'est plus ce que c'étaient les soirées pyj'… ricana JB

- T'es con… sourit Antoine.

- Non drôle, nuance ! Je suis d'astreinte aujourd'hui et toi, tu es toujours sous traitement… Alors pas de bières… Donc coca !

- Et les bonbons ? l'interrogea Antoine en riant.

- On m'a dit que quelqu'un ici n'avait pas la forme. Rien de mieux qu'un ami et du sucre pour retrouver le moral ! répliqua JB, satisfait de son effet.

- Ha non ! Pas question ! J'ai pris du gras à force de rester cloîtrer dans cette maison… Alors, tes bonbons, tu te les garde ! riposta Antoine.

- On verra ! Tu me fais entrer, ou on déjeune sur le pas de la porte ?

- Oui entre ! J'ai commandé des pizzas ça te va ?

- Parfait mec. On se met sur la terrasse ?

- Oui, je te suis. J'apporte les couverts et les verres. »

L'arrivée de JB fit du bien à Antoine, les bêtises de son ami l'avaient fait sourire. Un vrai sourire. Pas un sourire de façade dont il usait ces derniers jours devant les enfants. Bah oui, pourquoi sourirait-il ? Pour qui ? La situation actuelle n'était pas des plus joyeuses…

« Elle n'est pas là Candice aujourd'hui ? Les enfants ? demanda JB en tirant une chaise de la terrasse et en s'asseyant.

- Non, il n'y a que toi et moi. Les enfants sont à l'école toute la journée, et Candice… Candice elle est partout sauf ici… Elle fuit sa propre maison, à cause de moi… répondit Antoine, penaud, en baissant le regard.

- Raconte.

- J'ai fait le con, vraiment. J'avais envie de provoquer le destin. Depuis que je vis ici, mes sentiments pour Candice n'ont fait que grandir…

- Ah ! Depuis le temps que je le dis ! l'interrompit JB, fier de lui.

- Tu veux que je continue oui ou non ?

- Vas-y, j'ai hâte de tout savoir !

- Donc, je me suis rendu compte ces derniers temps que je ressentais plus que de l'amitié pour elle. Bien sûr, ça fait un moment que j'ai réalisé qu'elle me plaisait. Qu'elle m'attirait. Mais là, à force de vivre avec elle, de la voir tous les jours, de partager son quotidien, … je me suis aperçu que c'était plus qu'une simple attirance.

- Mec, t'as 3 trains de retard là… mais vas-y continue !

- Bah tu me connais… Les sentiments et moi… Depuis Victoire, je voulais plus des histoires de cul que d'amour… Je ne ressentais plus rien, je ne voulais plus rien ressentir. Pour ne plus souffrir. Et ça m'allait très bien !

- Jusqu'à ce qu'une petite tornade rose arrive ! sourit JB. N'empêche, elle t'aura vraiment fait morfler cette Victoire… On t'a récupéré à la petite cuillère Chrystelle et moi.

- Ouais, j'en ai bavé… Mais bon, c'était voué à l'échec de toute façon. Je ne voyais pas qu'elle voulait tout contrôler dans ma vie, qu'on devienne un joli petit couple bon chic bon genre. Qu'on aille manger tous les dimanches chez mes parents et qu'on achète une belle et grande maison à la campagne. Et moi, comme un con, je disais amen à tout. J'ai même renoué avec ma famille. Et tu sais quoi ? J'aurais même quitté la police. Pour elle, flic, ce n'était pas un métier assez bien, assez classe. Elle voulait que je reprenne le droit pour devenir avocat. Avocat, c'était prestigieux ça.

- Mec t'es sérieux ? Tu es un super flic, tu as ce boulot dans la peau ! M'en veux pas, mais je ne te vois pas du tout en avocat ! Tu aurais envoyé bouler tes clients à la moindre remarque de travers.

- C'est clair ! Rien que d'aller témoigner au tribunal me donne des boutons, alors y bosser … Mais, par amour, je l'aurais fait… On est con quand on est amoureux.

- A qui le dis-tu ! sourit JB, opinant du chef. Alors, avec Candice ?

- Donc, petit à petit, je me suis aperçu que j'éprouvais de réels sentiments pour Candice. Que j'appréciais cette vie à ses côtés, avec les enfants. Pour la première fois de ma vie, je me sentais bien, à ma place. Et tout ça, grâce à elle. Au début, je craignais la présence des enfants, mais ils m'ont un tel accueil, que je n'imagine plus ma vie sans eux.

- Oui, en fait tu prends le package Renoir quoi ! Pour un mec qui a été odieux avec la mère durant un an et qui fuyait ses gosses comme la peste, tu as bien changé. Je me rappelle encore de ta tête quand les enfants venaient à la BSU voir leur mère. On aurait dit que tu avais mangé un truc avarié, vu ton expression !

- Comme quoi, y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis …

- Et donc ? Tu as enfin réalisé que tu l'aimais, il est où le problème ?

- Bah, j'ai merdé JB, sacrément merdé…

- Mais encore ?

- J'ai essayé de faire comprendre à Candice que j'avais des sentiments pour elle. Je lui ai tendu plusieurs perches mais elle a toujours fait l'autruche. Et y a sa copine, Chloé, qui m'a convaincu de faire quelque chose, d'agir, pour que les choses avancent enfin. Et… j'ai voulu tester, savoir si elle ressentait vraiment quelque chose pour moi. En avoir le cœur net quoi. Alors, j'ai essayé de la rendre jalouse avec mon infermière.

- Mec, excuse-moi, rigola JB. Mais on est à fond dans le cliché là ! L'infermière et puis la technique digne d'un magazine féminin, c'est le summum du cliché !

- Oui, ben, il fallait agir ! J'ai trouvé que ça sur le moment.

- Et lui avouer tes sentiments ? Comme ça tout simplement, t'y as pensé ?

- Trop risqué… Candice aurait de nouveau fait l'autruche j'en suis sûr. Et puis, c'était dur de trouver les bons mots.

- Alors, tu as préféré roucouler devant elle avec une autre femme.

- Oui. J'étais à fond dans mon rôle jusqu'à ce que Chloé mette le holà et me recadre. Elle m'a dit que j'agissais comme un con et que je faisais souffrir Candice. Donc j'ai arrêté mes conneries. J'ai essayé de parler à Candice et je me suis excusé auprès d'Emilie. Elle a plutôt bien pris le truc mais Candice, elle, elle me fuit depuis. C'est simple, elle part aux aurores le matin et rentre tard le soir. Juste pour ne pas me croiser.

- Super l'ambiance !

- Oui… Si tu savais comme je me sens mal JB. J'ai encore en mémoire le regard qu'elle m'a jeté après le départ d'Emilie. Comme si je lui avais planté un poignard, un regard rempli de tristesse.

- Mec, tu as foiré sur ce coup-là, c'est clair ! Mais tout n'est pas uniquement de ta faute. Tu n'aurais pas du utiliser Emilie pour la rendre jalouse. Mais avec Candice, c'est difficile de savoir sur quel pied danser. Un jour, c'est blanc, un jour, c'est noir. Elle avance puis recule. Elle n'est pas aveugle, elle a bien dû voir que tu tentais des trucs.

- Oui peut être …

- Vous êtes deux dans cette situation. Deux idiots qui jouent aux gamins pour ne pas réellement s'avouer leurs sentiments. Alors, maintenant, tu as le choix entre deux possibilités : soit tu laisses la situation pourrir et tu perdras tout ce que vous avez construit, soit tu prends ton courage à deux mains et tu vas lui parler.

- Mais, elle me fuit je te rappelle ! Impossible de la voir.

- Et ben, vas où tu sais que tu la trouveras à coup sûr ! A la BSU ! Si elle y passe tout son temps, tu la verras là-bas.

- Non, non, je ne vais pas aller la déranger…

- Antoine, c'est le moment ou jamais. Crois-moi. Allez, je t'emmène !

- Ok… »


Candice était assise à son bureau, le nez dans les listes des élèves de l'école de théâtre. Chrystelle avait été à la pêche aux infos et, elle avait été plutôt bonne. Elle rentrait les noms dans les fichiers de la police pour voir si les élèves avaient un casier. Elle attendait le retour de Chrystelle d'une minute à l'autre. Chloé l'avait envoyée chercher les dossiers de la première victime chez elle. Elle avait l'intuition qu'un nom ressortirait des deux listes. En attendant, Candice suivait toutes les pistes, essayait toutes les méthodes. Tout était bon à prendre dans cette enquête.

On frappa à la porte.

« Entre Chrystelle ! cria Candice de son bureau.

Mais ce n'était pas Chrystelle qui franchit la porte.

- Antoine ? Qu'est-ce que tu fais là ? Il y a un problème ? Les enfants ? s'écria Candice paniquée.

- Non, non, tout va bien. Ils sont à l'école. Mais il fallait que je te parle.

- J'ai du boulot Antoine, on verra ça ce soir si tu veux bien.

- Non. Pour que tu te défiles encore une fois ? Non.

- Mais qu'est-ce qu'il y a Antoine ? Tu me fais peur !

- Candice, j'ai bien réfléchi. Je vais partir, je ne peux plus rester chez toi »