Heya ! Nouveau chapitre !

On entre enfin dans le vif du sujet avec les premiers cours à Poudlard, et croyez-moi qu'Emerald a des avis bien arrêtés !

Grand merci à flavien, sebferga et Cookie-Eat pour le follow-fav !

Sur ce, je vous souhaite une bonne lecture~!


Quand Emerald ouvrit les yeux le jour de la rentrée, elle mit un instant à se rappeler où elle se trouvait. Le dortoir lui était trop peu familier pour le moment, sans compter qu'elle n'avait jamais eu le luxe d'un lit à baldaquin pour avoir de l'intimité. Ceux de l'orphelinat n'étaient pas inconfortables, mais allez dormir correctement avec cinq paires d'yeux qui vous scrutent.

La demoiselle se redressa et ouvrit les rideaux de son lit avant de se figer. L'immense fenêtre qui se trouvait juste à côté d'elle lui montrait un paysage aquatique, des algues et plantes marines se balançaient paresseusement au gré du courant et de temps à autre, des créatures étranges passaient devant la vitre sans jamais y prêter attention. Les quartiers des Serpentard se situaient sous le lac noir.

Emerald eut les yeux brillants alors qu'elle s'approchait de la fenêtre en silence pour ne pas réveiller les autres.

- Fascinant… murmura-t-elle.


Il y avait cent quarante-deux escaliers, à Poudlard, des larges, des étroits, des courbes, des carrés, des délabrés, certains avec une ou deux marches piégées qu'il fallait se souvenir d'enjamber pour ne pas tomber. Il y avait aussi les portes qui refusaient de s'ouvrir si on ne le leur demandait pas poliment, ou si on ne les chatouillait pas au bon endroit, et d'autres qui n'étaient que des pans de mur déguisés en portes. Il était aussi très difficile de se souvenir où les choses se trouvaient car tout bougeait sans cesse. Emerald faisait de son mieux pour les mémoriser, mais l'exercice s'avérait difficile et en moins d'une semaine elle s'était déjà trompé de chemin trois fois. Les gens représentés sur les tableaux accrochés aux murs ne pouvaient pas constituer de repère fiable, car ils passaient leur temps à se rendre visite les uns aux autres et la fillette préférait ne pas penser à la possibilité que les armures se promenaient parfois dans les couloirs.

Quant aux fantômes, ils ne facilitaient pas la tâche. Même sans compter le questionnement existentiel qui frappait Emerald à chaque fois qu'elle en voyait un, c'était toujours désagréable lorsque l'un d'eux traversait une porte au moment où on essayait de l'ouvrir. Avant de découvrir Poudlard, si on lui avait demandé si elle en avait peur, la fillette aurait répondu sans hésiter qu'ils n'existaient pas. Maintenant… Elle prenait le temps d'y réfléchir. Ce n'était pas qu'ils l'effrayaient, mais elle ne pouvait pas nier le malaise qu'elle ressentait à chaque fois qu'elle en croisait.

Peeves, l'esprit frappeur, était sans doute le pire de tous. Il bombardait les nouveaux de morceaux de craie, tirait les tapis sous leurs pieds, renversait des corbeilles à papier sur leur tête ou se glissait silencieusement derrière eux et leur attrapait le nez en hurlant: « JE T'AI EU ! » d'une voix perçante. Dès son deuxième jour de cours, le Baron Sanglant, le fantôme de la maison Serpentard, était venu à sa rescousse quand Peeves avait essayé de la fourrer dans un sac de tarentules.

Emerald se demandait sérieusement comment était le monde sorcier en dehors de l'école. Si ce château plein de pièges et de poltergeist dérangés, avec son couloir et sa forêt interdits car dangereux, était vraiment l'endroit le plus sûr qui existe, il y avait de quoi se poser des questions.


Une fois les dangers esquivés et la salle de classe trouvée et atteinte, il fallait suivre les cours, et la fillette découvrit très vite que l'exercice de la magie était plus difficile que ce qu'on pourrait penser en voyant faire les professeurs. Rien d'insurmontable, bien sûr, mais elle ne pouvait pas nier qu'elle aimait pouvoir faire travailler son cerveau pour la première fois depuis longtemps. Son père aurait sans doute été offensé s'il l'avait entendue, mais elle ne pouvait pas nier que c'était tout aussi fascinant que ce qu'il lui avait enseigné.

Chaque mardi soir, elle observait le ciel au télescope et apprenait les noms des étoiles ainsi que le mouvement des planètes. Trois fois par semaine, elle étudiait les plantes dans les serres situées à l'arrière du château, sous la direction du professeur Chourave. Les cours les plus ennuyeux étaient ceux d'histoire de la magie qui était enseignée par le seul professeur fantôme du collège. Lors de ces cours, entre deux noms et deux dates à griffonner, Emerald essayait de réfléchir à une théorie expliquant l'existence même de ces esprits éthérés, ou la raison pour laquelle ils se promenaient encore dans le château. Ou elle prenait de l'avance sur ses devoirs.

Flitwick, le professeur d'enchantements, était un minuscule sorcier à moitié gobelin qui devait monter sur une pile de livres pour voir par-dessus son bureau. Le professeur McGonagall était aussi stricte qu'elle le laissait penser, intelligente et leur parla très directement dès le début du premier cours.

- La métamorphose est une des formes de magie les plus dangereuses et les plus complexes que vous aurez à étudier, avait-elle dit. Quiconque fera du chahut pendant mes cours sera immédiatement renvoyé avec interdiction de revenir. Vous êtes prévenus.

Elle avait alors changé son bureau en cochon puis lui avait redonné sa forme d'origine. La démonstration était impressionnante et Emerald s'en trouvait très intéressée, mais bien entendu elle n'était pas prête d'en faire autant.

Après avoir suivi des explications très compliquées, ils avaient commencé à s'exercer en essayant de changer une allumette en aiguille, mais il avait fallu faire répéter ses instructions au professeur, et ce ne fut qu'à la fin du cours qu'elle eut des résultats, devancée de quelques minutes par Malefoy. Le professeur McGonagall avait montré à toute la classe l'allumette qui avait pris une couleur argentée et dont l'extrémité était devenue pointue et les avait félicité tous les deux.

Sa plus grande déception sur les cours, cependant, c'était celui de la défense contre les forces du Mal. L'enseignement de Quirrell tournait plutôt à la farce. La salle de classe était imprégnée d'une forte odeur d'ail destiné à éloigner un vampire que le professeur avait rencontré en Roumanie et qu'il craignait de voir arriver un jour à Poudlard. Emerald s'était rapidement construit un avis sur le professeur paranoïaque. Il avait sans doute des compétences, mais ne semblait pas très enclin à partager ses expériences personnelles, il se contentait de leur demander de le croire sur parole. Pour la fillette c'était à peu près aussi agaçant que son éternel bégaiement. Il s'était vexé lorsqu'elle lui avait conseillé de parler un peu plus lentement pour essayer d'alléger un peu son fardeau.


Emerald avait pu constater que bien des Serpentards semblaient ne jamais avoir lancé de sort auparavant et se sentait satisfaite de ne pas avoir le moindre retard sur son année comme elle aurait pu le penser. Au contraire, il semblerait qu'elle n'ait pas trop de difficultés à se hisser au sommet, bien que la plupart du temps, le jeune Malefoy parvienne à la dépasser, finissant les exercices demandés avec quelques minutes d'avance sur elle, ou répondant à une question dont elle ne connaissait pas encore la réponse. Cela ne l'empêchait pas de travailler jusqu'à épuisement pour que ses devoirs soient au plus proche possible de la perfection. Pour le moment il n'y en avait pas tant, après tout la première semaine de cours n'était pas encore terminée, mais elle ne doutait pas que ça changerait à mesure que l'année scolaire avancerait.

Le vendredi matin arriva et la demoiselle s'en trouva soulagée, se disant que le week-end qui était en vue lui laisserait le temps de finir les devoirs qu'elle n'avait pas encore terminé. Bien qu'étudier avec son père eut été difficile, elle n'avait jamais été aussi fatiguée mais là encore, avec lui il n'y avait pas autant de matières différentes.

Assise à l'extrémité de la table des Serpentards dans la Grande Salle, elle vérifiait son emploi du temps tout en mangeant son petit déjeuner. Cours commun de potions avec les Gryffondors. Vu les quelques conversations concernant la maison des lions qu'elle avait pu entendre dans la Salle Commune, cela promettait. Pour une raison obscure les Serpentards et Gryffondors semblaient se haïr inconditionnellement. Emerald poussa un soupir silencieux et vida son verre de jus d'orange avant de se lever pour sortir de la Grande Salle, direction les cachots. Après avoir demandé la direction à un Serpentard de quelques années plus vieux, elle arriva devant la classe et attendit à côté de la porte.

Selon elle, le cours de potion était sans doute le plus prometteur, elle espérait que ce ne serait pas le même fiasco qu'avec Quirell. C'était la matière la plus proche de sa vocation, après tout, et elle mourrait d'envie d'apprendre à concocter des potions et même utiliser les ingrédients individuels pour faire ses propres créations qui aideraient dans son travail. Quand la cloche sonna et que les autres élèves arrivèrent, elle contenait difficilement son impatience, bien qu'elle ne le montrait pas. Rogue sortit de la classe et leur dit d'entrer en silence, ce qu'ils firent tous, ne voulant pas prendre le risque de se mettre l'intimidant professeur à dos.

Tout en s'installant à une table pour sortir ses affaires, Emerald regarda autour d'elle. Les lieux étaient juste assez éclairés pour voir ce qu'ils faisaient, mais il y avait une atmosphère sombre, des animaux flottaient dans des flacons de formol entreposés sur des étagères le long des murs. Et pour la deuxième fois concernant le professeur de potion, la fillette se dit que son père l'aurait jugé digne de respect.

Le concerné prit la liste des élèves pour commencer à faire l'appel, mais fit une courte pause, regardant les visages dans la salle avant de s'arrêter sur l'un des Gryffondors.

- Ah oui, dit-il avec l'ombre d'un sourire narquois. Harry Potter. Notre nouvelle… célébrité.

Alors que Malefoy et ses larbins se mirent à ricaner, Emerald haussa un sourcil, un peu surprise du comportement du professeur. Celui-ci finit de faire l'appel et se pencha sur son bureau, se mettant à parler d'une voix basse que seul le silence qui régnait dans la classe leur permettait d'entendre.

- Vous êtes ici pour apprendre la science subtile et l'art rigoureux de la préparation des potions, dit-il. Ici, on ne s'amuse pas à agiter des baguettes magiques, je m'attends donc à ce que vous ne compreniez pas grand-chose à la beauté d'un chaudron qui bouillonne doucement en laissant échapper des volutes scintillantes, ni à la délicatesse d'un liquide qui s'insinue dans les veines d'un homme pour ensorceler peu à peu son esprit et lui emprisonner les sens...

Si quelqu'un avait jeté un œil vers Emerald, ils auraient vu ses yeux scintiller devant les paroles de Rogue. Elle avait plus que hâte de commencer.

- Je pourrais vous apprendre à mettre la gloire en bouteille, à distiller la grandeur, et même à enfermer la mort dans un flacon si vous étiez autre chose qu'une de ces bandes de cornichons à qui je dispense habituellement mes cours.

Et le début de sourire qui s'affichait sur le visage de la fillette mourut instantanément. Elle allait lui donner des raisons de regretter de l'avoir qualifiée ainsi, qu'il attende un peu.

- Potter ! dit soudain Rogue. Qu'est-ce que j'obtiens quand j'ajoute de la racine d'asphodèle en poudre à une infusion d'armoise ?

Là, elle commença à se poser des questions. Demander cela à un Première Année ? Au premier cours ? Même son père ne l'aurait pas fait, et pourtant c'était un enseignant extrêmement sévère. Du coin de l'œil, elle vit la main d'Hermione Granger se lever à la vitesse d'un boulet de canon.

- Je ne sais pas, Monsieur, répondit Potter.

Rogue eut un rictus méprisant. Il n'y avait aucun doute, il haïssait Potter, pour une raison obscure.

- Apparemment, la célébrité n'est pas tout dans la vie, dit-il sans prêter la moindre attention à la main levée de la brunette. Essayons encore une fois, Potter, reprit Rogue. Où iriez-vous si je vous demandais de me rapporter un bézoard ?

Granger leva à nouveau la main comme si elle essayait de toucher le plafond, mais visiblement Potter n'avait pas la moindre idée de ce que pouvait bien être un bézoard. Emerald se souvenait avoir lu un paragraphe dessus dans le Poudlard Express, mais encore une fois, c'était une question qu'on ne pouvait pas poser à un débutant et exiger une réponse correcte. Elle adressa un regard en direction de Malefoy, Crabbe et Goyle qui étaient secoués d'un fou rire.

- Je ne sais pas, Monsieur, dit Potter.

- Vous n'alliez quand même pas vous donner la peine d'ouvrir un de vos livres avant d'arriver ici, n'est-ce pas, Potter ?

Le jeune garçon baissa les yeux alors que Rogue continuait d'ignorer la main levée de Granger.

- Potter, reprit le professeur, quelle est la différence entre le napel et le tue-loup ?

Cette fois, la brunette se leva, la main toujours tendue au-dessus de sa tête.

- Je ne sais pas, répondit Potter avec calme. Mais je crois qu'Hermione le sait. Vous aurez peut-être plus de chance avec elle.

Emerald applaudit mentalement le garçon pour le calme olympien dont il faisait preuve malgré la tentative d'intimidation et d'humiliation de leur professeur. Il y eut quelques rires, mais Rogue, en revanche, n'avait pas l'air content.

- Asseyez-vous ! lança-t-il à Granger qui obéit immédiatement. Pour votre information, Potter, sachez que le mélange d'asphodèle et d'armoise donne un somnifère si puissant qu'on l'appelle la Goutte du Mort vivant. Un bézoard est une pierre qu'on trouve dans l'estomac des chèvres et qui constitue un antidote à la plupart des poisons. Quant au napel et au tue-loup, il s'agit de la même plante que l'on connaît aussi sous le nom d'aconite. Alors ? Qu'est-ce que vous attendez pour prendre note ?

La fillette qui pianotait inconsciemment de la main gauche cligna des yeux, regardant le professeur retourner à son bureau dans un grand mouvement de sa robe de sorcier.

- Et votre impertinence coûtera un point à Gryffondor, Potter.

Après sa démonstration de mesquinerie, il répartit les élèves deux par deux et d'un geste de sa baguette, afficha des instructions sur le tableau noir. La recette d'une potion qui soigne les furoncles. Emerald sentit son enthousiasme remonter en flèche.

- Les instructions sont au tableau, soyez attentifs et peut-être que vous obtiendrez quelque chose de potable à la fin de ce cours.

Le silence fut brisé par les sons discrets des élèves qui commençaient à piocher leurs ingrédients dans leur nécessaire à potion, à les peser, les écraser ou les couper. La demoiselle resta immobile, confuse, regardant les autres travailler, puis sur son partenaire pour ce cours, qui s'avérait être Malefoy, lequel lui lançait des regards curieux alors qu'il commençait à trier ses propres ingrédients.

- C'est tout ?

Le silence retomba instantanément sur la classe alors que tous se tournaient en direction d'Emerald.

- Un problème, miss Coldstone ? demanda Rogue en haussant un sourcil.

- Je pensais qu'un cours sur les potions nous ferait étudier les ingrédients et leur utilité, le pourquoi du comment telle combinaison donne tel effet, ce genre de chose, répondit-elle. Enfin, je pensais que l'on étudierait réellement la potion avant de la reproduire, pas qu'on se contenterait de suivre la recette !

La totalité des élèves avaient complètement oublié leurs ingrédients, regardant Emerald et Rogue avec des yeux ronds. Le professeur fronça légèrement les sourcils et afficha un rictus.

- Seriez-vous une experte des potions, miss Coldstone ? demanda-t-il encore.

- Non, monsieur.

- Alors quel est le problème avec ma façon d'enseigner ?

- Je m'attendais à ce que vous nous appreniez quelque chose, justement.

Il y eut un long silence qui parut s'étirer pendant quelques minutes. La fillette pouvait voir dans les yeux noirs du professeur qu'elle avait fait mouche.

- Vous avez gagné un mois de retenue, miss Coldstone, finit-il par déclarer calmement. Et dix points de moins pour Serpentard. Maintenant asseyez-vous et remettez-vous au travail.

Emerald ne protesta pas plus, sa plainte ayant été entendue, mais son enthousiasme s'était complètement envolé. Elle fit son travail avec autant de sérieux que pour ses autres cours, mais la déception se faisait ressentir à chacun de ses gestes. Rogue reprit sa ronde pour surveiller les chaudrons, passant et repassant parmi les élèves, sa longue cape noire flottant derrière lui. De temps en temps, il s'arrêtait sur un élève pour critiquer son travail sévèrement, les seuls qui semblaient pouvoir y échapper étaient Emerald et Malefoy. Rogue avait l'air d'apprécier le blondinet, et comme elle faisait équipe avec lui, s'il insultait leur potion, il insultait Malefoy. Ironique.

Brusquement, un nuage de fumée verte accompagné d'un sifflement sonore emplit le cachot. Neville Londubat s'était débrouillé pour faire fondre le chaudron de son binôme et leur potion se répandait sur le carrelage en rongeant les chaussures des élèves. Un instant plus tard, toute la classe était debout sur les tabourets et Londubat, aspergé de potion lorsque le chaudron avait fondu, gémissait de douleur tandis que des furoncles lui poussaient sur les bras et les jambes.

- Imbécile ! gronda Rogue en faisant disparaître d'un geste de la main la potion répandue sur le sol. J'imagine que vous avez ajouté les épines de porc-épic avant de retirer le chaudron du feu ?

Le garçon se mit à pleurnicher alors que des furoncles lui poussaient sur le visage. Emerald retint une grimace en voyant les effets désastreux de la potion ratée. C'était exactement pour cela que le professeur aurait dû leur apprendre les propriétés des ingrédients au lieu de les laisser livrés à eux-même !

- Emmenez-le à l'infirmerie, ordonna Rogue au partenaire du pauvre garçon.

Puis il se tourna vers Potter et Weasley qui avaient préparé leur potion à côté de Londubat.

- Potter, pourquoi ne lui avez-vous pas dit qu'il ne fallait pas ajouter les épines tout de suite ? Vous pensiez que s'il ratait sa potion, vous auriez l'air plus brillant ? Voilà qui va coûter un point de plus à Gryffondor.

La demoiselle leva les yeux au ciel, agacée par le comportement mesquin de Rogue envers Potter et reporta son attention sur sa propre potion, histoire d'éviter une nouvelle catastrophe.


Quand le cours fut terminé et que les Première Année sortirent des cachots, Emerald se sentait extrêmement frustrée. Sans un regard envers ses camarades de Serpentard elle sortit du château, cherchant un peu de solitude et de calme qu'elle ne trouverait évidemment pas dans la Grande Salle si elle allait déjeuner. Fort heureusement elle était libre le vendredi après-midi et n'était donc pas pressée par le temps.

Elle marcha à pas rapides, quittant la cour pour descendre la pente douce qui menait dans le parc jusqu'à aller s'asseoir contre un arbre sur la rive du lac noir, suffisamment proche de la Forêt Interdite pour qu'elle soit certaine qu'on ne viendrait pas la déranger, mais assez éloigné pour qu'elle ne puisse pas être accusée de vouloir y pénétrer. Elle laissa échapper un grognement en passant ses mains dans ses cheveux noirs. Si elle était mal élevée, elle se serait mise à crier pour évacuer toute la frustration qu'elle ressentait.

L'idée d'étudier la préparation des potions lui avait tellement plu ! Voir les effets des ingrédients sur les êtres vivants aurait été tellement proche de ce que lui enseignait son père ! On ne la laissait plus faire depuis qu'elle était à l'orphelinat, on lui disait que ce n'était pas de son âge et qu'une fille ne devait pas s'intéresser à ce genre de choses, mais ils ne comprenaient pas à quel point c'était important !

Emerald avait une vocation choisie depuis qu'elle était toute petite, pour laquelle elle avait travaillé aussi longtemps qu'elle se souvienne, et plus le temps passait, plus on mettait d'obstacles sur sa route. Et ce, sous prétexte qu'à son âge, elle ne devrait pas être capable de prendre la moindre décision !

La demoiselle se mit à respirer lentement pour se calmer et regarda le lac, arrachant distraitement les brins d'herbe à sa portée. Elle passa un long, très long moment à juste attendre, se concentrer sur sa respiration, à prendre du réconfort dans le calme et la solitude, sa seule compagnie étant le vent qui soufflait doucement en ce début d'automne. Quand son estomac commença à protester à cause du manque de nourriture, elle décida qu'elle s'était assez détendue et se releva avant de s'étirer. Elle avait des devoirs à faire.

Alors qu'elle allait faire un pas, elle entendit quelqu'un. La fillette se pencha pour regarder qui marchait si proche de la forêt et haussa un sourcil en voyant le professeur Quirrell, qui tordait ses mains tremblantes devant lui, regardant un peu partout autour de lui alors qu'il pénétrait dans les bois.

C'est vrai qu'il était le professeur de Défense Contre les Forces du Mal, mais elle ne pouvait pas s'empêcher de trouver ça étrange... Quand il fut hors de vue elle sortit de sa cachette et commença à scruter l'orée de la Forêt Interdite, intriguée.

Elle sursauta quand elle entendit un chien aboyer et se retourna d'un bond pour voir qu'elle s'était involontairement rapprochée d'une grande cabane de bois où Potter et le plus jeune Weasley attendaient devant la porte. Lesquels l'avaient remarquée, par ailleurs. Le rouquin ouvrit la bouche pour dire quelque chose quand la voix du géant qui les avait guidé jusqu'au château à la rentrée retentit avec force.

- Ça suffit Crockdur !

La porte s'ouvrit et le visage hirsute de leur guide apparut dans l'entrebâillement alors qu'il retenait un énorme molosse au poil noir par son collier pour l'empêcher de leur sauter dessus.

- Bonjour Harry ! salua-t-il avec un sourire. Content de te voir ! Et tu as amené des amis ! Entrez, entrez !

Emerald cligna des yeux, surprise qu'on puisse la croire amie avec qui que ce soit, mais n'eut pas le temps de clarifier le malentendu qu'elle se retrouva à l'intérieur de la cabane, la porte se refermant derrière elle. Alors que le jeune Weasley se retrouva pris sous les assauts de l'énorme chien, elle prit la peine de regarder autour d'elle.

La maison ne comportait qu'une seule pièce. Des jambons et des faisans étaient suspendus au plafond, ce qui la fit grimacer légèrement quant à l'hygiène, et une bouilloire massive en cuivre était posée sur le grand feu de la cheminée. Un coin de la pièce était occupé par un lit aussi imposant que son propriétaire, recouvert d'une courtepointe en patchwork.

- Faites comme chez vous, dit le géant.

- Je vous présente Ron, fit Potter alors que le géant versait de l'eau chaude dans une grande théière et disposait des biscuits sur une assiette.

- Encore un Weasley, à ce que je vois, remarqua-t-il. J'ai passé la moitié de ma vie à poursuivre tes frères jumeaux quand il leur prenait l'envie d'aller faire un tour dans la forêt.

Le dénommé Ron se mit à rougir un peu des oreilles, visiblement embarrassé. Puis le géant se tourna en direction d'Emerald en reprenant son sourire aimable. Elle resta quelques secondes immobile avant de réaliser qu'il s'attendait sûrement à ce qu'elle se présente.

- Emerald Coldstone, monsieur, lui dit-elle.

- Enchanté Emerald ! Moi c'est Rubeus Hagrid, le garde-chasse, mais tout le monde m'appelle Hagrid.

- Monsieur Hagrid, je crois que v-

- Juste Hagrid c'est suffisant ! Je suis pas un professeur pour qu'on m'appelle "monsieur", se mit à rire le géant.

La demoiselle échangea un regard avec Potter qui affichait un sourire d'excuse, et avec Weasley qui la regardait avec suspicion. Juste pour agacer le rouquin davantage, elle décida finalement de jouer le jeu au lieu de clarifier la situation et hocha la tête.

- Bien, Hagrid, consentit-elle.

Le garde-chasse sembla satisfait et passa à autre chose, allant chercher dans un placard quatre tasses qui avaient plutôt la taille de bol, qu'il disposa ensuite devant ses petits invités et lui-même. Il commença à servir le thé, demandant comment s'était déroulée leur première semaine. Emerald laissa faire les garçons, buvant son thé à petites gorgées en prenant la tasse à pleines mains au lieu de tenir la anse.

- Pas étonnant que vous vous perdiez, nota Hagrid. Quant à cette vieille ganache de Rusard, il essaie toujours de fourrer son nez partout, celui-là !

Il se tourna vers la demoiselle qui haussa un sourcil.

- Et toi alors ? Comment ça se passe avec les Serpentards ?

- C'est-à-dire ? s'étonna la fillette.

- Ben, est-ce que tu réussis à t'intégrer ? fit le géant.

Emerald cligna des yeux un instant, puis haussa les épaules.

- Je ne vois pas d'intérêt à "m'intégrer" pour l'instant, je préfère concentrer mon attention sur les études, répondit-elle.

- Euh… oui, c'est important les études, acquiesça Hagrid, visiblement perplexe. Mais pense à te faire des amis tout de même. Enfin, en dehors de Harry et Ron, bien sûr.

- Mais c'est pas notre amie ! protesta le rouquin.

- Hein ? Mais qu'est-ce que tu racontes ? s'étonna le géant.

Emerald esquissa l'ombre d'un très léger sourire amusé alors que le garde-chasse les regardait tour à tour, passant sur un Potter embarrassé et un Weasley qui lançait un regard noir à la fillette.

- En fait, Emerald ne faisait que passer devant la cabane au moment où vous avez ouvert la porte… avoua Potter en se passant une main sur la nuque, un peu tendu.

- Vraiment ? s'inquiéta Hagrid en regardant Emerald pour avoir confirmation.

- Vraiment, acquiesça-t-elle. Mais je vous remercie pour votre accueil.

Elle reposa sa tasse de thé à moitié vide et se leva de son siège.

- Sur ce, je ne vais pas vous déranger plus longtemps, déclara-t-elle avant de faire un semblant de révérence. Passez une bonne journée, Hagrid, Potter.

Puis elle s'approcha de la porte, dont la poignée était miraculeusement juste assez basse pour qu'elle puisse l'atteindre en sautant et sortir d'elle-même. Elle remonta le parc en direction du château. Elle avait l'estomac plein de thé, elle pourrait bien tenir jusqu'au dîner, mais en attendant, elle avait toujours des devoirs à faire.