Chapitre 26: "Déni et contractions"

Cameron émergea lentement du sommeil, encore engourdie par la nuit qu'ils venaient de passer. Un bras chaud l'entourait, une main paresseuse traçant des cercles sur sa hanche.

— Je crois que c'est officiel.

Sa voix grave vibra contre son oreille. Elle ouvrit les yeux pour croiser son regard bleu, pétillant d'amusement.

— Quoi donc ? murmura-t-elle.

House effleura sa lèvre du bout des doigts, un sourire en coin.

— Gémir mon prénom toutes les trois secondes pendant notre partie de jambe en l'air te donne un sérieux avantage.

Elle roula des yeux, mais il vit bien la lueur amusée dans son regard.

— Tu as apprécié? Dit elle en souriant

— "Apprécier" est un euphémisme. Il se pencha, frôlant sa bouche de la sienne. Je vais devoir être exemplaire plus souvent si c'est ça la récompense.

Cameron rit doucement glissant sa main sur sa nuque.

— Tais-toi et embrasse moi.

Il grogna contre ses lèvres.

Ils continuèrent quelques minutes puis s'activèrent.

House et Cameron avaient quitté l'appartement ensemble, lui boitant avec nonchalance, elle lissant machinalement une mèche de cheveux derrière son oreille alors qu'ils échangeaient quelques piques sur la nuit passée.

Une fois arrivés à l'hôpital, leurs chemins se séparèrent. House regagna son bureau, où il retrouva Foreman, Taub et Thirteen, fidèles au poste. Le diagnostic différentiel pouvait enfin reprendre son cours normal, avec House qui balançait ses sarcasmes tels des balles de ping-pong dans la tête de ses subordonnés.

Cameron, de son côté, savait déjà ce qui l'attendait. House lui avait expressément dit de lever le pied et de ne pas venir avec lui en salle de diagnostic aujourd'hui. Il voulait qu'elle reste en consultations et qu'elle supervise les étudiants. Autant dire pour elle, une punition déguisée.

Lorsqu'elle entra dans la salle des consultations, le groupe d'étudiants, fraîchement débarqués, attendait sagement, carnets en main. Elle soupira en refermant la porte derrière elle.

— Très bien, qui veut commencer par diagnostiquer un patient enrhumé qui est persuadé d'avoir un cancer du cerveau ?

Une main se leva timidement.

— Vous venez de vous désigner volontaire. Allez-y, je vous regarde.

Quelques heures plus tard, alors que House savourait sa matinée redevenue "normale", Wilson débarqua dans son bureau, son air curieux plaqué sur le visage.

— Alors, comment ça s'est passé avec les parents de Cameron ?

House leva à peine les yeux de sa Gameboy.

— Oh, tu sais, ça y est ils m'adorent. Je suis charmant, respectueux, et incroyablement modeste.

— Vraiment ? fit Wilson, sceptique.

— Non. Mais on a réussi à ne pas s'entretuer. C'est déjà pas mal non ?

Wilson plissa les yeux, intrigué.

— Et Cameron, elle en a pensé quoi ?

House laissa échapper un petit sourire en coin, repensant à la nuit qu'ils avaient passée.

— J'imagine que je me suis bien comporté. Disons qu'elle m'a remercié à sa manière.

Wilson fit une grimace.

— S'il te plait n'en dis pas plus

— Ba quoi c'est toi qui a posé la question.

Wilson leva les yeux au ciel, habitué aux sous-entendus graveleux de son ami. Il s'apprêtait à répondre quand le téléphone de House se mit à vibrer sur le bureau. House jeta un regard au nom qui s'affichait sur l'écran et poussa un soupir exagéré.

— Oh non… C'est ma mère.

Wilson arqua un sourcil.

— Tu comptes encore l'ignorer ?

House fit tourner le téléphone dans sa main, hésitant. Il avait tenté de la joindre quelques jours plus tôt, pour lui annoncer la nouvelle de sa relation avec Cameron et du bébé à venir. Mais depuis, il évitait soigneusement ses appels. Il savait que Blythe House ne lâcherait pas l'affaire, surtout s'il donnait l'impression de fuir.

— Allez, décroche. Ça te fera du bien, l'encouragea Wilson avec un sourire amusé.

House lui lança un regard noir, mais il accepta finalement son sort et appuya sur le bouton pour répondre.

— Maman, quel plaisir…

— Gregory, enfin ! J'ai essayé de t'appeler plusieurs fois, je commençais à m'inquiéter !

— Oh, tu sais, entre diagnostiquer des cas désespérés et supporter Wilson, mes journées sont bien remplies.

Wilson leva les yeux au ciel mais ne put s'empêcher de sourire.

— Alors dis-moi, pourquoi m'as-tu appelé l'autre jour ? Tout va bien ?

House prit une inspiration et lança un regard furtif à Wilson, qui lui fit un signe encourageant. Il hésita une seconde avant de lâcher, le plus naturellement possible :

— Je...Je vais être papa.

Un silence. Long. Trop long.

— …Pardon ?

House grimaça. Il reconnaissait ce ton, celui qu'elle prenait lorsqu'elle essayait de digérer une information qui la dépassait.

— Tu te souviens de Cameron ? Allison Cameron tu l'avais rencontrée avec papa dans mon bureau il y a quelques années. Tu lui avais même proposé de venir manger avec nous.

— Ta… ta subordonnée ?

— Oui, enfin, elle ne travaille plus pour moi. Enfin pas vraiment.

— Elle est beaucoup plus jeune que toi, Greg.

— Oui, maman, je sais…

— Elle est vraiment enceinte de toi ?

— Oui, et de huit mois. Je vais être père dans quelques temps, répéta-t-il en insistant sur les mots, comme si cela pouvait aider à enfoncer le clou.

Un autre silence, plus profond.

— Oh mon Dieu…

House roula des yeux.

— C'est une réaction typique. Manque plus que tu t'évanouisses et on aura le combo complet.

— Ce n'est pas ça, Gregory ! C'est juste que… Je suis surprise. Ta relation avec elle et puis cette nouvelle. Je ne pensais pas que tu… Enfin, que tu voudrais…

— Avoir un enfant ? Compléta-t-il. Moi non plus, crois-moi. Mais… c'est comme ça.

Un silence, cette fois plus doux, presque bienveillant.

— Et… Comment va-t-elle ?

House se détendit légèrement.

— Fatiguée, mais elle gère mieux que moi. Elle est excitée, stressée, tout ce qu'il faut.

— Et toi ?

Il fronça légèrement les sourcils, pris au dépourvu.

— Moi quoi ?

— Comment tu te sens, Gregory ?

Il ouvrit la bouche pour répondre avec un sarcasme bien senti, mais il s'arrêta. Son regard croisa celui de Wilson, qui observait la conversation avec une attention discrète. Pour une fois, il ne trouva pas la force de tourner cela en dérision.

— Je… Je ne sais pas, admit-il finalement, sa voix plus basse. C'est bizarre. J'ai peur de tout foirer. Mais j'ai envie d'essayer.

Il y eut un bruit de respiration de l'autre côté du téléphone, comme si Blythe retenait une émotion.

— Je suis sur que tu t'en sors bien Greg, peu importe je suis fière de toi.

House déglutit, pris de court par cette déclaration soudaine. Il passa une main sur sa nuque, mal à l'aise.

— Ouais, ouais… Évite juste d'envoyer un pull tricoté pour le bébé, d'accord ?

Sa mère rit doucement.

— D'accord. Mais tu sais que je viendrai bientôt te voir avec toutes ces révélations, n'est-ce pas ?

House ferma les yeux en soupirant.

— Je m'en doutais. Wilson, prépare-toi, on va avoir une invasion maternelle.

Wilson éclata de rire alors que Blythe protestait gentiment au téléphone. House, lui, esquissa un sourire. Peut-être que cette histoire ne serait pas si terrible, après tout.


Du côté de Cameron, cette dernière se tenait devant son patient, écoutant attentivement ses symptômes tout en consultant ses dossiers. La pièce était plongée dans une silence presque lourd, seulement brisé par le grattement des stylos sur les carnets. Soudain, une douleur fulgurante la traversa, aussi aigüe qu'inattendue. Ses doigts se crispèrent autour du stylo, mais elle refoula l'envie de se plier sous la douleur. Elle inspira profondément, espérant que la vague finirait par passer, mais elle s'intensifia.

Elle se redressa, luttant pour rester calme, et continua à écouter son patient, sa voix devenant légèrement plus posée, plus distante. C'est alors, que l'un des étudiants, qui prenait des notes, leva la tête, son regard rempli d'inquiétude.

— Docteur Cameron, vous allez bien ?

Elle leva les yeux, forçant un sourire qui n'atteignait pas ses yeux.

— Tout va bien, merci. Ce n'est rien.

Pourtant, les contractions devenaient de plus en plus insistantes. Elle serra les dents et observa discrètement autour d'elle, cherchant à cacher son malaise. Mais un étudiant plus observateur, remarqua sa crispation et se pencha légèrement en avant.

— Vous voulez qu'on prévienne le docteur House ?

Le silence s'abattit sur la pièce. Cameron se figea un instant, une lueur de colère traversant brièvement ses yeux, avant de se maîtriser. Elle s'approcha du jeune homme, son visage devenu impassible, mais son ton glacial.

— Si l'un de vous ose prévenir House, vous pouvez commencer à chercher un autre stage, parce que vous serez tous virés.

Le silence fut total. Les étudiants, visiblement choqués par cette réaction aussi directe, restèrent figés, et Cameron sentit la tension monter dans la pièce. Elle redressa les épaules, sans lâcher un instant son regard froid et déterminé.

— Ce ne sont que des contractions de Braxton Hicks. Ça va passer. Je vais bien. Compris ?

Tous acquiescèrent silencieusement, aucun mot n'osant franchir leurs lèvres. Cameron inspira profondément et, après une longue pause, se reconcentra sur le patient, comme si rien ne s'était passé. Mais au fond d'elle, une partie d'elle savait que ce n'était pas rien.

Cameron termina ses consultations sans flancher. Chaque contraction la traversait comme une vague implacable, mais elle refusait de montrer le moindre signe de faiblesse. Elle posait des questions, corrigeait les étudiants, et prenait même le temps de les aiguiller sur des diagnostics, comme si de rien n'était.

Une fois la dernière consultation achevée, elle rassembla ses dossiers avec calme, adressa un dernier regard à ses étudiants, puis sortit. Personne n'osa rien dire, mais elle sentait leurs regards sur elle. Ils avaient compris. Mais elle avait été claire : personne ne préviendrait House.

Elle marcha d'un pas mesuré jusqu'à la salle de diagnostic. Là, à travers la porte vitrée, elle aperçut House, canne en main, en pleine discussion avec Foreman, Taub et Thirteen.

Prenant une profonde inspiration, elle entra dans la pièce suivi par Les étudiants, en retrait qui se placèrent contre le mur et écoutaient la joute verbale du médecin avec fascination.

House ne leva même pas les yeux lorsqu'elle s'assit à sa place habituelle, son regard rivé sur les analyses sanguines affichées au tableau blanc.

— Le patient a un syndrome myélodysplasique, mais les anomalies chromosomiques ne collent pas. On a testé pour une leucémie atypique, rien. D'autres idées ? lança-t-il en tapotant sa canne contre sa jambe.

Taub haussa les épaules.

— Et si c'était une infection virale déguisée ? Epstein-Barr avec une réponse immunitaire anormale ?

— Et si c'était une infection alien ? Railla House. Sérieusement, vous croyez que Foreman n'a pas déjà envisagé ça ?

— Il faut refaire une ponction de moelle, intervint Thirteen.

House leva les yeux au ciel.

— Oh oui, bonne idée. Retentons une ponction. J'adore torturer les patients sans raison valable.

Cameron, jusque-là silencieuse, suivait le débat, le regard concentré. Mais au bout de quelques minutes, elle sentit son ventre se contracter une nouvelle fois. Cette fois-ci, elle ne put s'empêcher de crisper légèrement les doigts sur l'accoudoir.

Elle inspira discrètement, puis se leva, cherchant à masquer son malaise sous un geste anodin. Sans un mot, elle se plaça derrière sa chaise, s'appuyant naturellement sur le dossier.

Le diagnostic terminé, House assigna les tâches à son équipe d'un geste nonchalant.

— Foreman, analysez les nouveaux résultats de la ponction. Taub, appellez la famille du patient et trouvez-moi un détail compromettant sur leur historique médical, j'adore les secrets de famille. Thirteen, refaites un test pour les infections exotiques, on ne sait jamais.

L'équipe acquiesça et commença à quitter la pièce ainsi que les étudiants, mais House, lui, ne bougea pas. Son regard s'attarda sur Cameron, qui, toujours debout derrière sa chaise, semblait légèrement tendue. Il tapota sa canne contre sa paume, pensif, puis lâcha d'un ton calme :

— Depuis combien de temps ?

Cameron releva les yeux vers lui, feignant l'incompréhension.

— Comment ça ?

House arqua un sourcil, son regard scrutant chaque détail de son visage.

— Depuis combien de temps tu as des contractions ?

Un silence pesant s'abattit sur la pièce. Cameron serra imperceptiblement la mâchoire avant de secouer la tête.

— Je n'ai pas de contractions.

House sourit. Ce sourire narquois, celui qui disait "Je sais que tu mens, et je vais te le prouver."

— Bien sûr. Et moi, je suis un mec sympa.

Il s'approcha lentement d'elle, sa canne résonnant sur le sol.

— Tu es restée assise tout le long du diagnostic, sauf à un moment précis, juste après avoir eu ce regard un peu trop concentré… comme si tu te battais contre quelque chose. Ensuite, tu t'es levée, discrètement, en t'appuyant sur ta chaise. Pas pour changer de position, pas parce que tu étais fatiguée… mais parce que tu avais mal.

Cameron pinça les lèvres mais ne répondit pas.

— Depuis que tu es entrée dans cette pièce, j'ai compté, reprit House. À intervalles réguliers, ton expression change. Une micro-seconde de crispation, suivie d'une respiration plus lente. Je dirais… toutes les huit minutes environ.

Il haussa un sourcil triomphant.

— C'est fascinant, non ?

Cameron détourna le regard, son corps tendu.

— Ce ne sont que des contractions de Braxton Hicks.

House roula des yeux.

— Ah oui, bien sûr. De fausses contractions, bien régulières, bien intenses… Tu comptes te mentir encore combien de temps ?

Elle ouvrit la bouche pour répliquer, mais au lieu d'un flot de paroles, un frisson la traversa.

House la fixa, prêt à argumenter davantage, mais elle lui lança un regard noir avant de tourner les talons.

— J'ai du travail, House.

Il la suivit du regard tandis qu'elle quittait la pièce d'un pas rapide, visiblement agacée.

— Je suis sûr que ce bébé sera ravi de naître entre deux consultations. marmonna-t-il en la voyant s'éloigner dans le couloir.

Puis, au beau milieu du corridor, Cameron s'arrêta net.

Elle se figea, une expression de choc traversant son visage.

House fronça les sourcils.

— Cameron ?

Elle inspira brusquement, ses yeux s'écarquillant légèrement. Puis, sous le regard de plusieurs étudiants et membres du personnel, une tâche sombre s'étendit progressivement sur le tissu de son pantalon. Elle venait de perdre les eaux.

Il y eut un silence de plomb.

Cameron baissa lentement les yeux, ses mains tremblantes se posant sur son ventre.

— Non… murmura-t-elle, comme si elle refusait d'y croire.

House, lui, esquissa un sourire en coin avant de s'approcher à grandes enjambées, s'appuyant sur sa canne pour la rejoindre.

— Bon, cette fois, c'est officiel.

Il se tourna vers un étudiant abasourdi.

— Vous! allez chercher un fauteuil roulant.

L'étudiant s'élança dans le couloir, tandis que Cameron secouait frénétiquement la tête.

— Non ! Ce n'est pas nécessaire ! Je ne vais pas accoucher maintenant. Je dois accoucher dans trois semaines !

House arqua un sourcil, faussement compatissant.

— Oh, alors dans ce cas, t'as raison. On va juste dire au bébé d'attendre un peu.

Il claqua des doigts en direction de son ventre.

— Hé toi la dedans rebrousse chemin, c'est pas encore l'heure !

Cameron lui lança un regard assassin.

— Ce n'est pas drôle, House.

— Ce n'est pas moi qui fais des blagues c'est toi.

Elle inspira, paniquée.

— Elena…

House fronça les sourcils.

— Quoi Elena ?

— Elena ! Mon amie de Chicago ! Elle doit arriver dans quelques jours pour l'accouchement !

House haussa les épaules, totalement indifférent.

— Ah. Dommage. Mais à moins qu'elle ait des supers pouvoirs, elle ne va pas surgir de nulle part en criant "Je suis là pour m'occuper de ton utérus !"

Il posa une main sur son épaule, son ton devenant étrangement sérieux malgré son sarcasme.

— Allison. Tu es en travail.

Elle ouvrit la bouche pour nier, mais une contraction brutale la plia en deux. Cette fois, elle ne put pas la masquer.

House la rattrapa aussitôt, la soutenant avec plus de douceur qu'on ne l'aurait imaginé.

— Allez, fais-moi plaisir et monte sur ce fichu fauteuil. Parce que sinon, je te jure que je te porte moi-même.

L'étudiant revint, poussant le fauteuil roulant avec précipitation.

Cameron hésita, encore en plein déni. Mais une autre contraction lui arracha un gémissement étouffé.

House leva les yeux au ciel.

—Tu n'es définitivement pas en travail c'est évident

Finalement, à contrecœur, elle s'assit, le souffle court.

House tapota son épaule.

— Voilà. Maintenant, direction la maternité. Et promis, si tu es sage, je laisserai Wilson te tenir la main à ma place.

Cameron roula des yeux, mais cette fois, elle ne protesta plus.

House avançait dans les couloirs de l'hôpital, poussant le fauteuil de Cameron avec une impatience non dissimulée. Chaque couloir lui semblait interminable, chaque porte un obstacle inutile entre lui et la salle d'examen.

— Tu pourrais ralentir, grogna Cameron entre deux contractions.

— Et que tu accouches dans le couloir? Non merci.

Cameron souffla d'exaspération, mais la douleur revint en force, lui coupant toute envie de répondre.


Enfin, ils atteignirent la maternité. Une infirmière prit immédiatement le relais, roulant Cameron vers une salle d'examen pendant que House restait en retrait, l'observant disparaître derrière des portes battantes. Il croisa les bras, un tic nerveux agitant légèrement ses doigts sur sa canne.

C'est alors qu'une, une voix bien trop familière se fit entendre derrière lui.

— Comment va Cameron ? Ca y est c'est le moment?

House pivota et tomba sur Wilson, légèrement essoufflé, sa cravate de travers.

— Comment t'as su ? demanda House, méfiant.

— Un de tes étudiants m'a prévenu. Alors ?

House haussa les épaules.

— Aucune idée. On est en train de l'examiner.

Wilson hocha la tête, scrutant son ami. Il remarqua l'air plus tendu qu'à l'habitude, le manque de sarcasme cinglant. Il connaissait House mieux que personne, et il voyait bien qu'il n'était pas aussi détendu qu'il voulait le paraître.

— Et toi, ça va ?

House roula des yeux.

— C'est elle qui va accoucher, pas moi.

Wilson ne répondit rien, se contentant d'un léger sourire entendu.

Un médecin en blouse bleu pâle passa à côté d'eux et appela :

— Docteur House ?

House s'avança, boitant légèrement plus vite que d'habitude, et suivit le médecin à travers les portes battantes.

Il pénétra dans la salle d'examen. Cameron était allongée sur un lit, désormais vêtue d'une blouse d'hôpital. Son front était perlé de sueur, ses mâchoires crispées. Une infirmière lui posait un cathéter sur le dos de la main pendant qu'un autre médecin prenait ses constantes.

House s'approcha du lit, s'appuyant sur sa canne.

— Sympa la tenue.

Cameron, allongée, tourna lentement la tête vers lui, lui lançant un regard assassin.

— Je te déteste.

House esquissa un sourire en coin.

— Ah, voilà. Là, tu commences vraiment à ressembler à une future maman en travail.

Elle serra les dents alors qu'une nouvelle contraction la traversait, et House la vit agripper le drap avec une force surprenante.

Son sourire s'effaça légèrement.

— Alors, verdict ?

L'obstétricien releva la tête et fixa l'écran du monitoring.

— Travail en cours, dilatation à quatre centimètres.

House croisa le regard de Cameron. Elle semblait à la fois terrifiée et furieuse d'être dans cette situation.

Il soupira, posant brièvement sa main sur la sienne.

— Bon, t'as gagné. Je crois que tu vas vraiment accoucher aujourd'hui.

Cameron ferma brièvement les yeux, expirant lentement.

— Je ne veux pas c'est trop tôt…

House garda le silence un instant, observant son visage crispé par la douleur.

— Ne t'en fais pas, le bébé va très bien elle est prête

Elle rouvrit les yeux et le fixa, hésitante.

— Jai...J'ai peur.

House arqua un sourcil, mais ne fit aucun commentaire. Il resserra légèrement sa prise sur sa canne avant de s'installer à côté d'elle.

— Très bien prend ma main. Mais si tu me la broies pendant une contraction, je te rappelle que j'ai besoin de mes doigts pour jouer du piano et de te donner du plaisir.

Cameron laissa échapper un bref rire, vite interrompu par une nouvelle vague de douleur.

L'accouchement venait à peine de commencer.


House était tranquillement installé dans le fauteuil inconfortable de la salle d'accouchement, un gobelet de café tiède en main, lorsqu'il sentit son téléphone vibrer dans sa poche. Un rapide coup d'œil à l'écran lui apprit que son équipe réclamait son génie immédiatement.

Il hésita. Répondre signifiait s'exposer au regard perçant de Cameron, qui, allongée sur le lit, entre deux contractions, n'était pas exactement d'humeur à faire preuve de patience. Ne pas répondre, en revanche, garantissait que son équipe, peu réputée pour sa subtilité, multiplierait les tentatives jusqu'à ce qu'il cède.

Soupirant, House se leva avec l'agilité d'un homme pris en faute et s'éloigna lentement vers la porte, espérant jouer la discrétion. Il décrocha finalement, baissant la voix.

« Quoi ? »

« On est désolés House on sait que vous êtes en train de vivre un moment particulièrement mais on a un problème, » annonça Foreman à l'autre bout du fil. « Le patient ne répond pas au traitement. On a besoin de votre avis. »

« C'est pas le moment! débrouillez vous. »

« House, Les analyses indiquent — »

Un gémissement derrière lui le fit se figer. Il tourna la tête juste assez pour voir Cameron plisser les yeux dans sa direction. La contraction passée, elle le fixa avec suspicion.

« Tu fais quoi ?! » demanda-t-elle d'un ton accusateur.

House masqua maladroitement le téléphone dans sa paume. « Rien du tout. Je commande une pizza.»

Son regard se posa sur lui, scrutateur. Une seconde passa. Puis une autre.

« Tu es en train de bosser sur un cas ?! » réalisa-t-elle.

Il leva les yeux au ciel, pris sur le fait. « Techniquement, non. Je suis en train de discuter de façon purement théorique. »

Une nouvelle contraction la coupa dans son élan, et House profita de l'instant pour retourner son attention au téléphone.

« Je vous écoute vous avez 2 min avant la prochaine contraction » lança-t-il, espérant profiter du moment pour s'éclipser mentalement.

Mais à sa grande surprise, Cameron reprit son souffle et, sans même lui laisser le temps d'embrayer, demanda : « C'est quoi les symptômes ? »

House la dévisagea, incrédule. « Tu veux vraiment participer ? »

« Réponds! et met le haut parleur. Ça m'aide à me concentrer sur autre chose pendant les contractions, répondit-elle en inspirant profondément. Allez y continuez. »

Foreman, hésita une fraction de seconde avant de détailler le dernier bilan sanguin. Cameron grimaça sous une nouvelle contraction, s'accrochant aux draps, mais dès qu'elle put parler à nouveau, elle intervint :

« Le patient a eu des traitements récents aux antibiotiques ? »

« Oui, pourquoi ? »

House croisa les bras, la regardant avec un mélange d'amusement et d'admiration. « Parce qu'elle est bonne. »

« Il a une candidémie. Son système immunitaire est déjà affaibli, vous auriez dû le voir. »

Un silence. Puis, Taub : « Ça se tient. »

House sourit. « Allez traiter le patient et arrêtez de m'appeler. »

Il raccrocha avant qu'ils n'aient le temps de protester et observa Cameron, dont le front était perlé de sueur. Elle reprenait son souffle, les doigts crispés sur les draps.

Il s'approcha du lit, l'air faussement pensif. « Tu sais, tu es particulièrement efficace quand tu souffres. »

Elle lui lança un regard assassin entre deux halètements, mais il vit le coin de ses lèvres tressaillir. Cameron serra les dents alors qu'une nouvelle contraction arrivait, lui attrapant la main au passage et la lui broyant. House grimaça, mais ne dit rien. Après tout, il l'avait bien cherché.