Mes petits chats,
Je suis heureuse de vous proposer aujourd'hui la 29e partie de "L'affaire Philippe Delveau" dans laquelle l'heure des retrouvailles a sonné (bien entendu !). J'ai hésité à changer la temporalité de cette partie pour la rapprocher de celle de la partie précédente mais j'ai décidé de garder mon idée première. J'espère avoir rendu l'ensemble cohérent car c'est toujours un défi de faire se perdre de vue deux personnes avec tous les moyens de contacts qu'offrent notre monde contemporain. J'espère que c'est plausible...
Il reste un épilogue à cette histoire (j'adore les épilogues :)) dont la publication devrait avoir lieu dans quinze jours MAIS j'ai pris quelques jours de congé cette semaine et encore la semaine prochaine. Je vais travailler dur, toutefois je doute de parvenir à publier la suite de "L'Aimé de Mère-Monde" la semaine prochaine donc mon planning sera probablement légèrement décalé. Je vous prie de m'en excuser.
Je vous laisse en compagnie de notre joyeuse équipe pour une partie pleine d'amour, d'humour et de maladresses :)
Bonne lecture et on se retrouve très bientôt pour la fin de cette histoire,
ChatonLakmé
Jimmy Fallon et Conan O'Brien sont deux célèbres animateurs de late shows américains.
L'affaire Philippe Delveau
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Vingt-neuvième partie
Butler, Pennsylvanie, dimanche 14 juillet
Par un mystère qu'il ne s'explique pas, Dean a parfois d'étranges fulgurances mémorielles. Son retour à Butler est de celle-ci. Quand il remonte N Main Street au volant de l'Impala, il se souvient que neuf mois avant, c'était déjà au son de Back in Black de AC/DC et de la voix éraillée de Brian Johnson. Le châtain se rappelle de la devanture de cette tarterie bio avec son auvent rayé et sa jolie terrasse. Le feu rouge à l'angle de N Main Street et de Weber Way est aussi long qu'il l'a pensé la première fois.
Le coude appuyé sur la portière, Dean passe une main sur son visage. Neuf mois. Une fraction de seconde dans son emploi du temps surchargé. Au fond de lui, une sensation d'éternité, nichée juste à côté de celle de solitude. Et du manque. Et du froid, parce qu'il se souvient de baisers brûlants et d'un corps pressé contre le sien qui l'écrasait contre un mur tendu d'un horrible papier peint fleuri.
Le châtain se pince l'arête du nez.
—«Tu dois tourner au prochain feu sur E Brady Street», indique Sam, les yeux baissés sur le GPS de son smartphone.
—«Je sais Sammy.»
Dean s'est déjà mis dans la bonne file et il voit au loin l'endroit exact où il va quitter N Main Street. L'Impala s'arrête souplement à un autre feu rouge et le châtain regarde autour de lui. Il est de retour à Butler et rien n'a changé. Il voit les mêmes magasins aux vitrines proprettes et bien décorées le long des trottoirs, les mêmes immeubles anciens aux façades soigneusement entretenues. Un peu plus loin devant lui, un beau bâtiment richement sculpté est en cours de restauration. Dean pianote du bout des doigts sur le volant de l'Impala. Il trouve ça bien, comme si cela avait de l'importance pour lui.
—«Tu dois tourner au prochain feu, Dean.»
—«Je sais. Je prends E Brady Street et je tourne sur N Monroe Street.»
—«Depuis quand as-tu le sens de l'orientation?», le taquine Sam.
—«Les choses changent. Tu devrais le savoir, tu as fini par arrêter d'avoir peur des clowns. Même si c'est arrivé après ton treizième anniversaire…»
Son frère lui donne un coup de coude dans les côtes mais le châtain cille à peine. Les choses changent mais il espère que toutes les choses ne changent pas toujours et qu'il n'est pas le seul à se souvenir d'un baiser affolant. Dean arrête l'Impala à un autre feu de signalisation avec l'impression désagréable que la circulation dure une autre sorte d'éternité.
Un groupe d'adolescents est attablé à la terrasse d'un coffee shop. Comme il y a neuf mois, l'un d'entre eux siffle d'admiration en voyant la Chevrolet tandis qu'un de ses amis fait un signe de cornes en entendant la guitare folle d'Angus Young. Le châtain les salue d'un signe de tête. C'est la même chose mais le groupe d'adolescents est différent. Parce que les choses changent.
Sam observe attentivement la rue.
—«Le centre-ville est toujours aussi bien tenu. Les logos sur ces échafaudages sont ceux d'entreprises spécialisées, les travaux vont coûter une fortune aux propriétaires…»
—«Comment peux-tu savoir ça?», lui demande Dean avec étonnement.
—«Jessica m'en a montré plusieurs quand elle m'a fait visiter le centre-ville un peu avant notre départ. Celui-ci est spécialisé dans les menuiseries anciennes et la banderole est au nom d'un décorateur réputé dans le comté.»
—«Une tête si bien faite et tu es toujours incapable de comprendre l'humour de Jimmy Fallon quand tu regardes ses émissions avec maman», ricane le châtain.
—«Je comprends très bien, il ne me fait juste pas rire», renifle Sam.
Dean roule des yeux. Mary et lui adorent le Tonight Show de Jimmy, le type le fait toujours rire aux éclats mais Sam a l'humour un peu pince-sans-rire. Il doit être plutôt de l'équipe du très sarcastique Conan O'Brien. Tristesse.
—«Je suis sûr que Castiel ne rit pas non plus quand il regarde le Tonight Show. Son humour plus fin que ça», grommelle le blond.
—«Cas aime Jimmy», proteste Dean.
—«Non, il t'apprécie toi. Il t'a dit ce que tu voulais entendre quand tu lui as imposé de regarder son émission un soir. Tu riais comme si tu avais à nouveau quinze ans, il a dû te trouver touchant.»
Le châtain le fusille du regard. Il relance l'Impala dans la circulation d'un bon coup d'accélérateur et Sam grogne quand la ceinture de sécurité lui entre dans le , Ohio, États-Unis
—«Tourne maintenant», dit-il en tirant sur la sangle.
Dean obtempère et son frère jette un regard par-dessus son épaule en direction de E Penn Street, vers le Maridon Museum.
L'affaire qui les a menés à Pittsburgh, Pennsylvanie, à cinquante kilomètres de Butler, a été difficile. Les deux frères détestent quand un enfant est impliqué.
56 kms.
47 minutes de route.
Dean n'est pas superstitieux mais il y a vu un signe. Le Maridon Museum doit être à moins de cinq minutes en voiture, son frère a aussi le droit de voir le signe dont il a besoin. Dean se racle légèrement la gorge.
—«… Est-ce que tu veux qu'on s'arrête au Maridon pour aller voir Jessica?»
Sam hésite un instant avant de secouer lentement la tête.
—«J'irais peut-être plus tard, quand tu auras réglé tes propres problèmes sentimentaux et si elle accepte de me parler.»
—«… Sale affaire ce truc à Pittsburgh, pas vrai?»
—«Oui, sale affaire. … Nous aurions dû revenir bien plus tôt à Butler, il est difficile de se présenter la bouche en cœur après neuf mois de silence.»
Sam passe une main fatiguée sur son visage et le châtain pince les lèvres. Son petit frère a la formidable capacité de mettre les mots exacts sur ce qui le taraude depuis qu'ils ont quitté Pittsburgh. Ce truc qui les taraude tous les deux. Il se gratte la mâchoire, les poils de sa barbe de trois jours crissent doucement sous la pulpe de son doigt.
—«Je t'interdis de te connecter à nouveau sur le compte de Ghost Hunters. Plus d'affaires surnaturelles pour les prochains jours Sammy», marmotte Dean.
—«Je me suis déjà désabonné. Je n'y chercherai plus jamais de clients.»
Le châtain sourit mais un pli amer se creuse à la commissure de ses lèvres et le vieillit. Il suppose que cela devait arriver un jour, un truc vraiment moche qui les mette en difficulté. Les hommes sont parfois pires que les saloperies surnaturelles qu'ils chassent.
Un client trop bavard dans le Dakota du Sud a rompu le contrat de confidentialité pour raconter son aventure sur les réseaux sociaux. Dean et Sam ont été filmés à leur insu plusieurs fois et ils ont découvert dans la douleur que la valeur juridique de leur contrat est une belle connerie. Harry Bailey a fait le buzz pendant exactement deux jours avant d'être supplanté par la vidéo d'une fille dessinant le profil de Johnny Deep sur sa manucure. Le châtain en a hurlé de rire. Tout allait mieux mais la productrice d'une émission télé à sensations à Minneapolis s'est montrée beaucoup plus coriace – elle avait acheté leur numéro de téléphone à Bailey, les gens sont dingues –, peu importe qu'elle hurle dans ses messages vocaux à quel point les frères Winchester étaient sexy et passeraient bien à l'écran. Dean a brièvement eu envie de la rencontrer pour l'exorciser. Ashley Coleman de Fox 9 n'était dingue. L'incident leur a coûté beaucoup d'énergie mais surtout leurs cartes SIM, réduites en morceaux et jetées dans plusieurs poubelles. Pire encore, il a provoqué la perte de leurs rares contacts enregistrés parce que dans l'urgence, ni Sam (avec son énorme cerveau), ni lui (avec son instinct) n'ont pensé à les sauvegarder. Le harcèlement d'Ashley les rendait fous.
Les deux frères se sont terrés à Lawrence pendant quelques semaines mais ils y ont affronté un autre ennemi mortel, le Temps. Le bâtard a gagné.
Castiel lui manque depuis qu'il a vu la maison disparaître de son rétroviseur. Il lui manque atrocement mais Sam et lui ont traité de nombreux autres dossiers depuis Butler avant de replonger dans le même quotidien, à la fois impossible à prévoir et totalement attendu. Des affaires surnaturelles, la gestion de son appartement à Kansas City, la reprise momentanée de son activité de comptable pour une très grosse entreprise de matériel informatique lors d'une période de vache maigre. Tout ça et plus encore qui lui a fait remettre sans cesse au lendemain un appel ou un message au brun, jusqu'à ce que les jours deviennent des semaines et les semaines des mois. Après sept mois à tergiverser, Dean a fini par craindre de déranger Castiel s'il l'appelait. Un message était trop nonchalant. Bordel, qu'était-il censé faire? Écrire un truc banal comme «Salut Cas. J'espère que tu vas bien. Quoi de neuf?» Horrible. Atroce. Castiel mérite mieux qu'un foutu message d'adolescent. Dean rêve de lui certaines nuits et parfois, il se touche dans son lit ou sous la douche, la peau brûlante et les muscles frissonnants parce que – bordel! – ça compte pour lui. Il se souvient des hanches trop fines qui s'emboîtaient douloureusement mais si parfaitement aux siennes, des lèvres qui le dévoraient et le laissaient à peine respirer. Brûlant. Désireux. … Amoureux? «Salut Cas. J'espère que tu vas bien. … Je pense à toi.» Jamais assez bien, jamais assez suffisant. Il a laissé traîner et maintenant, il va se présenter chez Castiel à l'improviste.
Le châtain jette un regard à la banquette arrière.
Pas tout à fait à l'improviste.
Dean a lu et relu suffisamment de fois le contrat signé par Castiel pour se souvenir de tout ce qui le concerne, y compris sa date de naissance. Surtout sa date de naissance parce qu'il est bon en calcul mental, que Castiel est très légèrement plus jeune que lui et qu'il trouve ça sexy. Donc il est là, à quelques kilomètres de la maison du brun, avec un cadeau pour lui faire une surprise. Dean est un putain d'impulsif.
—«… Sam, ça te dit de faire un détour par Butler? C'est à cinquante kilomètres.»
—«Tu veux y aller maintenant?»
—«Oui, maintenant. Maman et papa peuvent attendre quelques jours, on leur a dit qu'on prendrait notre temps pour aller les voir à Lawrence.»
—«… Et tu comptes te présenter chez Castiel comme ça? Sans t'annoncer?»
—«L'effet de surprise, c'est cool. Fais ton sac, on quitte Pittsburgh dans quinze minutes.»
C'était le cas dans ses rêves – entre un pelotage sur le canapé et un baiser contre le mur –, accompagné d'un sourire charmeur et d'un bon mot, quelque chose comme «Surprise! J'ai un cadeau pour toi!» Ouvrir les bras d'un geste invitant. Toujours sourire. Fermer les yeux puis les bras autour du brun pour lui rendre son baiser parce que Castiel serait en train de l'embrasser follement comme dans une série télé. Ouais, dans ses rêves ça paraît toujours bien. Maintenant, il n'est plus aussi sûr de lui. Il aurait peut-être dû prêter une plus grande attention au sourcil levé de son frère qui criait «Est-ce que tu es vraiment sûr de toi?». Dean est un putain de grand impulsif.
Le châtain pianote nerveusement sur le volant.
L'Impala est arrêté au dernier feu de signalisation avant Belmont Road. Le jeune homme reconnaît la zone plus résidentielle, les maisons cossues alternant avec des demeures anciennes. Celle qui ressemble à une sorte de petit château, cette autre aux peintures colorées. … Plus loin, celle du brun. Il vérifie machinalement le nom de la rue, toujours imprimée en blanc sur le petit panneau vert un peu laid. Police de caractère banale, poteau planté bien droit sur lequel le nom se détache comme le sommet d'une hache.
Plus loin, Belmont Road.
Dean arrête l'Impala devant la maison, tend le cou pour la regarder. Il reconnaît tout. Deux étages, peinture gris anthracite et blanche. La large galerie extérieure au soubassement en pierre. Les frises délicatement sculptées sur la façade. Le bow-window (réparé) de la chambre de Castiel au premier étage. Il déglutit.
—«Nous y sommes», dit doucement Sam.
—«Oui.»
—«Est-ce que tu es sûr que tu ne veux pas le prévenir de notre retour avant d'aller le voir? Te présenter chez lui comme ça est un peu… audacieux.»
—«Tu n'as pas protesté quand je t'ai proposé de faire un détour par Butler», proteste Dean.
—«Tu avais ta tête de petit con décidé, tu ne m'aurais pas écouté. Je te demande juste si c'est le genre de chose que tu apprécierais…»
Le châtain passe une main dans sa nuque. … Non, il n'aimerait pas ce genre de surprise. Ou si, cela dépend de la personne qui se trouve derrière la porte. Si c'était Castiel, il serait très heureux. Et atrocement rancunier après un aussi long silence. Il crispe ses doigts sur le volant. Merde.
—«Il va falloir te décider ou un voisin va appeler la police parce qu'une voiture suspecte stationne depuis longtemps dans un quartier très résidentiel…»
Dean lui donne un coup de coude dans les côtes et regarde à nouveau la maison de Castiel. C'était son idée après tout. Une distance d'à peine cinquante kilomètres était un putain de signe cosmique. C'est maintenant à lui de la transformer en quelque chose de raisonnable donc pas de sourire malicieux ou de bons mots, juste de l'humilité pour faire amende honorable. Puis embrasser follement Castiel – se faire follement embrasser par le brun –, et virer Sam de la maison en l'autorisant exceptionnellement à prendre l'Impala pour aller chez Jessica.
Il frotte ses paumes sur ses cuisses. Elles sont un peu moites.
—«… Maintenant que nous sommes là…».
—«Est-ce que tu veux y aller seul? Je comprendrais que tu ne veuilles pas que je sois là, je peux attendre dans l'Impala le temps que tu désamorces… ce qui doit être désamorcé avec Castiel», propose gentiment Sam en défaisant sa ceinture de sécurité.
—«Ce n'est pas aussi grave que ça. Je n'ai pas tué son chien et je ne lui apporte pas de mauvaise nouvelle, c'est juste une visite surprise.»
—«Les retrouvailles peuvent être comme des au revoir Dean, pas forcément agréable…»
—«Ne te fais pas prier Sammy. Tu te demandes aussi comment il va, non? Alors tu viens avec moi.»
Le châtain lève les yeux au plafond et détache sa ceinture de sécurité. Dean n'a pas réellement besoin de son frère avec lui – pas de connerie comme le fait d'être plus fort à deux – mais Sam apprécie le brun. C'est important pour lui et si sa présence peut aider à ce que les choses se passent bien – mieux? – entre Dean et Castiel alors le châtain trinque sans hésitation. Bordel, il n'a pas donné signe de vie depuis neuf mois…
Une main sur le toit de l'Impala, le châtain regarde la maison. Elle lui a manqué aussi avec son agréable jardin et son escalier en bois qui ressemble à celui d'un château. Dean se sent toujours comme un mec très friqué quand il le descend lentement, une main sur la rampe et l'air hautain. Ça faisait rire Castiel.
Du courage, Dean Winchester.
Sam l'attend déjà en bas du perron, les mains dans les poches de sa veste et un sourire aux lèvres. Le châtain récupère un petit sac en papier kraft sur la banquette arrière et déglutit. Ouais, du courage. Le gravillon crisse sous ses pieds. Le bouton en cuivre de la sonnette brille doucement, bien lustré et sans corrosion. Dean s'apprête à appuyer dessus mais soudain, la porte s'ouvre devant lui.
—«Oui, je sais maman! Je fais juste l'aller-retour pour aller chercher ma Batmobile!»
Un petit garçon blond, habillé d'un costume de Batman, se tient dans l'embrasure. Une main posée sur la poignée, il regarde quelqu'un dans la maison dont la voix résonne. L'enfant roule des yeux.
—«Non! Je veux pas prendre le doudou de Kim, elle n'a qu'à venir avec moi!»
—«Ta sœur est un bébé de dix mois, elle ne marche pas… Ramène-lui son cochon en peluche s'il te plaît avant qu'elle ne se mette à pleurer. S'il te plaît, Noah.»
Le petit garçon grommelle. Il ferme la porte avec humeur et tourne brusquement les talons. Manque de heurter Dean. Celui-ci le regarde d'un air interdit. L'enfant le dévisage aussi puis appuie ses petits points serrés sur ses hanches, les pieds bien plantés dans le sol. Dean remarque que le bas de sa cape est coincée dans son pantalon, probablement la dernière fois qu'il est allé aux toilettes. Il pourrait rire mais il n'a pas envie.
—«C'est pas votre maison. Je vous connais pas, je parle pas aux inconnus», dit-il avant de sauter en bas du perron.
Il court dans les plates-bandes devant la maison et disparaît à l'angle de la palissade voisine.
… Quoi?
Dean crispe ses doigts sur l'anse de son sac, une goutte de sueur coulant le long de son dos. Il n'a pas pensé à vérifier le nom inscrit sur la boîte aux lettres en bas de l'allée et il n'y en a pas sous la sonnette. Est-ce que celui du brun était écrit il y a neuf mois? Il ne se souvient pas. Est-ce que Castiel… déménagé? Est-ce qu'il a déménagé?
Le châtain jette un regard à Sam qui hausse les épaules et appuie sur la sonnette. La porte s'ouvre à nouveau. Les yeux rivés sur leurs portables, deux adolescentes jumelles habillées de crop-tops en crochet et de larges jeans sortent à leur tour sur le perron. L'une d'elle tient en laisse un grand chien de berger blanc aux yeux vairons. L'animal se précipite vers Dean et enfonce son museau dans son entrejambe avant de renifler très fort. Sam ricane.
—«Dégage de là!», siffle le châtain en le repoussant, les joues rouges de gêne.
Les adolescentes lèvent la tête pour dévisager les deux frères. Crop-Top-Rose glisse son smartphone dans la poche arrière de son jean.
—«Désolée. Nixon n'est pas méchant. Il n'a qu'un an, on fait encore son éducation», dit-elle en tirant sur la laisse.
Le chien contourne Dean et renifle ses fesses, sa grosse queue touffue battant joyeusement l'air derrière lui. Le jeune homme jure atrocement tandis que Sam éclate bruyamment de rire. Crop-Top-Violet attrape le berger par le collier pour le ramener vers elles.
—«Ne vous énervez pas ou Nix' va croire que vous voulez jouer avec lui. Est-ce qu'on peut vous aider?», demande-t-elle d'un air suspicieux.
—«Il a un sac. Ils doivent venir pour la fête, Tessa», souffle sa sœur en désignant Dean d'un signe de tête.
—«Tu savais qu'on attendait encore du monde, toi? On ne les connaît pas Mia, on ne va pas laisser entrer n'importe qui. … Même s'ils sont canons.»
Le châtain esquisse un rictus vaguement reconnaissant.
Le chien blanc continue à s'intéresser d'un peu trop près à son anatomie en faisant de petits bruits humides, Dean sent la chaleur de son haleine à travers la toile de son jean. Exaspéré, les joues rouges de gêne, il attrape la balle que tient Crop-Top-Violet et la jette hors du perron. Nixon s'élance immédiatement, arrachant la laisse des mains de Crop-Top-Rose.
—«Qu'est-ce qui vous prend?! Vous êtes malade?!», s'exclame-t-elle en les fusillant du regard. «Nix', reviens ici! Reviens immédiatement! Au pied!»
Les deux sœurs s'élancent devant la maison. Dean n'est pas très fier de voir le chien blanc les faire courir derrière lui mais il semble vraiment s'amuser alors il sourit quand même. Voir un chien s'amuser est sympa.
—«… Qu'est-ce que c'est que ce bordel Sam? Qui sont tous ces gens?»
Son frère hausse les épaules et le châtain regarde la sonnette d'un air mauvais, comme si elle était un foutu portoloin capable de le transporter dans une foutue dimension où la maison de Castiel est remplie d'inconnues. Le petit garçon blond en costume de Batman est de retour, une voiture et une peluche dans les mains. Il grimpe les marches quatre à quatre, passe devant eux dans les regarder avant de s'engouffrer dans la maison. Comme s'il habitait là. Bordel.
—«Maman! Il y a des gens bizarres devant la maison!»
Soudain, dans cet étrange ballet qui met Dean de plus en plus mal à l'aise, le châtain aperçoit un visage familier.
Un garçon brun habillé d'un tee-shirt sur lequel est imprimé un smoking, apparaît dans l'embrasure, l'air suspicieux. Ses joues ont un peu perdu de ses rondeurs d'enfant mais c'est bien Tom Moore. Il les dévisage et cligne des yeux d'un air incrédule.
—«… Dean? Sam?»
—«Salut mon petit pote. Plutôt cool ton tee-shirt», répond le châtain en souriant.
—«C'est – Bon sang, c'est vraiment vous! Merde, vous êtes vraiment là! Vous êtes vraiment revenus!»
—«Est-ce que ta mère est au courant que tu jures comme un grand garçon?»
—«On a mis un bocal à gros mots dans la cuisine mais c'est pas moi qui y mets le plus de pièces… Merde, vous êtes là…»
—«Surprise!»
Le châtain écarte les bras, l'air bravache. Tom n'est pas du tout Castiel, il n'appréhende pas de se voir claquer la porte au nez s'il se montre trop Dean Winchester. Le garçon hésite un instant avant de se jeter contre lui pour le serrer dans une étreinte maladroite. Dean caresse gentiment ses cheveux un peu ébouriffés.
Devant la maison, Crop-Top-Rose et Crop-Top-Violet courent toujours derrière le chien de berger. Tom salue les jumelles d'un signe timide et s'empresse de se recoiffer avant de regarder le sac en papier de Dean.
—«Vous êtes venus pour la fête, c'est ça? Maman vous a prévenu?»
—«De quelle fête parles-tu?», demande gentiment Sam.
—«De la fête d'anniversaire de Cassie. C'était il y a quatre jours mais on l'a organisé le week-end. … Vous savez que c'est aujourd'hui, pas vrai? Il a quarante et un ans, c'est genre… tellement vieux», dit-il en roulant des yeux.
—«Je vais avoir quarante-trois ans dans quelques mois, mon pote…»
—«Ce n'est pas pareil Dean, tu as une voiture super cool.» Tom rit. «Cassie va être tellement heureux de vous voir! Entrez vite!»
Devant eux, le garçon rit comme s'il s'agissait de la meilleure plaisanterie du monde mais Dean entre presque timidement dans le vestibule. Oh, cette odeur de bois ciré et de légère poussière. Elle lui a manqué.
—«… Tu es sûr de toi?»
—«Tu plaisantes? Bien sûr qu'il va être fou de joie! Toi et lui, vous aviez ce… truc entre vous, pas vrai? Cassie n'en parle pas mais je sais qu'il va être heureux. Maman ne vous aurait pas demandé de venir si ça lui faisait du mal, non?»
—«Probablement pas», acquiesce Sam en jetant un regard éloquent à son frère.
Dean regarde avidement de lui.
C'est la même maison mais pas tout à fait. Il remarque immédiatement que la décoration a un peu changé, que de nombreux d'objets d'art ont disparu. Il se demande si Castiel a des problèmes d'argent et si c'est bien le cas, il n'a pas tiré le gros lot à la super loterie avec le châtain. Dean n'a pas à plaindre – son investissement immobilier à Kansas City est agréable – mais il n'aura jamais les moyens d'acheter à Castiel une porcelaine française ou un meuble anglais sans liquider son plan épargne-retraite.
Une cavalcade bruyante résonne sur le palier puis dans l'escalier. Une petite fille descend maladroitement les marches, les salue avec timidité avant de s'enfuir dans le couloir en direction du jardin. Trop de chien, trop d'enfants inconnus. Dean joue nerveusement avec les anses de son sac.
—«Viens, tout le monde est dans le jardin», dit Tom en le tirant par le poignet.
—«Qui ça?»
—«Tu sais bien, tout le monde. Maman, papa et Julia. Les voisins du quartier et des gens que je ne connais pas», répond le garçon en roulant des yeux. «Cassie a beaucoup d'amis depuis qu'il va mieux. Maman dit que les gens sont hypocrites parce qu'il est exactement le même qu'avant mais qu'ils sont plus sensibles à un joli visage. … Je pense qu'elle a raison parce qu'Ava Foster a eu une plus grosse part de cake au chocolat lors du dernier jour d'école. Tous les garçons de la classe disent qu'elle est jolie.»
Dean acquiesce sagement. Mea culpa mais lui aussi est (très) sensible au joli visage de Castiel.
Le jardin d'hiver est inondé par le généreux soleil de juillet. À droite, un grand buffet a été installé, lourdement chargé de boissons et de gâteaux. À gauche, les cache-pots en porcelaine sont à nouveau remplis de plantes vertes luxuriantes. Deux baies vitrées sont ouvertes sur le jardin, Dean remarque qu'il est noir de monde.
—«Maman! Ils sont arrivés!», crie Tom.
Les discussions cessent, tous les visages se tournent vers eux.
Sur le seuil, Dean rougit un peu de gêne. Il reconnaît certains invités – il est même surpris de voir Mrs. Singleton parmi eux – mais la plupart des gens lui sont inconnus. Ils ont toutefois tous en commun d'être habillés pour une garden party. Pas le genre barbecue avec bière et saucisses industrielles mais une garden paaarty prononcé avec l'accent anglais. Une femme en tailleur avec un petit chien dans les bras porte même un chapeau. Pas une casquette, un chapeau élégant avec une très légère voilette. Le châtain a un peu honte de ses traits tirés par la fatigue, de sa barbe de trois jours négligée et ses boots en cuir un peu sales. Il a changé de tee-shirt en quittant Pittsburgh; au moins celui-ci n'a pas de traces de transpiration sous les aisselles. Aucun mouvement dans la foule, si ce n'est une jeune femme sur leur gauche qui hausse un sourcil appréciateur dans sa direction.
Sam tousse discrètement derrière lui et le châtain le fusille du regard.
—«Ne me regarde pas comme ça. Je te promets que je n'étais pas au courant», proteste le blond en levant les mains entre eux.
—«Il y a une fête dans le jardin de Cas», siffle-t-il.
—«Comment voulais-tu que je le sache? Je n'échange pas en secret avec Carol et Jessica pour vous organiser des retrouvailles dignes de héros de romans.»
—«Vous ne saviez pas pour la fête? Mais alors pourquoi –?»
—«Tom?»
Un verre à la main et les sourcils légèrement froncés, Carol marche vers eux. Dean enfonce légèrement sa tête entre ses épaules. Du courage, Dean Winchester.
—«… Surprise?», tente-t-il maladroitement.
Il ne savait pas à quoi s'attendre alors il est agréablement surpris quand la jeune femme tend son verre à Tom avant de l'attirer dans une étreinte très serrée. Elle rit contre lui, un soupçon de larmes dans sa voix. Pas de la tristesse, de la joie et Dean sourit timidement.
—«Tu sais ménager ton effet Dean Winchester. Que faites-vous ici?», glousse-t-elle en le dévisageant.
—«C'était l'anniversaire de Cas et on était encore à Pittsburgh il y a une heure. J'ai pensé que pousser jusqu'à Butler était une bonne idée mais je ne m'attendais pas à… tout ça.»
Il désigne le salon et le jardin d'un geste un peu incrédule. Bon sang, les invités boivent dans de vrais verres, pas de gobelet en carton. Carol repousse une mèche folle sur son front et hoche la tête.
—«Maintenant que Castiel est redevenu fréquentable, il a beaucoup d'amis dans le quartier. J'ai organisé la fête avec lui, il a dressé la liste des invités en conviant tous nos voisins et je n'ai pas eu à cœur de lui dire que certaines personnes seraient aussi bien ailleurs.»
—«… La femme au petit chien est membre de votre comité de quartier, n'est-ce pas? C'est celle qui trouvait que l'état des plates-bandes de Cas dévaluaient Belmont Road.»
—«Elle le trouve absolument charmant maintenant», roucoule exagérément la jeune femme avec de sourire. «Pour le moment, je dois admettre que nous passons tous un excellent moment.»
Sam rit joyeusement. Pas longtemps. Dean a aussi repéré Jessica à leur gauche, en train de parler avec son grand-père Gary Osborn. La jeune femme lui effleure l'avant-bras avant de se diriger vers eux. Le châtain observe son frère rejoindre nerveusement Jessica d'un pas un peu hésitant, les mains dans les poches. Dean est soulagé de voir qu'il n'y a ni gifle ni insultes pour l'accueillir. La blonde sourit doucement avant de lui embrasser la joue, une main dans la sienne.
—«Cette journée est en train de venir encore meilleure. Tu as même apporté un cadeau à Cassie», rit Carol en lorgnant sur le sac.
—«Ma mère m'a bien élevé», grommelle-t-il.
—«Je suppose que tu as envie de le lui offrir. Attends-moi ici, je vais le chercher. Mange ou bois quelque chose en attendant, le cake aux fruits confits est aussi délicieux que le paradis.»
Dean sourit d'un air un peu crispé. Peut-être plus tard, il n'a pas très faim. Le châtain salue Jessica mais la jeune femme lui répond distraitement. Très près de Sam, elle discute doucement avec lui, sa main toujours dans la sienne. Le châtain entend son frère s'excuser d'avoir manqué leur dîner et lui affirmé qu'il a beaucoup pensé à elle, qu'il a été stupide de lui dire qu'ils ne devaient rien se promettre quand il a quitté Butler. Dean hausse un sourcil admiratif. Ça a l'air très simple quand Sammy le dit, plein de regrets et d'excuses sincères.
Gêné par la présence de ces inconnus dans la maison, le châtain erre un peu avant d'accueillir avec soulagement le sourire malicieux de Mrs. Singleton.
—«Bonjour Dean. Vous nous avez manqué», dit-elle en lui tendant la main.
Le jeune homme s'empresse de la presser délicatement dans la sienne. La propriétaire du Clarence Inn est aussi rayonnante, très joliment apprêtée dans sa robe évasée et la broche vintage épinglée sur sa poitrine. Elle est comme une vision sortie d'un vieux film et dans le monde de Dean franchement en bordel depuis quinze minutes, c'est réconfortant.
—«Bonjour Mrs. Singleton. Je suis surpris de vous voir ici, vous connaissez Cas?»
—«J'ai fait du tri dans le grenier de l'hôtel et j'ai trouvé ses coordonnées dans l'annuaire de Butler. Il est venu et m'a acheté certaines vieilleries que je comptais donner à un prix dont je n'osais rêver. Il paraît que le vieux rocking-chair de ma tante Martha est une pièce de musée datant du début du XIXe siècle», rit-elle.
Dean acquiesce. Un rocking-chair est un truc assez cool. Mrs. Singleton serre gentiment son avant-bras.
—«Je ne savais pas que vous connaissiez aussi Mr. Novak. Est-ce chez lui que vous travailliez pendant votre séjour à Butler? Il a dû devenir un très bon ami si vous êtes revenu pour son anniversaire.»
—«Il l'est et j'ai trop tardé à revenir. Pour être honnête, j'appréhende même un peu de le revoir», répond-il avec une pointe de nervosité.
—«Vous êtes vous quittés en mauvais terme?»
Il hausse les épaules. Ce n'est pas du tout ce qu'il dirait, c'était juste une séparation sans promesse ni déclaration. Dean se dit qu'il a eu tort à un point que le dire ne serait même pas amusant. En neuf mois, il peut se passer des centaines de choses qui lui feraient regretter sa stupidité jusqu'à la fin de ses jours. Le sac en papier pèse lourd dans sa main.
Mrs. Singleton regarde par-dessus son épaule avant de sourire.
—«Vous allez pouvoir lui présenter vos excuses Dean, il vient de revenir. Il était à l'étage avec Cole», dit-elle doucement.
Le châtain ne demande pas qui est Cole. Il se retourne au moment au Castiel descend les marches du jardin d'hiver vers le jardin. Une assiette à dessert dans une main, le brun sourit et Dean reçoit un uppercut dans la poitrine. C'est lui, l'homme en smoking de la photo. Incroyablement beau, le corps solide, la mâchoire bien dessinée et ce sourire, oh ce sourire. Plein de vie. Finies les chemises qui flottaient sur ses épaules trop fines, terminés les pantalons qui s'accrochaient à ses hanches parce que les os de son bassin étaient trop saillants.
Le brun est follement séduisant et Dean est amoureux.
Castiel parle et rit avec un homme qui crochète un bras autour de son cou. Un inconnu très tactile. Il tient une assiette de son autre main et le châtain déteste voir qu'il partage les mêmes goûts. Il pince les lèvres. Ce n'était qu'un baiser, pas une promesse d'éternité.
Tom et Carol trépignent d'impatience. Quand Castiel regarde le jardin, ils crient un «Surprise!» tonitruant.
Castiel l'aperçoit.
Ses yeux bleus s'écarquillent de surprise, il penche légèrement la tête sur le côté et – oh – Dean est aussi éperdument amoureux de lui qu'il y a neuf mois.
L'assiette penche dangereusement dans sa main et l'inconnu la rattrape avant de lui pincer la hanche. Dean trouve que son corps est trop près du sien, que ses doigts sont très bas sur son bassin. Il échange quelques mots avec le brun – a-t-il réellement besoin de lui parler à l'oreille? Connard – et ce dernier hoche lentement la tête.
Castiel gagne le jardin.
Dean a les pieds fichés dans le sol jusqu'à ce que Mrs. Singleton le pousse gentiment en avant.
—«Vous devez aller saluer le héros du jour, Dean».
Ouais. Ouais, il va faire ça. Les deux hommes se rejoignent dans l'herbe. Dean contemple le brun – il le respire – jusqu'à l'indiscrétion. Si beau. Si éclatant de santé. Si vivant.
Non loin d'eux, le bosquet sous lequel Sam a enterré le paquett est luxuriant et putain, il a réussi.
—«Salut Cas. Tu as l'air d'aller bien», souffle-t-il doucement.
—«J'ai repris le sport avec Everett. Je l'ai battu au sprint lors de notre dernière sortie.»
—«C'est cool. En quel temps?»
—«Nous ne sommes pas d'accord mais je l'estime à 15 secondes au 100 mètres.»
Dean s'esclaffe tandis que Castiel esquisse un sourire. Oh, ce sourire…
—«… C'est grâce à toi.» Il se mordille les lèvres. «… Je n'arrive pas à croire que tu sois vraiment là.»
—«Je suis désolé Cas, ça m'a pris beaucoup plus de temps que je ne l'espérais.»
—«… Est-ce que tu voulais vraiment revenir à Butler?»
Le brun a plongé son regard dans le sien. Si clair, si bleu. Pas de pupilles dilatées et noires comme l'enfer. Juste parfaitement et magnifiquement bleus. Ça rend sa gorge un peu sèche et sa langue pâteuse dans sa bouche. Dean hoche lentement la tête.
—«… C'est exactement ce que je voulais. Joyeux anniversaire Cas», sourit-il un peu timidement.
Le châtain se prépare à une poignée de mains. Éventuellement une brève accolade mais rien d'intime parce qu'il a gardé le silence pendant neuf foutus mois et que l'inconnu les dévisage en picorant sans façon dans l'assiette de Castiel. Oui, Dean se prépare à beaucoup de choses – y compris à une monstrueuse déception parce qu'il a gardé le silence pendant neuf foutus foutus mois – mais il n'est pas prêt pour l'étreinte dans laquelle l'attire le brun. C'est un peu hésitant avant que Castiel ne s'agrippe à lui. Le châtain referme immédiatement ses bras autour de lui. Fort, très fort.
—«Je suis content que tu sois là. La maison est vide sans toi et tes émissions télés», chuchote Castiel à son oreille.
C'est un peu tendancieux venant d'un homme qui semble si intime avec cet autre homme derrière lui mais Dean s'en fout comme de son premier caleçon. Il plonge son nez dans le cou du brun et le respire. Plus d'odeurs de maladie ou d'hôpital, seulement des notes délicates et sexy de parfum.
Après une dernière pression dans son dos, Castiel le relâche et lui sourit joliment. La tension dans les épaules de Dean disparaît comme par magie. Il a été tellement con.
Quelqu'un le tire doucement par le bas du tee-shirt et il tourne la tête. Confortablement installée dans les bras de Sam, Julia le salue d'un baiser maladroit avant de regarder sur le sac en papier.
—«Tu as apporté un cadeau pour Cassie? C'est son anniversaire, il faut lui donner un cadeau.»
—«Qu'est-ce que tu lui as offert?», demande le châtain du tac-au-tac.
—«Un dessin de sa maison.»
—«Je l'ai déjà accroché sur la porte du frigo, c'est le plus beau dessin que j'ai vu de ma vie», acquiesce Castiel.
La petite fille glousse de contentement. Tom se glisse entre eux, un sourire malicieux aux lèvres.
—«Julia a raison, tu as un très beau sac…», dit-il en lorgnant à son tour dessus.
—«Laisse-moi deviner, tu lui as aussi fait le plus beau dessin de sa vie. Je me souviens que tu portais un tee-shirt de Spider-Man la dernière fois qu'on s'est vu», ricane Dean.
—«Je ne suis pas un bébé. Je lui ai acheté du chocolat avec mon propre argent!», rougit le petit garçon.
—«C'est aussi le meilleur chocolat que j'ai jamais mangé.»
Dean rit joyeusement. Cet homme est parfait. Tous ces regards lui brûlent le visage alors le châtain tend le sac à Castiel. Tant pis s'il espérait un moment avec moins de public et avec son frère déjà parti chez Jessica. Sa pénitence commence peut-être ici.
—«Ouvre-le Cassie!», babille Tom avec excitation.
Castiel sort un petit paquet rectangulaire, entouré de papier bleu. Il défait soigneusement l'emballage, décolle les scotchs l'un après l'autre avec application. Dean trouve ça à la fois exaspérant et adorable. Le brun contemple l'écrin vintage en maroquin avec étonnement. Le couvercle est doré du logo un peu élimé d'une grande maison d'horlogerie. Il l'interroge du regard mais Dean se contente de hausser légèrement les épaules, les mains dans ses poches. Il les cache pour éviter d'essuyer frénétiquement ses paumes moites sur son jean quand Castiel ouvre l'écrin.
—«… Tu n'aurais pas dû, Dean. C'est beaucoup trop…», souffle-t-il d'un ton incrédule.
—«C'est une montre. Dean t'a offert une jolie montre», acquiesce Julia en se penchant vers lui.
—«Cole, viens voir! Dean a offert une montre à Cassie!», braille son frère.
Le plus-vraiment-inconnu les rejoint d'un pas sautillant et Dean se raidit. Merde, il est encore plus séduisant vu de près. Un beau complet sur le dos, pantalon, veston, veste et chemise. Un faux air de Simon Baker. Un type ne doit pas être du tout ridicule en smoking à côté d'une femme portant des dizaines de milliers de dollars de diamants. Le châtain le déteste.
Cole les salue d'une espèce de ridicule petite révérence, Dean a envie d'écraser la part de tarte à la crème sur sa chemise immaculée.
—«Jolie babiole», siffle-t-il avec admiration en contemplant la montre. «Est-ce que tu m'autorises à la regarder de plus près?»
—«C'est un cadeau, Cole. Je l'aime comme elle est, tu n'as pas besoin de l'expertiser…»
—«Oh aller Cassie, c'est trop drôle quand il fait son truc!», s'esclaffe Tom en se pendant à son bras.
Le brun hésite avant d'acquiescer. La montre en main – Dean n'aime pas le voir la toucher – Cole sort une petite loupe de bijoutier dans la poche intérieure de sa veste.
—«Un artisan ne sort jamais sans ses outils», rit-il en la portant à son œil.
Le châtain transpire un peu, son tee-shirt colle à ses épaules. Il le déteste.
La montre est un cadeau offert par un client reconnaissant il y a quelques semaines. Sam et lui l'ont débarrassé d'un sort jeté par un collège jaloux de sa réussite professionnelle. Qui aurait pu deviner que le débonnaire Robert Griffin, avec ses chaussures en daim et ses cravates trop larges, descendait d'une sorcière de Salem et que son sang lui permettait de lancer de véritables malédictions? Pas lui de toute évidence car il s'est contenté de petites mesquineries qui ont fait passé leur client pour un mec horriblement malchanceux. Les deux frères ont rapidement réglé l'affaire mais la récompense a été royale. Dean a vu cette montre chez leur client, il l'a distraitement imaginé au poignet de Castiel. Mr. Ford l'a décrite comme un modèle vintage de Rolex et le châtain espère qu'il a dit vrai pour éviter toute humiliation en public.
Cole observe le bracelet, le boîtier puis le cadran de la Rolex avec attention. Tom et Julia gloussent de plaisir et le châtain se demande ce que ce connard prétentieux peut avoir de si amusant.
Il retire la loupe de son œil.
—«Le patient est en excellent santé. Bracelet et cadran en acier, mouvement à quartz avec trois complexions. C'est un beau modèle du début des années 1980 de la marque Rolex dans son écrin d'origine. Très beau cadeau», dit-il avec envie. «Je vais l'accrocher à ton poignet. Vous permettez?»
Le châtain n'ose pas refuser et lui dire d'aller se faire voir avec son costume et sa petite loupe prétentieuse. Il doit se contenter de voir Cole glisser le bracelet en cuir autour du poignet de Castiel. Son seul réconfort est d'observer le brun en train de faire jouer la lumière sur le cadran en souriant. Son cadeau lui plaît.
—«Elle est garantie sans mauvais esprit ni malédiction ni démon.»
—«… Tu es désespérant, Dean», soupire Sam avant de chatouiller Julia. «Si tu me montrais ce qu'il y a de bon à manger au buffet?»
La fillette glousse de plaisir.
Castiel admire une dernière fois le boîtier en acier argenté et lève les yeux sur Dean. Celui-ci passe une main gênée dans sa nuque. Sam a raison, il est un crétin.
—«Est-ce que tu as déjà mangé ou bu quelque chose? La tarte aux cerises est délicieuse.»
—«… Est-ce que je peux rester?»
—«Est-ce que tu serais attendu autre part? Tu es ici, Dean alors je vais te servir une énorme part de tarte puis tu me feras le plaisir de manger du cake aux fruits confits. Mrs. de Fabio a précisé qu'elle ne repartirait pas avec le plat mais je ne le mangerai jamais sans un peu d'aide, il est beaucoup trop sucré à mon goût…»
Le châtain s'esclaffe.
Cole murmure quelque chose à l'oreille de Castiel avant de s'éloigner vers les jumelles au crop-top, revenues avec Nixon et à nouveau en train de pianoter sur leur smartphone. Dean a l'impression de le voir se rouler à moitié dans l'herbe pour jouer avec le chien de berger. Au-delà du fait d'être un connard prétentieux, ce type a un vrai problème.
Le châtain emboîte le pas à Sam et à Julia en direction du buffet. Une assiette richement garnie dans une main, il se fraye ensuite un chemin parmi les invités. On l'accueille avec le sourire, on parle agréablement avec lui. Dean se sent à l'aise et apprécié mais il jette de fréquents regards en coin vers Castiel. Cole est souvent à ses côtés, charmant, rieur et facétieux. Il le touche, l'effleure, le papouille mais le brun le repousse gentiment, sans tendresse particulière. Quand Castiel l'a l'embrassé – l'a poussé, pressé, acculé, contre le mur –, les jambes de Dean ont tremblé.
Le châtain tâche de se concentrer à nouveau sur la femme au chapeau et au petit chien, occupée à lui raconter la dernière réunion du comité de quartier. Dean s'ennuie – il se moque prodigieusement du règlement qui impose jusqu'à la fréquence de l'entretien des pelouses devant les maisons – mais il sait être charmant. Sa barbe de trois jours semble aussi avoir un effet particulier sur son interlocutrice. Un peu plus loin, Castiel discute avec un couple. Le brun le regarde, ils plongent dans les yeux l'un de l'autre. Comme avant. Dean esquisse un sourire.
—«Vous ne pensez pas?»
—«Je vous demande pardon?», dit-il en regardant Mrs. de Fabio.
—«Je disais qu'il est préférable de refuser la construction d'une cabane qui serait visible depuis la rue.»
—«C'est préférable sauf pour les enfants qui s'y amuseraient. Mon père avait construit une cabane dans le jardin quand j'étais gamin, j'y passais des après-midi entiers à refaire le monde», répond-il en haussant les épaules.
—«… C'est amusant, Mr. Novak a dit exactement la même chose à la réunion.» Elle arrange son chapeau du bout des doigts. «Est-ce que le cake aux fruits confits est à votre goût? Je l'ai préparé ce matin.»
Dean cligne des yeux avant de rire. Il accompagne galamment Mrs. de Fabio jusqu'au buffet et Castiel le remercie d'un sourire.
Mince, c'est vraiment comme avoir sa place quelque part.
.
.
Castiel se ressert un fond de champagne et rejoint le jardin, une assiette à dessert dans l'autre main.
La nuit a commencé à tomber et les guirlandes de lanternes japonaises suspendues dans les arbres diffusent une agréable lumière. Il a protesté quand Carol les a achetées – plus encore quand il a fallu les accrocher parce qu'il n'est pas à l'aise sur l'escabeau – mais il doit admettre que l'effet est joli.
Le brun descend les petites marches vers le jardin.
La plupart de ses invités sont rentrés chez eux, il ne reste que les fidèles, familièrement assis dans l'herbe sur de grandes couvertures. Dean est assis en tailleur, les mains derrière lui pour se soutenir. Tom somnole sur ses genoux. Les lanternes japonaises nimbent son visage de teintes douces et chaudes. Ses cheveux ont une délicate couleur de miel, comme les poils de sa barbe. Ça provoque des papillons dans le ventre de Castiel. Un peu plus loin, Julia est allongée entre Mrs. Singleton, Sam et Jessica, plongée dans une leçon d'astronomie impromptue. Elle s'est un peu recroquevillée contre le blond mais elle tient bon, les yeux fixés sur le ciel qui commence à se consteller à l'est.
Le brun tend son assiette au jeune homme.
—«J'ai ajouté un morceau de gâteau au chocolat à la tarte aux cerises. Il faut finir le plat, je me suis dit que tu accepterais de faire ce sacrifice», dit-il.
Le châtain hausse un sourcil plein de défi et Castiel se sent mollir un peu. Après neuf mois, Dean Winchester est toujours aussi séduisant. La lumière des lanternes fait aussi des choses au dessin de ses lèvres. Elle crée des ombres qui accentuent la courbe sensuelle de son arc de Cupidon et la douceur de leur modelé. Tom est trop étalé trop sur la couverture pour lui permettre de rejoindre Dean alors le brun retourne s'asseoir en face de lui. Castiel peut survivre à cette légère frustration, c'est peu de chose comparée à ce qui est niché en lui depuis neuf mois. Il a tellement souri pendant cet après-midi que les muscles de son visage tiraillent un peu.
Appuyée contre Everett, Carol étouffe un bâillement dans sa main.
—«Je pense qu'il est temps pour nous de rentrer. Lève-toi Ju', nous allons y aller. Ton frère s'endort contre Dean», dit-elle en effleurant son genou pour attirer son attention.
—«Tom est un bébé. Je veux rester, Dora est en train de me lire mon thème astram», marmotte-t-elle d'une voix lourde de sommeil.
—«Ton thème astral ma chérie. Je faisais ça à l'université pour me faire un peu d'argent, mon travail à la bibliothèque ne payait pas assez. Je n'étais pas mauvaise vous savez.»
—«Vous continuerez une autre fois. … Ne le prenez pas mal Mrs. Singleton mais je préférerai que ma petite fille s'appuie sur quelque chose d'un peu plus tangible pour construire son avenir, comme faire ses devoirs par exemple», rit Everett en chatouillant Julia.
- «Mais tu expliques mal, je n'aime pas ça…»
- «Ta mère s'en chargera. Allez, debout!»
Carol et son mari se lèvent, grognent légèrement en disant que le sol est trop dur. Castiel pense la même chose mais il aimerait rester comme ça dans le jardin pour le reste des jours.
La petite famille se rassemble en traînant un peu des pieds et Finley baille si fort que le brun peut voir sa glotte. Dean aide Tom à se remettre debout avant de reprendre sa dégustation. Soudain, il se redresse, jure avant de donner un coup de pied à Sam pour le réveiller.
Castiel étouffe un rire tendre. Cela lui a tellement manqué dans sa maison silencieuse.
—«Il fait nuit Sammy!»
—«Tu es tellement brillant…»
—«La ferme. Mrs. Singleton, mon frère et moi sommes arrivés à Butler sur un coup de tête. Est-ce qu'il vous reste une chambre au Clarence Inn?»
Les mains croisées sur le ventre et les pieds nus, la sexagénaire fronce légèrement les sourcils avant de secouer la tête.
—«Je suis navré Dean mais il y a une rencontre médicale en ville ce week-end. Toutes mes chambres sont louées pour la semaine.»
Dean semble contrarié. Castiel a envie de dire que le Clarence Inn n'est pas le seul hôtel en ville mais –
—«Vous ne trouverez pas non plus de place chez mes concurrents. Nous avons tous été assaillis de demandes et le prix des Airbnb en centre-ville se sont envolés», ajoute-t-elle.
—«Merde.»
Le brun ne l'aurait pas formulé de la sorte mais oui, c'est l'idée. Jessica rampe un peu plus vers Sam et embrasse doucement sa mâchoire, une main sur son ventre.
—«Tu peux venir à l'appartement si tu veux. J'ai un canapé-lit», propose-t-elle.
—«Carol?», demande Dean avec espoir.
—«Je suis désolé Dean, ce n'est pas possible mais Cassie peut t'accueillir pour la nuit, n'est-ce pas?»
—«… Je ne voudrais pas déranger.»
Le châtain jette un regard en coin vers Cole, en bras de chemise et occupé à tresser une bague en brins d'herbe. À côté de lui, Nixon dort en bavant sur sa veste tandis que les jumelles portent des anneaux en herbe à chacun de leurs doigts. Castiel cligne des yeux de surprise. Il pose son verre dans l'herbe, ouvre la bouche mais Cole lui coupe la parole.
—«Tiens Cassie, je t'offre un dernier cadeau d'anniversaire», roucoule-t-il en lui tendant la bague en brins d'herbe.
Le dessus est orné d'une petite fleur bleue et le brun se demande d'où elle peut sortir, il a soigneusement tondu le jardin le jour précédent. Il a été bien élevé alors il la prend entre deux doigts et la garde comme ça, brandie devant lui sans plus y toucher.
—«Ne t'inquiète pas, je ne vais pas te demander de la porter», ricane Cole. «Les filles? Il est aussi temps de lever le camp.»
Les jumelles se lèvent, leurs portables toujours à la main. Tessa prend la laisse du chien de berger tandis que Mia adresse un salut général à l'assemblée. Elle s'accroupit devant Castiel et lui embrasse la joue.
—«Merci pour la soirée Castiel, c'était sympa. Tu es toujours d'accord pour faire ta présentation au collège mardi?», demande-t-elle.
—«Tu aurais dû me demander de participer à ta journée des métiers», grommelle Cole en agitant sa veste pour retirer la bave de chien.
—«Tu l'as déjà fait dans la classe de Tess' Pa' et le métier de Castiel est franchement plus passionnant que le tien.»
Dean les observe d'un air parfaitement interdit alors le brun se rapproche doucement de lui sur la couverture. Il peut le faire, Tom n'est plus sur son chemin.
—«Cole est propriétaire de plusieurs espaces commerciaux dans le centre-ville de Butler. Je lui loue un local sur N Main Street, j'ai ouvert un nouveau magasin d'antiquités. Nous avons fait connaissance lors d'une vente aux enchères de bijoux et montres anciens à New York il y a quelques semaines. C'est un collectionneur éclairé», explique-t-il en se penchant vers lui.
—«… Il n'est pas avec toi? Il ne loge pas ici?»
—«Cole et ses filles habitent une belle propriété avec un grand jardin sur Edgewood Road. Sa femme travaille de nuit au Butler Memorial Hospital», répond Castiel en secouant la tête.
—«Ce type est marié?!»
L'incrédulité de Dean le rend charmant. Le brun serre ses doigts sur la couverture, il a envie de toucher la fine barbe sur ses joues du bout des doigts.
—«Il est marié et très fantasque, il a fait du théâtre à l'université.»
—«Il t'a offert une bague en herbe…»
—«Il est vraiment très fantasque. … Est-ce que tu as cru qu'il logeait ici?»
—«Peut-être», grogne Dean.
Castiel rit et les bulles de champagne explosent dans sa tête.
Nixon aboie bruyamment tandis que Tessa et son père se chamaillent se disputent à propos d'une obscure histoire de bijoux. Les bras croisés sur sa poitrine, Mia semble compter les points avec détachement. Elle regarde longuement ses ongles – longs et roses comme son crop-top – avant de passer une main dans ses cheveux.
—«Vous avez tous les deux gagné, nous pouvons rentrer maintenant. Maman va bientôt terminer sa garde», soupire-t-elle.
—«Est-ce que je dois vous accompagner?», s'inquiète Castiel.
—«Merci Castiel mais c'est inutile. Papa n'a pas beaucoup bu et il marche parfaitement droit après avoir mangé son point en sucre blanc raffiné. Tessa et moi allons juste l'empêcher de chanter à tue-tête dans le quartier», ricane-t-elle en prenant sa sœur par la main. «On se revoit mardi à dix heures?»
—«Je te promets que je serai là.»
Castiel se relève souplement, suivi par Dean. Il y a un peu de crème à la commissure de ses lèvres, le brun sent le bout de ses doigts picoter à l'idée de la retirer de son pouce. Il est tellement distrait qu'il remarque à peine la main que Cole lui tend, sa veste drapée sur son avant-bras.
—«Merci de nous avoir invité à ta petite sauterie, j'ai trouvé ça très amusant et plein de rebondissements. Si cette montre te pèse un peu trop, pense à moi. Je serai ravi de te l'acheter.»
—«C'est un cadeau…»
—«… Je ne veux pas te vexer mais je pense que tu n'as pas la moindre idée de sa valeur. Lui non plus d'ailleurs», ricane l'homme. «On se revoit dans quelques jours pour parler de cette histoire de volet roulant au magasin.»
—«Nous avions parlé de nous rencontrer demain.»
—«Je sais mais je me dis que tu vas avoir bien d'autre sujets à penser dans les jours qui viennent…»
Cole lance une œillade expressive vers Dean qui tente de se défaire à nouveau de la curiosité de Nixon pour son entrejambe. Castiel sent ses oreilles chauffer un peu.
—«Très belle prise, je suis content pour toi», souffle-t-il d'un ton taquin avant de jeter un regard alentour. «Chers amis, la famille Gardner vous remercie pour cet excellent moment et vous salue bien bas. Je suggère de refaire ça quand vous voulez.»
—«Tu as une piscine, non? Tu pourrais organiser prochainement une pool party», le taquine Everett.
—«C'est une excellent idée, je suis splendide en slip de bain.»
—«Qui porte encore des slips de bain…», ricane Dean en se grattant la barbe.
Castiel lui jette un regard en coin. Oh, cette barbe… Il a l'impression de sentir le discret scrach scrach dans ses os et ses reins. C'est un son sexy.
L'homme enroule la laisse du chien de berger autour de son poignet avant de hausser un sourcil arrogant.
—«Je suis splendide en slip de bain. Nous en reparlerons aussi quand tu seras au bord de ma piscine avec ton short de bain. … Tu es du genre à porter un short de bain et c'est tout sauf élégant, Dean Winchester. Ils seront strictement interdits à ma pool party. Cassie, tu devras l'empêcher d'en porter. Je parle uniquement du short de bain bien entendu, ce n'est pas ce genre de soirée…», dit Cole avec malice.
—«Ça suffit Pa', on rentre maintenant», soupire Tessa en roulant des yeux.
La famille adresse un salut au reste des invités et s'éclipse dans la maison, suivie par les aboiements joyeux de Nixon.
—«Cet homme te connaît étonnamment bien Dean», sourit Sam en serrant la taille de Jessica d'un bras.
—«La ferme Sammy.»
Dean aide Mrs. Singleton à se relever. La sexagénaire tapote légèrement sa robe pour arranger les plis d'un geste charmant.
—«Je pense qu'il est aussi temps de prendre congé, nous sommes tous fatigués», dit-elle avant de regarder Sam et Jessica. «Souhaitez-vous que je vous raccompagne? Ta voiture est toujours en réparation n'est-ce pas? Tu es venu avec le couple Mason mais ils sont déjà rentrés.»
—«Je vous remercie mais ce n'est pas nécessaire Mrs. Singleton, vous habitez de l'autre côté de Butler. Nous allons appeler un taxi.»
Sam acquiesce lentement, ses doigts noués sur la hanche de la blonde.
Castiel se mord les joues. Lui aussi a envie de se rapprocher de Dean, juste un peu pour sentir sa chaleur. Peut-être aussi sa main sur son corps. Est-ce qu'il ferait ça alors qu'ils ne se sont pas parlés depuis neuf mois? Le jeune homme est très près de lui, il tient prudemment Mrs. Singleton par le coude tandis que celle-ci remet ses chaussures tout en babillant à propos de la constellation d'Andromède, celle des amoureux. Le brun aimerait bien en apprendre un peu plus.
Sur le seuil du jardin d'hiver, la famille Moore et Mrs. Singleton prennent à son tour congé. Dean lorgne en direction de son frère qui, serré contre Jessica, les balance inconsciemment l'un contre l'autre comme dans un slow. Le châtain passe une main dans sa nuque.
—«Je vais vous ramener avant que vous ne vous transformiez en sirop de sucre dans le jardin…»
—«Nous allons appeler un taxi, Dean.»
—«Ne sois pas ridicule. J'ai les clés de l'Impala dans la poche, ton sac est dans le coffre. Vous serez chez Jessica dans quelques minutes au lieu d'attendre un foutu taxi.»
—«Je te remercie.»
Castiel tire distraitement sur une manche de sa chemise. L'attention de Dean est touchante mais il espère que ce n'est pas une manière habile de prendre un peu de distance avec lui. Peut-être n'a-t-il pas assez montré qu'il voulait l'accueillir chez lui. Dean s'est mépris sur sa relation avec Cole, le contraire a semblé le soulager mais c'est – Le châtain lève les mains au-dessus de sa tête pour s'étirer et son tee-shirt remonte de manière intéressante sur son ventre. Les poils dorés sur son bas-ventre sont dorés aussi, ils ont l'air fin et doux. Castiel à la gorge un peu sèche. Ça pétille trop fort sous son crâne.
—«… Est-ce que tu veilles encore un peu? Je serais vite de retour…», demande Dean en massant sa nuque.
Le brun hoche vigoureusement la tête. Il est prêt à veiller toute la nuit, s'il le faut.
—«Je vais commencer à ranger.»
—«C'est ton anniversaire Cas, tu n'as rien à ranger.»
—«Il y a eu beaucoup de gens, d'enfants et de chiens dans ma maison. Il y a des choses à ranger et je n'ai pas envie de le faire demain.»
—«Attends mon retour et nous le ferons ensemble. Tu n'es pas censé faire de choses désagréables aujourd'hui Cas, c'est ton anniversaire.»
Le brun rit. C'est aussi facile que si Dean n'était jamais parti. La même complicité, la même aisance. La même envie dévorante de le toucher, de poser sa bouche sur la sienne, de… Castiel se racle légèrement la gorge.
—«… Je pense que je peux t'attendre pour commencer. La porte se claque automatiquement quand elle se ferme, prends le second jeu de clés qui est dans le vide-poche. Je ne bouge pas de la maison.»
Dean acquiesce, un sourire un peu timide aux lèvres.
Jessica récupère son sac à main dans le jardin d'hiver, Castiel insiste pour que la jeune femme reparte avec un énorme morceau de cake pour aider à finir les restes. Il évite soigneusement de lui confier le plat de la tarte aux cerises, c'est ce que Dean préfère et qu'il a mangé en faisant d'obscènes gémissements de plaisir. Le brun veut le conserver précieusement pour le lendemain quand ils seront… Peu importe ce qu'ils seront. Ça rendra le châtain heureux et Castiel pense que c'est un bon projet de vie dans l'immédiat.
Le groupe traverse la maison pour gagner le vestibule. Le brun ferme la marche, incapable de quitter des yeux les épaules, la nuque et les reins de Dean. Son rire, ses taquineries résonnent dans la maison et c'est tellement bon à entendre.
Dans l'entrée, il l'observe récupérer les clés puis faire tourner le porte-clés autour de son index d'un geste parfaitement naturel. Castiel pose la main sur la clenche pour fermer la porte, ses doigts effleurent ceux du châtain.
—«Je reviens vite Cas.»
—«Je t'attends.»
Les deux hommes se regardent un moment, un très long moment sur le pas de la porte. Le brun se mord les joues. Dean est vraiment beau et ça l'absorbe tout entier. Castiel a l'impression de sentir ses yeux s'égarer sur son visage, sur ses lèvres. Ils se regardent encore, sans un mot, sans un bruit autour d'eux. Le brun a l'impression qu'ils se sont un peu rapprochés, leurs doigts sont presque emmêlés sur la clenche de la porte d'entrée. C'est peut-être seulement ce qu'il veut.
—«Dean! Tu es censé nous faire gagner du temps!», l'interpelle bruyamment Sam depuis le trottoir.
Le châtain cligne des yeux. Castiel aussi.
—«Excuse-moi, le petit garçon est fatigué et il a besoin d'aller se coucher…», marmotte Dean.
Le brun sourit. Appuyé d'une épaule contre le chambranle, il observe encore le dos, les épaules, la nuque de Dean tandis que le châtain rejoint l'Impala en invectivant son frère pour son impatience.
Son regard s'égare sur ses reins puis sur ses fesses. Dean est revenu.
L'Impala s'éloigne sur Belmont Road. Castiel rentre dans la maison. Il retourne dans le jardin d'hiver et considère d'un œil noir la débandade du buffet, les verres et les assiettes en carton abandonnés un peu partout. Il remarque un peu de crème sur le sol en mosaïque de la pièce et l'essuie d'un coup de serviette en papier avant d'aller s'asseoir dans l'embrasure de la baie vitrée.
Un sourire aux lèvres, il attend patiemment le retour du châtain en jouant distraitement avec le bracelet de sa montre.
.
.
Dean est arrêté à un feu rouge sur N Main Street et fredonne. La circulation est faible, Butler est en train de plonger dans le sommeil.
—«Où dois-je aller Jessica?», demande-t-il en cherchant son regard dans le rétroviseur.
—«Tourne à droite au prochain feu puis prend la première à gauche. Mon immeuble est en pierre blanche avec des fenêtres noires et une galerie au premier étage», souffle-t-elle.
Le châtain fredonne encore et surveille l'air de rien la banquette arrière. Sam et Jessica s'y sont glissés ensemble avant de s'enlacer. Son frère regarde distraitement par la fenêtre, un sourire aux lèvres. La blonde est appuyée contre lui, sa joue sur son épaule et les yeux fermés. Leurs mains sont liées sur leurs genoux. C'est très sentimental mais Dean taquinera son frère plus tard, lui-même a quelques sujets de réflexion à l'esprit.
Il gratte sa mâchoire. Pas de raison d'être nerveux, ses retrouvailles avec le brun ont été au-delà de ce qu'il espérait et de ce qu'il pensait mériter.
Il n'a juste pas anticipé le reste de la journée. La soirée. La nuit. Seul avec Castiel. Chez lui.
Dean fait jouer ses doigts sur le volant de l'Impala. Mince, un dénouement vraiment inattendu. Vraiment –
—«C'est ici Dean.»
Le châtain gare souplement la Chevrolet le long du trottoir. Il coupe le contact et ouvre la portière à Jessica. Sam est déjà sur le trottoir, son sac de voyage à l'épaule. Le couple noue immédiatement leurs doigts ensemble et Dean sourit. Il lui fera une misère mais beaucoup plus tard.
—«Soyez sage les enfants. On s'appelle demain, le plus tard possible», rit-il.
—«Nous nous appellerons le plus tard possible», acquiesce Sam. «… Ne foire pas tout Dean.»
—«Sam a raison, ne foire pas tout Dean», répète Jessica.
—«Vous avez vos propres trucs à gérer ce soir, ne vous préoccupez pas des miens. Et tu as imposé à Cas de m'héberger», grommelle-t-il, les mains dans les poches.
—«Je doute que cela le dérange beaucoup. Castiel et moi sommes d'accord sur le fait que les frères Winchester sont difficiles à vivre mais qu'on ne regrettera jamais de vous avoir rencontré. Jamais, Dean. Vis avec ça», ricane la jeune femme.
Le châtain s'appuie lourdement contre l'Impala, les bras croisés sur son torse.
—«… Est-ce que cette histoire de rencontre médicale et de chambres occupées est vraie au moins?»
—«Qui sait? Est-ce cela a de l'importance?»
—«… Non.» Dean sourit et passe une main dans sa nuque. «Je vais rentrer, Cas m'attend.»
—«Il t'attend depuis plus longtemps que tu ne le crois. Va-t'en maintenant et laisse-nous en tête-à-tête maintenant», acquiesce la blonde en haussant un sourcil suggestif.
Le châtain salue le couple et s'éloigne en jetant un dernier regard au rétroviseur latéral. Sam et Jessica sont en train de s'embrasser sur le trottoir. Dean ricane. Il va lui mettre une misère d'anthologie quand ils se reverront.
Il se gare à nouveau devant la maison du brun et coupe le contact.
La nuit est tombée, les fenêtres du rez-de-chaussée sont éclairées et jettent des nappes de lumière sur la pelouse bien entretenue. Les vitraux qui encadrent la porte d'entrée ont des chatoiements de pierres précieuses. Confort. Chaleur. Foyer. Castiel. Dean sourit malgré sa nervosité. Il peut bien y avoir une suite disponible dans le joli hôtel de Mrs. Singleton, avec son excellente table de petit-déjeuner et sa piscine, il n'y a aucun autre endroit au monde où il aimerait plus être à cet instant.
Le châtain récupère son sac de voyage dans le coffre, remonte l'allée jusqu'au perron. Plus d'hésitation maintenant, il a les clés. Littéralement. Il entre dans la maison, fait jouer ses doigts sur la lanière à son épaule où son sac pèse agréablement. Bon sang. Je suis de retour.
—«Cas?»
—«Je suis dans le salon d'hiver.»
Sa voix grave et un peu rauque résonne dans la maison.
Dean dépose lentement, presque respectueusement, son sac dans le vestibule puis sa veste au meuble porte-manteau avant de poser les clés dans le vide-poche du couloir. Cela lui donne furieusement l'impression de rentrer chez lui.
Castiel est assis sur le seuil du jardin d'hiver, les jambes dehors et une épaule appuyée contre le chambranle de la porte-fenêtre. Les guirlandes lumineuses du jardin font aussi briller les verrières colorées. Camaïeu de bleu, de rouge et de vert sur le sol en mosaïque. Camaïeu aussi sur la chemise de Castiel. Ses épaules et ses reins. Dean déglutit. Il récupère une bouteille de champagne entamée et deux verres sur la table du buffet avant d'aller s'asseoir à côté du brun.
—«Bon retour.»
—«Merci. Est-ce que tu veux m'aider à finir? Il en reste pour nous deux.»
Castiel rit. Leurs doigts s'effleurent quand Dean lui tend un verre. Longtemps. Le châtain boit une longue gorgée du sien. Pas mauvais, même si l'alcool a un peu chauffé.
—«Est-ce que Sam et Jessica sont bien rentrés?»
—«Je les ai ramenés à bon port. Son immeuble est sympa et le quartier a l'air agréable. Sam va être très bien chez elle. J'espère juste que Jessica a un grand lit, il prend énormément de place quand il dort…»
—«Je suis persuadé qu'ils sauront très bien s'en sortir», sourit le brun.
Dean acquiesce et boit encore.
Un silence confortable envahit la maison tandis que les deux hommes terminent leur verre. Le châtain s'installe plus à son aise, les mains derrière lui pour se soutenir et les jambes légèrement écartées. Il a envie de rester là très longtemps. Le châtain se lèche distraitement les lèvres, goûtant le goût sucré du champagne. À côté de lui, Castiel joue distraitement avec le bracelet de sa montre.
—«Tu n'es pas obligé de la garder si elle ne te plaît pas…»
—«C'est ton cadeau, Dean», proteste-t-il.
—«Sam m'a offert une tasse en poterie quand il avait dix ans, il prenait des cours. C'était mignon mais je ne l'ai pas gardé pour autant.»
—«Je suis sûr que tu mens… Dieu merci, je suis plus âgé et je sais apprécier ce que l'on m'offre. À moins que tu ne m'autorises à la vendre à Cole?»
—«Jamais de la vie.»
—«Donc je suis obligé de la garder. Maintenant que nous avons mis ça au clair, viens m'aider à ranger, s'il te plaît.»
Dean roule des yeux. Enfoiré charmant.
Bouteille et verres à la main, Castiel se relève souplement et le châtain lui emboîte le pas vers la cuisine. Il recouvre les gâteaux entamés pour les mettre au frigo et salive déjà à l'idée d'achever la tarte au petit-déjeuner. Dean a envie de regarder si sa tasse est toujours dans le placard à vaisselle. Il débarrasse le jardin d'hiver tandis que le brun inspecte soigneusement les pièces du rez-de-chaussée. Dean l'entend grommeler à chaque assiette sale qu'il trouve dans un endroit inapproprié et aux traces de crème sur les tapis et ricane.
Quand il revient dans la cuisine avec les derniers verres, Castiel a les mains plongées dans l'eau savonneuse pour laver les plats à gâteaux. Le châtain s'installe à ses côtés pour les essuyer, comme ils l'ont fait tant de fois il y a neuf mois. Le jeune homme ne cesse de lorgner sur sa montre, soigneusement posée à côté de l'évier.
—«Elle me plaît vraiment mais le vrai cadeau à mes yeux est que tu sois revenu à Butler, tu sais…», souffle-t-il.
En train de fredonner une chanson d'AC/DC, le châtain se fige. Castiel lui adresse un sourire un peu timide avant de baisser à nouveau les yeux sur l'évier rempli d'eau. Dean déglutit.
—«… Cela a pris plus de temps que je ne le pensais. … Sam serait revenu pour voir Jessica, j'aurais été là», répond-il maladroitement.
—«…Oui, bien sûr.»
La voix de Castiel sonne d'une manière un peu fêlée et Dean jure silencieusement. Il pose le torchon sur le plan de travail et se tourne vivement vers lui. Il a dit qu'il ne merderait pas.
—«Sam serait resté chez elle et je serais venu ici, comme nous l'avions dit. Tu te rappelles, on avait prévu d'aller à l'inauguration de ton exposition au Maridon et que je te continue à te raconter des histoires de fantôme pendant une soirée pyjama», dit-il d'un ton malicieux.
—«… L'exposition a été annulée.» Castiel pince les lèvres. «… J'ai tenté de te joindre mais je n'ai pas réussi. Ton numéro n'était plus attribué.»
—«Ouais… Sam et moi avons dû nous débarrasser de nos portables. Un de nos anciens clients a parlé de nous sur les réseaux sociaux et a attiré l'attention d'une productrice de télé qui nous a harcelé. Il lui a littéralement vendu nos numéros de portable pour qu'elle puisse nous joindre. Les gens sont dingues et cette fille était complètement folle. Elle voulait créer une émission pour faire le buzz et relancer les audiences de la chaîne qui l'emploie. Elle nous a appelé des dizaines de fois en trois jours, j'avais presque envie de lui répondre et de tenter de l'exorciser au téléphone.»
Castiel rit et lui tend un plat en verre.
—«Sam et toi auriez eu votre propre émission de chasseurs de fantômes?»
—«Nous aurions carrément crevé l'écran et envoyé Ghost Hunters dans le purgatoire télévisuel de la décennie mais nous avions d'autres choses à faire.»
—«D'autres choses comme de vraies affaires?»
- «Tu as bien retenu mes leçons. Je sais déjà que je suis foutrement télégénique avec des lunettes de vision nocturne, je n'ai pas besoin d'essayer pour en être certain», sourit Dean avant de s'assombrir. «Nous avons dû jeter nos cartes SIM pour nous protéger. Nous étions à bout et Sam et moi n'avons pas… réfléchi. Nous n'avons pas pensé à sauvegarder nos contacts et nos historiques de messagerie et d'appels. Je suis désolé, Cas.»
Le brun dodeline légèrement de la tête et Dean se rapproche légèrement de lui. Il sait que cela n'explique pas – ne pardonne pas – tout mais Castiel doit comprendre la merde dans laquelle Sam et lui ont été plongés pendant trois jours. L'Enfer doit ressembler à ça.
—«… Tu aurais pu me joindre sur le téléphone fixe. J'avais noté le numéro dans votre contrat.»
Le châtain se mord les joues. Ouais, il sait.
Un petit quelque chose d'inconfortable flotte entre eux, quelque chose de non-dit comme tout ce qui transpirait de leur simple «Prends soin de toi» chuchoté bouche contre bouche. Conneries. Castiel est beau, il sent bon, Dean est amoureux de lui. Il n'aura pas d'autre chance alors c'est le moment d'être courageux.
—«… Je sais. Tu utilises même une sonnerie d'appel que tu détestes. Je t'ai suggéré de la changer pour un autre modèle pré-enregistré mais tu as refusé parce que celle-ci est suffisamment désagréable pour t'obliger à décrocher le plus vite possible», débite-t-il d'une voix gênée. «Je sais que tu as un téléphone fixe mais j'étais tout le temps sur la route, à Kansas City pour gérer mon appartement ou chez mes parents. Après plusieurs mois, je ne savais juste plus comment faire pour ne pas être ridicule.»
—«… Tu n'aurais jamais été ridicule, Dean. Et si tu veux, tu peux changer cette sonnerie. Elle m'insupporte vraiment.»
—«Ça devient sérieux si tu m'autorises à faire ça», rit-il maladroitement.
Castiel rince le dernier plat à gâteau et le pose avec soin sur le torchon étendu sur le plan de travail avant de se tourner vers lui. Les mains du brun sont rougies par l'eau chaude, des flocons de mousse parfumée sont accrochées aux poils de ses avant-bras. Dean plonge dans ses yeux bleus.
—«Je te l'ai dit Dean, la maison t'est ouverte pour la durée que tu souhaites. Ça peut être juste pour cette nuit ou pour un peu plus longtemps, je suis d'accord. Tu m'as énormément manqué et je suis à nouveau… plutôt bien maintenant», souffle Castiel en baissant sa manche droite.
—«Tu sais que ça n'a rien à voir. Je t'ai aussi dit que tu étais très bien depuis le premier jour», grogne le châtain.
Le bout de ses doigts picote à l'idée de le toucher, de l'attirer à lui. Dean enroule lentement une main autour de son avant-bras gauche pour l'empêcher de le couvrir. Il caresse les jointures du brun, sa main serrée sur sa chemise.
—«… Je suis souvent sur la route.»
—«Moi aussi, il m'arrive souvent de séjourner à New York ou à Los Angeles pour les affaires. Je fais l'aller-retour sur deux ou trois jours.»
Le ton de Castiel est assuré et le châtain sourit affectueusement. Ses doigts glissent doucement sur sa peau, dessinant les muscles, appréciant la douceur des fins poils noirs jusqu'à se crocheter à son coude. Le brun se laisse tirer en avant sans résister. Ils se regardent toujours. Le jeune homme lève une main pour effleurer sa mâchoire barbue.
—«… Tu m'as manqué Dean», répète-t-il.
Son pouce frotte sur la courbe de l'os maxillaire. Dean a un peu honte mais un frisson descend le long de son dos pour se nicher dans ses reins. Juste là, bien enroulé sur lui-même comme un petit tourbillon chaud et ronronnant. Il hoche lentement la tête.
—«Je suis prêt à me faire pardonner ce que j'ai fais –»
—«Ce que tu n'as pas fait.»
—«… Ce que je n'ai pas fait. Demande-moi ce que tu veux», reprend Dean en ricanant.
—«… Embrasse-moi une nouvelle fois.»
Le châtain l'attire encore plus près et embrasse tendrement son nez. Castiel fronce les sourcils mais avant qu'il ne puisse s'offusquer, Dean l'embrasse sur les lèvres. C'est comme rentrer à la maison.
Les yeux fermés, le brun gronde contre sa bouche.
—«C'est mon anniversaire, tu peux faire mieux que ça», proteste-t-il.
Ni Dean ni Castiel ne savent réellement qui fait le dernier pas pour les faire basculer si délicieusement.
Soudain, ils sont l'un sur l'autre, leurs mains partout, leurs bouches en feu.
Ils s'empoignent, s'agrippent, se pressent.
Ils respirent fort et dur.
Leurs souffles sont brûlants, leurs inspirations hachées.
Le brun gémit délicieusement contre lui alors que Dean maltraite sa lèvre inférieure. Il s'engouffre dans sa bouche offerte, emmêle passionnément sa langue à la sienne. C'est un peu différent du baiser de retrouvailles qu'échangent des héros au cinéma, c'est plus dévorant et impérieux, mais Dean ne peut pas s'arrêter. Il s'enflamme et une boule de désir lui brûle les reins, incendie son bas-ventre. Il se presse contre Castiel plus fort jusqu'à l'acculer contre le plan de travail.
Les yeux fermés, l'esprit bourdonnant, le châtain commence à onduler contre lui.
Frotter leurs hanches.
Appuyer leurs entrejambes.
Faire danser leurs bassins de la même manière.
Il suçote la langue de Castiel et sent le jeune homme bouger à son tour pour lui répondre.
Même désir que le sien. Même excitation.
Le châtain empoigne ses hanches et serre ses doigts dessus. Corps ferme, pas d'arête tranchante. Corps solide, musclé. Dean effleure l'arrière de ses cuisses et serre. Il cambre les reins pour le soulever et l'asseoir sur le plan de travail. Ce serait mieux, il pourrait se glisser entre ses jambes ouvertes et –
Le souffle court, il cligne des yeux.
Castiel pèse… lourd.
—«… Ne le prends pas mal mais je crois que tu as grossi…», souffle-t-il contre ses lèvres gonflées.
Le brun le dévisage, les cheveux ébouriffés et les lèvres rougies par leurs baisers. Décadent. Attirant. Il éclate de rire et enroule ses bras autour de son cou avant de brosser doucement sa bouche contre la sienne.
—«Le Dr. Lauwers est très satisfait de ma courbe de poids. Il dit que je récupère très bien.»
—«Il te dit aussi que tu grossis?»
—«Oui mais il le fait d'une autre manière que la tienne.»
Castiel continue de butiner ses lèvres, de laper leur commissure comme un chaton putain d'adorable. Dean gronde. Il crochète possessivement ses doigts à ses hanches et respire fort dans son cou. Le brun a un léger sursaut de bassin quand il mordille délicatement sa gorge.
Dean embrasse tendrement son cou et sa mâchoire.
—«Je suis souvent sur la route mais je n'ai pas une maison dans chaque ville que j'ai traversé», dit-il lentement.
—«Je suis heureux de l'apprendre, je ne partage pas quand je suis amoureux.»
—«… Moi non plus.»
Le châtain enfouit un peu plus son visage dans son cou, soudain un peu timide.
Voilà, c'est dit. Juste comme ça et il se demande pourquoi il a gardé le silence aussi longtemps.
Les deux hommes bougent l'un contre l'autre dans la cuisine vide. Le frottement de leurs vêtements, de la toile rêche de leur jean contre leur entrejambe et leurs respirations lourdes sont délicieusement indécents. Ils ondulent, parfaitement coordonnés. Dean est follement heureux. Il sent la main de Castiel se faufiler entre leurs bassins collés et empaumer son sexe sensible par-dessus son pantalon. Le châtain siffle de plaisir. Il rue doucement dans sa main et embrasse follement son cou. Merde, Castiel est parfait. Parfait.
—«Je t'assure que je ne voulais pas partir la première fois. Je ne voulais pas quitter Butler, je voulais rester avec toi», ahane-t-il, le plaisir enflant dans ses veines.
—«Ça a été difficile de te voir partir. … Il est toujours difficile de voir les gens qu'on aime partir.»
Les doigts du brun dansent doucement sur la fermeture éclair de son jean. Ils rôdent autour du bouton, invitants et presque sexuels. Le jeune homme l'arrête en prenant délicatement sa main dans la sienne. Castiel lutte un peu pour le toucher encore mais Dean rit et enroule ses bras autour de lui pour l'attirer dans une étreinte chaude et réconfortante. Pas de sexe, juste le plaisir de se sentir l'un contre l'autre. Ensemble. À nouveau. Le brun enlace son dos et niche son visage dans son cou. Leurs aines palpitent doucement l'une contre l'autre, ils sentent l'odeur de transpiration sur leur peau mais ils ne bougent pas. Ils ne bougent plus. Jamais.
—«Nous pourrons discuter des détails mais je pense rester un moment dans le coin», reprend Dean.
—«Je suis d'accord. Je suis d'accord depuis des mois, Dean…»
Castiel frotte son nez dans son cou d'un air câlin. Ils restent enlacés jusqu'à ce que leurs désirs s'apaisent alors que leurs mains effleurent à peine leur dos ou leurs reins. Ils peuvent, ils ont du temps maintenant. Les deux hommes s'embrassent d'un dernier geste languide avant de se séparer.
Dean est tellement foutrement heureux qu'il a l'impression qu'il va voler.
—«… Que veux-tu qu'on fasse maintenant?»
—«Les produits ménagers et les brosses sont dans le placard sous l'escalier. Il y a de la crème sur le tapis du salon bleu et des traces de chocolat sur la tapisserie du salon blanc.»
—«Est-ce que tu es sérieux?»
—«Le tapis a presque quatre-vingt ans et la tapisserie est une réplique sur mesure du papier peint d'origine de la pièce. Je t'assure que c'est très sérieux pour moi», répond Castiel d'un ton pince-sans-rire.
Le châtain l'embrasse rapidement du bout des lèvres et disparaît dans le couloir. Il ne voit pas le jeune homme cligner adorablement des yeux, ni tirer sur son pantalon au niveau de l'entrejambe pour soulager un peu la pression. Dean sait que sa propre démarche est aussi un peu ridicule. Tandis qu'il ouvre le placard sous l'escalier, le châtain espère que Sam s'amuse autant que lui, qu'il se sent aussi à l'aise. Dean n'est pas arrogant mais il pense sincèrement qu'ils l'ont mérité.
.
.
La tarte aux cerises n'attend pas le petit-déjeuner du lendemain mais Castiel aurait dû le savoir.
Dean est en train terminer le plat à petits coups de fourchette précis et rythmés. Assis devant la télé, il est à moitié affalé contre lui dans le canapé et s'esclaffe depuis presque une heure devant un mauvais bêtisier. Le brun est un peu circonspect à l'idée de rire du malheur d'autrui mais les vidéos de chatons, de chiots et de bébés le font sourire. Quand ils ne tombent pas.
—«Je suis sûr que son quad va se renverser quand il va tenter de traverser la rivière!», s'exclame Dean en montrant l'écran de sa fourchette.
Le véhicule patauge dans la boue avant de faire une magnifique chandelle puis un tonneau dans l'eau sale. Le châtain éclate de rire et enfonce son visage dans le cou de Castiel. Ses lèvres effleurent la peau chaude, le brun gigote légèrement contre lui. Il commence à trouver un vague intérêt à cette collection de gadins et de maladresses du début des années 1980 à aujourd'hui.
Castiel pioche distraitement une grosse miette de pâte oubliée sur le bord du plat, les reins confortablement calés contre le dossier du canapé. Dean est chaud contre lui, il vibre presque d'amusement et il sent la cerise. Ça le distrait un peu. Mais il aime toujours les vidéos de chatons, de chiots et de bébés. Quand ils ne tombent pas.
—«Celui-ci est un classique! Je te parie le prochain morceau de tarte que le chiot va s'endormir debout et tomber tête la première dans sa gamelle!», recommence le châtain.
Dean est bon à ce jeu. À moins que Castiel ne soit tout simplement très mauvais. Le châtain a terminé la tarte, il lui retire gentiment le plat des mains pour le poser sur la table basse.
—«Je suis presque admiratif du fait que tu aies réussi à manger tout le plat mais montre-toi un peu plus respectueux de ton travail et évite de mettre de la cerise par terre. Nous avons frotté le tapis pendant plus d'une demi-heure pour faire partir les traces de crème», lui rappelle-t-il en haussant un sourcil.
—«J'ai frotté le tapis. Tu étais debout et tu nettoyais la tapisserie.»
—«Si tu crois que je me suis plus amusé que toi…»
Dean ricane et lui vole un baiser. Ses lèvres sont poisseuses de sucre, elles ont le goût de la cerise. Castiel a faim.
Les deux hommes ont passé les premières heures de la soirée à nettoyer la maison avant de s'affaler devant une émission de télé-poubelle. Le brun aime voir des chatons et des chiots à la télé mais le désir et l'amour crépitent doucement sous sa peau en un bourdonnement continu. Il est hanté par les baisers de Dean et après une heure de visionnage attentif, toutes les vidéos commencent à se ressembler. Chutes, chiots, chatons ou bébés, peu importe.
Le châtain tire la table basse pour la rapprocher du canapé et étend nonchalamment ses jambes dessus. Castiel pince les lèvres. Il a bien fait de déposer la table basse marquetée dans sa nouvelle boutique et de lui préférer ce modèle plus moderne et moins fragile. Dean croise son regard et replie ses jambes.
—«Excuse-moi, Sam dit souvent que je devrais être un peu moins… spontané», dit-il avec une pointe de gêne.
—«Cela ne me dérange pas, je veux que tu te sentes à l'aise. Nous pouvons laisser la table comme ça.»
Le brun a posé une main sur sa cuisse. Il baisse les yeux. Ses doigts sont très hauts sur sa jambe, proche de son entrejambe. Ce n'était pas voulu. Ou peut-être que si.
Les deux hommes se regardent et Dean déglutit un peu tandis que ses prunelles s'assombrissent. Castiel a chaud. Et faim.
—«… Si tu veux que je me sente à l'aise, est-ce qu'on peut parler du lit de la chambre d'ami? Le cadre grince atrocement Cas…», dit lentement le châtain.
—«Il date des années 1950.»
—«C'est impressionnant mais il n'empêche qu'il grince horriblement. Tu te réveilleras dès que je me tournerai sur le matelas», ricane Dean.
Le brun se frotte légèrement les yeux de son autre main. L'autre ne quitte pas la cuisse du jeune homme, son pouce caresse même distraitement l'épaisse toile de son jean. Il est fatigué, la journée a été riche en émotions. Riche en espoir. Riche en baisers aussi. Neuf mois qu'il attend, il n'a pas envie d'attendre encore le prochain matin. Il plonge son regard dans celui de Dean. Castiel est fasciné par la barbe fine aux reflets dorés qui couvre ses joues. Il veut la sentir sur sa peau. Il en a besoin.
—«… Tu n'es pas obligé d'aller dans la chambre d'ami.»
—«Tu es sûr?»
—«Est-ce que tu veux vraiment qu'on fasse comme les magazines conseillent de bien faire les choses? Aller aux deux premiers rendez-vous, attendre le troisième pour s'embrasser et encore un autre pour faire l'amour? Notre rencontre est un peu un bordel. Je viens de fêter mes quarante et un ans aujourd'hui alors je suis assez certain de ce que je veux mais je suis prêt à écouter tes arguments. L'amour, c'est à deux ou pas du tout.»
—«… Comme si j'allais refuser.
Le châtain rit et l'attire à lui pour l'embrasser chaudement. Castiel est déséquilibré, il chute à moitié sur lui mais les bras de Dean le rattrapent et l'enlacent fort.
Nouvelles ondulations. Nouveaux désirs.
Cette fois, le brun ne se laisse pas le temps de palper l'excitation du jeune homme dans son jean. Il se redresse maladroitement, trébuche sur le tapis alors que leurs bouches se dévorent à nouveau et tire Dean derrière lui pour les entraîner dans le vestibule. En bas de l'escalier, celui-ci s'arrache brièvement à ses lèvres pour récupérer son sac de voyage. Castiel l'embrasse encore et se presse contre lui.
Vite. Oh, vite, vite, vite. Plus vite.
Les deux hommes montent l'escalier en chêne dans un concert de respirations haletantes et de baisers.
Castiel vibre de désir mais il n'a pas besoin de faire l'amour avec Dean ce soir. Pas entièrement car il a envie d'entendre et de voir le châtain avoir un orgasme. Le voir nu et le toucher. Le brun a besoin de réaliser que c'est réel avant de s'enrouler autour de lui pour la nuit et ne jamais le laisser repartir.
Il ouvre la porte de sa chambre à tâtons – la belle porte faite sur mesure par le menuisier et son fils – et tire Dean à l'intérieur. Le jeune homme entre. Son sac de voyage fait un petit bruit mou quand il le lâche sur le parquet.
—«Tu as changé la décoration», souffle-t-il d'une voix rauque.
Collé contre son dos, Castiel fredonne doucement dans son cou. Ses doigts se sont déjà glissés sous le tee-shirt de Dean et effleurent la peau nue de son bas-ventre. Ils s'égarent à la lisière de la couture et sur la braguette. Le châtain se cambre dans sa main et commence à onduler inconsciemment contre sa paume.
—«Je ne pouvais pas conserver le même mobilier avec tout ce qu'il s'est passé. Je l'ai vendu à un Texan qui l'a mis dans son ranch à côté de Forth Worth», répond Castiel à son oreille
—«Tu es sérieux? Un vrai ranch avec des cow-boys, des vaches et des –»
Dean est distrait et le brun fronce les sourcils. Il masse avec art son entrejambe, faisait grogner de plaisir son amant. Castiel fait habilement sauter le bouton, descend la tirette et glisse sa main dans son pantalon. Le brun est habile aux jeux de l'amour. Et il a rudement envie de Dean.
—«Ça m'a fait mal de m'en séparer mais je suis content de l'avoir fait. Je n'aurais pas pu être avec toi comme ça dans mon ancien lit. Pas comme avec… Lui», reprend-il en jouant avec son érection.
—«O – Ouais. Oh merde, Cas… Continue…»
Castiel baisser son pantalon et son boxer sous les fesses pour pouvoir le caresser. Dean est débraillé dans sa chambre, son érection pulse dans sa main. Bon sang. Il l'aime, il l'aime, il l'aime.
Le brun le pousse habilement vers le lit, l'esprit bourdonnant de désir et son propre sexe pulsant dans son pantalon. Les deux hommes tombent sur le matelas en riant. Dean les fait basculer d'un coup de rein et se glisse habilement entre ses jambes ouvertes. Castiel inspire brusquement par le nez tandis qu'il recommence à onduler contre lui. Le châtain entreprend d'ouvrir les petits boutons de sa chemise et il tremble un peu. Castiel enserre solidement ses hanches de ses jambes pour aller à la rencontre de son érection. Dean déglutit et effleure son cou et ses clavicules nues du bout des doigts.
—«… Tu es vraiment beau tu sais. J'aurais aimé être un peu moins négligé, je ne pensais pas que j'arriverai au beau milieu d'une fête organisée pour ton anniversaire», avoue-t-il.
—«Tu es parfait. Tu n'as pas la moindre idée de l'effet que me fait ta barbe de trois jours.»
—«Je pensais la raser», répond le châtain en se grattant la mâchoire.
—«Si tu veux mais tu pourras le faire demain. Ou après-demain. … Je vais peut-être jeter mes rasoirs et les tiens.»
Castiel donne un coup de bassin vers le haut, écrasant leurs bas-ventres l'un contre l'autre. Dean grogne et le dévore d'un baiser exigeant. Le brun referme ses bras autour de ses épaules, les reins souples et languides pour bouger en même temps que lui. Dean se baisse vers lui et embrasse gentiment ses lèvres.
—«Tu as raison, je peux le faire un autre jour», répond-il tendrement à son oreille.
Le brun hoche farouchement la tête.
Ils en reparleront, ils ont le temps.
Plus tard.
.
.
Dean observe avec admiration la manière dont le brun bouge sous lui.
Ça va fonctionner.
Bordel, ça doit fonctionner.
Il a l'impression qu'il pourrait jouir là, juste avec quelques caresses et frottements supplémentaires. Castiel l'embrasse durement, leurs langues dansent si fougueusement que le châtain peine à respirer et à le déshabiller correctement. Envie de trop de choses en même temps. Envie de tout. Il est possible qu'il murmure des choses stupides à l'oreille du brun, c'est même plus que probable compte-tenu des baisers affolants dont celui-ci le gratifie.
Dean sourit, la poitrine chaude et le cœur battant à tout rompre.
Demain. Après-demain. Un autre jour.
Sam et lui se sont rarement autorisés à se projeter. Ils ne chasseront pas le mal jusqu'à la fin de leur vie mais en attendant, leur futur a toujours été flou. Le châtain a parfois l'impression de se tenir sur le bas-côté de la route, assis sur le capot de l'Impala à regarder le reste du monde tourner selon un rythme immuable. C'est une sensation désagréable qui le taraude quand Mary lui donne des nouvelles de ses anciens camarades de lycée. Beaucoup sont restés dans le comté de Douglas, elle les croise parfois. Kevin Romero s'est marié pour la deuxième fois. Millicent Bradford vient d'accoucher de son troisième enfant, une fille prénommée Pearl. Stan Hopkins a ouvert une affaire de sécurité informatique prospère, il s'est associé avec Carl Vaughn qu'il a un peu maltraité pendant leur scolarité. Ils ne sont plus vraiment les amis de Dean et le châtain a oublié le visage de certains d'entre eux. Ça fait quand même un peu mal de voir leur vie et de rester en panne sur le bas-côté, même si c'est en compagnie de Baby.
Rien ne l'oblige vraiment à continuer la chasse et parce qu'il n'est pas un foutu héros de comics, il pourrait envoyer se faire voir les recommandations de l'oncle Ben mourant à Peter Parker. Il pourrait arrêter et s'établir durablement comme comptable. Il est bon, les affaires marcheraient bien. Il pourrait le faire pourtant il continue parce qu'il n'a pas de raison d'arrêter.
Demain, après-demain, un autre jour.
Des concepts lointains jusqu'à maintenant. Parce que Castiel est sous lui, en train de l'embrasser, de gémir et d'onduler contre lui pour attiser très efficacement leur désir.
Le châtain cesse de bouger et le dévisage en souriant. Il est beau. Castiel hausse un sourcil et caresse sa joue barbue. Ses doigts sont un peu malhabiles et tremblants d'excitation.
—«À quoi penses-tu?», demande-t-il d'une voix rauque.
—«J'étais en train de me demander ce que je pourrais modifier dans la maison pour me sentir chez moi», répond le châtain en embrassant tendrement sa paume.
—«C'est comme ta barbe Dean, ça peut attendre plus tard. … Mais je préfère te prévenir que je suis difficile en affaire.»
—«… Même en échange de très bon sexe?»
—«Je sais qu'il va être excellent, je t'aime, mais tu dois quand même me laisser en juger par moi-même. Bouge, Dean.»
Le châtain le fait taire d'un vigoureux coup de rein qui fait adorablement couiner Castiel.
Les deux hommes s'enlacent à nouveau avec fougue.
Ouais, ils en reparleront plus tard.
C'est un nouveau projet qui plaît à Dean.
Juste après le très bon sexe.
