Passer enfin à la caisse

Altaïr "Harry" Sirius Gaunt a 17 ans

Lily Gaunt masquait à grande peine sa satisfaction de voir Albus Dumbledore sur le banc des accusés.

Après le fiasco du «mariage» de Severus, elle avait compris qu'elle ne pouvait plus tarder concernant l'avenir de Poudlard. Si son meilleur ami avait déposé plainte contre lui pour abus de pouvoir, elle l'avait définitivement renvoyé de l'école en tant que Régente Serpentard. Puisque Gringotts attendait avec impatience cette révélation, la banque avait fourni sans délai les preuves de ce que la rousse prétendait au ministère qui ne pouvait que s'incliner, surtout avec la bague du clan Serpentard. Sa première action fut de reprendre totalement la main sur l'école, excluant tout influence du ministère, la deuxième de renvoyer Albus Dumbledore pour mise en danger des élèves. Les enquêteurs provenaient de tout le monde magique – donc n'était pas exclusivement sorciers – et les rapports depuis sept mois étaient édifiants. Le vieux sorcier, extradé du pays pour des raisons de sécurité, n'avait pas encore réussi à faire appel à ses alliés et seul son avocat pouvait lui parler mais ce dernier comprenait que c'était une cause totalement perdue.

Puisqu'elle avait indiqué qu'Albus Dumbledore avait assez de contacts en Grande Bretagne pour faire pencher le procès en sa faveur alors que toutes les preuves étaient contre lui, Lily avait eu la satisfaction de voir que le procès se déroulerait directement devant le conseil international magique, puisque ses actes avaient impacté aussi bien les sorciers que les peuples magiques qui vivaient en Britannia. Les pays frontaliers avaient pu envoyer leurs représentants pour témoigner de l'exode massif depuis l'archipel depuis des années à cause des décisions du vieux sorcier. Ses actions envers le clan Gaunt, même s'ils n'étaient pas pénalement punissables, montraient son acharnement pour contrôler ce clan et l'influence qu'il a eue sur Voldemort mis en lumière.

L'autre particularité d'un procès devant le CIM était que tous les sorts actifs sur une personne ne l'étaient plus une fois dans la salle, sauf s'ils avaient été lancés pour sa santé. Sans le soutien de Poudlard et, apprirent avec horreur les médicomages chargés de l'examiner pour évaluer son état de santé, le vol de la magie des membres de l'Ordre du Phénix encore vivants ainsi que de ses sympathisants lui ayant juré fidélité, Albus Dumbledore n'était plus qu'un simple sorcier faisant bien ses quatre-vingt-dix-neuf ans. Affaibli et émacié malgré ses bonnes conditions de détention, si le public pouvait se laisser attendrir par l'image de grand-père abandonné de tous à cause des accusations portées, le personnel judiciaire, les témoins et les victimes ne pouvaient que le mépriser.

Après un mois d'audience, le verdict allait être rendu et Lily tenait à être présente. Depuis qu'elle avait découvert que Dumbledore l'avait magiquement manipulée pour convenir à ses plans, à l'époque épouser James Potter alors qu'elle n'avait aucun sentiment positif pour lui, la rousse s'était jurée de le lui faire payer avec les intérêts en prime. Toutes ces années, elle avait découvert qu'elle n'était pas la seule à lui en vouloir mais son prestige faisait que le plus grand nombre se rangeait à ses côtés sans même réfléchir.

-Veuillez vous lever, ordonna le greffier.

Toutes les personnes dans la salle se levèrent, ce qui sortit Lily de ses pensées. Elle vit les juges prendre place et le greffier déclamer la liste des accusations contre Albus Dumbledore. Enfin, le juge principal prit la parole.

-Nous jugeons Albus Dumbledore COUPABLE!

Tout était dit.

§§§§§

Lily Gaunt débarquait du bateau qui faisait la navette entre la côte et Azkaban. Plusieurs années étaient passées depuis la condamnation à perpétuité d'Albus Dumbledore et trois jours plus tôt, le conseil international magique avait modifié sa peine pour qu'il lui soit désormais impossible de demander une libération anticipée. La raison? La perquisition de l'une de ses nombreuses propriétés cachées avait révélé ses recherches les plus sombres, notamment sur les horcruxes. Visiblement, sa peur de ne pas pouvoir laisser sa trace dans l'histoire l'avait poussé à se rapprocher de Pernelle et Nicholas Flamel, détenteurs de la pierre philosophale puis, quand le couple avait refusé de le laisser l'étudier, vers ce pan sombre de la magie. Son horcruxe avait été retrouvé auprès de Gellert Grindelwald – les autorités cherchaient encore comment l'objet avait pu se retrouver en sa possession malgré son propre emprisonnement – et détruit. Comme il s'agissait d'une pratique condamnée même par la Confrérie de l'Après, la guilde des nécromanciens, personne ne voulait qu'il puisse transmettre ses connaissances, même sur son lit de mort.

Auréolée de son patronus, Lily était accompagnée d'Harry, qui, à l'âge de vingt-sept ans, avait réclamé la tête du clan Serpentard il y a peu. Le jeune homme avait attendu que Severus Prince succède à Pomona Sprout, qui avait pris la tête de Poudlard après le renvoi d'Albus Dumbledore, et se proclame officiellement Régent Gryffondor. Ce dernier était également du voyage et tous avaient voulu épargner Azalée Prince, huit ans, future lady Gryffondor mais surtout, future Serpentard à Poudlard.

Après les vérifications d'usage par les gardes sur place, les trois sorciers furent dirigés vers le parloir, dans les hauteurs de la prison et loin des détraqueurs pour ne pas trop importuner les visiteurs. Ils n'eurent pas à attendre longtemps avant que la porte s'ouvre devant deux aurors qui traînaient littéralement une silhouette décharnée qui fut rudement assise sur la chaise usée. Il leur fallut quelques minutes pour comprendre qu'ils avaient devant eux Albus Dumbledore déchu de toute prestance et qui avait subi les conditions de détention habituellement réservées aux sorcières et sorciers considérés comme mangemorts par ses soins, qu'ils le soient réellement ou non.

-Vous avez une heure, prévint le garde.

-Merci, fit Lily.

Ils attendirent patiemment que le prisonnier relève la tête et les fusillent du regard.

-Que me vaut la visite? cracha Albus

-Allons, allons, railla Lily. Ce n'est pas parce que vous n'avez pas réussi à nous manipuler comme des marionnettes que vous devez être impoli.

-Qu'est-ce que vous me voulez? grogna Albus

-Je tenais à vous présenter moi-même mon fils Altaïr Gaunt, lord Serpentard, et Severus Prince, Régent Gryffondor.

Le vieux blêmit à tel point qu'il en devint translucide.

-Impossible … souffla Albus. Ils ne peuvent pas appartenir à la maison ennemie …

-C'est vous qui avez voulu qu'elles soient ennemies, corrigea Severus. Les maisons de Poudlard sont complémentaires ou sinon, les fondateurs auraient créé quatre écoles distinctes au lieu d'une seule.

-Un Gryffondor ne peut pas être un Serpentard, hoqueta Albus.

-Une maison de Poudlard ne nous définit pas, tout comme notre nom de famille, renifla Harry. Vous savez comme c'était barbant de faire comprendre aux plus jeunes que votre voix ne voulait rien dire? D'ailleurs, pendant que j'y pense, Hermione vous en veut vraiment d'avoir saboté son avenir.

Severus sourit malicieusement. Hermione Granger, Gryffondor dans la même année qu'Harry, avait littéralement bu toutes les paroles de Dumbledore jusqu'à ce qu'elle se rende compte peu après son dix-huitième anniversaire – qui était tombé la veille du mariage raté – que tous les «bons» conseils patiemment susurrés par le directeur de l'école lui avait garanti une exclusion officieuse aussi bien de la société sorcière que de la société magique de Britannia. Rattraper ces erreurs avait été ardu, au bas mot, et sans l'aide de Ronald Weasley, son désormais époux – dont la famille avait pu se débarrasser de l'influence néfaste du vieux sorcier après la mise en garde sur les rumeurs répandues par Ginny – jamais elle n'aurait pu réussir.

-Mais … protesta Albus.

-Mais rien du tout! grinça Harry. Votre plus grand Bien menait la partie sorcière de la Britannia droit dans le mur, il n'y a que vous qui ne vous en êtes pas rendu compte. Vous vous êtes infiltré partout comme de la vermine, vous avez dénaturé nos préceptes parce que vous étiez incapable d'y répondre, vous avez fait croire que vous étiez le nouveau Merlin parce que vous aviez vaincu un mage noir que vous avez contribué à créer et en plus de tout ça, vous pensez que vous seul détenez la bonne parole? Vous êtes fou, il n'y a pas d'autres mots!

-Du calme, tempéra Lily. Maintenant que vous êtes installé dans vos nouveaux quartiers jusqu'à la fin de vos jours, j'aimerai avoir quelques réponses.

-Lesquels? fit Albus

-Commençons par la raison pour laquelle vous avez laissé les Maraudeurs maltraiter Severus, fit Lily. Ensuite, ce qui est passé par votre tête pour croire que ce serait une bonne idée de forcer Severus à épouser l'un de ses harceleurs.

Severus soupira lourdement. L'idée relevait de la folie pure, il n'y avait pas d'autres mots. D'ailleurs, les concernant, Lupin avait été capturé dans l'enceinte même de Poudlard, quelques heures après le fiasco du mariage, et les aurors avaient dû attendre plus d'un an avant qu'il ne reprenne suffisamment conscience de lui pour que la Harde d'Artemis, l'équivalent du conseil international des sorciers, ne puisse le récupérer pour comprendre pourquoi il avait fait cela. Malheureusement, l'embrigadement était tel qu'il était devenu un danger pour les lycans et il avait été condamné à une Chasse Sauvage, équivalent de la peine de mort, six ans auparavant. Quant à James Potter, sans le soutien de son grand maître déchu, il avait été toléré jusqu'aux fêtes de fin d'année où Lily n'avait pas hésité à le renvoyer après s'en être pris à des élèves de 7e année qui soutenaient que la Régente Serpentard avait bien eu raison de renvoyer Albus Dumbledore après tous les manquements dont il était responsable et le mariage de Severus Prince n'était que le point culminant. L'affrontement s'était terminé sur la défaite cuisante du professeur qui avait pris la porte dans la foulée et, bien évidemment, avec une plainte au cul pour agression. C'était d'ailleurs Hermione Granger qui lui avait mis la déculottée dont il avait besoin, une élève que le sorcier avait toujours méprisé car née de moldus et intellectuelle.

Puisque Dumbledore refusait de répondre, Severus se dévoua, usant de la légilimencie.

-Il voulait continuer à piocher dans les coffres du clan Prince, révéla Severus. Il avait réussi à se faire désigner mon tuteur légal à la mort de ma mère, et comme les coffres du clan étaient pleins, il pouvait garder son train de vie. Initialement, il visait Sirius à ma place mais Regulus n'est pas mort de la main de Voldemort?

Surpris, Severus se tourna vers Lily, qui ne semblait l'être.

-Voldemort a utilisé la magie familiale du clan Gaunt pour appâter les mangemorts avec un lien de vassalité, expliqua Lily. Mais avec la marque des ténèbres, c'est un lien d'esclavage qui en est sorti. Quand Regulus a été en danger de mort à cause de Voldemort qui l'a presque tué, la magie familiale me l'a envoyé pour «arbitrer», en tant que cheffe du clan Gaunt. La suite, tu peux facilement l'imaginer …

Le clan Black s'était relevé de la déchéance dans laquelle Bellatrix et Sirius, poussés par leurs parents, l'avaient plongé et il s'était drastiquement éloigné des mangemorts et de leur idéologie comme de l'Ordre du Phénix et du plus grand Bien. Un coup dur pour les camps en guerre.

-Pour ce qui concerne la campagne de terreur des Maraudeurs, poursuivit Severus après s'être repris, il voulait placer Potter comme représentant du plus grand Bien avec un adversaire bien identifié, moi. Je devais être sans soutien autre que les mangemorts et suffisamment haineux pour accepter sans sourciller la marque des ténèbres, quitte à être un peu aidé. Mais lady Gaunt a commencé à se faire connaître et Potter n'a pas pu supporter que l'une de ses marionnettes lui échappe.

-Mais si vous comptiez sur Lupin pour infiltrer deux grands clans, qu'est-ce que vous comptiez faire pour Potter? demanda Harry, intrigué

Le silence du vieux sorcier était éloquent et Severus se dévoua de nouveau.

-Il destinait Potter à celle qui aurait dû être à ta place? s'étonna Severus

-Lily Evans, croassa Albus.

Tous les regards se tournèrent vers Albus Dumbledore.

-J'ai découvert que Lily Evans n'était pas une née de moldus mais la fille de Tom Riddle, expliqua Albus. En l'attachant à une famille de la Lumière avant de lui faire reconnaître son lien de parenté, j'aurais pu avoir le contrôle des mangemorts en poussa sa fille à reprendre le combat de son père. Mais le titre de lady Gaunt a été repris par une inconnue qui a fichu le bordel dans mes plans …

-Oh, vous ne le saviez pas … fit Harry. Je vous présente ma mère, Lily Evans-Black, lady Gaunt.

Albus en tomba de sa chaise, translucide.

-J'ai découvert ma parenté assez tôt, avoua Lily. Mes alliés m'ont patiemment aidé et m'ont indiqué que vous étiez assez intéressé par mon clan sans pouvoir expliquer pourquoi. J'ai donc gardé mon identité secrète et j'ai commencé à me faire connaître comme lady Gaunt. Vous devez vous en souvenir, quand vous nous avez parlé de la prophétie, j'ai catégoriquement refusé de vous donner mon nom.

Albus serra les dents. Visiblement, il se souvenait de cette rebuffade.

-J'ai également pu me détacher de vos «aimables» conseils, notamment après la purification rituelle de la magie pour accéder à la tête d'un clan, indiqua Lily. Vous pouvez donc comprendre que je n'avais aucune envie de vous voir tourner autour de ma famille. Severus, tu en as assez?

-Oui, confirma Severus en se levant et en défroissant ses robes. Quand il était directeur adjoint, il avait convaincu Dippet de le laisser agir en son nom, notamment pour gérer l'histoire de l'héritier de Serpentard et une fois directeur, il n'a fait aucun rituel comme sa position l'exigeait et il a méthodiquement ignoré toutes les alertes du château.

-Il n'a donc aucun respect pour l'héritage des fondateurs, comprit Harry, écœuré. J'en ai assez entendu.

Les deux sorciers, restant polis, lui dirent adieu avant de quitter la pièce. Lily observa son ancien directeur, pensive.

-Vous savez, quand j'ai lu votre biographie, je me suis sincèrement demandé comment votre complexe d'infériorité avait pu vous pousser à mettre l'Europe à feu et à sang, déclara Lily. Maintenant que je vous voie, je me rends compte qu'en fait, vous êtes tellement resté dans votre bulle que vous ne vous êtes jamais rendu compte que les autres n'étaient pas des pions que vous pouviez bouger à votre guise et que votre prestige ne vous protégeait pas de toute accusation. J'espère que vous allez apprécier vos dernières années et que Magia vous fera payer vos actes. Adieu, Albus Dumbledore, et à jamais.

Elle tourna des talons et abandonna définitivement tout ce qui le concernait.

Fin