Il semble que je sois incapable de faire court ces derniers temps. Un chapitre de plus de 23 000 mots, avec quelques intrigues se profilant, mais surtout beaucoup, beaucoup de scènes à caractère sexuel. S'il-vous-plaît, ne lisez pas ce chapitre, a fortiori la fic toute entière, si vous n'êtes pas à l'aise avec ce thème.
Bonne lecture.
Chapitre XVIII : L'Amant
Bellatrix l'ignorait encore, mais les mois qui suivirent le départ de Rodolphus allaient se révéler comme les plus lumineux de son existence. Jusqu'à un certain évènement qui surviendrait au cours de l'année 1973, venant clore une parenthèse aussi brève qu'inespérée, Bellatrix vécut une année de félicité rare, tissée de souvenirs qu'elle chérirait à jamais. Ces réminiscences, faites de liesse, deviendraient inaccessibles à Azkaban, tant elles avaient constitué ce qui se rapprochait le plus d'une félicité absolue, dont elle n'en reverrait jamais la couleur et n'en goûterait plus la douceur.
Mais n'allons pas trop vite en besogne.
En cette fin d'été, Bellatrix découvrit d'abord les délices inconnus d'une vie en solitaire. Rodolphus avait quitté la maison familiale et ne serait pas de retour avant plusieurs mois. Rabastan, désormais accablé par le poids des responsabilités laissées par son frère, se retrouvait fréquemment absent du manoir Lestrange, accaparé par des affaires autrement réservées à Rodolphus. Libérée de toute contrainte, sans colocataires, sans beaux-parents réprobateurs, sans Rodolphus ni Alecto, sans les débauches nocturnes des Mangemorts ou les regards noirs échangés au petit-déjeuner, Bellatrix savourait un plaisir ineffable.
Elle n'en revenait pas des récents bouleversements dans sa relation avec le Seigneur des Ténèbres. De l'attitude froide et distante qu'il avait de tout temps imposée entre eux, et ce jusqu'au soir du Nouvel An où ils avaient couché ensemble pour la deuxième fois de leur vie, il avait évolué vers une attitude plus relâchée à son encontre lors de leurs deux dernières rencontres, espacées de quelques heures seulement, et conclues à chaque fois par des étreintes charnelles d'une intensité telle qu'elle en frissonnait encore. Le contraste était saisissant.
L'origine de ce changement demeurait incertaine. Bellatrix n'en percevait que les contours, devinant sans certitude la cause ou, à défaut, les circonstances de ce revirement. Sa récente solitude lui offrit tout le loisir de méditer sur les évènements de l'année écoulée. Manipulant ses souvenirs, les disséquant, les fragmentant jusqu'à l'obsession, elle en vint à la conclusion qu'un basculement s'était produit lors du mariage des Rosier.
Ce jour-là, Lord Voldemort l'avait entraînée à l'écart pour réprimer la scène qu'elle s'apprêtait à faire devant l'assemblée, alors que Rodolphus venait de laisser entendre une implication du Seigneur dans un complot mêlant le patriarche Lestrange et le médicomage français Mirepoix. À cet instant, Voldemort s'était conformé à l'image qu'il projetait depuis toujours : froid, distant, implacable. Il l'avait même châtiée sans s'attarder.
Plus tard, durant le dîner, il l'avait ignorée avec une ostentation cruelle et délibérée.
Ce ne fut qu'au moment de la danse, qu'il lui avait proposé de manière aussi impromptue qu'inattendue, que leur relation connût un bouleversement certain. De maître inatteignable et glacial, il s'était mué en un séducteur narquois, joueur, mais toujours drapé de cette acidité sous-jacente. Il ne cherchait plus à dissimuler son emprise sur Bellatrix, affichant sans retenue cette mainmise, tant à ses yeux qu'à ceux de toute la société sorcière présente.
C'était comme s'il s'autorisait enfin à adopter l'attitude qu'il avait toujours désiré afficher envers elle. Bellatrix, ayant exploré à plusieurs endroits la pensine et été témoin des conflits entre le Seigneur des Ténèbres et Reginaldus Lestrange, en avait conclu que la retenue dont Voldemort faisait preuve à son égard trouvait son origine dans une forme de respect – celui qu'il réservait à l'un de ses plus anciens et fidèles partisans. Mais après l'assassinat brutal du patriarche par Fabian Prewett, scellant à jamais dans la mort les différends entre le Mangemort et son Maître, l'indiscrétion grotesque de Rodolphus ce jour-là, semblait avoir redistribué les cartes.
Elle imaginait qu'au cours de ce dîner, tandis qu'il demeurait étrangement silencieux, s'attardant sur les bavardages d'Avery, il avait pris une décision cruciale : s'affranchir de tout ménagement vis-à-vis de Rodolphus.
À présent que Rodolphus s'était vu expédié pour une mission d'une durée indéterminée, Bellatrix voyait sa théorie confirmée. Lord Voldemort n'avait certainement pas goûté aux machinations de Rodolphus à ses dépens, et la sévérité de la sanction infligée semblait presque excessive, comme si elle portait en elle un message limpide destiné à l'ensemble des Mangemorts : Je ne suis pas un pion que vous pouvez déplacer à votre avantage dans vos petites intrigues mesquines. C'est moi qui dicte les règles.
L'éloignement de Rodolphus, au moment même où les rumeurs concernant leur relation gagnaient en intensité, s'apparentait à un étendard planté en pleine lumière. Bellatrix comptait bien tirer parti de cette ouverture. À présent que la carapace de son Maître avait été fissurée, et qu'il avait, de son propre chef, laissé entrevoir un fragment de leur lien aux yeux des autres, elle ne s'encombrerait plus des rigueurs du protocole ou de la retenue dont elle avait fait preuve dans le passé. Il n'était plus question de laisser s'écouler des mois d'attente silencieuse, consumée par le désir de le revoir. À présent, elle prendrait l'initiative.
Mais Bellatrix restait sur ses gardes: elle n'oubliait pas qu'elle-même devait payer pour son indiscrétion, pour cette audace insensée qui l'avait poussée à fouiller dans la pensine de son Maître. Elle craignait qu'il prît son temps pour concevoir une punition à la hauteur de sa trahison, à l'instar de celle infligée à Rodolphus.
Plongée dans ses pensées et habituée désormais à la solitude de sa demeure, Bellatrix fut surprise, un soir d'août, par le tintement de la sonnette signalant l'arrivée d'une personne via son réseau privé de Cheminées. Ce réseau ne permettait le voyage qu'entre un nombre restreint de résidences : celles des proches parents, principalement du côté des demeures des Black ou des Rosier (la famille maternelle de Bellatrix), ainsi que quelques maisons de la branche française des Lestrange.
C'était pourquoi elle fut étonnée de voir apparaître, devant la cheminée du salon, un adolescent qu'elle connaissait à peine.
— Que fais-tu là ? demanda-t-elle, sa surprise trahissant la moindre nuance de sa voix.
Le visiteur n'était autre qu'Evan Rosier, son jeune cousin âgé d'à peine quinze ans, le frère cadet d'Ethan Rosier, qu'elle n'avait aperçu qu'une seule fois, lors du mariage de Geraldine Avery et d'Ennius Rosier une dizaine de jours plus tôt.
— Bonsoir, madame, dit le garçon avec une timidité perceptible. Je viens à la demande de mon père. On vous réclame d'urgence chez nous… Quelque chose d'horrible vient de se produire.
Alarmée par cette étrange injonction, Bellatrix se leva sans perdre un instant. Elle suivit son jeune cousin à travers les méandres du réseau de Cheminées, pour atterrir dans l'une des demeures les plus remarquables des familles sorcières : le château ancestral des Rosier. Elle s'y était rendue à quelques occasions durant sa jeunesse, lors de visites à la famille de sa mère. Moins luxueux et confortable que le Manoir Lestrange, c'était néanmoins un véritable dédale de couloirs et de pièces sombres, remontant à l'époque médiévale.
Dans le grand salon où elle arriva, un petit groupe de personnes s'était formé, et un mélange confus de discussions tendues, de sanglots étouffés et de paroles réconfortantes rebondissait doucement entre les murs de pierre. À peine eut-elle le temps de reprendre ses esprits que Geraldine Rosier se leva précipitamment. Le visage ravagé, reniflant entre deux sanglots, elle se jeta dans les bras de Bellatrix, éclatant en pleurs.
— Mon père est mort, Bellatrix, gémit-elle d'une voix brisée, tremblante dans son étreinte. Je voulais que tu viennes… Tu es ma seule amie, et je n'ai plus personne. Tous les Avery sont morts…
— Il vous reste votre jeune cousin, Ralph Avery, il est à Poudlard avec moi. C'est un brave garçon, intervint Evan avec sérieux, lançant un regard plein d'assurance à sa jeune belle-mère.
Décontenancée et visiblement mal à l'aise face à cette effusion inattendue, Bellatrix tapota maladroitement le dos de Geraldine, tout en essayant d'assimiler cette nouvelle choquante. Enguerrand Avery était mort ? Un autre des Mangemorts les plus anciens et les plus proches du Seigneur des Ténèbres… disparu ? C'était par le concours de ce Mangemort de la première heure que Bellatrix avait réussi à obtenir une entrevue avec le Seigneur des Ténèbres quelques semaines après la fin de ses études.
— C'est un enfant… d'une branche mineure, et je le connais à peine, se lamenta Geraldine, accablée.
— Vous nous avez, nous, ma chère femme, lança une voix compatissante qui s'était tournée vers eux.
Ennius Rosier, le nouvel époux de Geraldine et l'un des derniers Mangemorts de la génération de Lord Voldemort, se détacha du groupe et s'avança vers elles.
— Les Rosier sont votre nouvelle famille, et nous vous vengerons. Nous vengerons mon vieil ami Enguerrand, je vous en fais la promesse.
Geraldine acquiesça faiblement, encore secouée, avant de s'éloigner de Bellatrix, au grand soulagement de cette dernière. Bellatrix croisa brièvement le regard d'Ennius Rosier, puis tourna son attention vers le petit groupe rassemblé près de l'imposante cheminée. Elle reconnut Ethan Rosier, George Nott accompagné de sa femme, ainsi qu'Antonin Dolohov.
— Que s'est-il passé ? demanda-t-elle.
— Il a été tué par des Aurors dans sa propre maison, répondit Ennius, visiblement peiné.
— Pardon ? s'étrangla Bellatrix. Sur quels critères ? Depuis quand les Aurors s'arrogent-ils le droit de faire irruption dans nos propriétés privées ?
— Il avait reçu une convocation au Ministère fin juillet, pour répondre à des soupçons de collusion avec le Seigneur des Ténèbres, expliqua Ennius, mais il ne s'y est pas présenté. Cet enfoiré de Croupton a signé un mandat autorisant son arrestation à domicile. Ils prétendent qu'Enguerrand aurait résisté et qu'un duel s'en serait suivi. Mais nous ne saurons jamais la vérité : il n'y aura ni enquête, ni procès, et sa baguette n'a même pas été restituée.
— C'est scandaleux ! s'indigna Bellatrix.
Cette nouvelle était des plus inquiétantes.
Geraldine, toujours en pleurs, laissait échapper des sanglots entrecoupés, recroquevillée sur elle-même, tandis que le silence pesant des autres traduisait une rage contenue.
— Ce Croupton… Qui est-il ? demanda Evan en se tournant vers son frère aîné, qui avait travaillé un temps au Ministère.
— Il dirige le Département de la Justice Magique, répondit Ethan. Avant cela, il était au Bureau des Aurors, mais il a été promu après la mort de Maggins, en raison de ses méthodes pour le moins… efficaces.
Bellatrix parvint à dissimuler le haut-le-cœur que ce nom honni faisait naître en elle, mais un accès de rage pure la traversa lorsqu'elle surprit le sourire goguenard qu'Ethan lui lança avant de reporter son attention sur les autres.
— Il commence sérieusement à nous emmerder, ce salopard, marmonna George Nott avec hargne. Depuis des mois, il fouine partout, interroge les familles de Sang-Pur. Même Abraxas Malefoy a eu affaire à lui ! Et il ne s'embarrasse pas de formalités : il débarque sans mandats, utilise du Veritaserum sans autorisation. Heureusement que ce pauvre vieux d'Abraxas n'avait rien d'important à lui révéler. Mais quand il a commencé à s'intéresser à Enguerrand, c'était une autre histoire.
Nott marqua une pause, son regard se perdant un instant dans les flammes vacillantes de l'âtre.
— Le Seigneur des Ténèbres lui avait interdit de se rendre au Ministère. Il savait que ces bureaucrates utiliseraient des moyens secrets, sans doute ceux du Département des Mystères, pour tenter de le briser ou de le corrompre. Du moins, c'est ce qu'a laissé entendre…
D'un mouvement furtif, Nott jeta un coup d'œil à sa femme, à Evan, puis à Geraldine. Bellatrix, attentive, comprit immédiatement qu'il faisait allusion à Igor Karkaroff, Langue-de-Plomb au Département des Mystères et informateur clef du Seigneur des Ténèbres. Seul le cercle restreint, auquel elle appartenait, connaissait son identité.
— Bref, Croupton a largement dépassé les bornes cette fois, conclut Nott avec amertume. C'est une déclaration de guerre. L'Ordre de Dumbledore nous donnait déjà assez de fil à retordre, mais si on doit en plus supporter ce zélé du Ministère, les choses risquent de tourner au carnage.
— Ne t'en fais pas, gronda Dolohov d'une voix basse, presque apaisante. J'aurai de quoi faire trembler l'Ordre sous peu…
Bellatrix lui lança un regard tranchant, comme pour lui intimer le silence. Elle n'aimait pas la désinvolture avec laquelle ils abordaient des sujets réservés au cercle restreint.
— Evan, tu devrais aller te coucher maintenant, intervint Ennius d'un ton ferme.
— Père a raison, Evan, il est tard. Va te coucher, ajouta Ethan, d'un air pressant.
Les Nott prirent finalement congé, mais Bellatrix se sentit obligée de rester pour tenir compagnie à Geraldine, qui sanglotait doucement dans un fauteuil. Elle s'installa sur un canapé à proximité de Dolohov, cherchant, sans grand succès, quelque chose à dire. Décidément, elle n'avait aucun talent pour consoler ceux qui pleuraient leurs morts.
Ennius, Ethan et Antonin échangeaient des chuchotements, leurs voix effleurant à peine l'air tandis qu'ils évoquaient Dumbledore, Croupton et les frères Prewett.
— Où est le Seigneur des Ténèbres ? lança-t-elle soudain, rompant le silence d'un ton tranchant.
— Il était ici plus tôt, répondit Ennius, mais il est parti avec Lucius, Rabastan et Karkaroff chez Abraxas. Ils devaient discuter de leurs contacts au Ministère.
— Il doit aussi inspecter les résidences des Mangemorts dont les noms auraient pu fuiter, ajouta Dolohov. Les protections doivent être renforcées.
Une flamme d'intérêt s'alluma dans le regard de Bellatrix. Si c'était le cas, il était fort probable qu'il vienne vérifier les enchantements du Manoir Lestrange cette nuit. L'idée s'imposa à elle avec une urgence soudaine. Il était temps de rentrer, au risque de manquer sa venue.
— Il va sans doute nous convoquer très bientôt, reprit Ennius, le regard grave. Il est temps de resserrer les rangs.
XxXxXxX
Cette nuit-là, comme elle l'avait anticipé, le Seigneur des Ténèbres en personne vint s'assurer que les protections du manoir étaient infranchissables. L'Elfe-de-maison trouva Bellatrix réfugiée dans un livre, lovée sous un plaid, installée sur l'un des canapés de la bibliothèque.
— Maîtresse, je ressens une intrusion dans le salon, murmura l'Elfe. Il me semble qu'il s'agit du Seigneur des Ténèbres.
Esquissant un sourire, Bellatrix repoussa vivement le plaid et abandonna son livre. Ainsi, il n'avait même pas jugé nécessaire de se faire annoncer. Lorsqu'elle pénétra dans le salon, il était déjà à l'œuvre, traçant des enchantements autour de l'âtre de la cheminée.
— Maître ! s'exclama-t-elle, incapable de masquer la joie qui l'envahissait.
Il lui accorda à peine un regard, concentré sur ses sortilèges.
— Tu ne dors pas ? fit-il d'un ton lapidaire.
Bellatrix perçut aussitôt que Lord Voldemort était furieux. Elle s'en était doutée — la perte d'un partisan de premier plan représentait un revers considérable, aggravé par l'assassinat de Reginaldus Lestrange l'année passée. Son humeur ne l'effraya pas. D'un pas mesuré, elle s'approcha et se plaça à sa gauche, levant les yeux vers lui pour déchiffrer l'expression de son visage. Elle n'y trouva que détachement et contrariété, mais Bellatrix n'était pas sans savoir que les vraies émotions du mage noir étaient toujours cachées sous un masque épais, quasiment impénétrable.
— Non, Maître. Je vous attendais.
— Qui t'a avertie ?
— Les Rosier m'ont informée de ce qui s'est passé. J'ai déduit que vous viendriez renforcer les enchantements du manoir... Sa sécurité a de toute évidence été compromise.
À ces mots, il interrompit son geste et tourna lentement la tête vers elle, son regard transperçant, un brin sarcastique.
— Sais-tu pourquoi la famille Lestrange est, à présent, parmi les plus vulnérables, Bellatrix ?
— Nous ne l'étions pas déjà, Maître? Nous étions dans le viseur de Dumbledore. C'est ainsi que Reginaldus a trouvé la mort, assassiné par Fabian Prewett, répondit-elle en fronçant légèrement les sourcils.
— Tous ceux qui furent mes condisciples à Poudlard sont soupçonnés. Ce n'est guère nouveau. Ce qui vous expose davantage, toi, Rodolphus et Rabastan, c'est ta sœur, Bellatrix.
— Andromeda ? murmura-t-elle, la voix à peine audible.
— Elle sait pertinemment que vous servez mes intérêts. Et elle a trahi sa famille. À ma connaissance, personne n'a encore mis la main sur elle. Est-ce exact ?
Bellatrix acquiesça sans un mot, les yeux baissés, honteuse. Ni son père ni son oncle n'avaient réussi à retrouver l'endroit où elle se cachait.
— Combien de temps penses-tu qu'elle tiendra sa langue ? Jusqu'à quand avant qu'elle ne se présente au Ministère pour dénoncer vos activités ?
— Andromeda ne ferait jamais cela… souffla Bellatrix, avant de pouvoir se contenir.
— Comment peux-tu en être aussi certaine ?
— Elle ne veut plus entendre parler de nous, c'est vrai… Mais elle ne prendra pas les armes contre nous.
Voldemort l'observa un instant, scrutant ses mots avec une froide curiosité.
— Et ton jeune cousin, Sirius ? Il était également présent, n'est-ce pas ? Il t'a vue révéler ta marque, si je ne m'abuse.
Bellatrix sursauta légèrement, surprise que son cousin, de douze ans seulement, puisse être considéré comme une menace.
— Maître, ce n'est qu'un enfant…
— C'est aussi le premier Black à avoir été réparti à Gryffondor, le vivier dans lequel Dumbledore recrute ses pions. Crois-tu sincèrement qu'un tel enfant, comme tu l'appelles, se soit gardé de répéter à ses amis que sa cousine s'agenouille à mes pieds ?
La formulation choisie fit légèrement rosir Bellatrix, un frisson coupable lui parcourant l'échine. Elle chassa d'un battement de cils les mille pensées déplacées qui s'étaient insinuées dans son esprit, se réprimandant intérieurement avec véhémence. Ce n'était ni l'heure ni le lieu pour de telles divagations libidineuses.
Dans les profondeurs sombres des yeux de son Maître, elle distinguait le grondement d'une colère sourde, pour l'instant restée tapie mais qui n'était pas loin de bondir. La menace n'était pas feinte ; elle palpitait dans l'air, dense et pesante.
— Maître, je reconnais la gravité de ma faute lorsque j'ai dévoilé par mégarde mon allégeance. Mais comment prendre au sérieux la parole d'un enfant? Je pourrais facilement les contester. Elle n'aurait aucun poids devant un jury, murmura-t-elle avec prudence.
Un éclat glacé passa dans les yeux de Voldemort.
— Le problème, Bellatrix, est que le Ministère ne s'encombre plus de jurys et de procès, répliqua-t-il d'un ton acerbe.
Il abaissa lentement sa baguette avant de se diriger vers le hall d'entrée.
— Le réseau de cheminée est désormais scellé. Tu ne pourras plus l'utiliser pour te déplacer. Il est contrôlé par le Ministère.
Il avançait avec l'aisance d'un prédateur en territoire conquis.
— À compter de cette nuit, tu n'auras plus le droit de transplaner depuis l'intérieur du manoir. Je vais ériger un sas à l'entrée, et seules quelques personnes, choisies avec soin, pourront outrepasser les défenses sans l'autorisation des propriétaires des lieux.
Il s'arrêta devant la porte du manoir, levant à nouveau sa baguette. Dans un mouvement fluide, il traça des symboles complexes dans l'air, lesquels s'inscrivirent en lueur pâle sur le bois massif, semblant y glisser comme des cicatrices invisibles.
— As-tu une liste à me soumettre ? demanda-t-il sans détour, sans cesser son ouvrage.
— Ma sœur Narcissa.
Voldemort marqua une pause. Il tourna légèrement la tête vers elle, laissant planer le silence quelques instants.
— Personne d'autre ?
— Vous, Maître.
Voldemort leva les yeux au ciel dans un geste d'exaspération silencieuse, abaissant sa baguette dans un soupir à peine audible.
— Je ne comptais pas m'exclure de cette liste, Bellatrix.
Elle baissa la tête, incapable de réprimer un sourire amusé.
— Qu'en sera-t-il des demeures des autres Mangemorts ?
— J'ai renforcé la protection de plusieurs familles dont l'allégeance à l'Ordre des Ténèbres semble avoir été compromise. De plus, dès à présent, aucun d'entre vous ne pourra transplaner jusqu'à mon Quartier Général. Vous ne vous y rendrez que si je vous convoque. En cas d'urgence, vous m'appellerez. Mais plus personne n'a l'autorisation d'y accéder de son propre chef.
Il ponctua sa déclaration d'un regard appuyé, ses yeux fixés sur Bellatrix plus longtemps que nécessaire. La pointe de reproche, bien que subtile, était indéniable. C'était une liberté qu'elle avait usée jusqu'à la corde – et avec une audace bien supérieure à celle des autres Mangemorts. À vrai dire, Bellatrix était persuadée d'être la seule à avoir osé forcer l'entrée des appartements privés de son Maître dans la folle intention de profiter de lui.
Elle comprenait la nécessité de cette décision, mais cela n'atténuait en rien la déception qui l'envahissait. L'idée qu'elle ne pourrait plus se glisser à ses côtés à sa guise – même au prix de risquer son courroux – lui pesait lourdement. Désormais, si elle n'avait rien d'urgent à rapporter au sujet de l'Ordre des Ténèbres, toute rencontre dépendrait de son bon vouloir. Et Bellatrix savait pertinemment que, dans ces conditions, les occasions de le voir s'amenuiseraient drastiquement. Elle n'était pas encore assez dérangée pour oser le convoquer sans autre raison que celle de vouloir le voir.
Elle suivit Voldemort en silence, de pièce en pièce, tandis qu'il scellait portes, fenêtres et cheminées de sortilèges complexes.
— Je suis désolée pour Enguerrand Avery, Maître, dit-elle finalement, brisant le silence, après de nombreuses pièces à l'observer sans mot dire.
— Oui, je le suis aussi.
Elle entendit la sincérité dans ses mots.
De longues minutes s'écoulèrent, troublées seulement par le crépitement de la magie qui s'insinuait dans les murs du manoir. Bellatrix le suivait, pas à pas, les yeux rivés sur lui avec une attention quasi religieuse. Il traçait des enchantements d'une main sûre, effleurant portes et fenêtres du bout de sa baguette, comme s'il insufflait une nouvelle vie à la demeure.
Elle percevait la tension s'effacer peu à peu dans la courbe de ses épaules, la colère s'étioler lentement, laissant place à une lassitude plus sournoise. Des ombres discrètes s'étaient glissées sous ses yeux, et bien qu'il restât impassible, Bellatrix remarqua la fatigue qui imprégnait chacun de ses gestes, alourdissant imperceptiblement sa silhouette droite. Cela la fascinait davantage. Il était là, à quelques pas, troublé peut-être, mais jamais vulnérable. Même épuisé, il demeurait cette force implacable autour de laquelle gravitaient ses fidèles. Cette facette, il ne la dévoilait qu'à une poignée d'élus – elle savait qu'Enguerrand Avery en avait fait partie.
— Est-ce que je peux essayer, Maître ? demanda-t-elle alors qu'ils longeaient la cave voûtée du manoir.
Il s'interrompit brièvement, puis hocha la tête.
— C'est une série complexe de protections, que j'ai raccourci par des calculs arithmantiques.
D'un geste, il sortit un petit carnet et le lui tendit.
— Ce sera plus simple en lisant chaque série. Suis le mouvement précis.
Elle parcourut les lignes de calculs avec appréhension, dépitée en réalisant qu'il s'agissait de runes. Ce n'était pas la première fois qu'elle remarquait qu'il transposait ses recettes de potions et autres formules sous cette forme, mais elle ne savait pas les lire. Elle n'avait jamais étudié cette matière à Poudlard.
Il ricana un peu en constatant sa gêne. D'un mouvement de baguette, il traduisit les runes, révélant dans les airs une série de sorts accompagnés de leurs gestes. Il ne lui restait plus qu'à les prononcer et à les reproduire. L'exactitude de la projection lui permit de réussir sans difficulté la première série de protections. Il se plaça près d'elle, observant son travail, et elle sentit le frôlement de ses doigts contre sa nuque, doux et tendres, comme pour la complimenter. Un frisson de plaisir la parcourut de bas en haut.
— Comment les Aurors ont-ils pu pénétrer dans son manoir ? s'enquit la Mangemort plus tard. N'avait-il pas renforcé ses défenses après avoir appris sa convocation par le Ministère ?
Ils se trouvaient désormais dans le boudoir personnel de Bellatrix, au deuxième étage.
— Si, bien sûr.
Un silence s'étira entre eux.
— Il y a un traître parmi mes fidèles, révéla-t-il finalement.
L'annonce frappa Bellatrix de plein fouet.
— Enguerrand menait discrètement une enquête à ce sujet depuis plusieurs semaines, poursuivit Voldemort. Sa disparition n'est certainement pas une coïncidence. Je suis convaincu qu'il s'apprêtait à découvrir quelque chose d'important.
Bellatrix redressa la tête, ses yeux brûlant de détermination.
— Qui suspectez-vous, Maître ?
— Pour être honnête, Bellatrix, la liste des suspects est longue. Tous pourraient être impliqués.
Il marqua une nouvelle pause, son regard perçant s'attardant sur elle comme pour jauger sa réaction.
— Je pense que le traître était présent au mariage des Rosier.
Une expression de haine passa sur son visage. Voldemort s'arrêta devant l'une des hautes fenêtres du boudoir, son profil se découpant dans la lumière ténue de la lune. Il semblait contempler l'obscurité au-delà du verre, mais Bellatrix savait qu'il réfléchissait, pesant ses mots avec soin.
— Il y a eu… un incident, la nuit du mariage des Rosier.
Bellatrix fronça les sourcils, redressant légèrement la tête.
— Un incident ? Je n'en ai rien entendu.
— Non. Cela aurait jeté l'opprobre sur la famille Rosier et semé la discorde parmi nos rangs. Il valait mieux étouffer l'affaire.
Il marqua une pause, puis tourna la tête vers elle, son regard impénétrable.
— Une coupe de vin a été trouvée, empoisonnée. Un Elfe-de-maison l'a interceptée avant qu'elle n'atteigne la table d'honneur.
— Il s'agissait d'un invité… l'un des nôtres ?
— Qui d'autre aurait eu accès à la salle de réception, Bellatrix ?
Le ton était froid, dépourvu de doute.
— L'elfe n'a pas pu identifier l'auteur. Ses pouvoirs lui ont seulement permis de détecter le poison dans la coupe. L'interrogatoire n'a rien révélé de plus. Pourtant, la nuit suivante, les protections du manoir d'Enguerrand Avery ont été désactivées. Comme j'avais moi-même renforcé ces défenses peu de temps auparavant, cela ne pouvait être que l'œuvre de quelqu'un connaissant ses sceaux.
Bellatrix resta figée, le regard fixé sur le visage de son Maître.
— Je crois qu'Enguerrand s'était approché trop près de la vérité… Le traître, quel qu'il soit, a dû vouloir agir vite pour l'empêcher de découvrir son identité.
Elle inspira lentement, sentant la colère lui brûler la poitrine.
— Vous n'avez aucune idée de qui ça peut être?
— Si je le savais avec certitude, cette personne ne respirerait déjà plus. Mais je sais ceci : le traître est proche. Il fait partie de ceux qui m'ont juré fidélité. Et il était parmi nous, au mariage, à lever sa coupe avec les autres.
Voldemort s'approcha d'un pas mesuré, réduisant peu à peu la distance qui les séparait.
— À vrai dire, Bellatrix, parmi tous mes fidèles invités au mariage, tu es la seule dont l'innocence ne saurait être mise en doute. Lors de l'intrusion… tu étais enfermée dans mes appartements.
La chaleur s'invita aussitôt sur ses joues, teintant son visage d'un rose pâle. Le souvenir s'imposa à elle avec une acuité troublante : Voldemort quittant la pièce en réponse à l'appel pressant d'Avery, la laissant seule, debout dans cette chambre silencieuse, nue et frémissante. Sa robe vaporeuse s'étalait autour d'elle, abandonnée sur le sol de pierre comme une ombre fondue.
Un sourire effleura ses lèvres, discret, presque timide. Il était là, devant elle, si proche que la lueur de la lune portée haut dans le ciel dessinait les contours de son visage avec une netteté presque irréelle.
— J'ose espérer que vous savez que je ne pourrai jamais vous trahir, Maître, souffla Bellatrix, la voix ferme malgré la fièvre qui dansait en elle. Je vous suis entièrement dévouée.
Ses yeux, sombres et brillants d'une ardeur contenue, s'ancrèrent dans ceux de Voldemort sans ciller. Il ne répondit pas. Ses doigts s'élevèrent lentement et vinrent effleurer doucement ses cheveux défaits. Bellatrix sentit son cœur s'accélérer, tambourinant contre sa poitrine.
— Avez-vous d'autres demeures à protéger cette nuit, Maître ? demanda-t-elle, la voix légèrement rauque, trahissant l'émotion qui la gagnait.
— Non. Rabastan et Mulciber s'en chargent. J'ai moi-même sécurisé celles qui présentaient le plus grand risque d'intrusion.
Bellatrix acquiesça distraitement. Ses pensées s'étaient déjà égarées ailleurs. Elle était tout entière absorbée par le désir irrationnel de se jeter à son cou et de l'embrasser, tel une jouvencelle énamourée. Elle s'insurgea intérieurement contre cette impulsion ridicule, s'arrachant à ses rêveries pour retrouver une contenance.
— Il reste une dernière pièce à protéger, Maître.
— J'en suis conscient. Tu prends bien ton temps pour me conduire à ta chambre. Je t'aurais crue plus empressée de commencer par celle-ci.
Une rougeur plus vive encore s'empara d'elle, mais elle accueillit ses paroles d'un sourire.
— Je tentais de faire preuve d'un minimum de retenue, Maître. Que penseriez-vous si je vous avais mené directement là-haut ?
Un éclat amusé traversa son regard. Il s'approcha davantage. Déterminée à prendre les devants, Bellatrix franchit le dernier pas. D'un mouvement fluide, elle s'éleva légèrement sur la pointe des pieds, enroula ses bras autour de son cou et scella ses lèvres aux siennes. Comme la dernière fois, il ne la repoussa pas. Bien au contraire. Sa main glissa dans ses cheveux, et il approfondit le baiser. Une onde brûlante déferla en elle, lui montant à la tête comme une gorgée de whisky pur feu. L'envie de lui fut immédiate. Elle gémit doucement contre sa bouche.
— Montre-moi cette chambre, Bellatrix, murmura-t-il.
Sans un mot, elle s'empara de sa main, l'entraînant à travers les couloirs du deuxième étage d'un pas précipité. Chaque centimètre de sa peau frémissait d'un désir intense. Elle savait que jamais auparavant il n'avait franchi le seuil de cette pièce. Il avait bien-sûr déjà visité la chambre conjugale qu'elle avait partagé avec Rodolphus au premier étage. C'était là qu'il l'avait retrouvée après son enlèvement. Là encore qu'il l'avait examinée, bien plus tard, lorsqu'elle était tombée enceinte inopinément. Mais cette chambre… celle-ci lui appartenait entièrement. C'était son refuge, son antre. Là où elle avait le plus souvent rêvé de son Maître.
Près des hautes fenêtres à la française, ouvertes sur l'étendue sombre du parc noyé dans la nuit, Voldemort poursuivit son œuvre. Sa baguette glissa avec une fluidité élégante, effleurant tour à tour les montants de chaque battant. L'avoir là, dans sa chambre, lui fit un effet fou… C'était un franchissement bienvenu dans son intimité. Si elle pouvait, elle l'aurait ligoté et gardé là avec elle la nuit entière.
Lorsqu'il acheva son incantation, il se tourna vers Bellatrix, capturant son regard d'un éclat étrangement cruel.
— Ton cher mari ne te manque pas ? demanda-t-il, sans signe annonciateur, d'un ton piquant.
— Non, Maître, répondit-elle sans manquer un battement. J'aime cette nouvelle tranquillité, répondit-elle en s'approchant de lui, un sourire malicieux aux lèvres.
Elle glissa ses bras autour de sa taille avec une aisance fantastique, émerveillée par cette indulgence qu'il lui accordait. Levant les yeux vers lui, presque sans hésiter, Bellatrix s'empara de nouveau de ses lèvres. À travers l'étoffe fine de sa robe de chambre, elle sentit ses mains froides s'égarer, explorant lentement la courbe de ses hanches. Le tissu léger semblait disparaître sous leurs caresses, chaque contact éveillant des frissons électriques qui serpentaient sur sa peau. Elle ne portait cette fois ni corset ni jupons. Juste une nuisette de soie blanche, courte, ourlée de dentelles délicates, recouverte d'une robe de chambre damassée de velours bleu. Une main passa sur ses seins, écartant la bordure dentelée, pour en caresser le téton sensible.
La baguette de Voldemort, qu'elle devinait encore glissée contre elle, effleura son buste avant qu'un souffle de magie glaciale et fugace ne réduise la robe de chambre à néant. Bellatrix réprima une pointe de frustration en se rendant compte que sa propre baguette reposait trop loin. Elle aurait aimé lui rendre la pareille.
En réponse, ses doigts s'agrippèrent aux attaches d'argent qui scellaient sa cape. Fébrile mais déterminée, elle les défit en vitesse. C'était la seule barrière qu'il ne lui avait jamais laissée franchir. Jamais elle n'avait pu aller au-delà. Cette nuit-là serait différente, se promit-elle.
Lorsque la cape se déploya et glissa de ses épaules, Bellatrix interrompit leur étreinte un instant, et se retourna pour s'appliquer à la déposer avec soin sur le dossier sculpté d'un fauteuil. Ce bref geste, pourtant rapide, mit un terme prématuré à sa tentative. En un instant, il s'était approché derrière elle, sans bruit, et avait glissé ses bras autour d'elle pour l'enlacer et empêcher tout mouvement. Un frisson la traversa alors que ses lèvres glissèrent jusqu'à sa nuque, son souffle effleurant sa peau.
Les mains du mage noir, froides, s'aventurèrent lentement sur ses hanches, remontant en un lent crescendo jusqu'à effleurer la soie de sa nuisette. L'étoffe céda sans résistance elle aussi, passant au-dessus de sa tête d'un mouvement fluide. Elle était à nouveau complètement nue. Et lui, comme toujours, demeurait complètement vêtu. Un soupir s'échappa de ses lèvres, à mi-chemin entre l'acceptation et la frustration. Pourtant, à mesure que ses mains exploraient la courbe de ses seins, toute pensée cohérente s'effaça pour laisser place à cette langueur brûlante qu'elle ne connaissait que trop bien.
Elle sentit la chaleur se diffuser, s'accumulant au creux de son ventre, prête à exploser. Entre ses jambes palpitait une excitation presque douloureuse. Dos contre lui, Bellatrix renversa la tête, ferma les yeux et se laissa aller, ondulant ses hanches contre lui. Ses doigts effleurèrent machinalement ses mains, toujours caressantes contre la pointe de ses seins, et s'immiscèrent dans leur danse, jusqu'à sentir la baguette qu'il tenait encore, pressée entre sa paume et son sein. Une idée folle la traversa. Elle hésita. Une impulsion irréfléchie. Que comptait-elle faire ? Désarmer ses vêtements d'un sortilège ? La lui ôter simplement ? Elle referma les doigts sur sa baguette. Mais elle n'eut pas le temps de se décider sur ce qu'elle allait en faire qu'une voix glaciale fendit l'air:
— Que fais-tu ?
Bellatrix lâcha aussitôt prise, se retournant pour chercher son regard, les mains glissant avec douceur sur son torse comme pour apaiser la tempête qu'elle avait elle-même invoquée.
— Je… je voulais simplement…
Elle n'eut pas le temps de terminer. D'un geste vif, il la repoussa. Bellatrix trébucha légèrement, tombant avec maladresse sur le fauteuil derrière elle, le souffle court. Ses yeux s'accrochèrent aux siens, cherchant dans cette froideur sévère la moindre trace de colère. Voldemort la fixait, impassible.
— Penses-tu qu'un seul sorcier ait jamais eu l'audace de poser la main sur ma baguette, Bellatrix ?
Évidemment, il fallait que ce soit moi, songea-t-elle, presque avec regret. Qui d'autre serait assez insensé pour tenter une telle chose ? Une fois encore, Bellatrix s'interrogea sur ce qui pouvait bien lui traverser l'esprit, parfois.
La baguette s'éleva de façon presque imperceptible. Bellatrix sentit aussitôt ses poignets se lier derrière son dos, la magie s'enroulant autour d'elle comme des cordes invisibles. Elle frissonna et leva les yeux vers son Maître, toujours debout face à elle. D'un second mouvement de baguette, Voldemort tissa de nouvelles cordes invisibles qui s'enroulèrent autour de ses tibias, les forçant à s'ouvrir brusquement. Bellatrix s'affaissa contre le dossier du fauteuil, le souffle court, alors que ses jambes se retrouvaient suspendues un instant dans l'air avant d'être délicatement déposées de part et d'autre des accoudoirs.
Ainsi ligotée — les poignets liés dans son dos, les cuisses écartées, nue sous le regard scrutateur de son Maître — elle se découvrait dans une position d'une vulnérabilité absolue. L'ironie ne lui échappa pas. Pourquoi avoir pris le soin de choisir cette petite nuisette blanche, si c'était pour se retrouver dans un tel état, dépouillée et offerte, en moins de cinq minutes ? Un léger froncement barra ses sourcils, mais ce n'était là qu'une façade. La moue qu'elle arborait visait moins à exprimer une véritable contrariété qu'à masquer la rougeur naissante sur ses joues. Car en vérité… elle savourait chaque seconde. Il y avait dans cette captivité une forme d'abandon profondément enivrant, un trouble délicieux qu'elle ne pouvait dissimuler.
Son corps parlait pour elle.
Les frissons parcourant sa peau, la tension palpable dans ses muscles et les spasmes qui s'intensifiaient entre ses cuisses trahissaient tout. Elle était à sa merci, et cela lui plaisait plus qu'elle n'osait l'admettre.
— Si tu ne t'obstinais pas à toucher ce qui ne t'appartient pas à chaque fois que nous nous voyons, je n'aurais pas à te restreindre ainsi.
Un éclat amusé flottait dans la voix de Voldemort, mais Bellatrix n'y décela aucune indulgence. Il esquissa un léger mouvement dans sa direction, et elle sentit l'électricité dans l'air, comme si chaque geste de sa part modelait l'atmosphère autour d'eux.
— Vous allez me punir, Maître ? murmura-t-elle, sa voix tremblante d'un mélange d'appréhension et de désir.
Il s'immobilisa.
— Tu aimerais cela…?
— Si cela signifie que vous posiez les mains sur moi, alors oui, Maître.
— Le seul problème, vois-tu, c'est que je n'avais pas particulièrement ma main en tête.
L'insinuation glissa entre eux comme une caresse invisible. Bellatrix sentit son ventre se contracter et un frisson la parcourir.
— Tout ce que vous voudrez, Maître, souffla-t-elle précipitamment, son souffle s'accélérant à mesure que son corps s'enflammait sous l'effet de ses paroles.
Lorsqu'il s'agenouilla lentement devant elle, son cœur manqua un battement. Il ne la quittait pas des yeux, mais son regard s'attarda sur l'intimité offerte devant lui. Bellatrix sentit ses joues s'embraser, et pourtant, elle ne bougea pas, incapable de détourner les yeux de l'homme qui se trouvait désormais entre ses jambes.
— Je ne peux te promettre que ce ne sera pas légèrement punitif, ma chère Bellatrix, murmura-t-il, sa voix soyeuse s'entourant autour d'elle comme une menace.
Sous la lumière crue de la pleine lune, elle le vit s'avancer, ses mains se plaçant délicatement sur ses cuisses, et, lentement, Voldemort posa ses lèvres contre elle, là où elle le désirait le plus. Un choc électrique la traversa, lui arrachant un gémissement incontrôlé. Très vite, sa bouche se mut contre elle, explorant avec application chaque recoin de son intimité. Sa langue s'enfonçait en elle, léchait; ses lèvres s'attardaient autour de ce point palpitant qui faisait vibrer tout son corps. Elle sentait son souffle irrégulier contre elle, témoin silencieux de son propre trouble. Implacable, il poursuivait son œuvre sans relâche, ses yeux aux reflets infernaux toujours ancrés aux siens. Cette fois, ils avaient perdu tout semblant de normalité. Le noir habituel avait cédé la place à des reflets veloutés, des éclairs rouge foncé, étincelants, comme le plat d'une lame recouverte de sang.
Et, comme il l'avait promis, il n'utilisait pas ses mains.
D'abord, cela importait peu. Ses lèvres, sa langue, sa bouche brûlante suffisaient à embraser chaque nerf de son corps, le plaisir éclipsant toute autre pensée. Mais rapidement, l'absence de ses doigts devint une torture insidieuse. Les parois de son intimité se contractaient violemment, suppliant une intrusion – un doigt, deux, ou davantage. Quelque chose, n'importe quoi.
Il n'en fit rien. Bellatrix ne pouvait que s'abandonner, gémissante et tremblante, le bassin ondulant comme elle le pouvait, malgré les liens. Pire encore, Voldemort s'amusa à suspendre ses caresses dès qu'elle approchait du sommet. Il s'interrompait brutalement, la laissant pantelante, la frustration s'amassant dans son ventre comme un nœud impossible à défaire. Pour le tromper, Bellatrix tenta de masquer ses tremblements, de réprimer les gémissements, de stopper les spasmes qui la trahissaient, mais elle échoua misérablement sur tous les points. La vision de son Maître agenouillé entre ses cuisses, sa bouche s'attardant sur son sexe, était trop intense, trop érotique pour qu'elle puisse maîtriser quoi que ce soit.
— Maître, s'il vous plaît…
Sa voix se brisa sur cette supplique, ses joues rouges de l'effort, alors qu'il venait de lui refuser son plaisir une nouvelle fois. Voldemort laissa l'ombre d'un sourire flotter sur ses lèvres, mais il ne répondit pas. Il n'avait jamais été du genre à céder facilement. La torture se prolongea encore, chaque seconde semblant étirer davantage la frustration qui la consumait. Puis, soudain, il s'interrompit. D'un geste lent et méthodique, Voldemort essuya le coin de ses lèvres du revers de la main, levant vers elle un regard froidement calculateur.
Il fit glisser ses jambes du fauteuil avec une facilité presque négligente, puis se redressa de toute sa hauteur. D'un mouvement fluide, ses doigts vinrent défaire un à un les boutons de son pantalon. Bellatrix se redressa aussitôt, du mieux qu'elle le put avec ses poignets toujours liés dans son dos.
— Si tu parviens à me satisfaire sans l'usage de tes mains, déclara-t-il d'une voix douce, je pourrais envisager d'abréger ton supplice.
Son regard s'abaissa vers elle, perçant, dominateur.
Le sexe de Voldemort était déjà tendu, dressé devant elle avec une évidence qui témoignait du plaisir qu'il avait pris à la tourmenter. Bellatrix sentit sa gorge s'assécher – et, inversement, sa bouche s'humidifier. Il était manifestement aussi excité qu'elle. Elle ne se fit pas prier.
S'avançant légèrement sur le bord du fauteuil, elle inclina la tête, sa langue effleurant d'abord la base de sa virilité avant d'en remonter l'étendue avec une lenteur exagérée. Lorsqu'elle atteignit le sommet, elle fit tournoyer sa langue autour du gland, s'attardant juste assez pour recueillir, du bout de la langue, la perle translucide qui s'en échappait.
Les yeux mi-clos, elle plongea son regard dans celui de son Maître, savourant pleinement l'instant.
— Mmh…
Un gémissement discret s'échappa de ses lèvres alors qu'elle les refermait autour de lui, s'enfonçant un peu plus profondément, savourant chaque réaction qu'elle parvenait à provoquer.
Voldemort tressaillit, presque imperceptiblement, mais Bellatrix n'en manqua rien.
Elle savait. Elle savait qu'elle réussirait. Le véritable défi, à cet instant, n'était plus pour elle… mais pour lui.
Son souffle s'était déjà fait plus court, et malgré son masque d'impassibilité, elle pouvait sentir la tension dans son corps. Il lutterait. Il résisterait. Mais ça ne durerait pas longtemps. L'ombre d'un sourire effleura ses lèvres, mais elle n'eut pas l'occasion de savourer davantage sa victoire.
Comme pour punir ses arrogantes présomptions, Voldemort empoigna ses cheveux d'une main ferme, l'autre s'enroulant autour de sa nuque, et d'un mouvement brutal, il s'enfonça plus profondément dans sa gorge. La férocité de l'intrusion la prit au dépourvu. Bellatrix eut un haut-le-cœur qu'elle réprima avec peine, mais elle s'évertua à se détendre et à relâcher la tension de sa mâchoire. Elle s'obligea à rendre sa bouche molle, offerte, acceptant l'invasion de ce membre dur, gonflé, chaud, avec une docilité qui ne faisait qu'alimenter son désir. Son Maître dirigeait ses mouvements, utilisant sa bouche comme s'il n'était qu'un simple outil à son service. Et à sa propre surprise… cette idée ne la répugnait nullement. Au contraire. Être ainsi prise, réduite à n'être qu'un réceptacle pour son plaisir, éveillait en elle une sombre satisfaction.
Oh, si seulement ses mains étaient libres… Elle aurait glissé ses doigts entre ses cuisses, se dit-elle, tremblante de désir. Chaque mouvement, chaque pression contre sa gorge ravivait l'ardeur insatiable qui brûlait au creux de son ventre. Peu après, il explosa dans sa bouche, et Bellatrix n'eut d'autre choix que d'en avaler chaque goutte. Pourtant, là encore, elle n'en éprouva aucun dégoût.
— Mmh… répéta-elle, comme par provocation, se léchant lentement les lèvres.
Elle ne lui laisserait pas croire qu'il avait l'ascendant sur elle.
Conscient de son jeu, il soupira, concédant silencieusement sa victoire. Bellatrix, cependant, restait méfiante. Son Maître était encore entièrement vêtu, son corps, lui, réclamait davantage – et il pouvait toujours s'en aller maintenant qu'il avait été satisfait.
Lorsqu'il fit libérer ses poignets, Bellatrix en profita sans attendre. Tremblante, elle se redressa et s'approcha de sa silhouette sombre. Son regard évita le sien, de peur de trahir sa fébrilité. Doucement, elle entreprit de déboutonner sa chemise, laissant ses doigts glisser contre le tissu.
— Tu es décidément très déterminée.
— Cela ne doit pas être très confortable… murmura-t-elle, cajoleuse. Il est tard, vous resterez ici, n'est-ce pas ?
— Non.
— Maître… souffla-t-elle, séductrice, ses mains à plat contre son torse nu.
Un délicieux frisson la parcourut tout entière. C'était la première fois qu'elle touchait sa peau ailleurs que sur son visage, son sexe ou ses bras. Sous ses doigts, sa peau pâle brillait d'un éclat presque nacré sous la lueur de la lune. Imberbe – plus qu'aucun homme qu'elle n'avait connu – sa chair était lisse, froide et douce, semblable à un minéral, mais vivant, soyeux, modelé avec précision. Fascinée, elle déposa ses lèvres là où sa hauteur lui permettait, à quelques centimètres au-dessus de son cœur.
— Vous êtes beau, mon seigneur…
Il la laissa poursuivre, silencieux, impénétrable. Bellatrix acheva de le déshabiller, ses gestes tremblants, révérencieux, mais sans accros. Puis, elle recula de quelques pas vers le lit. L'air tiède de l'été glissait doucement dans la pièce. Derrière les carreaux, le crissement des grillons ne parvint pas à couvrir tout à fait le froissement subtil du corps de Bellatrix s'abandonnant aux draps fraîchement lavés. Avec une langueur naturelle, sensuelle dans son désir, elle écarta les jambes dans une invitation sans détour.
— S'il-vous plaît… murmura-t-elle.
Ses yeux, posés sur elle, brillaient toujours de cette teinte particulière, semblable à des gouttes de sang s'effaçant sur un buvard sombre. Il était de nouveau dur.
Il vint.
Il prit place au-dessus d'elle, entre ses jambes, et Bellatrix, le corps parcouru de frissons délicieux, savoura la sensation de sa peau nue contre la sienne. Elle respira l'odeur de son cou, enivrée, et y parsema des baisers avides.
Lorsqu'il la pénétra, elle ne put s'empêcher de répéter dans un souffle, les mains parcourant ses cheveux, sa nuque, sa peau nue : «Oh, Maître… oh Maître… oh Maître…».
Mais dans son esprit, un autre mantra s'imposait :
Je vous aime, je vous aime, je vous aime.
XxXxXxX
L'enterrement d'Enguerrand Avery eut lieu quelques jours plus tard, dans la plus stricte intimité et sous une multitude de sortilèges de protection, au château des Rosier – au grand dam de résidence des Avery, désormais scellée et surveillée par le ministère, n'était plus accessible. Bellatrix, en tant que seule amie du Fantôme, fut invitée, ainsi que l'ensemble de la famille Rosier, Lord Voldemort et les Mangemorts de la première génération encore de ce monde. La cérémonie fut expédiée rapidement ; seuls les sanglots de Geraldine vinrent ponctuer le discours sobre qu'Ennius prononça, la voix quelque peu enrouée.
À l'issue de la cérémonie, Voldemort attira Bellatrix à l'écart.
— Tu es très proche de Geraldine, n'est-ce pas ?
— Euh… oui, Maître.
Comme toujours, elle ignorait comment définir cette relation à sens unique qu'elle entretenait avec l'héritière désormais orpheline. Geraldine voyait en Bellatrix une amie, mais l'inverse n'était pas vrai du tout.
Il perçut probablement son hésitation, mais la balaya d'un revers de main, sans y prêter attention.
— J'aimerais que tu prennes soin d'elle, dit-il d'un ton mesuré.
— Que je prenne soin d'elle, Maître ?
— Oui. Je veux que tu ailles la voir et que tu la consoles… du mieux que tu pourras. Supposons que, dans les jours à venir, un journaliste de laGazette du Sorcier, proche de l'un de mes fidèles, se présente chez les Rosier… Penses-tu qu'elle serait encline à livrer ses malheurs, accompagnés des violons de circonstance et d'un soupçon d'effusions sentimentales ?
Bellatrix esquissa un sourire amusé.
— Cela est tout à fait envisageable. Devrait-elle insister sur l'injustice flagrante de cette intrusion, l'innocence manifeste de son père et son incompréhension face à de telles méthodes, mon Seigneur ?
— Absolument. Au fil d'un long témoignage émaillé d'anecdotes mettant en lumière les qualités de père d'Enguerrand, sans omettre de souligner ses nombreuses contributions aux œuvres caritatives du monde sorcier, bien entendu.
— Bien sûr, Maître.
— Tu devras assister à cet entretien, veillant à ses propos. En amie dévouée, cela va de soi.
— Naturellement, Maître.
Ils échangèrent un bref sourire, empreint de connivence.
— Viendrez-vous me voir ce soir, mon seigneur ? osa-t-elle chuchoter, bravement.
Elle savait que Rabastan ne serait pas là.
— Te sentirais-tu finalement seule, dans cette vaste demeure, Bellatrix ?
— Non… c'est vous qui me manquez, Maître.
Il marqua une pause.
— Je ne serai pas libre avant le milieu de la nuit.
— Je vous attendrai, Maî la nuit, s'il le faut.
XxXxXxX
Lorsque Bellatrix s'éveilla un matin pluvieux de septembre, un plaisir presque enfantin s'empara d'elle en découvrant la présence de son Maître, étendu près d'elle sous les draps, toujours endormi.
C'était la première fois qu'il restait dormir.
D'ordinaire – depuis cette première nuit passée au manoir Lestrange au début du mois d'août – il disparaissait dès que son plaisir était assouvi, s'attardant tout au plus une heure, le temps qu'elle sombre dans le sommeil.
Mais Bellatrix pouvait néanmoins s'enorgueillir, le cœur débordant de bonheur, de le voir venir désormais avec une magnifique régularité. Il la retrouvait en soirée, s'invitant dans son boudoir tandis qu'elle lisait des grimoires de magie ancienne, ou apparaissait juste avant le dîner qu'ils partageaient à deux – lorsque Rabastan était absent. Une fois ou deux, elle s'était réveillée en pleine nuit, arrachée au sommeil par des mains froides, impérieuses, presque fébriles, sur elle.
Réjouie de le voir encore à ses côtés, elle le dévora des yeux et s'appliqua à graver chaque détail dans son esprit. Sur l'autre oreiller reposait ce visage qu'elle connaissait si bien, tourné vers elle. Ses cheveux noirs, plus ébouriffés qu'à l'accoutumée, encadraient une expression paisible, parfaitement lisse. Il semblait serein, comme rarement elle avait eu l'occasion de l'observer. Aucun bruit n'émanait de lui. Il était aussi silencieux qu'un serpent. Cela était très différent de Rodolphus, pensa fugacement Bellatrix.
Son mari était bruyant dans son sommeil. Il se retournait souvent, l'attirait contre lui, glissait ses lèvres dans son cou et murmurait des phrases incohérentes, tout en laissant échapper de légers ronflements. Elle avait eu tout le loisir de faire l'inventaire de ces petits dérangements sonores lors des nombreuses nuits d'insomnie causées par ses terreurs nocturnes.
Lord Voldemort, lui, n'avait pas bougé d'un iota. Sans le léger soulèvement de sa poitrine, on pourrait douter qu'il fût vivant. Bellatrix espéra qu'elle n'avait ni ronflé ni prononcé quelque absurdité durant la nuit. Rodolphus lui avait souvent rapporté ses cauchemars et ces moments où, perdue dans son sommeil agité, elle le repoussait parfois d'un coup de pied. L'idée qu'elle eût pu lutter contre son Maître dans son sommeil la fit sourire, mais elle se hâta de réprimer ce rire.
Il avait l'air si calme, si droit, si tranquille. Pour rien au monde, elle n'aurait voulu troubler cette quiétude si peu coutumière chez lui. Elle se rapprocha un peu, observant les traits de son visage maintenant que l'aube perçait à travers les rideaux. Comme toujours émerveillée par la beauté étrange du mage noir, elle se repaît longuement de la ligne délicate de ses paupières, fuyant vers des joues creusées, allant de pair avec l'acéré de sa mâchoire, mais tranchant avec cette bouche étonnamment pleine. Bouche que l'on avait envie encore plus envie d'embrasser maintenant qu'elle n'était ni affublée d'un sourire cruel ni d'un mécontentement marqué.
Enfin, Bellatrix se représentait telle réflexion pour un observateur extérieur. En ce qui la concernait, elle avait envie de l'embrasser, peu importait l'humeur, le temps, l'heure, le lieu, ou l'époque. Elle aimait infiniment son visage aux traits si saillants, à la peau cirée, d'une pâleur étonnante, et ce, depuis la première fois qu'elle l'avait vu, sept ans auparavant. Si on avait dit à l'adolescente de quatorze ans que le mage noir qui avait fait trembler tous les hommes de sa famille finirait un jour dans son lit, elle n'en aurait pas cru un seul mot. Que ce sorcier aux pouvoir terrifiants lui ferait l'amour quasiment toutes les nuits, parfois plusieurs fois de suite, qu'elle l'entendrait jouir dans son oreille et qu'elle pourrait s'endormir en faisant glisser ses doigts sur sa peau douce…
Mais plus que tout, plus que ce physique si particulier, elle se délectait de cette aura de puissance déversée en vagues calmes autour de lui. De tous les sorciers du monde, c'était le seul qui lui donnait cette impression de contrôle absolu, d'impossible puissance mêlée d'une maîtrise parfaite. Elle ne se sentait jamais plus sereine, plus en sécurité, plus réconfortée qu'auprès de lui. Elle était plus qu'attirée, elle était conquise.
Lorsque les rayons du soleil rasèrent le plancher de la chambre et que le chant des oiseaux s'intensifia derrière les fenêtres, Bellatrix perçut les signes du réveil de son Maître.
— Quelle heure est-il ? demanda-t-il, sans ouvrir les yeux, sa voix encore voilée par le sommeil.
Le ton était glacial, détaché. L'aura qui l'enveloppait s'était refermée, implacable, chassant la moindre trace de vulnérabilité laissée par la nuit.
— Sept heures, Maître.
Voldemort se redressa sans un mot de plus. Cette réponse ne lui plaisait manifestement pas. Bellatrix, de nouveau intimidée malgré l'intimité partagée à de nombreuses reprises, hésita à laisser son regard dériver sur son corps nu tandis qu'il se rhabillait avec une élégance austère. Elle devina qu'il n'avait pas du tout prévu de passer la nuit dans son lit. Alors qu'il s'apprêtait à transplaner, il s'interrompit, posant un regard autoritaire sur elle.
— Bella.
Elle se redressa aussitôt, s'appuyant sur ses coudes, suspendue à l'attente de son nom, délicieusement diminué, espérant peut-être qu'il prolongerait cet instant ou lui accorderait une caresse plus tendre. De son orteil, elle tira imperceptiblement sur le drap, qui glissa légèrement, laissant ainsi apparaître l'un de ses seins, et elle prétendit n'avoir rien remarqué.
— Oui, Maître ?
— J'ai des raisons de croire que tu pourrais être convoquée par les Aurors sous peu.
Bellatrix acquiesça, sans surprise.
Elle savait déjà que cette menace planait sur elle. Enguerrand Avery avait payé de sa vie pour avoir refusé de répondre à cette convocation. Les Aurors s'étaient rendus chez lui, et il n'en était jamais ressorti vivant.
— Si cela devait arriver, tu m'en avertiras immédiatement… mais tu t'y rendras.
Elle releva brusquement la tête, surprise.
— Pardon ? Mais, Maître, vous aviez dit à Avery…
— Enguerrand savait trop de choses, trancha Voldemort, son regard perçant la réduisant instantanément au silence. Il ne pouvait risquer d'être interrogé, certainement pas par Croupton.
Bellatrix se demanda pour la première fois si le vieux Mangemort n'avait, au final, pas préféré mourir que de divulguer l'un des secrets de son Maître sous la contrainte. Elle connaissait Avery. Il était orgueilleux, certes, mais pas au point de croire pouvoir défier seul une escouade d'Aurors. Peut-être avait-il compris qu'il n'y avait pas d'autre issue. Que la mort était préférable à l'éventualité de trahir, d'ouvrir par faiblesse la porte aux vérités que Voldemort s'efforçait de dissimuler.
— Toi, en revanche, Bellatrix… tu n'as ni son âge ni ses limites. Il n'avait malheureusement pas le dixième de tes compétences en Occlumencie.
Un frisson glissa le long de la colonne vertébrale de Bellatrix, mêlant appréhension et fierté face à ses compliments.
— Si tu es convoquée, tu répondras. Et lorsque tu te trouveras face à eux, tu feras exactement ce que tu as déjà fait avec moi.
Elle hocha la tête, comprenant aussitôt ce qu'il attendait d'elle.
— À la différence qu'avec eux, tu pourras créer de fausses pensées. Ils ne seront pas assez doués pour faire la distinction. Prends garde à mélanger habilement le vrai et le faux. Invente une version crédible où tu n'es jamais entrée à mon service. Que tu sois restée la fille parfaite des Black, simplement croisée lors d'événements mondains – tes fiançailles, ton mariage. Rien de plus.
Il marqua une pause, sa voix s'abaissant jusqu'à devenir presque menaçante.
— Mais évite toute mention de ces derniers mois. Et surtout, éloigne-toi d'un souvenir en particulier.
Bellatrix sentit son souffle se suspendre.
— Sais-tu de quoi je parle ?
— Les sept sorciers… souffla-t-elle, incertaine.
— Non, corrigea-t-il, son regard se durcissant. Ce que tu as vu dans ma pensine est évidemment à proscrire. Mais il est une chose plus précieuse encore, un secret que tu n'as jamais eu le droit de questionner.
La réponse s'imposa à elle comme une évidence.
— Ce qui est caché dans mon coffre à Gringotts ?
Elle frissonna en évoquant cet artefact. La coupe. Bellatrix n'avait jamais osé poser la moindre question à ce sujet. Par une loyauté presque sacrée, elle s'interdisait même d'y penser.
— Oui, Bellatrix. Cela ne doit jamais être découvert.
Il s'approcha d'un pas, la surplombant de toute sa hauteur.
— Tu m'as bien compris ?
— Parfaitement, Maître. Je vous le promets.
Un silence s'installa, chargé de sous-entendus.
Voldemort soutint son regard, s'attardant longuement comme pour éprouver la sincérité de sa promesse. Son regard glissa brièvement vers son sein découvert, signe évident qu'il n'avait rien manqué de son manège. Puis, contre toute attente, il se pencha, effleurant ses lèvres d'un baiser rapide mais assuré, puis ces mêmes lèvres déposèrent un baiser sur le galbe de son sein, moins rapide et plus tendre.
— Quand vous reverrai-je, Maître ? demanda-t-elle, presque suppliante.
— Je ne sais pas, répondit-il froidement.
Bellatrix se redressa, laissant glisser le drap qui dévoila son corps, s'offrant sans retenue en se cambrant contre lui.
Elle l'embrassa, cherchant à le retenir, à le lier à elle par chaque contact.
— Je dois partir, souffla-t-il entre deux baisers.
— J'ai envie de vous… s'il vous plaît.
— Je n'aurai pas le loisir de venir ici comme j'en ai pris l'habitude. Rabastan mérite un repos de plusieurs semaines.
— S'il vous plaît… si vous me convoquez, je viendrai dans vos quartiers…
— Bella…
Il s'était redressé, s'éloignant légèrement, et posa sur elle un regard froid.
— Calme tes ardeurs, par Merlin. Ne penses-tu qu'à cela… ? demanda-t-il, presque surpris, la voix teintée de mépris.
Le regard qu'il posa sur elle la fit rougir de honte.
Sans ajouter un mot, il transplana.
Bellatrix resta immobile, les yeux fixés sur l'espace vide où il se tenait quelques instants plus tôt, le cœur un peu meurtri.
XxXxXxX
Au début du mois d'octobre, une missive scellée aux armoiries du Ministère de la Magie parvint à Bellatrix. Elle s'était doutée que ce moment viendrait vite.
L'entretien qu'elle et Geraldine avaient accordé à la Gazette du Sorcier avait fait grand bruit, enflammant aussi bien la presse que la radio sorcière. Si le Ministère avait tenté d'étouffer la mort d'Enguerrand Avery, leurs paroles, habilement choisies, avaient porté le coup nécessaire. Bellatrix s'était drapée dans l'image d'une amie attentive, tandis que Geraldine, candide et éplorée, incarnait à merveille la fille endeuillée. À elles deux, héritières de deux des plus illustres lignées de Sang-Pur, elles avaient obtenu l'effet recherché.
Mais c'est une simple phrase de Geraldine, glissée à l'oreille par Bellatrix, qui mit véritablement le feu aux poudres : «C'est comme si, nous, les familles de Sang-Pur, étions prises pour cible sur le seul critère de notre sang !» Ces mots, répétés et disséqués à l'envi, avaient suscité un tollé. Les méthodes de Bartemius Croupton furent publiquement mises en cause. Le Ministre de la Magie, contraint de répondre au scandale, invoqua une enquête interne et, balbutiant, présenta des excuses maladroites aux familles de Sang-Pur, s'efforçant de les convaincre qu'il n'y avait aucune chasse aux sorcières.
Bellatrix, pourtant, n'était guère rassurée. L'idée de se rendre seule au Ministère, sans protection, sans la certitude d'en ressortir libre, la troublait plus qu'elle ne voulait l'admettre. Les Aurors n'avaient pas dû goûter à son petit entretien et à ses insinuations. Sans perdre de temps, elle s'empressa de convoquer son Maître. Il ne répondit pas immédiatement, mais elle sentit bientôt cette pression familière et intangible qui lui indiquait qu'il l'avait entendue. La permission de transplaner lui fut accordée sans un mot. Un battement plus tard, Bellatrix rejoignit le sas et disparut dans un craquement sec.
Elle le trouva dans le laboratoire des potions, aux dalles noires luisantes. L'air y était épais, chargé d'une humidité stagnante, et l'odeur métallique des ingrédients en décomposition se mêlait à celle, plus âcre, des potions en cours de préparation. Près d'une rangée au fond de la pièce, Voldemort conversait avec Lucius Malefoy. Fronçant imperceptiblement les sourcils, Bellatrix s'arrêta net, prise au dépourvu par cette présence inattendue. Elle s'attendait à le trouver seul. L'agacement monta en elle, sourd et brûlant.
Lucius Malefoy… Cet arriviste prétentieux, avec ses airs d'aristocrate, ses cheveux blonds soigneusement coiffés et ses sourires faussement charmeurs. Depuis qu'il avait trompé sa sœur avec Alecto près d'un an auparavant, elle n'entretenait que du mépris à son égard, mais elle n'avait jamais échangé plus que des banalités avec lui. L'idée qu'il puisse capter l'attention de son Maître l'irritait profondément.
— Maître… lança-t-elle d'un ton hautain, amorçant un pas en avant.
Mais la main de Lord Voldemort l'interrompit, s'élevant d'un geste rapide et négligent, sans même daigner tourner la tête vers elle. Le rouge lui monta aux joues. L'humiliation lui noua la gorge tandis qu'elle regardait, comme une petite fille rabrouée et laissée à l'écart, Lucius recevoir des instructions à voix basse. Bellatrix capta quelques bribes – « Serpentard » et « Sangs-de-Bourbe » – alors que le Seigneur des Ténèbres lui tendait un journal relié de cuir sombre. Malefoy l'écoutait avec une déférence soutenue, buvant chacune de ses paroles.
Bellatrix serra les poings. Il était à son service depuis moins de quatre mois, et pourtant, il se tenait là, à partager des secrets avec son Maître. C'était à en hurler de rage. Lucius s'inclina profondément – trop profondément, pensa-t-elle, hypocrite jusqu'au bout des ongles.
En passant devant elle, il s'arrêta un instant.
— Mes hommages, Madame Lestrange, dit-il avec courtoisie, inclinant légèrement la tête dans un geste empreint de respect avant de quitter le laboratoire, serrant étroitement le journal dans ses mains.
Madame Lestrange, mima-t-elle intérieurement, dégoûtée.
Du fond de la pièce, Voldemort avait à présent les yeux tournés vers sa servante et la considérait. Le tableau qu'elle donnait à voir était saisissant avec les sourcils froncés, fière et arrogante, le regard noir, les lèvres pincées.
— Ce Lucius n'est pas digne de confiance, marmonna-t-elle, arborant une moue presque boudeuse.
— Tu m'as appelé, Bellatrix ? demanda-t-il, sans paraître l'avoir entendue.
— Oui, Maître, répondit Bellatrix, d'une voix où pointait un reproche qu'elle ne parvenait pas à masquer. J'ai reçu ma convocation, je dois m'y rendre cet après-midi.
Il s'approcha sans un mot, prenant la lettre de ses mains pour la parcourir rapidement. D'ordinaire, Bellatrix aurait profité de cet instant, laissant ses doigts effleurer les siens ou s'attardant délibérément près de lui. Mais cette fois-ci, elle n'en fit rien. Sa dernière remarque sur ses ardeurs résonnait encore dans sa tête. Ses mots avaient tourné en boucle dans son esprit, l'empêchant de trouver le sommeil plusieurs nuits durant. Était-elle trop pressante ? Trop demandeuse ? Elle s'en voulait, rongée par l'idée d'avoir paru frivole, ou pire… ridicule.
Elle garda donc soigneusement ses distances et se contenta de rester immobile, les bras croisés devant elle, crispant légèrement les doigts sur le tissu de sa robe.
— Très bien, dit-il enfin, levant lentement les yeux vers elle. Tu es prête à les affronter ? À moduler tes pensées comme je te l'ai appris ?
— Oui, Maître, répondit-elle.
— Voici un antidote au Veritaserum. Bois-le avant de t'y rendre, il atténuera les effets du filtre de vérité.
Il lui tendit une petite fiole de verre, dont l'étiquette discrète arborait les initialesLVLT. C'était une autre de ses créations personnelles, mise au point aux côtés de Ludmilla Thenn durant ses années à Poudlard.
— Bella, reprit-il, le ton grave, tu ne peux te permettre la moindre erreur. Ils ne doivent rien percevoir, rien qui puisse leur offrir le moindre prétexte pour t'envoyer à Azkaban.
Elle hocha la tête, gardant les yeux baissés.
— Oui, mon seigneur…
— Tu te souviens de ce que je t'ai dit à propos de Gringotts et de ton coffre ?
— Oui, Maître, répéta-t-elle, relevant cette fois les yeux pour s'assurer qu'il n'y voyait aucune trace d'hésitation.
Il s'attarda un instant, son regard scrutant le sien comme s'il cherchait à déceler quelque chose qu'elle s'efforçait de cacher.
Il semblait un peu perplexe, mais il ne posa aucune question.
— Tu peux y aller dans ce cas. Appelle-moi lorsque ce sera terminé.
Elle inclina la tête et transplana aussitôt.
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Bellatrix s'était attendue à une épreuve difficile, mais l'exercice s'avéra plus éprouvant encore qu'elle ne l'avait imaginé. Face aux trois Aurors, elle mobilisa toute sa dextérité et son talent de conteuse pour tisser une histoire convaincante. Elle se façonna l'image d'une épouse dévouée, absorbée par les réceptions mondaines, les visites de ses parents et de sa sœur.
L'antidote au Veritaserum fut précieux. Sans lui, elle aurait vacillé sous la pression, tiraillée entre les assauts d'un Auror legilimens et l'emprise du filtre de vérité. Lorsqu'ils sondèrent ses pensées par la Légilimancie, elle les guida vers des souvenirs anodins – des scènes domestiques avec Rodolphus, Rabastan, ses beaux-parents. Tout était soigneusement filtré. Puis, ils évoquèrent Lord Voldemort.
Avec habileté, elle leur livra quelques images soigneusement choisies : des fragments de lui, pris lors de ses fiançailles, à Square Grimmaurd. Son sourire énigmatique, sublime, ce charme presque irréel qu'il avait laissé paraître avant de disparaître. Elle sentit leur surprise. L'admiration qui transparaissait dans son regard ne leur échappa pas. Ils l'interrogèrent avec plus d'insistance. Bellatrix adopta alors l'air d'une jeune femme impressionnable, admettant avoir été fascinée à l'époque, mais précisa qu'elle n'avait jamais eu l'occasion d'échanger véritablement avec lui depuis.
Ils bifurquèrent sur Rodolphus. Où se trouvait-il ? Pourquoi restait-il injoignable par hibou ?
Ce fut là qu'elle offrit sa performance la plus convaincante : celle de l'épouse trompée et abandonnée. Elle laissa entendre que Rodolphus avait probablement déserté leur foyer pour rejoindre une maîtresse. D'une voix tremblante, elle évoqua ses soupçons, appuyant chaque mot d'une douleur meurtrie. Ce n'était pas difficile à imiter. Après tout, elle était véritablement une femme trompée.
Quand quelques larmes perlèrent à ses cils, elle sentit l'atmosphère s'alléger, l'un des Aurors détournant légèrement le regard, visiblement gêné.
— Vous partagez les idées de ce sorcier, n'est-ce pas ?
— Quelles idées, précisément ?
— La supériorité des sang-purs, par exemple.
— Mais c'est vous qui abattez de bons pères de famille sous prétexte de leur sang ou de leur prétendue appartenance à quelque société fantasmée.
— Vous allez nier l'existence d'un cercle secret autour de ce sorcier... ce Lord V-Voldemort ?
— Un cercle secret ? Vous lisez trop de romans de Dodie Smith. Mais ça a l'air captivant, je vous en supplie, dites m'en plus.
L'Auror lui jeta un regard noir. Il fallait qu'elle se calme, se dit-elle. Les sorciers n'aimaient pas être moqués par une sorcière, et par ego, ils trouveraient n'importe quelle excuse pour prolonger son interrogatoire.
— Montrez-moi vos bras.
Elle joua un air surpris, et les posa sur la table d'un geste fier, mais perplexe, exposant la blancheur intacte de ses avant-bras avec une expression hautaine. Seuls les Mangemorts connaissaient l'existence de la Marque. Si elle n'en était pas une, cette demande devait lui paraître incongrue. Ils continuèrent de lui poser des questions sans relâche. Elle tint bon, même si la fatigue menaçait de lui faire baisser la garde.
Pour l'instant, la situation était maîtrisée.
Mais ce qu'elle n'avait pas prévu… c'était Igor Maggins.
Après six longues heures d'interrogatoire, l'un des Aurors déposa une photo sur la table. Le visage de Maggins s'imposa à elle comme un coup de poignard. Bellatrix sentit son estomac se nouer, une nausée brûlante lui montant à la gorge. L'homme qui l'avait violée la fixait, tout sourire, depuis ce morceau de papier glacé. Elle parvint de justesse à retenir sa réaction, mais ses doigts crispés sur ses genoux trahissaient sa tension.
— Avez-vous déjà vu ce sorcier ? demanda l'Auror, sa voix calme et posée. C'était l'un de nos collègues.
Elle fit «non» de la tête.
Ses yeux bleus très clairs, presque translucides, se plantèrent dans ceux de Bellatrix avec une intensité glaciale.
— Un jour, il a retrouvé son bébé mort dans son berceau. Il était convaincu qu'elle avait été empoisonnée par un partisan de Voldemort, mais il n'a jamais pu le prouver. Quelques semaines plus tard, toute sa famille a été massacrée. Depuis, il a disparu. Comme s'il s'était volatilisé.
Le regard de Bellatrix resta rivé sur la photo, bien qu'elle s'efforçât de paraître détachée.
— Le facteur moldu de leur quartier, à Manchester, a affirmé avoir vu une femme rôder près de leur maison le jour où le bébé, Cassiopa, a été retrouvé sans vie.
L'Auror promena lentement ses yeux le long de la robe bustier noire qu'elle portait.
— Il a décrit une femme brune, à l'accoutrement étrange. Une robe bustier noire, exactement du style que vous portez aujourd'hui.
Bellatrix soutint son regard, impassible malgré les battements furieux de son cœur.
— Alors, Madame Lestrange, cet homme vous évoque-t-il quelque chose ?
Elle ne cilla pas.
— Je ne l'ai jamais vu de ma vie, je ne sais pas de quoi vous parlez.
Elle sentait les larmes lui monter aux yeux.
C'était fini. Elle finirait à Azkaban. Les Détraqueurs se repaîtraient de son âme, la laissant vide, condamnée à pleurer en silence, poursuivie par l'empreinte fétide de Maggins, comme une souillure incrustée jusque dans sa chair. L'Auror legilimens la fixa un très long moment, impassible.
Elle retint sa respiration. Dans son esprit, sous les assauts répétés du legilimens, elle se représenta une mer calme, une nuit d'été, et ses vagues paresseuses venir lui chatouiller les chevilles.
D'un geste sec, il arracha la photo de la table, comme s'il balayait le dernier vestige de son contrôle.
Faute de preuves suffisantes, ils finirent par la relâcher. Alors qu'elle s'apprêtait à quitter la pièce, l'un des Aurors s'approcha, s'attardant juste assez pour murmurer d'un ton menaçant :
— L'impunité touche à sa fin. Tu peux en informer ton mari… et ton beau-frère. Eux aussi seront bientôt convoqués. Nous verrons s'ils parviennent à s'en tirer aussi bien que toi.
Bellatrix soutint son regard, les lèvres pincées.
— Je n'ai rien à me reprocher, déclara-t-elle d'un ton ferme.
L'Auror esquissa un sourire sans joie.
— Peut-être. Mais une personne nourrissant une telle fascination pour un sorcier aussi dangereux que… ce L-Lord V-Voldemort ne saurait être tout à fait innocent.
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Assise dans son boudoir, Bellatrix se sentait vidée, exténuée. Le poids de l'interrogatoire s'écrasait encore sur ses épaules lorsqu'elle appela son Maître. Peu de temps après, il fit irruption par la porte, ayant emprunté le passage discret au rez-de-chaussée. Elle sentit une pointe de colère à son égard – brève, étouffée presque aussitôt par une fatigue accablante. En le voyant là, devant elle, un soulagement immense la saisit. Elle aurait pu finir à Azkaban. C'était passé à un fil. Et Maggins… Qui aurait pu prévoir qu'on exhumerait sa silhouette immonde, s'agitant tel un benêt souriant sur cette fichue photo ?
Bellatrix éclata en sanglots, son masque de contrôle enfin brisé.
Sans un mot, Voldemort s'approcha. Debout devant elle, il glissa une main dans ses cheveux, inclinant doucement sa tête contre lui. Elle se laissa faire, passant ses bras autour de sa taille dans un besoin irrépressible de s'ancrer à son aura pénétrante.
— Montre-moi, ordonna-t-il froidement, renforçant sa prise sur ses cheveux pour rejeter sa nuque en arrière.
Bellatrix ne résista pas – elle s'abandonna à l'intrusion, le laissant fouiller, scruter, et tordre chaque recoin de sa mémoire. C'était exténuant. C'était comme être comprimé dans un trou noir, à la fin exsangue et morcelée de toute part. Il se retira brusquement, disparaissant aussi vite qu'il était entré. Des larmes continuaient de couler sur ses joues.
— Maître… sanglota-t-elle, la voix tremblante. C'était si difficile… Ils… ils vont interroger Rabastan et Rodolphus. Ils ne sont pas préparés comme je le suis. Comment pourraient-ils leur résister ?
— Ils ne pourront pas, répondit-il simplement. Ils sont tous deux condamnés à se cacher, à leur échapper. Il n'y a rien à faire, sinon effacer autant que possible les traces de leur implication. Lorsque je renverserai le Ministère, cela changera, mais d'ici là, ce sont des fugitifs… comme moi.
— Mais… par association, Maître, je devrais me cacher aussi, n'est-ce pas ? Le manoir des Lestrange sera surveillé. Ils épieront tous mes mouvements. Quel était l'intérêt de me rendre au Ministère ?
Elle leva vers lui des yeux humides, cherchant dans son regard une explication rassurante.
— Aucun, admit-il d'un ton tranchant.
Bellatrix écarquilla les yeux, surprise par la brutalité de sa réponse.
— C'était un test, poursuivit-il, un moyen de mesurer ta capacité à protéger mes secrets… et une façon de te punir pour tes indiscrétions répétées.
Ses doigts glissèrent sur sa joue, le contact doux contrastant avec la dureté de ses paroles. Il s'installa à côté d'elle, s'adossant nonchalamment contre le dossier du canapé.
— Et la… la coupe, Maître ? N'est-elle pas précieuse ?
— Oh, elle l'est, répondit-il avec un sourire distant. Mais si tu avais échoué, cela m'aurait confirmé qu'elle n'était pas en sécurité entre tes mains. Je n'en doute plus à présent.
— Et s'ils m'avaient envoyée à Azkaban ? balbutia-t-elle, la gorge serrée d'indignation.
— Tu l'aurais mérité, et cela t'aurait servi de leçon. Mais, comme je m'y attendais, tu t'en es sortie.
Son ton était désinvolte, presque amusé. Bellatrix baissa les yeux, le cœur serré, incapable de cacher la blessure que ses mots venaient de raviver.
Elle l'entendit rire doucement.
— Ma Bella, je plaisante… crois-tu vraiment que je te laisserais croupir à Azkaban ?
Elle releva les yeux vers lui, un éclat de tristesse encore visible dans ses prunelles. Viendrait-il la sauver ? Si elle se retrouvait seule, enfermée, désespérée, torturée par ses souvenirs les plus sombres ?
Il se pencha et l'embrassa. Elle y répondit mollement, presque à contrecœur. Quoi qu'il fasse, elle ne parvenait jamais à lui refuser quoi que ce soit.
— Je suis fier de toi, Bella. Tu as passé leur test… et le mien. Mais retiens bien ceci : ce qui m'appartient m'appartient. Ma baguette, ma pensine, mes secrets… Tu ne t'en approches pas sans mon autorisation. Est-ce clair ?
Elle hocha la tête, ses lèvres effleurant les siennes, mais elle refusa d'initier un baiser.
— Je sais que tu es contrariée, ajouta-t-il en repoussant une mèche de ses cheveux. Mais crois-moi… j'ai fait preuve d'une clémence que tu n'imagines pas. Aucun Mangemort n'a bénéficié d'autant d'indulgence que toi.
Elle hocha à nouveau la tête, sans un mot.
Son regard s'attarda sur elle, puis il l'embrassa encore. Elle était trop avide de réconfort. Cette fois-ci, elle y répondit, mais ses mains restèrent sages, posées sur ses genoux.
— Tu es… fatiguée ? demanda-t-il, levant un sourcil sarcastique.
— Non, répondit-elle, un peu hautaine. J'essaie simplement de modérer mes ardeurs, Maître.
Voldemort éclata de rire, surpris.
— Je t'ai blessée ? Est-ce pour cela que tu étais distante toute la journée ?
Elle garda les bras croisés, l'air courroucé.
— Bellatrix… petite idiote, souffla-t-il, un sourire amusé aux lèvres. J'adore ton insatiabilité. Elle me fait juste douter de ma capacité à te suivre.
Aussitôt, l'ombre vexée quitta son visage. Ses yeux brillèrent, et ses mains retrouvèrent aussitôt leur place sur lui.
— Maître… Je ne veux pas vous incommoder. Je sais que je peux être… excessive. Mais je n'y peux rien. Je n'arrive pas à me passer de vous.
Voldemort s'enfonça dans le canapé, l'observant avec un mélange d'amusement et d'affection.
— Eh bien, ce soir, je suis tout à toi, murmura-t-il.
XxXxXxX
Novembre 1972,
Ils furent tous convoqués dans un cimetière abandonné, niché au creux d'une vallée sinueuse, autrefois accessible par un chemin aujourd'hui disparu. Seule une petite église d'un autre âge, écroulée sur son flanc, tentait de se dresser encore parmi des tombes affaissées dont les dalles craquelées laissaient jaillir quelques brins de végétation. La nuit venait de tomber, et une pluie fine glissait doucement sur les arbres.
Lord Voldemort se tenait à l'écart du gros du groupe, entouré de quatre hommes masqués. Bellatrix reconnut sans peine Antonin Dolohov, Ennius Rosier, Charles Mulciber et George Nott – leurs silhouettes, leur posture et leurs gestes trahissaient leur identité. En leur présence, le Seigneur des Ténèbres se laissait approcher, et aucun d'eux ne semblait craindre de franchir cette distance que les autres n'osaient réduire. Au contraire, ils gravitaient autour de lui, cherchant à capter son attention, à échanger quelques mots. Exactement comme trente ans plus tôt, lorsqu'ils n'étaient que des étudiants à Poudlard et qu'ils ne pouvaient parcourir un couloir sans s'attrouper autour de lui.
Bellatrix restait en retrait. On attendait que tous arrivent. Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas assisté à un rassemblement aussi massif des Mangemorts, et l'ampleur de l'assemblée la stupéfiait. Elle compta presque une centaine de personnes. Naturellement, des groupes s'étaient formés. Certains se reconnaissaient malgré les masques et les capes. Lord Voldemort avait toujours favorisé ces regroupements, convoquant ensemble les membres d'une même famille, leur confiant des missions communes et partageant avec eux les mêmes secrets.
Bellatrix se retrouvait souvent aux côtés des proches des Black et des Lestrange, et grâce à son ascension, auprès des Mangemorts les plus anciens, ceux du cercle restreint. Parfois, elle s'interrogeait sur la manière dont son Maître parvenait à tisser ces réseaux sans jamais faillir, compartimentant chaque mission, chaque faction, jusqu'au plus infime détail.
Sans Rodolphus, et sans Rabastan – qui passait désormais l'essentiel de son temps avec de jeunes recrues comme Lucius Malefoy ou Amycus Carrow – Bellatrix se rendait compte à quel point elle était isolée parmi les Mangemorts, à quel point elle constituait le maillon faible de son propre groupe. Voldemort lui confiait rarement des missions, et lorsqu'il le faisait, elles étaient souvent solitaires. Il fallait dire que ses deux seules missions de groupe – l'une avec Rabastan et Rosier contre Maggins, l'autre avec Rodolphus, Rabastan et d'autres en Roumanie – s'étaient toutes deux soldées par un échec cuisant.
Elle sentit une main agripper son avant-bras. Elle se dégagea d'un geste brusque, prête à dégainer sa baguette. À côté d'elle se tenait une silhouette de la même taille qu'elle, dont la poitrine trahissait l'identité. Une femme, donc.
— Bonjour, Alecto, grommela Bellatrix.
— Bonjour, Bellatrix, répondit Alecto d'un ton goguenard. On se demande pourquoi on s'embête à porter un masque. Tous les hommes ici savent qui nous sommes.
— Ils savent que nous sommes des femmes, pas qui nous sommes.
— Mmh… c'est vrai que je ne connais même pas la moitié des gens présents ce soir. Mais Bellatrix, ton service auprès du Seigneur des Ténèbres est un secret de polichinelle.
Bellatrix hésita un instant. Elle se tourna vers Alecto et tenta de lire son regard, ce qui était évidemment impossible avec un masque.
— Que disent-ils à mon sujet ? murmura-t-elle d'une voix si basse qu'elle se mêla à la pluie.
— Eux ? Ils plaisantent, comme toujours. Mais en réalité, ils ont la trouille. Ils savent que s'ils s'approchent trop, ils finiront en Sibérie à courir après des loups-garous, répondit Alecto en riant doucement.
— Rodolphus est en Sibérie ?
— Aux dernières nouvelles, oui. Il a déjà essayé de tuer Greyback trois fois.
— Il t'écrit ?
— Oui, mais rarement, et toujours en codes. Trop risqué autrement.
Bellatrix se tut, pensive.
— Tu crois que le Seigneur des Ténèbres l'a envoyé là-bas à cause de moi ?
— Je ne prétends pas connaître les intentions de notre Maître. Mais tout ce qu'ils savent, eux, c'est que Rodolphus t'a trompée avec moi, et qu'au mariage des Rosier, le Seigneur des Ténèbres a dansé avec toi. Ça suffit pour nourrir leur imagination.
— Ils pensent vraiment que je… je suis intime avec le Seigneur des Ténèbres ?
— Ce n'est pas le cas ? rétorqua Alecto.
Bellatrix perçut le sourire dans sa voix. Elle ne répondit pas. Un petit rire désabusé s'échappa de la Mangemort. D'un même mouvement, les deux jeunes femmes tournèrent la tête vers la haute silhouette du Seigneur des Ténèbres, toujours entouré des quatre Mangemorts près de l'église effondrée. Même à distance, son pouvoir suffoquant imposait le respect.
— J'ai encore plus de respect pour toi, tu sais.
— Oh, vraiment ? ricana Bellatrix, moqueuse.
— Tu n'as pas froid aux yeux.
Sous son masque, Bellatrix leva les yeux au ciel.
— Je suis au courant des orgies auxquelles tu participes avec ces goujats. Ne viens pas me dire que tu es du genre pudique.
— Je suis tout sauf pudique. Et je comprends ton attirance pour lui… Qui ne le serait pas? Pourtant, je n'oserais jamais. Il faut du cran… Je l'admets, ça me terrifierait.
Bellatrix marqua une pause, surprise. Certes, le Seigneur des Ténèbres pouvait être impressionnant, voire effrayant. Ses colères froides vous glaçaient sur place. Mais cela ne contribuait-il pas à l'excitation de la chose?
— Ne dis rien à Rodolphus, chuchota Bellatrix.
Alecto garda le silence.
— S'il te plaît, insista-t-elle.
— Il est resté aveugle longtemps, si tu veux mon avis. Mais ce n'est pas par moi qu'il apprendra quoi que ce soit. Je ne dirai rien. De toute façon, ça ne change plus grand-chose. Même Rabastan sait que le Seigneur des Ténèbres passe parfois la nuit au manoir Lestrange.
Bellatrix écarquilla les yeux, figée.
— Votre elfe… Meeney, c'est ça ? Elle lui répète tout. C'est Rabastan le maître de la maison, après tout.
Bellatrix porta instinctivement les mains à sa bouche, avant de les abaisser, se rappelant son masque.
— Ne t'en fais pas, ajouta Alecto, comme si elle avait deviné ses pensées. Il m'étonnerait que quoi que ce soit échappe à notre Maître. Il se moque bien que Rabastan soit au courant.
Ces paroles rassérénèrent quelque peu Bellatrix.
— Si Rabastan le sait, Rodolphus aussi.
— Oui, confirma Alecto lapidairement. Bon, je vais rejoindre ma place. Je n'ai rien à faire à côté de la favorite du Seigneur des Ténèbres.
— Arrête… souffla Bellatrix, un brin amusée.
Une question lui brûlait les lèvres.
— Tu m'en veux pour Rodolphus ? Je t'ai privée de ton partenaire préféré.
— Oh, j'ai Walden. Pas aussi mignon que Rod, mais il fait l'affaire, lança-t-elle avec un sourire dans la voix.
Bellatrix secoua la tête. Alecto était décidément incorrigible.
Soudain, un mouvement agita les rangs des Mangemorts. Lord Voldemort avançait à travers le cercle formé par ses partisans, et une vague de silhouettes masquées s'agita de droite à gauche, cherchant précipitamment leur place. Alecto glissa un « À plus, Bellatrix ! » avant de s'éclipser. Bellatrix resta immobile. Ils avaient manifestement reçu des instructions précises, mais ce n'était pas son cas; elle ignorait totalement où se positionner.
Elle reconnut bientôt Ennius Rosier et sans doute Antonin Dolohov, qui s'installèrent à sa gauche, laissant un espace libre entre eux et elle. Tandis que les derniers Mangemorts s'affairaient à trouver leur place, George Nott et Charles Mulciber approchaient. Bellatrix s'apprêtait à leur céder un peu de terrain pour qu'ils prennent position aux côtés de Rosier et Dolohov, mais au dernier moment, ils obliquèrent à sa droite.
Lord Voldemort les suivait de près. D'un pas léger et silencieux, il s'arrêta à l'endroit exact, prenant place entre Ennius Rosier et Bellatrix, et d'une pression discrète sur son bras, il lui fit avorter le pas de côté qu'elle s'apprêtait à faire.
Il l'immobilisa près de lui.
Elle se tenait à sa droite.
Juste à sa droite.
Son cœur battait à tout rompre.
— Mes chers amis, déclara Voldemort.
Bien que sa voix fût douce, elle résonna clairement parmi les rangs des Mangemorts, s'insinuant jusqu'au moindre recoin du cercle.
—Je vous ai convoqués ce soir, non pour vous féliciter ou vous rassurer, mais pour vous préparer à ce qui vient. Des heures sombres s'annoncent. Chacun d'entre vous sera mis à l'épreuve, et la moindre faiblesse sera exploitée par nos ennemis. Ce n'est pas le moment de se reposer sur de maigres victoires ou de s'illusionner sur notre invincibilité. Les fondations de notre cause sont solides, mais elles ne suffiront pas à elles seules. Comme vous le savez, une menace gronde. Le ministère, sous l'impulsion de Bartemius Croupton, s'agite tel un chien aux abois. Ses hommes multiplient les raids, frappant au hasard, cherchant à semer la peur et la discorde. Les vieilles familles de sang-pur sont harcelées, inspectées sans avertissement, comme si leur héritage même constituait un crime. Certaines familles en ont souffert plus que d'autres, et nous pensons à elles ce soir.
Voldemort balaya l'assemblée du regard, s'arrêtant un instant sur certains visages masqués.
— Croupton ne cherche pas seulement à vous traquer. Il veut vous effrayer, vous briser. Il espère que vous plierez sous la pression, que vous remettrez en question vos choix, vos alliances, jusqu'à douter de vos propres convictions. Mais comprenez ceci : s'il entre chez vous, s'il piétine vos terres, traumatise vos enfants et abat les vôtres sans sommation, ce n'est pas parce que vous êtes faibles. C'est parce que vous avez le courage de vous battre. Vous vous battez pour vos familles, pour votre sang, pour les traditions qu'ils voudraient voir disparaître. Ils veulent vous faire croire que vous êtes le danger. Que vous incarnez un passé révolu tandis qu'ils représentent l'avenir. Ne les laissez pas vous duper. Ce sont eux qui trahissent leur sang, eux qui renient leur héritage, et qui, au nom de leur lâcheté, cherchent à effacer tout ce que nous défendons. Croupton, comme tous ceux qui s'attaquent à nos familles, à nos enfants, et à nos maisons, en paiera le prix. Je vous en fais la promesse.
Un murmure d'approbation parcourut discrètement l'assemblée. Voldemort poursuivit d'un ton plus bas, menaçant. Comme pour accompagner ses paroles, un grondement retentit dans le ciel.
— Cependant… il existe une trahison plus insidieuse que celle de nos ennemis déclarés. Parmi vous ce soir, continua-t-il avec une lenteur calculée, se cache un traître.
Il laissa ces mots se déposer, pesants, venimeux, tandis qu'un sursaut agita les Mangemorts. Lord Voldemort s'était immobilisé au centre du cercle, et ses yeux noirs les foudroyait du regard. Son regard glissa lentement d'un Mangemort à l'autre, s'attardant juste assez longtemps pour que chacun ressente le poids de l'accusation. Seuls Bellatrix et les quatre Mangemorts autour d'elle furent épargnés.
— Tu te crois à l'abri, dissimulé derrière tes artifices, reprit-il en s'adressant à l'ombre indistincte d'un coupable invisible. Mais je t'en fais la promesse à toi aussi : lorsque viendra le jour où ton nom me sera révélé, je t'arracherai à cette illusion de sécurité, et tu goûteras à des tourments que même ton esprit le plus torturé n'oserait concevoir. Je n'ai jamais toléré la faiblesse, et encore moins la trahison. Que cela soit gravé dans l'esprit de chacun : la loyauté est la seule monnaie qui vous préservera de ma colère.
Il redressa lentement la tête, dominant l'assemblée tel un souverain impitoyable.
— Mais je suis clément… envers ceux qui me servent sans faille. Prouvez-moi que je ne me suis pas trompé en vous choisissant.
Puis, après un long silence, il conclut :
— Et que ce traître… prenne conscience qu'il est déjà mort.
Qui que ce fût, pensa Bellatrix, il devait être terrifié à cet instant précis. Jamais encore elle n'avait vu le Seigneur des Ténèbres incarner une menace aussi palpable, ni inspirer une terreur aussi paralysante.
Quand il congédia l'assemblée, personne ne s'attarda. Bellatrix fut presque tentée de les imiter, tant l'aura électrique de Voldemort était intimidante. Mais ses jambes bougèrent d'elles-mêmes, indépendantes de sa volonté. Elle s'avança.
Il la fixait, et lorsqu'elle parvint à sa hauteur, ils étaient seuls dans le cimetière. La pluie, désormais battante, s'écrasait en rafales froides sur les tombes et l'herbe détrempée.
— Maître… susurra-t-elle. Merci pour…
D'un geste flou de la main, elle désigna l'endroit où elle avait été placée dans le cercle.
— Je sais récompenser mes plus fidèles serviteurs, répondit-il simplement en s'approchant d'elle.
Il la contempla un instant avant de faire disparaître le masque qui dissimulait son visage. Puis, dans un élan d'affection qu'elle voyait poindre de plus en plus souvent, ses doigts effleurèrent sa joue. Bellatrix en profita pour se rapprocher imperceptiblement de lui.
— Viendrez-vous me rejoindre cette nuit ?
— J'en doute. La nuit promet d'être longue. Plusieurs de mes fidèles réclament déjà audience… sans doute pour me prouver qu'ils ne sont pas le traître.
— Pourquoi avoir choisi de révéler à tous que vous savez qu'il y en a un ?
— Pour pousser ceux qui détiennent des indices à parler. Vous êtes tous liés, d'une manière ou d'une autre. Frères, sœurs, cousins… ou de la même lignée. Je n'ose croire que personne n'a rien remarqué.
— Peut-être, dans ce cas, que le traître n'agit pas seul ?
— Peut-être, répondit-il, son ton laissant entendre que cette idée n'avait rien de réconfortant.
Un bref silence s'installa entre eux. Bellatrix sentit son regard s'attarder sur son visage, glissant de ses yeux à ses lèvres, avant de remonter lentement pour croiser à nouveau son regard.
— Bellatrix, fit-il d'une voix faussement détachée. Je sais que cela pourrait paraître inconvenant, mais cela te dérangerait-il si je te prenais là, maintenant ?
— Ici ? murmura-t-elle, un sourire effleurant ses lèvres.
— Il fait nuit. Il n'y a personne.
— Il pleut et il fait froid…
Quelle pluie ? Quel froid ? Son corps tout entier brûlait déjà d'anticipation.
Voldemort esquissa un sourire, arrogant, et d'un simple mouvement de baguette, posa deux sortilèges non-verbaux dans un geste rapide et précis. UnImperviuspour repousser la pluie, aussitôt suivi d'unCalefacioqui diffusa autour d'eux une chaleur douce et enveloppante, semblable à celle d'un feu de bois.
Bellatrix s'avança pour l'embrasser, mais il la devança d'un ordre bref :
— Retourne-toi.
Plus tard, alors qu'elle remettait sa robe en place, Bellatrix laissa échapper un petit rire et lança, d'un ton narquois :
— Qui de nous deux manque le plus de contrôle sur ses ardeurs, Maître ?
— Je t'en tiens pour seule responsable, répondit-il, le souffle encore légèrement court.
Elle éclata de rire.
XxXxXxX
Décembre 1972,
Manoir Lestrange.
Tic, tic, tic.
Elle gémit légèrement dans son sommeil, mécontente de sentir son corps se dérober, rejeter la couverture et quitter le lit. Ouvrant imperceptiblement les yeux, elle l'observa se lever, dans toute sa nudité, et s'approcher de l'une des grandes fenêtres de la chambre. Un majestueux hibou grand-duc se tenait derrière le carreau, une missive serrée dans son bec.
Un courant d'air glacé s'immisça dans la pièce, s'enroulant autour d'elle et la faisant frissonner tandis qu'il laissait entrer l'oiseau. Elle imagina qu'il ne tarderait pas à se rhabiller et profiterait de cette interruption pour s'en aller, comme à son habitude. Il ne restait jamais longtemps.
Mais, contre toute attente, il se retourna vers le lit et revint s'y glisser, cherchant la chaleur des draps. Il s'approcha même d'elle, s'adossant confortablement contre les oreillers dodus qu'elle avait disposés.
Bellatrix en profita aussitôt pour se lover contre lui, savourant le contact de sa peau nue – froide, lisse et douce – dont elle raffolait. Ses doigts effleurèrent doucement ses avant-bras tandis qu'il décachetait la lettre et commençait à la lire en silence.
Toujours taquine lorsqu'elle était éveillée et près de lui, elle laissa sa main glisser plus bas, effleurant doucement ce qu'elle y trouvait d'un geste à peine appuyé, avant de remonter lentement. Le membre endormi de son Maître, doux et chaud, tressaillit. Impassible, Voldemort ne laissa rien paraître, dissimulé derrière sa missive. Elle parsema de baisers son torse et longea ses côtes. Contrairement à elle, il n'était pas du tout chatouilleux. Elle avait déjà tenté de provoquer une réaction, une autre nuit où il avait dormi avec elle – sans succès.
Cette lecture devait être particulièrement captivante s'il ne daignait pas lui accorder la moindre attention, se dit Bellatrix, piquée d'un soupçon de jalousie. Ses caresses se firent alors plus insistantes, faisant nonchalamment glisser ses doigts le long de son membre, jusqu'à creuser ses mains par-dessous, et non sans un sourire mutin, elle le sentit devenir de plus en plus dur.
— Bellatrix, siffla-t-il enfin, d'un ton froid et agacé.
Bellatrix rit, savourant sa victoire, avant de disparaître sous les draps pour le prendre en bouche, sa langue s'enroulant autour de son gland. Elle adorait cela. Elle avait découvert, avec une exquise satisfaction, qu'il était absolument incapable de refuser ce genre de caresses.
Amusée, elle repensa à cette fois où, emportée par une envie folle, elle avait bondi sur son Maître – abasourdie et tout autant excitée de s'apercevoir qu'il l'avait laissée faire quelques secondes avant de la repousser avec brusquerie. À présent, elle savait combien il en raffolait et à quel point il avait dû lutter pour la congédier.
Elle perçut le bruissement d'un parchemin qu'on déposait au sol et sentit une main s'enfoncer doucement dans ses cheveux, tandis que ses lèvres et sa langue s'appliquaient autour du sexe dur, lisse et irrésistible de son Maître. Le drap avait glissé, exposant son corps à l'air froid de la chambre qui la fit frissonner.
Elle dut se retenir de gémir autour de lui – l'excitation la gagnait à l'idée qu'il l'observait, sa main pâle agrippant fermement ses cheveux. Son souffle était légèrement saccadé, ses yeux sombres et brûlants fixés sur elle, sa bouche, son corps nu. Dans ces moments-là, il ne dissimulait ni son désir ni l'admiration qu'il lui portait. C'était grisant.
Elle laissa échapper un nouveau gémissement.
— Viens là, dit-il.
Sa voix était plus rauque qu'à l'accoutumée. Elle esquissa un sourire, puis grimpa sur lui, les bras posés sur son torse, pressée contre lui. Elle l'embrassa de ses lèvres humides, languissantes, tandis qu'il glissait des mains possessives sur son corps, palpant ses cuisses et ses fesses, et descendant lentement jusqu'à ses hanches. Elle s'arqua contre lui, désespérée qu'il la prenne, et frissonna en sentant son sexe effleurer son entrée, une fois, puis une seconde, avant qu'il ne la pénètre d'un mouvement lent et profond.
Bellatrix gémit contre sa bouche, et resta immobile, les lèvres scellées aux siennes, les paupières closes, savourant l'intense plaisir qui l'envahissait à chaque fois qu'il était en elle. Elle sentit ses bras caresser son dos étroit, ses épaules, puis l'enlacer fermement, dans une étreinte destinée à l'immobiliser, et bientôt, il imposa un rythme plus soutenu. Elle se cambra autant qu'elle le put, ponctuant chaque mouvement de gémissements extatiques entre deux baisers mouillés. Incapable de s'en empêcher, elle accompagna ses va-et-vient par de petites ondulations, se mouvant autant que possible malgré l'étreinte qui la maintenait plaquée contre lui.
Il semblait se délecter de ses plaintes étouffées, de ses petits mouvements entravés, ou du moins ce fut ce qu'elle déduisit à le sentir frémissant sous son corps, ses bras se contracter autour d'elle à chaque fois qu'elle gémissait. Sa bouche se détacha de ses lèvres, et embrassa la ligne de sa mâchoire malgré le rideau noir de ses cheveux qui cascadaient entre leurs deux visages. Ils échangèrent un regard, et elle sut que ce serait une de ces fois où il lui parlerait.
Parfois il ne disait rien du début à la fin, parfois il la taquinait, moqueur, presque cruel, parfois il la complimentait.
— Tu es irrésistible, comme ça, ma Bella. Tu es toujours si heureuse de me retrouver. C'est comme si tu avais été faite pour moi… pour ma queue.
Elle s'empourpra. Le registre de langue pouvait basculer brusquement, sans crier gare, et elle adorait cela aussi.
— Oui, Maître, gémit-elle, leurs deux visages proches, les yeux plantés dans les siens.
— Dis-moi, Bellatrix… combien de fois par jour songes-tu à nos étreintes ?
Elle rougit de plus belle.
— Maître, ne vous moquez pas, je le confesse, j'y pense tout le temps. Vous m'obsédez complètement.
Il leva un sourcil intrigué.
— Et que t'imagines-tu, exactement ?
— Ne vous moquez pas.
— Je ne me moquerai pas.
— Que… Que vous me preniez dans chacune des pièces de cette maison par exemple, répondit-elle, le feu aux joues, à bout de souffle.
Saisie par une impulsion audacieuse, Bellatrix tendit son esprit vers celui de son Maître, comme frappant à la porte de sa conscience. Elle le sentit aussitôt lui répondre, lui ouvrant l'accès sans résistance. Les fantasmes s'imposèrent avec une vivacité électrique, s'écoulant librement devant lui, dévoilés sans la moindre pudeur.
Dans la bibliothèque du manoir, appuyée contre la table de billard, elle se voyait porter une longue robe rouge – une pièce sans doute d'une rare élégance en d'autres circonstances. Mais à présent, elle était retroussée, dévoilant ses fesses nues, offertes, tandis qu'il la pénétrait de gestes vifs, précis. Chaque mouvement était accompagné de baisers ardents déposés sur sa nuque, traçant des sillons brûlants sur sa peau frémissante.
Dans le salon, elle se découvrait à califourchon sur lui, le chevauchant sur ce même canapé où, un temps maintenant lointain, Reginaldus s'était assis pour discuter de l'annulation possible de son mariage. L'ironie de la scène ne lui échappait pas, mais cela ne faisait qu'ajouter à l'ivresse du fantasme.
Dans la salle à manger, elle s'imagina étendue, nue, sur la grande table de réception, les bras relâchés au-dessus de sa tête. Là, à la place du patriarche, elle le sentait la prendre avec une brutalité sans fard, sans retenue. Et ses cris extatiques emplissaient les lieux augustes. Pièce après pièce, les images défilaient, déferlant en vagues brûlantes qu'elle laissait s'insinuer dans son esprit. Parfois, il était entre ses jambes, lent, tendre, profond. D'autres fois, il était derrière elle, brutal, intransigeant, insaisissable.
Il voyait tout. Bellatrix n'ignorait pas qu'il goûtait à cette invitation silencieuse, qu'il se délectait de ces fragments d'elle qu'elle lui offrait sans réserve.
— Rien dans la salle de bain ? demanda le Seigneur des Ténèbres, l'air faussement innocent.
Bellatrix peinait à répondre, submergée par les vagues de plaisir qui déferlaient en elle. Ses paupières restaient obstinément closes, et elle ne contrôlait plus ni ses gestes ni sa respiration. Elle voulait qu'il la prenne plus vite, plus profondément, mais elle était toujours fermement étreinte, et, taquin, joueur, il ne la pénétrait plus que du bout de son sexe. Ses ongles effleurèrent, puis griffèrent légèrement son torse.
— Ma baignoire… est trop… petite… pour nous deux, Maître, souffla-t-elle dans un halètement. Oh… c'est si bon.
Les yeux toujours fermés, ses gémissements étouffaient tout autre son, mais elle sentit néanmoins le rire de son Maître vibrer sous ses doigts.
— Ce serait… bien mieux… dans la vôtre, parvint-elle à ajouter avec un sourire espiègle.
Il attira son visage vers lui et l'embrassa de nouveau, avant de la libérer complètement de son étreinte. Bellatrix s'appuya contre lui, reprenant son souffle, puis se redressa lentement pour mieux le chevaucher, s'enfonçant de toute sa longueur. Ses hanches étaient prises de tremblements, et ses gémissements cédèrent peu à peu la place à des cris.
— Oh, mon seigneur… répéta-t-elle, les yeux clos, l'extase marquée sur ses traits.
À chaque fois qu'elle frôlait l'orgasme, une envie absurde, mais brûlante, la poussait à lui déclarer son amour. C'était irrésistible – l'avoir en elle, sentir son sexe aller et venir, l'étirer à chaque mouvement.
La main froide de Voldemort glissa le long de sa cuisse, s'agrippant fermement à sa peau frissonnante. Son autre main remonta avec une lenteur exquise, effleurant un sein avant de redescendre le long de ses côtes. Bellatrix, chatouilleuse, tressaillit. Puis, ses doigts s'immobilisèrent à plat sur son aine. Avec un calme souverain, il humidifia légèrement son pouce avant de le poser contre son clitoris, imprimant un cercle lent et régulier, le rythme parfaitement synchronisé avec ses mouvements.
Le dos arqué, Bellatrix laissa échapper un gémissement plus aigu, ses ongles s'enfonçant un peu plus profondément dans la chair de son torse.
— Maître, je vais…
— Vas-y, murmura-t-il, l'ombre d'un sourire au coin des lèvres. Je t'attends depuis au moins cinq minutes, Bella.
Ce simple encouragement suffit à la faire basculer.
Elle se laissa emporter sans retenue, s'abandonnant à lui.
Quelques minutes plus tard, Bellatrix reposait contre lui, essoufflée mais comblée, un sourire béat étirant ses lèvres. Son corps tout entier vibrait encore des réverbérations du plaisir dans chacun de ses membres. Son Maître, en apparence, avait déjà retrouvé ce calme impénétrable qui ne le quittait jamais, l'aura de contrôle retombant sur lui comme une armure familière. Pourtant, la légère irrégularité de son souffle et le martèlement sourd de son cœur, perceptible sous son oreille, trahissaient que même lui n'en était pas sorti tout à fait indemne.
Elle déposa un baiser dans son cou.
— J'ai aussi imaginé bien des choses chez vous, Maître… murmura-t-elle, ses doigts dessinant distraitement des cercles sur son torse. Voulez-vous que je vous les montre ?
Un éclat amusé passa dans le regard de Voldemort lorsqu'il répondit, la voix aussi sereine que s'il n'avait jamais été dérangé :
— Non, ceux-là… je veux que tu m'en réserves la surprise.
Bellatrix se redressa légèrement, le menton appuyé sur ses mains croisées, et l'observa avec une satisfaction évidente. Il était rare qu'elle parvienne à le détourner de ses préoccupations.
Le silence retomba, confortable et chargé d'une proximité tacite.
— Et cette lettre, Maître ? demanda-t-elle après un long moment, brisant le fil paisible de leurs pensées.
— Oh…
Sans baguette, Voldemort tendit simplement la main. Le parchemin, qui gisait au sol à quelques mètres du lit, s'éleva aussitôt et vint se poser dans sa paume avec une grâce surnaturelle. Bellatrix éclata de rire, incapable de réprimer la satisfaction de l'avoir distrait si efficacement. Elle roula sur le côté, se détachant de lui avec une lenteur paresseuse, avant de se lever.
— Quand j'ai dit que ma baignoire était trop petite, c'était une simple théorie… fit-elle remarquer en s'étirant. Elle n'a jamais été testée, vous savez.
— Ça ne marchera pas deux fois, Bellatrix, répondit-il sans même lever les yeux du parchemin.
Elle rit de plus belle, malicieuse, et se dirigea vers la salle de bain en laissant traîner un regard sur lui. La porte se referma dans un léger claquement, laissant derrière elle l'ombre d'un sourire.
XxXxXxX
31 décembre 1972,
Manoir Lestrange.
Le soir du Nouvel An, une petite réception fut organisée au manoir Lestrange. Bellatrix avait accepté l'idée de Rabastan, à condition d'avoir son mot à dire sur la liste des invités. Il était hors de question que les événements de l'année passée se reproduisent. Ils échangèrent quelques piques, mais Bellatrix finit par trancher en invitant Narcissa et Geraldine, tandis que Rabastan insista pour convier Lucius, Amycus, Ethan, Dolohov, Macnair et Alecto.
— Pas Ethan, ni Lucius, ni Dolohov, trancha Bellatrix.
— Pourquoi pas Dolohov ?
— Il est vieux !
— Mais il est sympa, répliqua Rabastan. Et il n'est pas plus vieux que…
Rabastan lui lança un regard appuyé.
Bellatrix lui donna une tape sur le bras.
— Ok, ok, pas Dolohov, concéda Rabastan en riant. Mais je suis intransigeant sur les autres.
— S'il te plaît, pas Ethan.
Rabastan perçut sans doute la note de désespoir dans sa voix, car il raya le nom d'Ethan Rosier sans insister davantage.
— Mais Lucius est invité, sois raisonnable. Il va se marier avec ta sœur !
Bellatrix se renfrogna, mais finit par hausser les épaules, concédant cette fois la victoire.
Plus tard dans la soirée, Geraldine, Bellatrix et Narcissa étaient affalées côte à côte sur le canapé du salon, échangeant des potins tout en picorant des toasts au saumon. Rabastan, Lucius, Alecto, Amycus et Walden jouaient aux cartes explosives. Tous dégustaient un verre de whisky pur feu – à l'exception de Narcissa, qui se contentait d'une bieraubeurre.
— Délicieux ce whisky Rabastan, remarqua Amycus.
— Il fait partie de la collection de mon père, expliqua Rabastan, paix à son âme.
— Paix à son âme, murmurèrent les autres.
— Dolohov est sur une piste pour traquer les frères Prewett, reprit Rabastan, ces enfoirés vont bientôt payer.
— Tu sais qu'ils osent nier avoir toute implication dans son meurtre? lança Lucius, sardonique.
— Quoi? s'étouffa Rabastan, indigné. Qui t'a dit cela?
Bellatrix voulut écouter leur conversation davantage mais les bavardages de Geraldine l'empêchaient de tout entendre. La jeune mariée était ravie d'avoir l'occasion de passer du temps en compagnie de personnes de son âge. Avec verve, dans des murmures conspirateurs, elle aimait se plaindre de son époux, qui ne rangeait jamais ses affaires correctement et oubliait systématiquement tous les rendez-vous. Elle avait l'air de reprendre du poil de la bête suite à la mort de son père. Bellatrix remarquait que son verre de whisky pur feu était resté intact sur la table de salon.
Narcissa parlait des scandales à Poudlard, des frasques d'Evan Rosier et de Ralph Avery, et bien sûr de Sirius, ce chenapan qui enchaînait les retenues. De temps à autre, elle lançait des regards furtifs à Lucius, rougissant légèrement, mais paraissant aussi troublée, comme désarçonnée par son attitude. Bellatrix, s'étonnait aussi du comportement distant de Lucius envers sa sœur. Il l'avait saluée, un sourire charmeur aux lèvres, l'avait embrassée sur la joue, s'attardant plus que la décence ne tolérait, mais n'avait pas cherché à l'approcher de la soirée, préférant la compagnie de Rabastan et Amycus.
Bellatrix ne savait pas quoi en penser. Ce fut pourtant quelques heures plus tard, alors qu'elle fouillait dans la cave à la recherche d'autres bouteilles scellées par l'ancien patriarche, qu'elle obtint sa réponse. Il l'avait interceptée sur le seuil de la porte, dans le petit escalier étroit menant au sous-sol.
— Madame Lestrange, dit-il d'un ton solennel.
Bellatrix leva les yeux au ciel. Quel air pompeux. C'était insupportable.
— Oui ?
— Je voulais juste… me présenter formellement, puisque nous n'en avons pas encore eu l'occasion.
— Malefoy, la première fois que je t'ai vu, tu étais un petit geignard plein de bave de neuf mois.
— Oui… dit-il, un sourire gêné aux lèvres, je le sais bien, mais… depuis que je fréquente votre sœur, je veux dire.
— Je suis au courant de vos fiançailles, rétorqua-t-elle sèchement.
— Oui… je voulais simplement vous dire que j'aime énormément votre sœur et que je prendrai soin d'elle.
Bellatrix laissa échapper un rire bref, sans chaleur.
— Ah oui… ? C'est pour ça que tu t'es amusé avec Alecto l'année dernière ? Par amour pour ma sœur ?
Lucius sembla pris au dépourvu, ses traits se figeant dans une grimace embarrassée.
— Vous êtes au courant ?
Il s'approcha d'un pas, presque suppliant.
— Il ne se passe pas un jour sans que je regrette cette soirée. J'avais bu… et fumé quelque chose. Je ne cherche pas d'excuses, mais je n'étais pas moi-même. Rodolphus m'a piégé.
— Ah, donc c'est la faute de Rodolphus si tu as trompé ma sœur ?
— Non, ce n'est pas ce que je voulais dire…
Il semblait horrifié.
— S'il vous plaît, je ne veux pas la perdre. J'ai de sincères sentiments pour elle.
Bellatrix soupira et planta sur lui un regard long et acerbe.
— Je ne me mettrai pas entre vous deux. Elle est trop attachée à toi. Et cela tient du miracle d'être promis à la personne que l'on aime. Mais sois certain de tenir ta promesse, car je me ferai un plaisir de te la rappeler au moindre faux pas. Est-ce clair ?
— Oui, madame Lestrange.
— Et appelle-moi Bellatrix, par Merlin ! Es-tu toujours aussi sentencieux ?
— Je ne cherche qu'à être courtois avec la grande sœur de ma fiancée, répondit-il, un peu rougissant.
Bellatrix secoua la tête, exaspérée.
— Vous ne lui direz rien, n'est-ce pas ? chuchota-t-il nerveusement.
— Ça dépend. Que te voulait le Seigneur des Ténèbres, la dernière fois, dans le laboratoire de potions ? demanda-t-elle, impérieuse.
Lucius se raidit aussitôt.
— Il ne vous en a pas parlé ?
— Le Seigneur des Ténèbres ne s'embarrasse pas de ces banalités. Il ne me dit que ce qui compte vraiment, fanfaronna-t-elle.
— Mais c'est de la plus haute importance, rétorqua Lucius, piqué au vif.
Il toisa Bellatrix, mais son assurance s'effaça presque aussitôt, comme s'il savait d'avance que cela ne prendrait pas avec elle.
— Il m'a dit qu'il vous avait fait entrer à dessein, afin que vous voyiez que j'ai ce journal en ma possession.
Bellatrix fronça les sourcils, perplexe. Pourquoi était-il important qu'elle sache que Lucius Malefoy possédait ce carnet, si elle n'en connaissait pas le contenu ?
— Un journal ? Comme un… journal intime ? À qui appartient-il ?
— Je n'ai pas le droit d'en parler…
— Et moi j'ai tout à fait le droit de répéter à Narcissa tes frasques nocturnes en compagnie de Rodolphus et des rustres qu'il appelle ses amis, rétorqua-t-elle, menaçante.
— Je… je suis désolé, mais je ne peux pas. Le Seigneur des Ténèbres a été très clair. Je n'ai pas le droit de révéler à quoi sert ce journal.
Sert ? Le journal avait donc une fonction, un pouvoir ? Bellatrix sentit la curiosité la piquer.
— Très bien. Je finirai par le découvrir de toute façon, lâcha-t-elle avec irritation, emportant sa bouteille d'un geste sec vers le premier étage.
— Ne lui dites rien, s'il vous plaît…
XxXxXxX
Alors que la soirée battait son plein, à une heure de minuit, son Maître l'appela. Bellatrix prétexta une fatigue soudaine – une excuse qui ne trompa personne – puis salua sa petite sœur et Geraldine avant de se hâter vers le sas pour transplaner. C'était inespéré. Il n'était pas censé être disponible avant la semaine prochaine, et cela faisait presque dix jours qu'elle ne l'avait pas vu.
Elle apparut directement dans la chambre du mage noir, un peu chancelante sous l'effet du whisky pur feu. Son Maître se tenait face à l'âtre, réchauffant ses mains, mais il se tourna vers Bellatrix dès qu'il l'entendit transplaner. Mue par l'ivresse, elle s'approcha et l'embrassa, sans hésiter une seconde.
— Joyeux anniversaire, chuchota-t-elle contre ses lèvres.
Elle avait craint de manquer l'occasion de le lui souhaiter. Elle avait soigneusement retenu la date, découverte dans l'un de ses souvenirs, dans sa pensine. Ce n'était pas encore le 1er janvier. Il lui restait quelques précieuses minutes pour le lui dire.
Le mage noir ne répondit pas mais approfondit le baiser, quelques secondes de plus.
— C'est un détail dont tu aurais pu te passer, dit-il d'une voix basse mais assurée.
— Vous ne fêtez jamais votre anniversaire ? s'étonna Bellatrix, glissant ses bras autour de lui, poursuivant ses baisers le long de son cou et de sa mâchoire.
Il lui avait tant manqué.
— Non. Peu de personnes connaissent la date, et ça me convient parfaitement.
Bellatrix s'apprêtait à répondre une formule habituelle – « Pardonnez-moi, mon Seigneur, je ne le ferai plus si cela vous déplaît. » – mais quelque chose dans sa voix la fit suspendre ses baisers pour le dévisager avec curiosité.
— Pourquoi ? chuchota-t-elle, les yeux levés vers lui.
Il posa ses mains sur ses bras.
— Je ne t'ai pas fait venir ici pour parler de mon passé, rétorqua-t-il d'un ton cinglant.
Elle se mordit les lèvres pour s'empêcher de s'excuser comme une enfant prise en faute.
— Pourquoi m'avez-vous fait venir, mon Seigneur ?
Elle lui sourit, passa ses bras autour de son cou et l'embrassa à nouveau.
— J'ai beaucoup pensé à toi cette semaine, Bellatrix, dit-il d'un ton plus doux, presque narquois. Je t'ai imaginée t'ennuyer seule chez toi, à te rejouer toutes ces fantaisies idiotes que tu t'imagines quand tu penses à moi. Et une idée m'est venue…
— Oui, Maître ?
— Que fais-tu exactement lorsque tu t'inventes ces scénarios ? Es-tu assise, les yeux dans le vague, à attendre que je revienne ?
Bellatrix rougit.
— Au début, oui… puis, l'excitation montant, j'adopte une attitude plus proactive.
Ils échangèrent un regard.
— Montre-moi.
Elle hocha la tête, à la fois intimidée et excitée.
— Où voulez-vous que je…? demanda Bellatrix.
— Où le fais-tu d'habitude?
Où ? La vraie question serait plutôt : où ne le faisait-elle pas ? Lorsqu'il lui arrivait de penser à son Maître – ce qui survenait fréquemment, à toute heure du jour ou de la nuit – elle prenait presque toujours le temps d'assouvir son désir pour lui. Dans son boudoir, entre deux chapitres sur les enchantements de protection, la main paresseusement glissée sous ses jupons. Dans son lit, avant de dormir, au réveil, ou parfois en pleine nuit, prenant soin de se déshabiller entièrement, imaginant ses mains parcourant ses seins, son ventre, ses cuisses… ne modérant pas ses gémissements pour lui. Dans son bain. Et lorsque ni Rabastan ni Rodolphus n'étaient là, elle n'avait aucun scrupule à interrompre ses activités, quel que soit l'endroit du rez-de-chaussée. C'était un peu ridicule, elle en convenait. Oserait-elle répondre « partout » ?
— Dans mon lit, la plupart du temps, répondit-elle sagement.
— Eh bien, installe-toi dans le lit, dans ce cas.
Il s'assit sur le fauteuil près du lit.
C'était là, sur ce même fauteuil, qu'elle l'avait chevauché un an plus tôt, à cette heure exacte. Leur deuxième fois seulement. Depuis août, elle aurait été bien incapable de compter combien de fois ils avaient fait l'amour. Plusieurs fois par semaine, sans aucun doute. Et pourtant, malgré toutes ces fois où il l'avait vue nue, vulnérable, à sa merci, une certaine timidité persistait lorsqu'elle devait se toucher devant lui.
Elle s'allongea précautionneusement sur le lit, écarta les cuisses vers lui, remonta sa robe, et effleura lentement son ventre.
— Es-tu habillée quand tu fais cela ? demanda-t-il en croisant une jambe sur l'autre, ses mains nonchalamment posées sur les accoudoirs.
— Pas toujours…, répondit Bellatrix.
À peine eut-elle fini sa phrase que ses vêtements disparurent. Elle lança un regard exaspéré à son Maître, qui avait levé la main, sans même effleurer sa baguette.
— C'est pour plus de réalisme, expliqua-t-il, un sourire effleurant ses lèvres.
— J'ai beau les choisir avec soin, mes vêtements ne restent jamais bien longtemps en votre présence, Maître, rétorqua-t-elle avec amusement.
— Ton corps me plaît, reconnut-il, son regard indolent glissant sur elle.
Elle sentit ce regard effleurer la pointe dressée de ses seins, glisser jusqu'à son intimité palpitante, où l'excitation s'écoulait déjà le long de ses cuisses. Ses doigts reprirent leur danse, et un gémissement lui échappa aussitôt – son désir était à son comble. Du bout des doigts, elle traça la ligne de sa fente, avant de remonter vers son clitoris, qu'elle effleura sans s'attarder. Elle savait qu'en cet état, il ne lui faudrait que quelques mouvements pour atteindre l'orgasme. Mieux valait prolonger un peu le plaisir.
Elle écarta davantage les jambes, lui offrant une vue directe et sans détour sur son intimité. D'un léger mouvement du bassin, elle chercha à provoquer en lui l'envie irrépressible de la prendre.
Il la dévorait du regard.
— As-tu seulement idée du pouvoir que tu as sur moi… ? chuchota-t-il, presque malgré lui.
— Maître… je passe mes journées la main entre les cuisses à cause du pouvoir que vous avez sur moi, plaisanta-t-elle dans un souffle, se cambrant davantage, la voix tremblante de désir.
Il se leva, s'approcha du lit, et s'immobilisa entre ses cuisses.
— Le désir rend vraiment stupide, murmura-t-il en déboutonnant son pantalon. Tu me fais me sentir comme un adolescent dévoré par ses hormones.
Bellatrix ne put s'empêcher de rire doucement.
— C'est d'autant plus embarrassant que je n'ai jamais été cet adolescent bourré d'hormones, poursuivit-il, un sourcil levé, presque étonné de sa propre confession.
Bellatrix se remémora l'adolescent emprunté, sur ses gardes, destinataire involontaire du désir malsain de sa professeure plus âgée, désir insufflé malgré lui et qu'il ne comprenait pas. Elle revoyait avec clarté l'expression de froide perplexité, de réticence troublée, de curiosité hésitante, qui ornait son visage alors que Ludmilla Thenn avait sa bouche goulument fermée autour de son sexe gonflé. Le regard qu'elle posait sur lui, comme s'il était une friandise dont elle pouvait enfin se délecter. Le regard d'une prédatrice.
Elle priait de tout son cœur pour ne jamais ressembler à Ludmilla Thenn dans le désir absolu qu'elle nourrissait pour son Maître. C'était vrai — son appétit pour lui était insatiable. Elle avait envie de lui presque constamment. Peut-être que c'était étrange, un peu excessif, mais au-delà de ce besoin charnel, ce qu'elle désirait plus que tout, c'était de le voir satisfait. D'entendre son plaisir. De sentir qu'elle comptait, qu'elle pouvait lui offrir ce qu'il ne trouvait chez personne d'autre. Elle ne voulait pas profiter de lui. Elle vivait pour ce moment où son désir se reflétait dans ces yeux de feu et d'ombre. Quand elle atteignait l'extase, ce n'était jamais seulement pour elle. C'était pour se rapprocher de lui, franchir une barrière invisible, gagner une intimité précieuse, un rôle qu'aucune autre ne pourrait occuper. Servir, d'une manière que personne ne comprendrait jamais.
Bientôt, ces pensées s'envolèrent lorsqu'il la pénétra d'un coup de rein brusque et profond. Retenant son orgasme tout au long de ses caresses, Bellatrix jouit instantanément, son regard s'embrumant alors que des étoiles dansaient devant ses yeux. Le mage noir imposa un rythme violent, inflexible. Mais très vite, il sembla se lasser de cette position. Il attira Bellatrix à lui, l'enlaçant fermement, leurs corps pressés l'un contre l'autre alors qu'elle se retrouvait debout face à lui. Il l'embrassa, et elle sentit le souffle saccadé de sa respiration, son cœur battant avec une rare fébrilité.
Puis, sans un mot, il la fit pivoter pour la plaquer face à l'une des colonnes torsadées du lit. Ses doigts glissèrent le long du bois froid tandis qu'elle s'y agrippait, ses seins écrasés contre la colonne, mais ses hanches se cambrèrent d'elles-mêmes, offertes à son Maître. Ses mains descendirent sur son corps, parcourant chaque courbe – ses fesses, caressées sans retenue, ses seins, saisis avec possessivité. Il n'y avait aucune douceur dans ses gestes, mais une ardeur brûlante, dévorante.
Bientôt, sa bouche suivit le sillage de ses mains. Il écarta ses longs cheveux, révélant sa nuque, où il déposa des baisers brûlants, une morsure légère qui fit frissonner Bellatrix. Il la dirigea fermement par les hanches, l'amenant à se cambrer encore davantage, et la pénétra à nouveau, profondément.
Le claquement de leurs corps résonna dans la chambre. Sans attendre, il retrouva ce rythme féroce du début, plongeant en elle avec une intensité presque sauvage.
L'intensité de ses va-et-vient lui coupa le souffle, étouffant tout gémissement. Seuls les grognements rauques du mage noir résonnèrent dans la chambre. Il tenait fermement ses bras tirés en arrière, l'empêchant de bouger, l'obligeant à se cambrer davantage pour accueillir chaque coup de rein brutal. Il libéra un bras, juste assez pour pincer l'un de ses seins, que le rythme effréné faisait rebondir sous l'assaut. Puis il s'immobilisa brusquement, haletant.
Bellatrix crut un instant qu'il avait joui. Mais ses doigts continuaient de jouer paresseusement avec son téton, le pinçant et le roulant entre ses phalanges.
Incapable de se contenir, elle ondula instinctivement, s'empalant lentement sur lui, savourant chaque centimètre, du gland charnu jusqu'à sentir ses testicules frapper contre elle. Il ne bougea pas. Il la laissa prendre le contrôle, l'observant en silence tandis qu'elle adoptait un rythme plus lent, plus profond, se délectant de la sensation de sa longueur qui s'enfonçait et ressortait avec une lenteur exquise. Le bruit humide et obscène de son plaisir résonnait étrangement fort contre les murs de pierre, à chaque pénétration.
Il était encore bien trop dur, trop imposant en elle, pour que l'instant touche à sa fin.
— Oh Maître… c'est tellement bon de vous sentir en moi, gémit-elle, continuant à onduler, ses mouvements calculés pour caresser chaque recoin de son sexe.
Ses doigts, jusqu'alors insistants, se firent doux, effleurant la pointe tendue de son téton dans un cercle délicat.
— Qu'y puis-je si ce corps faible réclame d'être pris par son Maître ? murmura-t-elle, le souffle court.
Il ne répondit pas. Cette fois, il l'enlaça, la soulevant du sol d'un geste assuré. Son dos rencontra la colonne torsadée du lit alors qu'il la pressait contre le bois froid. Sa bouche, brûlante, captura son sein. Bellatrix bascula la tête en arrière, un gémissement plus fort s'échappant de ses lèvres lorsque, dans le même élan, il s'enfonça en elle de nouveau.
Elle adorait cette position – face à lui.
Il était contraint de la maintenir fermement, ses bras entourant sa taille, tandis qu'elle s'accrochait à lui, ses jambes enroulées autour de ses hanches. Et dans cette étreinte, elle avait tout le loisir de l'embrasser, de sentir son souffle se mêler au sien, de goûter à ses lèvres avec une lenteur savoureuse.
Lorsqu'il délaissa son sein, elle ne perdit pas une seconde pour couvrir son visage de baisers, avant de retrouver sa bouche. Elle l'invita à approfondir ce baiser, sa langue venant caresser la sienne dans un jeu silencieux.
Elle sentit cette vague familière monter à nouveau en elle, brûlante et inévitable.
— Oh Maître…
Son corps se tendit, se cambra, et lorsqu'elle jouit, il la suivit dans un même souffle, quelques secondes plus tard.
Il la garda contre lui un instant, leurs peaux moites encore collées l'une à l'autre, avant de la porter jusqu'au lit. Les draps frais les accueillirent, et Bellatrix se blottit immédiatement contre lui, sa main trouvant naturellement le chemin de son cœur, qui battait encore à tout rompre.
— Maître… je n'ai jamais été aussi heureuse de ma vie, souffla-t-elle, les yeux clos, un sourire paisible étirant ses lèvres.
En guise de réponse, il la serra un peu plus fort contre lui, les draps se refermant autour d'eux comme une étreinte brûlante. Il l'embrassa – un baiser moite, chaud, empreint de paresse et de langueur.
Dans la chaleur étouffante du lit, il se glissa de nouveau sur elle, la pénétrant sans précipitation, ses mouvements lents et profonds. Une main glissée sous sa tête la maintenait contre son cou, leurs souffles mêlés, leurs cœurs battant à l'unisson. Ils étaient si proches qu'elle sentait chaque battement résonner contre sa poitrine.
Mais au bout de quelques secondes, il se détacha légèrement, attrapa ses jambes et les fit passer par-dessus ses bras, approfondissant leur union d'une manière presque brutale.
Un gémissement s'échappa des lèvres de Bellatrix, teinté d'un mélange de douleur et de surprise.
— Oh Maître… c'est… c'est trop profond pour moi de cette façon…
— Mais c'est si bon pour moi de cette façon… répondit-il, sa voix grave et voilée à l'inflexion légèrement moqueuse, tandis qu'il s'enfonçait violemment en elle, les yeux clos, emporté par la sensation.
Bellatrix laissa échapper un cri sous le supplice.
Elle s'efforça de se détendre, prenant sur elle, mais c'était comme si chaque poussée la transperçait. Elle agrippait les draps, et les yeux rivés sur lui, elle observait son visage – abandonné au plaisir, les lèvres entrouvertes, les yeux fermés, son souffle court et rauque.
Malgré la douleur, une chaleur diffuse se propagea en elle. Bientôt, l'excitation crût davantage, et elle mouilla encore plus, l'humidité inondant ses cuisses. Le sexe imposant de son Maître glissa toujours aussi profondément, mais cette fois avec une exquise facilité, l'écartelant dans un mélange de douleur et de délice.
Une vague de plaisir, inattendue et dévastatrice, s'empara d'elle, la submergeant tout entière. Ses cris se transformèrent en gémissements hachés, teintés d'étonnement, comme si elle franchissait une nouvelle frontière du plaisir – brut, profond, vertigineux.
Il ouvrit alors les yeux.
— Tu aimes ça, Bella ?
— Oh… Maître… balbutia-t-elle, incapable d'assembler une pensée cohérente.
Ses yeux roulèrent vers l'arrière tandis que ses mains se crispaient sur ses bras, cherchant un point d'ancrage.
— Je savais que tu pouvais le supporter… ma belle et forte Bellatrix… souffla-t-il dans un gémissement rauque.
Elle jouit dans un hurlement, son corps se tendant sous la vague de plaisir. Il la suivit peu après, s'abandonnant à son tour dans un râle étouffé. Il resta allongé sur elle de longues secondes, leurs corps tremblant encore, frissonnants de la tête aux pieds.
— Mon Seigneur… murmura-t-elle, la gorge serrée, essoufflée.
Un léger rire secoua imperceptiblement le mage noir, un éclat rare, presque tendre.
— Bonne année, Bellatrix, dit-il avant de l'embrasser, paresseusement.
Elle retint une fois de plus ce « je vous aime » qui lui brûlait les lèvres.
Un maelström de pensées tourbillonnait dans son esprit, l'étourdissant presque. Elle brûlait de questions qu'elle n'osait formuler. Elle voulait lui parler de Ludmilla Thenn, des orgies dont elle connaissait l'existence parmi ses Mangemorts, de la façon dont il avait dû la percevoir un an plus tôt, lorsqu'elle s'était présentée à lui – tremblante de désir, mais déterminée à l'avoir en elle. Elle voulait savoir ce qu'il avait pensé d'elle à leur première rencontre, lorsqu'elle avait quatorze ans, et qu'elle était trop jeune, trop impressionnée pour prononcer ne serait-ce qu'un mot devant lui. Elle voulait comprendre. Si elle avait un statut particulier dans son cœur, ou si tout cela s'effacerait sans bruit lorsque Rodolphus reviendrait.
À suivre.
Merci à ceux qui me suivent – je vois vos visites dans les stats, et ça me fait chaud au cœur. Mais, comme toujours, un petit commentaire serait un immense plaisir.
Si vous n'aimez pas ce site (je comprends, c'est aussi mon cas), sachez que je publie également ma fanfiction sur AO3, et parfois un peu en avance par-rapport à ici. Avec le peu de retours ici, je réfléchis à ne poster que sur cette plateforme. Cela prend du temps de publier sur plusieurs sites, et je n'y trouve pas vraiment mon compte, sans retours par ici. De plus, il est plus facile pour moi de répondre aux reviews anonymes, de ceux qui n'ont pas de compte sur AO3. Tout le monde s'y retrouve.
Voici le lien :
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À bientôt ! Et bonne année 2025.
SamaraXX
