Andrea et Russel étaient arrivés dans l'après-midi du 31, et Sam, un peu stressée, n'avait pas arrêté de s'activer. Elle passait son temps à vérifier le contenu du frigo, s'assurant qu'il ne manquait rien, et avait même déjà commencé à préparer certaines sauces. Lena, amusée, n'avait jamais vu autant de nourriture pour un simple dîner à cinq.

Dans le hall d'entrée, Ruby ajustait son manteau pendant que Sam se préparait à partir. Andrea et Russel, qui discutaient non loin, tournèrent la tête en entendant Ruby reprendre la parole : Au moins, cette année, tu ne seras pas seule, fit-elle remarquer en enfilant ses gants.

Andrea haussa un sourcil, intriguée. Comment ça ?

L'an dernier, elle a insisté pour que j'aille fêter le Nouvel An avec mes copines… mais elle, elle est restée toute seule.

Adossée contre le mur du hall, Lena les observait se préparer, un sourire flottant sur ses lèvres en repensant à cette soirée. Sam lui avait assuré avoir passé un bon moment devant un film, puis elles avaient fini par discuter une grande partie de la nuit ensuite.

Pas vraiment, rectifia Sam, un brin nostalgique.

Ruby fronça les sourcils. Comment ça ? Tu m'as dit que tu avais regardé un film toute seule, et que les voisins avaient mis la musique à fond toute la soirée.

Sam échangea un regard avec Lena, dont le sourire ne fléchissait pas. Eh bien… c'est ce que j'ai fait. Oui.

Andrea observa l'échange, plissant les yeux. Attendez… vous avez discuté toute la soirée, c'est ça ?

Un léger rose colora les joues de Sam. Oui, c'est ça, admit-elle. C'était il y a un an, mais j'ai l'impression que ça remonte à une éternité.

Il s'est passé beaucoup de choses depuis, acquiesça Lena, la voix douce.

Oh non, pitié ! Vous allez encore vous fixer avec ce sourire niais pendant des heures ?! s'exclama Ruby, faussement exaspérée. Maman, je vais finir par être en retard !

Lena étouffa un rire tandis qu'Alex, confortablement installée sur le canapé, éclata franchement de rire.

Eh ! protesta Sam, faussement outrée. Si tu continues, je peux très bien te laisser y aller à pied, hein !

Ruby afficha alors son plus beau sourire angélique et prit une voix exagérément douce : Je t'aime, ma petite maman chérie… Tu es la meilleure maman du monde… et aussi la plus belle…

Lena se mordit la lèvre pour ne pas éclater de rire tandis que Sam plissa les yeux, peu convaincue. Ça ne marchera pas.

Ruby posa théâtralement une main sur son cœur, feignant l'innocence. Je veux juste te rappeler à quel point je t'aime… et, accessoirement, que ce serait vraiment adorable de me conduire maintenant, ajouta-t-elle avec un sourire exagérément forcé, poussant le réalisme jusqu'au bout.

Russel secoua la tête, amusé, tandis qu'Andrea croisa les bras, un sourire en coin. Impressionnant, commenta-t-elle. Ça flirte dangereusement avec la manipulation, mais il y a juste assez de charme pour que ça passe.

Tu devrais prendre des notes, lança Russel, moqueur.

Oh, j'ai déjà mon propre style, répliqua Andrea avec un haussement de sourcil avant de jeter un regard à Sam. Et il marche bien mieux que ça.

Sam roula des yeux, mais un sourire amusé finit par étirer ses lèvres. Monte dans la voiture avant que je change d'avis.

Je savais que tu étais la meilleure ! s'exclama Ruby fermant son manteau sous les regards amusés des autres.

Une fois Ruby et Sam parties, Andrea se tourna vers Lena avec un sourire en coin, la main posée sur son ventre arrondi. Eh bien, cette gamine a du répondant… J'espère que je n'aurai pas à gérer ça moi-même quand elle sera là, dit-elle, une pointe d'anxiété dans la voix en jetant un coup d'œil nerveux à son ventre.

Lena laissa échapper un petit rire en croisant les bras. Oh, tu n'as encore rien vu. Ruby est redoutable quand elle s'y met. Mais tu verras, avec ta fille, ce sera différent.

Andrea arqua un sourcil, peu convaincue. Ah oui ? Parce que tu crois que je vais miraculeusement échapper aux caprices et aux grands numéros de persuasion ?

Alex, qui venait d'ouvrir une bouteille de jus pour se servir un verre, intervint avec un sourire amusé. Non, mais tu auras peut-être l'avantage de l'expérience. Après tout, tu as déjà un spécimen sous les yeux, là, pour t'entraîner.

Russel éclata de rire et passa un bras autour des épaules d'Andrea. C'est vrai, prends des notes, chérie. Dans quelques années, on aura droit à des "Papa, Maman, vous êtes les meilleurs parents du monde…" juste avant qu'elle ne nous demande une sortie ou un truc hors de prix.

Andrea roula des yeux mais ne put s'empêcher de sourire. Génial, j'ai même pas encore accouché que vous me prévoyez déjà une mini-manipulatrice en herbe.

Lena posa doucement une main sur son bras. Ce sera ta fille, Andrea. Peu importe son caractère, tu sauras gérer.

Andrea pinça les lèvres, son regard s'adoucissant légèrement. Hm. Si tu le dis… Elle haussa les épaules avant d'attraper un canapé apéritif.

Alex intervint avec un sourire malicieux. Oh, si c'est la fille d'Andrea, elle peut déjà s'y attendre. Les fruits ne tombent jamais loin de l'arbre, non ?

Lena la regarda, amusée. Ça, c'est certain…

Andrea secoua la tête, désabusée, changeant de sujet. Bon, en attendant, je vais déjà essayer de survivre aux prochains mois. Et à cette soirée. Avec tout ce que Sam a préparé, on risque de rouler jusqu'à minuit.

Alex haussa un sourcil en direction de Lena. Elle est toujours comme ça, ou elle en fait encore plus parce que c'est le premier Nouvel An qu'elle passe avec toi ?

Lena esquissa un sourire en coin. Disons qu'elle veut bien faire. Et qu'elle a une certaine tendance… à l'excès.

Andrea rit doucement. Ça promet.

Russel hocha la tête, faussement pensive. Bon, soyons honnêtes, combien de temps avant qu'elle aille vérifier en cuisine que tout est parfait ?

Lena et Alex échangèrent un regard complice.

Dix minutes, déclara Alex en s'adossant au canapé.

Lena secoua la tête, feignant l'indignation. Vous êtes vraiment dures avec elle. Vous la voyez comme une maniaque du contrôle, mais elle ne fait que s'assurer que tout le monde passe un bon moment. C'est sa manière à elle de montrer qu'elle tient aux gens.

Alex hocha la tête. Ouais, et pourtant, c'est sans doute la seule ici qui aurait vraiment besoin de se détendre. Andrea ne manqua pas l'occasion et, avec un sourire en coin, glissa un regard entendu à Lena. Et je suis sûre que tu es bien placée pour l'y aider…

Lena leva les yeux au ciel, mais la teinte rosée sur ses joues ne passa pas inaperçue. Très subtil, Andrea. Vraiment.

La conversation se déroulait agréablement, et Lena se surprenait à apprécier l'instant. Elle n'aurait jamais imaginé passer un Nouvel An ainsi, entourée de ses amis dans un cadre aussi détendu. Il y avait une sensation de confort qu'elle n'avait pas ressenti depuis longtemps, comme si cette soirée marquait le début de quelque chose de plus léger et joyeux. Même les petites conversations pleines de taquinerie et de rires étaient un délice pour elle, qui avait souvent été trop prise par le travail pour profiter de tels moments. Entourée de Russel, Andrea et Alex elle se sentait à sa place, détendue, et cette convivialité était exactement ce dont elle avait besoin. Les fêtes, souvent synonyme de stress pour elle, prenaient une toute autre saveur ce soir-là.

Une demi-heure passa et Sam réapparut, visiblement dans une mission précise, son regard se dirigeant directement vers la cuisine. La voir vérifier les détails avec cette minutie qu'elle connaissait bien fit sourire les autres.

T'aurais dû me dire, on aurait lancé des paris ! s'exclama Andrea, faussement agacée, en tapant le bras de Russel.

Lena laissa échapper un rire léger. Ne recommence pas avec tes paris. Alex a besoin de garder son argent pour acheter des fournitures pour le bébé, ne va pas la ruiner.

Russel pouffa de rire, tandis qu'Andrea secouait la tête avec un sourire. Ils savaient tous que Sam, malgré son stress, ne faisait qu'agir de manière naturelle. Ça faisait partie de son charme, et ces petites scènes n'étaient rien face à l'affection qu'ils lui portaient.

Sam revint finalement, l'air un peu préoccupé, mais avec un léger sourire en coin. Elle fixa tour à tour les visages des autres, levant un sourcil en les voyant tous souriants et à peine gênés. De quoi vous parliez, exactement ? demanda-t-elle, l'air curieux.

Alex, détendue, se redressa légèrement et répondit sérieusement. On parlait des préparatifs. Le bébé naît en février, donc je prépare tout. J'ai déjà aménagé la chambre et acheté le nécessaire, il reste quelques papiers, mais ça avance bien.

Sam hocha la tête, absorbée par la conversation, mais avant qu'elle ne puisse répondre, Andrea intervint, un éclat malicieux dans les yeux. Elle se tourna vers Sam, un sourire en coin. Non, en fait, laisse-moi te dire de quoi on parlait vraiment. Elle marqua une pause théâtrale, attendant que tout le monde la fixe et l'écoute. On pariait sur le temps que tu mettrais avant de retourner en cuisine pour tout revérifier.

Russel étouffa un rire, secouant la tête en souriant, tandis qu'Alex observait la scène avec amusement. Sam, quant à elle, haussait un sourcil, clairement surprise.

Sérieusement ? Sam fronça les sourcils, mais son sourire revint bien vite. Vous auriez dû parier sur la quantité de nourriture que j'ai préparée, ça aurait été plus intéressant.

Lena se mordillait la lèvre pour ne pas éclater de rire. Tu es incorrigible, Sam, mais c'est pour ça qu'on t'aime.

Rectification, intervint Andrea, que tu l'aimes, et tu vas l'aider à se détendre.

Lena leva les yeux au ciel, un soupir discret s'échappant de ses lèvres, tandis que Sam semblait encore décontenancée. Elle prit un instant pour digérer la remarque, avant de secouer la tête. Après tout, c'était Andrea… ça ne pouvait que dévier dans cette direction.

T'as pu déposer ta fille à l'heure ? demanda Lena, espérant détourner l'attention.

En avance ! s'exclama Sam. Elle me fait vraiment passer pour une mère complètement dépassée.

Alex se mit à pouffer. Ah, les joies de l'adolescence.

Profites. dit Sam à Andrea, un sourire malicieux sur les lèvres. Vraiment, savoure cette période de grossesse.

Ne la fais pas paniquer… tenta de rassurer Lena en voyant qu'Andrea semblait un peu déstabilisée. Tu géreras très bien, t'inquiète pas.

Ce n'est que du bonheur. ajouta Sam, avec une pointe de moquerie bienveillante.

Jusqu'à ce que l'adolescence arrive, et là ton enfant décide de te rendre la vie plus compliquée… grimaça Andrea.

Bon, et si on passait à table ? proposa Alex, souhaitant clore la conversation avant qu'elle ne parte dans une direction plus sérieuse.

(...)

Sam avait vu juste : il restait une quantité astronomique de nourriture. Heureusement, Russel, Andrea et Alex ne repartaient que le 2 janvier. Ils avaient encore plusieurs repas devant eux pour tenter d'en venir à bout.

Il était plus de 22 heures. Andrea était lovée contre Russel sur le canapé, Alex affalée dans un fauteuil, tandis que Sam et Lena, assises côte à côte, étaient extrêmement proches. Le bras de Sam effleurait distraitement l'épaule de Lena pendant qu'ils digéraient tous tant bien que mal l'énorme repas préparé par Sam.

T'es sûre que t'as pas fait MasterChef dans une autre vie ? lança Andrea en caressant distraitement son ventre.

Sam eut un sourire. J'aime bien cuisiner.

Andrea esquissa un sourire malicieux. Et tu es avec la seule personne ici qui n'a jamais le temps pour ça. J'imagine que t'as vu l'état de sa cuisine ? Je n'en ai jamais vu d'aussi propre.

Eh, ça va ! protesta Lena. J'ai fait des efforts ! Et puis, tu dis ça comme si je ne savais pas cuisiner…

Elle sait, intervint Alex. C'est juste le temps qui lui manque.

Andrea haussa les épaules. Couper des tomates et faire cuire des pâtes, j'appelle pas ça "cuisiner".

Non mais tu me fais passer pour quoi, là ? grogna Lena, faussement vexée.

Sam lui embrassa la tempe avec tendresse. Ne t'inquiète pas, je cuisinerai pour deux s'il le faut. Et quand tu retourneras à L.A., je sais que Marco te préparera des plats à emporter.

Andrea se redressa légèrement, interloquée. Attends, elle a rencontré Marco ?!

Alex leva un sourcil. Si tu connais Marco alors…

Sam fronça les sourcils vers Lena, qui haussa les épaules avec nonchalance. J'avoue rarement que je fais appel à Marco, c'est tout, expliqua-t-elle rapidement.

Andrea plissa les yeux, un sourire en coin. Tu veux dire que Marco est littéralement en favori dans tes contacts, mais tu fais genre que tu cuisines tous les jours dans ta cuisine hyper propre.

Lena roula des yeux. Je peux et je sais cuisiner, merci. Ça ne veut pas dire que j'en ai le temps ou l'envie après une journée de travail.

C'est vrai, approuva Sam en lui lançant un regard complice. Mais je dois avouer que ses placards sont un peu vides…

Ah ! s'exclama Andrea en pointant un doigt vers elle. Je savais que t'avais vu l'étendue du désastre.

Lena croisa les bras, faussement vexée. Je stocke juste l'essentiel.

Des capsules de café et du sel, précisa Alex en étouffant un rire.

Ce sont des essentiels, répliqua Lena avec dignité. Et d'ailleurs, je te ferai remarquer que j'ai fait des efforts ces derniers mois.

Andrea arqua un sourcil, sceptique. Ah ouais ?

Lena pinça les lèvres, l'air de se demander si elle devait répondre.

Elle a vraiment essayé. Je suis témoin. Compléta Alex.

Andrea laissa échapper un petit rire. Ouais c'est ça. Elle a dû préparer un truc deux fois, je sais très bien qu'Alex est vite impressionnée.

Eh! S'exclama Alex en fronçant des sourcils.

J'ai préparé plus de choses ces 4 derniers mois que durant l'année entière l'an dernier, répliqua Lena avec fierté.

Et… ? demanda Andrea, amusée.

Lena prit un air faussement désinvolte. Et c'est tout ! J'ai juste cuisiné plus souvent que tu ne le crois. Ça fait trois mois que tu n'es pas venue chez moi, tu verrais ma cuisine tu saurais qu'elle n'est pas aussi immaculée.

Mouais… répondit Andrea, peu convaincue.

Sam posa une main sur le bras de Lena, amusée. Je confirme, elle a même cuisiné plusieurs fois quand on était en visio.

Andrea écarquilla les yeux et fit mine d'être sous le choc. En visio ?! Mais vous faites quel genre de visio, vous ?

Lena leva immédiatement la main pour l'arrêter. Ne commence pas.

Bah désolée, mais les visios que je fais avec Russel, c'est pas du MasterChef, si vous voulez tout savoir.

On ne veut pas savoir ! s'exclama Alex en grimaçant.

Bref, coupa Lena, j'ai déjà cuisiné plusieurs fois.

Andrea la fixa, sceptique. … "Plusieurs fois", ça veut dire quoi exactement ?

Lena lui lança un regard méfiant, sentant le piège arriver. Ça veut dire "plusieurs fois", répéta-t-elle prudemment.

Andrea plissa les yeux, puis son sourire s'étira. Mmh… Ça veut surtout dire que tu comptes sur Sam pour te sauver la mise au quotidien, maintenant, hein ?

Lena ouvrit la bouche pour répliquer, mais Alex éclata de rire avant elle. Andrea, laisse-la tranquille.

Oh, je ne fais que constater l'évidence, protesta Andrea, faussement innocente. Lena s'installe chez Sam, et on sait tous qu'elle va se faire entretenir. Elle marqua une pause théâtrale avant d'ajouter, un sourire en coin : Dans tous les sens du terme.

Lena leva les yeux au ciel, déjà excédée. Mon Dieu, Andrea…

Allez, fou-leur un peu la paix, intervint Russel en embrassant la joue d'Andrea.

Sam, de son côté, semblait bien plus amusée que Lena par la situation. Andrea dut le remarquer, car elle continua comme si de rien n'était.

T'es pas drôle, Lena. Regarde Sam, elle ne s'en plaint pas, elle. C'est ça que j'aime chez elle, déclara-t-elle avec un clin d'œil. Elle est ouverte d'esprit. Puis, avec un sourire malicieux, elle porta son attention sur Sam. Tu pourrais pas l'aider à se décoincer un peu ?

Lena lança un regard assassin à Andrea, qui affichait son air le plus innocent. Ne l'écoute pas, souffla-t-elle à Sam.

Mais au lieu de la défendre, Sam lui adressa un sourire en coin et se tourna vers Andrea. Tu sais quoi ? T'as peut-être raison.

Lena cligna des yeux, abasourdie. Attends, quoi ?

Andrea lui adressa un large sourire, visiblement ravie. Elle s'écarta légèrement de Russel pour mieux les observer, tandis que Lena, incertaine de la tournure que prenait la conversation, préférait rester confortablement calée au fond du canapé.

Ah, enfin une personne qui me comprend !

C'est vrai, poursuivit Sam d'un ton faussement sérieux, vivre avec Lena me donne des responsabilités. Je dois veiller à ce qu'elle mange bien, qu'elle ne travaille pas jusqu'à s'effondrer sur son clavier…

Merci ! s'exclama Andrea, triomphante.

et puis, avouons-le, j'ai une certaine satisfaction à la voir dépendre de moi.

Lena ouvrit la bouche pour protester, mais aucun son n'en sortit. Hein ?!

Sam haussa les épaules, prenant un air songeur. Je veux dire, je pourrais très bien décider quand elle mange, ce qu'elle mange… et même comment.

Andrea explosa de rire et applaudit. Oh, j'adore la tournure que ça prend !

Lena fronça les sourcils, sentant l'embuscade. C'est censé vouloir dire quoi, exactement ?

Sam se tourna vers elle, l'air faussement innocent. Juste que… tu es entre de très bonnes mains.

Andrea gloussa, et Lena sentit une vague de chaleur monter à ses joues. Sam…

Mais Sam ne s'arrêta pas là. Et puis, c'est pas comme si tu te plaignais quand je prends les choses en main, pas vrai ?

Andrea éclata d'un rire bruyant. Oh, putain, Sam, je t'adore !

Lena, elle, ouvrit de grands yeux scandalisés. Sam !

Sam haussa un sourcil, feignant l'innocence. Quoi ? Je dis juste que j'aime… m'assurer que tout soit fait comme il faut.

Andrea se laissa tomber en arrière, hilare. Non mais là, je suis fière de toi. Genre vraiment.

Lena, toujours sous le choc, croisa les bras et lança un regard accusateur à Sam. C'est la dernière fois que je vous invite à dîner.

Sam haussa un sourcil et glissa un bras autour de ses épaules. Techniquement, c'est chez nous maintenant. Donc, bonne chance pour m'interdire quoi que ce soit.

Andrea applaudit, ravie. Ah, j'adore ! Et sinon, exactement à quel moment elle commence à gémi—

ANDREA !

Alex leva brusquement les mains en l'air. OK, c'est officiellement le moment où je sors de cette conversation.

Russel, qui jusqu'ici observait la scène en silence, éclata de rire et embrassa la tempe d'Andrea. Tu ne peux pas t'empêcher, hein ?

Bien sûr que non, répondit-elle fièrement.

Lena, elle, enterra son visage dans ses mains, tentant désespérément d'ignorer la chaleur qui lui brûlait les joues. Je vous déteste. Tous.

Sam resserra doucement son étreinte et murmura à son oreille : Menteuse.

J'ai rien fait! cria Alex qui s'était dirigée vers la cuisine.

Lena se mordit l'intérieur de la joue pour ne pas sourire. Andrea, qui avait suivi l'échange, eut un sourire en coin et pointa un doigt accusateur vers elle. Elle sourit ! J'ai gagné !

Lena secoua la tête, faussement exaspérée. Bon, c'est pas tout ça, mais moi j'ai besoin d'un verre pour oublier cette conversation.

Andrea croisa les bras en les regardant lever leurs verres, un sourire faussement vexé sur les lèvres. Ah super, trinquez bien pendant que moi, je me tape de l'eau pétillante…

Russel lui embrassa la tempe, amusé. C'est temporaire, chérie.

Mouais, grommela-t-elle en attrapant son verre d'eau. Mais franchement, c'est un crime de me priver d'alcool et de me faire assister à ça.

Elle désigna Sam et Lena d'un mouvement de tête, une lueur taquine dans les yeux. Sérieusement, vous réalisez à quel point vous êtes niaises ? Ruby n'a pas vraiment tort en fait.

Lena, qui était en train de répondre au toast de Sam, s'arrêta net et la fusilla du regard. Quoi?! On n'est pas niaises !

Oh que si, répliqua Andrea en secouant la tête. Vous êtes ce genre de couple qui se regarde dans les yeux, qui murmure des trucs que personne n'entend, et qui donne vraiment envie de... vomir.

Je trouve ça mignon, intervint Russel en haussant les épaules.

Toi, t'es biaisé, rétorqua Andrea en le poussant doucement. T'as pas d'objectivité la dessus.

Sam, qui observait la scène avec un sourire, serra un peu plus Lena contre elle. Ah, mais c'est pas de notre faute si on est... heureuses.

Andrea croisa les bras, un sourire en coin, faussement indifférente et légèrement défiant. J'ai pas dit le contraire… C'est juste que vous êtes toujours là, à vous regarder rougissantes comme des adolescentes. Vous savez, c'est bien de s'observer comme ça, mais ça ne mène à rien si on ne passe pas un peu à l'action.

Lena écarquilla les yeux, surprise. Sam, bien plus détendue, lança un regard amusé à Andrea. L'action, hein ? Tu parles d'expérience là ? répondit Sam, un sourire malicieux aux lèvres.

Andrea haussait les épaules avec un petit air de défi. Ben oui, on n'a pas besoin de passer des heures à se dévorer du regard. Russel et moi, on fait ça de façon bien plus directe. Pas de fioritures, pas de chichis, vous voyez ce que je veux dire ?

Russel, qui avait écouté en souriant, prit un moment avant de répondre. Il passa une main dans ses cheveux, l'air pensif. Nous aussi, on a eu nos moments, ajouta-t-il, jetant un œil à Andrea. On n'a pas besoin de faire tout le temps dans le "direct" pour que ça ait du sens.

Andrea décida de faire comme si elle n'avait rien entendu, prête à reprendre son petit discours, mais Lena la coupa avant qu'elle n'ait pu continuer. Vous avez eu vos petits moments ? C'est-à-dire ?

C'est-à-dire rien, coupa Andrea.

Oh non ! Alors toi, tu te permets de te moquer ouvertement, mais tu n'assumes même pas avoir eu ton côté romantique ?

Romantique ! s'exclama Andrea outrée, comme si Lena venait de l'insulter. On a passé plus de temps à s'envoyer en l'air qu'à se regarder amoureusement ! tenta-t-elle de justifier.

Ce n'est pas une insulte d'être romantique, ajouta Sam, amusée.

Oh, pour elle, ça l'est, continua Lena. Mais je vous ai vus. Tu l'es aussi, Andrea, et tu ne peux pas y couper, c'est comme ça.

Aide-moi toi ! dit Andrea en tapant Russel sur le bras.

Ah, terrain miné, je ne me lance pas dedans, répondit-il, levant les mains en signe de reddition.

Miné ?! s'étonna Lena.

Bah, quand on fait un aller-retour exprès le jour de la Saint-Valentin… Ok, on a eu notre petit moment, mais je dois admettre que j'ai perçu le message subliminal, expliqua Russel.

Ah, donc tu fais un détour le jour des amoureux, mais tu n'es absolument pas romantique… ? dit Lena en arquant un sourcil, un sourire en coin.

Andrea roula des yeux, un sourire malicieux aux lèvres. Eh bien, fallait marquer le coup. Mais non, je ne suis pas romantique. Je suis arrivée sans carte ni bouquet, juste chez lui, et on a… réglé ça directement derrière sa porte.

Lena leva les mains comme pour l'interrompre, mais trop tard. Je ne vais pas… Je ne voulais vraiment pas savoir ça.

Sam se mordillait la lèvre, s'efforçant de retenir son rire, tandis que Russel secouait la tête, à la fois amusé et désabusé. Chacun son style, non ? Mais au fond, peu importe la manière, tant que ça fonctionne et que ça a du sens.

Soyons honnêtes… reprit Lena. Il y a un an, t'aurais paniqué rien qu'en entendant le mot « couple », et maintenant tu emménages avec lui et tu attends un bébé. Là, tu me bats à plate couture sur toute la ligne.

Andrea soupira, puis se redressa et fixa Lena. Je parie qu'il ne te faudra pas plus de trois mois avant de lui dire « oui ». Et je suis prête à parier que tu seras la prochaine à avoir un enfant.

Quo… commença Lena, son regard trahissant une légère panique.

Alex entra à nouveau dans le salon, un verre de jus à la main jetant un regard à Lena, visiblement perturbée. Qu'est-ce qui lui arrive ? demanda-t-elle.

Je crois que j'ai mentionné mariage et bébé… et elle a buggé, sourit Andrea.

Sam sourit à son tour et passa un bras autour de la taille de Lena, la rapprochant doucement. Arrête de la malmener, c'est bientôt la nouvelle année. Elle a déjà assez à faire avec L-Corp.

Oh, mais je suis sûre que tu sais comment l'aider à gérer son stress, répondit Andrea avec un sourire en coin. Sam lui jeta un regard qui en disait long mais décida de ne pas intervenir en voyant l'état de Lena.

Alex leva les yeux au ciel. Faut-il vraiment que je retourne à la cuisine ?

Russel éclata de rire, tandis que Sam tentait de détendre Lena, lui murmurant des mots doux à l'oreille. Lena rougit, gênée, tandis qu'Andrea les observait sans détours.

Mon dieu, c'est ça, toute la journée ? demanda Andrea, en s'adressant à Alex, qui les avait observés hier et aujourd'hui. Alex acquiesça. Je comprends la gamine, c'est insupportable à vivre au quotidien.

Dit la fille qui est littéralement sur les genoux de son mec, enceinte de six mois, répliqua Alex. Ça va, tu peux parler franchement, souffla-t-elle. Et arrête avec tes sous-entendus. J'ai envie de profiter d'être là avec vous plutôt que d'aller m'isoler dans la cuisine parce que tu ne sais pas te comporter en société.

Eh ! s'exclama Andrea. Je suis journaliste, je sais mieux que toi comment me comporter en société.

Il est bientôt minuit ! s'écria Russel, en jetant un coup d'œil à l'horloge murale.

Tous se levèrent en même temps, verre à la main, et se mirent à compter les secondes, impatients. Le salon était rempli de rires et de discussions joyeuses, et l'horloge murale annonçait bientôt minuit. L'atmosphère était chaleureuse, empreinte de cette effervescence typique du passage à la nouvelle année.

Bonne année ! s'écria Alex.

À une nouvelle année pleine de moments inoubliables, ajouta Lena, souriant, avant de trinquer avec Sam.

Les vœux fusèrent dans une explosion de gaieté, et chacun y allait de son propre souhait. Que cette année soit encore meilleure que la précédente ! dit Russel en souriant.

Et que l'amour et la joie nous accompagnent, ajouta Sam, en échangeant un regard complice avec Lena.

Les rires s'intensifièrent, et après quelques embrassades entre amis, le ton changea subitement. Andrea et Russel, sans un mot, s'attirèrent dans un baiser passionné et sans complexe, comme s'ils ne se souciaient de rien autour d'eux. Leur baiser était empli de désir et d'affection, un moment qui semblait suspendre le temps.

De l'autre côté, Sam et Lena se contentèrent d'un regard tendre et discret, leur complicité silencieuse mais évidente. Elles s'échangèrent un léger sourire et un simple baiser sur la joue, plus réservé, mais tout aussi significatif. Le contraste était flagrant : Andrea et Russel ne cachaient rien, tandis que Sam et Lena étaient plus intimes, moins expansives, mais leur connexion ne pouvait être ignorée.

Alex, en les observant, haussait un sourcil. Bon, eh bien, je vais aller refaire un tour à la cuisine, moi… murmura-t-elle, mais personne ne sembla vraiment l'entendre, trop absorbés par l'effervescence du moment.

(...)

Lena était arrivée à Los Angeles en début d'après-midi, mais elle ne se sentait plus chez elle. Pas vraiment. Boston l'attendait, tout comme Sam et Ruby. En revenant ici après ces moments passés dans la ville de l'Est, elle se rendait compte à quel point son choix de partir avait été le bon. La différence était frappante. Son appartement à L.A. lui paraissait froid, impersonnel, tandis que la maison de Sam à Boston était un havre de chaleur, de rires, et de souvenirs qu'elles étaient en train de tisser ensemble.

Les fêtes de fin d'année avaient été parmi les plus belles de sa vie. Pour la première fois, elle s'était sentie pleinement entourée, aimée. Sam, Ruby, et même Alex. Leur amitié retrouvée lui apportait un bien-être inattendu. Il restait encore des blessures, des non-dits, mais elles avaient recommencé à se parler, à échanger sans la tension qui les paralysait autrefois. Pour Lena, c'était une avancée précieuse.

Ce soir-là, elle avait décidé de retrouver Andrea autour d'un verre. Elles s'étaient donné rendez-vous dans un bar chic du centre-ville, un de ces endroits où elles avaient l'habitude de se retrouver après des journées de travail interminables. En entrant, Lena aperçut Andrea accoudée au comptoir, un mocktail à la main. Alors, Madame la Bostonienne, plaisanta Andrea en levant son verre, prête à trinquer. Comment va la vie de famille ?

Lena esquissa un sourire sincère en s'installant à ses côtés. Parfaitement bien, répondit-elle en trinquant. Et toi ?

Andrea haussa les épaules avec un petit sourire en coin. Oh, tu sais, boulot, grossesse, chaos émotionnel habituel…

Elles échangèrent quelques banalités, Lena savourant ce moment de légèreté, puis Andrea sembla hésiter. Elle joua un instant avec son verre avant de lâcher d'une voix hésitante : Lena je… Je crois que j'ai fait une connerie…

Lena arqua un sourcil. Avec Andrea, ça pouvait vouloir dire beaucoup de choses. Ça, c'est pas nouveau. Qu'est ce qu'il s'est passé?

Andrea soupira et posa son verre sur le comptoir. Tu te souviens qu'Alex ne voulait pas qu'on parle d'elle à Maggie ?

Lena sentit une légère tension s'installer en elle. Elle avait fait cette erreur par le passé, et en avait payé les conséquences. Elle se demandait ce qu'Andrea avait bien pu faire, mais préféra la laisser poursuivre, se contentant d'un hochement de tête.

Ben… disons que j'ai fait une bourde là-dessus.

Qu'est-ce que t'as fait ? demanda Lena, son ton resté calme, mais son regard plus perçant.

Andrea pinça les lèvres, puis souffla. J'ai revu Maggie récemment. C'était pas prévu, juste… un hasard. On a fini par se prendre un café, on a rigolé, discuté comme avant, et… j'ai laissé échapper un truc. Rien de bien méchant, mais… Elle marqua une pause, hésita, avant de poursuivre : J'ai fait une blague sur Alex, genre : 'Tu te rends compte, Alex en maman ? J'ai hâte de voir si son enfant va hériter de son caractère de merde.'

Lena ferma brièvement les yeux, comprenant instantanément l'ampleur du problème. Et comment Maggie l'a pris ? souffla-t-elle.

J'ai vu son visage changer. Comme si elle réalisait soudain qu'Alex avançait… et qu'elle ne suivait pas. C'était comme une prise de conscience brutale.

Lena resta silencieuse, digérant l'information. Maggie savait maintenant. Elle savait qu'Alex allait être mère. Et Maggie n'était pas du genre à simplement encaisser une information pareille et passer à autre chose. Est-ce que tu crois qu'elle va essayer de… Faire quelque chose? demanda Lena après un moment.

Andrea secoua la tête, incertaine. Je sais pas. Mais ce qui est sûr, c'est que ça l'a percutée. Je l'ai vue dans ses yeux. Elle a juste… encaissé sur le moment. Mais je suis presque sûre que ça la travaille maintenant.

Lena croisa les bras, plongée dans ses pensées. Ce n'était pas seulement un problème pour Maggie et Alex, c'était aussi un souci pour Andrea et Alex. Leur amitié s'était renforcée ces derniers mois, mais Alex n'allait pas pardonner facilement une erreur de ce genre. Andrea le savait bien, et cela se lisait dans l'inquiétude de son regard.

Je comprends mieux pourquoi Maggie me parle moins ces derniers temps. Elle doit savoir que je suis au courant.

Vous vous parlez souvent ? demanda Andrea, cherchant à comprendre.

De temps en temps. Depuis que je suis à Boston, c'est moins fréquent, mais avant de partir, on s'était déjà vues quelques fois pour discuter.

Tu l'as dit à Alex ?

Pourquoi ? répondit Lena, un peu surprise. On a un accord avec Maggie, on ne parle pas d'Alex. Donc, il n'y a aucune raison que ça devienne un problème.

Andrea haussa les épaules, incertaine. Et… comment elle allait ?

Quand j'ai repris contact avec elle, je crois que c'était en octobre, et c'était vraiment difficile pour elle à ce moment-là. Mais le mois dernier, elle semblait aller mieux. C'était encore un peu compliqué, mais elle faisait des progrès. Et toi, tu sais sûrement mieux que moi comment elle va, vu que tu l'as vue récemment.

Andrea se tordit légèrement sur son tabouret, un sourire nerveux se dessinant sur ses lèvres. Elle a esquivé la conversation, comme toujours avec une réplique à la Maggie, un truc du genre très évasif. Ça avait l'air d'aller, mais… avec ce qu'elle sait maintenant…

Lena baissa les yeux un instant avant de regarder Andrea, son ton plus doux. Tu vas le dire à Alex ?

Andrea grimaça. Je sais pas. Mais si je ne le fais pas et qu'Alex l'apprend autrement… je suis foutue.

Lena souffla un long soupir et but une gorgée de son verre, ses pensées toujours occupées par tout ça. Elle aurait voulu profiter de son retour en ville, mais elle sentait que la situation allait de toute façon prendre une tournure inévitablement compliquée. Elle posa une main sur l'épaule d'Andrea, un geste de réconfort, même si elle savait que ça ne suffirait peut-être pas. Bon courage, murmura Lena simplement.

Elle laissa échapper un petit rire nerveux. Merci… J'en aurai bien besoin. Andrea souffla doucement en posant son verre. Si la situation change, je sais qu'Alex va forcément se tourner vers toi. Vous avez déjà recommencé à plus vous parler, non ?

Lena baissa les yeux un instant, consciente que la conversation allait toucher un point sensible. Oui, ce n'est pas la même complicité qu'avant, mais… on se parle. On arrive à mieux échanger, et je sens qu'elle est prête à faire d'autres pas vers moi. Mais… Alex a toujours été la seule de notre groupe d'amies à savoir pardonner. Au pire, tu devras juste patienter. Et tu as déjà bien assez à faire avec les préparatifs pour le bébé et l'emménagement avec Russel.

Andrea leva les yeux au ciel, un sourire amer se dessinant sur ses lèvres. Ouais... Elle souffla en faisant tournoyer le liquide dans son verre. Boston, Los Angeles… Ça me manque, Lena. Ça me manque ce qu'on avait avant.

Lena sentit une petite douleur se loger dans sa poitrine. Rien n'a vraiment changé, Andrea. On a évolué, c'est vrai. Nos vies ont pris des tournants différents, mais ça ne veut pas dire que je serai moins présente, malgré la distance. Je serai toujours là pour toi. Et puis, maintenant, tu as Russel. Il va devenir un pilier dans ta vie, je n'en doute pas.

Andrea prit une profonde inspiration, un léger sourire se dessina sur son visage. Je sais, Lena. C'est juste que parfois, c'est difficile d'accepter le changement. On s'habitue à certaines choses, et quand tout se transforme… ça perturbe un peu. Elle haussait les épaules comme pour éclipser cette pensée.

Lena posa une main rassurante sur son bras. Je comprends, vraiment. Mais tu n'es pas seule dans tout ça. Russel est là, et même si la distance nous sépare, je suis toujours à un appel ou un message. Rien ne changera ça. Elle marqua une pause, ses yeux se plongeant dans ceux d'Andrea. On trouvera des moyens d'être là les unes pour les autres, peu importe où on est. Et tu sais, tu me manques aussi. Mais ce n'est pas une mauvaise chose ces changements, on a tous évolué dans le bon sens.

Andrea sourit faiblement, un soupir de soulagement passant entre ses lèvres. Sans doute… Je suppose qu'avec tout ce qui se passe, j'avais juste besoin de quelqu'un qui me rappelle que tout n'est pas perdu. Elle se redressa légèrement, plus sereine. Et tu as raison. Russel et moi, on va s'en sortir. Mais ça ne veut pas dire que je vais oublier mes amies, bien au contraire.

Lena hocha la tête. Ça, je n'en doute pas une seconde. On est toujours là, peu importe le temps et la distance. Elle se leva en souriant, décidée à changer de sujet pour alléger l'atmosphère. Allez, trinquons à ça et aux amitiés qui ne faibliront jamais, peu importe ce qui se passe.

Andrea prit son verre, un sourire sincère sur les lèvres. À l'amitié, alors.

(...)

Lena profita d'une pause entre deux dossiers pour observer la vue depuis son bureau. Les grandes baies vitrées offraient une vue imprenable sur la ville, avec, au loin, l'horizon de la mer. Ses bureaux à Boston étaient presque similaires, mais au moins là-bas, elle avait la chance de rentrer chez elle le soir, dans la maison de Sam et Ruby, qui était désormais son véritable chez-elle. Ici, cependant, elle ne se sentait plus aussi attachée à la ville qu'autrefois.

Elle saisit son téléphone et composa le numéro de Maggie. Depuis son message de vœux de Nouvel An, elle avait eu quelques nouvelles, mais rien de régulier. Maggie lui avait proposé de se retrouver pour déjeuner pendant son séjour à Los Angeles, mais Lena avait été prise par une discussion avec un nouvel employé récemment embauché. Celui-ci venait tout juste de s'installer en ville et lui avait confié qu'il avait besoin d'un avocat rapidement. En écoutant son histoire, Lena comprit qu'il s'était installé à Los Angeles pour se rapprocher de ses enfants, mais la situation semblait se compliquer : sa femme lui interdisait désormais de les voir.

Ne pouvant pas lui proposer les services de ses avocats par l'intermédiaire de la société, Lena lui avait suggéré un contact personnel : Maggie.

Mais au fond, elle savait que ce geste avait aussi un autre but : tester le terrain. Ce que lui avait révélé Andrea lui trottait encore dans la tête. Maggie était son amie. Peu importait ce qu'il s'était passé avec Alex ; elle méritait, elle aussi, d'être heureuse.

Lena attendit quelques tonalités avant d'entendre la voix familière de Maggie résonner à l'autre bout du fil. Lena ! Ça fait longtemps ! Comment tu vas ?

Un léger sourire apparut sur les lèvres de Lena en entendant la chaleur de sa voix. Je vais bien, merci. Et toi ?

Oh, on fait aller. C'est plutôt calme après les fêtes, mais ça reprend doucement, répondit Maggie, d'un ton un peu évasif. T'es à L.A. en ce moment, non ?

Oui, et justement, je voulais te parler d'un petit truc, si tu as un moment.

Un bref silence s'installa avant que Maggie ne reprenne, plus sérieuse. Bien sûr. Tout va bien ?

Oui, tout va bien, rassure-toi. Ce n'est pas pour moi, c'est pour le travail. Un de mes employés traverse une situation compliquée, et je me suis dit que tu pourrais peut-être lui donner un coup de main. Il a besoin d'un avocat.

Oh ? Quel genre de problème ?

Il vient de s'installer en ville pour se rapprocher de ses enfants, mais la situation s'est tendue, et son ex-femme lui refuse tout contact avec eux. C'est assez délicat, et il cherche quelqu'un pour l'aider. J'ai tout de suite pensé à toi. Je voulais savoir si tu pouvais lui conseiller un bon avocat… ou peut-être t'en occuper toi-même, si tu as de la place pour un dossier de plus. Répondit simplement Lena.

Oh, je vois. Eh bien, comme je te l'ai dit, c'est plutôt calme en ce moment. Tu peux m'envoyer son numéro ou lui donner le mien, comme tu préfères, et on prendra contact pour voir ce qu'on peut faire.

Lena marqua une courte pause avant de répondre : Merci. C'était un peu compliqué d'en référer à mes avocats ici, étant donné que c'est une affaire personnelle. Et puis, comme il vient d'emménager, il ne connaît encore personne.

Un silence un peu plus long s'installa. Lena attendit patiemment, guettant chaque mot que Maggie allait prononcer, tentant de percevoir dans sa voix quelque chose qui trahirait une émotion.

Je comprends. Si tu veux, je peux essayer de l'aider. Dans le pire des cas, j'ai un collègue au cabinet qui est très doué pour ce genre d'affaires. Je pourrais lui faire appel si besoin.

Une nouvelle pause. Lena ne pouvait s'empêcher de se demander si la conversation qu'Andrea avait eue avec Maggie l'avait affectée. Elles parlaient boulot, ce qui rendait l'échange facile, neutre, mais il y avait quelque chose… Une retenue, peut-être ? Lena n'aurait su le dire avec certitude.

Maggie finit par reprendre la parole : Lena, ça te dirait qu'on se voie ce soir ? J'ai un créneau, je suis dispo vers 19 heures. On pourrait en discuter si tu veux. Ou même pas, c'est juste qu'on avait dit qu'il fallait en profiter pour se voir. Ce serait sympa. Si ça te dit, on peut faire ça chez moi ?

Lena comprit que Maggie tenait vraiment à la voir ce soir. Était-ce par simple envie de passer du temps ensemble, ou cherchait-elle une excuse pour en savoir plus ? Difficile à dire. Maggie avait toujours su avancer avec subtilité, et Lena ne pouvait qu'émettre des suppositions.

Elle se mordit la lèvre, hésitant un instant. Elle ne voulait pas donner l'impression de sauter sur l'occasion trop facilement, mais en même temps, les moments passés avec Maggie se faisaient rares, surtout depuis son déménagement. Leur lien lui tenait à cœur, et elle ne voulait pas le laisser s'effilocher. Ça pourrait être une bonne idée. Je n'ai rien de prévu ce soir, alors je serais ravie de te voir.

Parfait, va pour 19 h alors. On se mettra à la page sur ce début d'année et ton déménagement avec Sam.

Lena perçut une douceur dans la voix de Maggie, ce qui fit naître un petit sourire sur ses lèvres. Oh, tu sais, je t'ai déjà raconté tout ça par message.

Tu m'as décrit les grandes lignes, mais on n'est pas allées dans les détails. On en parlera ce soir. Il faut que je file.

Pas de souci, moi aussi je dois retourner à mes dossiers.

Bon courage. À tout à l'heure !

Lena raccrocha, se sentant légèrement plus sereine. C'était une belle occasion de rattraper le temps perdu, de renouer doucement les fils d'une amitié qu'elle ne voulait pas voir se distendre. Et, au fond, ça lui évitait de passer une énième soirée seule.

Vivre avec Sam et Ruby avait ses avantages, mais le revers de la médaille était qu'elle peinait à rentrer chez elle et à se retrouver face à un lit vide. La veille, Andrea et elle avaient discuté tard, jusqu'à ce que la fatigue la terrasse. Ce soir, elle rentrerait sûrement plus tôt, mais l'idée d'avoir quelque chose de prévu lui plaisait. Et puis, maintenir ce lien avec Maggie comptait pour elle. La distance compliquait toujours les relations, qu'elles soient amicales ou autres.

Le soir même, en se rendant chez Maggie, Lena oscillait entre l'excitation et une légère appréhension. Elle avait apporté une bouteille de vin, mais une question lui trottait dans la tête : Maggie cherchait-elle simplement à passer du temps avec elle, ou comptait-elle, elle aussi, profiter de l'occasion pour en apprendre plus sur Alex ? Ce n'était pas vraiment son style, mais la réaction d'Andrea et l'impact qu'avait eu sa révélation prouvaient que l'idée n'était pas à exclure.

Maggie ouvrit la porte avec un sourire chaleureux en découvrant Lena sur le seuil. Hey, entre ! Fais comme chez toi.

Lena lui rendit son sourire et entra, tendant la bouteille de vin qu'elle avait apportée. J'ai pensé que ça accompagnerait bien la soirée.

Parfait, je vais ouvrir ça. Installe-toi, je nous sers un verre.

Lena en profita pour retirer son manteau et s'installer sur le canapé pendant que Maggie s'affairait. L'ambiance était chaleureuse, apaisante. Quand Maggie revint avec deux verres remplis, elle s'installa à côté d'elle. Alors, comment se passe ton installation à Boston avec Sam ? demanda Maggie en trinquant avec elle.

Lena hocha la tête avec un sourire sincère. Honnêtement, tout se passe encore mieux que je ne l'aurais imaginé. Elle marqua une courte pause, cherchant ses mots. C'est presque trop facile, comme si j'avais toujours été là. Bon, maintenant, Ruby joue à l'ado blasée et ne rate jamais une occasion de lancer des allusions sur le fait qu'on passe notre temps à se dévorer des yeux, mais… Je crois qu'elle en fait surtout un jeu.

Maggie pouffa. Ouais, une ado, quoi.

Lena sourit avant de poursuivre. Comme tu sais, on a passé le nouvel an à cinq. Ruby nous a avoué après coup que sa soirée n'était pas aussi géniale qu'elle l'espérait et qu'elle regrettait presque de ne pas être restée avec nous. Franchement ? Je suis contente qu'elle ne l'ait pas fait. Elle secoua la tête, se remémorant avec amusement – et un brin d'embarras – à quel point Andrea n'avait cessé de la mettre mal à l'aise.

J'imagine qu'Andrea a dû mettre son grain de sel dans chaque conversation.

Lena soupira en levant les yeux au ciel avant de rire. Tu n'imagines même pas ! Elle n'arrête toujours pas avec ses sous-entendus. Elle trouve toujours un moyen d'insinuer quelque chose sur moi et Sam, c'en est presque un talent à ce stade. Mais le pire… Lena secoua la tête, feignant l'exaspération. C'est que Sam a commencé à jouer le jeu ! Au début, elle roulait des yeux comme moi, mais maintenant, elle surenchérit ! Je ne sais plus si elle le fait pour la taquiner ou juste pour m'embêter, mais honnêtement, je suis dépassée.

Maggie éclata de rire, visiblement amusée par la scène qu'elle imaginait sans peine. Andrea qui s'en donne à cœur joie et Sam qui l'encourage ? Tu es fichue, Lena. Tu ne gagneras jamais contre ces deux-là.

Lena prit une gorgée de vin, faussement fataliste. Je commence à m'en rendre compte.

Maggie sourit, un brin nostalgique. Andrea et ses conversations très directes me manquent, mine de rien. Avec elle, au moins, il n'y avait pas de détour, tout était dit sans filtre.

Lena hocha la tête, partageant le sentiment. Oh, ça, c'est sûr. Parfois, j'aimerais qu'elle mette un peu plus de filtres… mais je crois que c'est aussi ce qui fait son charme.

Maggie eut un petit rire avant de marquer une pause, jouant distraitement avec son verre. Son ton se fit plus léger, mais Lena capta la subtilité derrière la question qui suivit. Et la soirée s'est bien passé?

Lena observa un instant son amie avant de répondre, devinant que la question n'était pas anodine. Oui, plutôt bien. Elle marqua une pause, scrutant la réaction de Maggie. On avait trop à manger, on a mis trois jours à finir les restes. Andrea était presque déçue de ne pas avoir pu parier là-dessus.

Maggie secoua la tête, amusée. Elle n'arrêtera jamais avec ça. J'imagine qu'Alex aurait encore perdu.

Lena eut un sourire en coin. Alex s'est surtout beaucoup éclipsée dans la cuisine.

Maggie haussa un sourcil, l'air de rien. Ah ?

Eh bien, avec Russel et Andrea littéralement collés l'un à l'autre et… bon, j'avoue, Sam et moi qui l'étions aussi… Elle a préféré nous laisser un peu d'intimité, ou quelque chose dans ce genre-là.

Maggie fit mine de réfléchir. Elle pouvait aussi s'éclipser pour écrire à quelqu'un, peut-être ?

Lena croisa les bras, la fixant dans les yeux. Qu'est-ce que tu veux me faire dire exactement ? Je croyais qu'on avait dit qu'on ne parlerait pas d'Alex.

Maggie soupira. Je sais… Tu sais que je lui souhaite le meilleur. Mais avec vous quatre, la pauvre, elle a dû se sentir un peu mise de côté.

Lena haussa légèrement les épaules. Je ne pense pas. À vrai dire, c'est encore un peu… Pas tendu, mais disons que c'est encore fragile entre elle et moi. Je n'ai pas insisté. Pas comme je l'aurais fait avant. J'ai préféré lui laisser un peu d'espace et si elle avait besoin de se réfugier dans la cuisine, eh bien… Je l'ai laissée faire.

Maggie hésita un instant. C'est toujours aussi compliqué entre vous ?

Lena hocha la tête. Moins. Puis, plissant légèrement les yeux, elle ajouta : Mais pourquoi tu veux absolument parler d'Alex ?

Maggie poussa un long soupir. De toute façon, je ne sais pas pourquoi je tourne autour du pot. J'imagine qu'Andrea t'a déjà parlé. Lena ne répondit rien, et Maggie enchaîna, baissant légèrement la voix : Alex adopte un enfant. Elle marqua une pause, cherchant ses mots. Elle… Elle le fait seule ou… ?

Lena mit quelques secondes avant de répondre. Maggie détourna le regard, visiblement tendue. Tu sais qu'elle ne veut pas qu'on t'en parle, dit finalement Lena. J'imagine qu'Andrea te l'a dit.

Je sais… murmura Maggie. Elle baissa les yeux, jouant nerveusement avec son verre. Je suis contente pour elle, c'est juste…

Lena posa son propre verre et se rapprocha pour lui serrer doucement le bras. Tu n'as pas encore réussi à tourner la page.

Maggie esquissa un sourire triste. J'ai signé ces fichus papiers, mais je n'arrive pas à m'y faire. Sa voix trembla légèrement. Je ne peux pas croire qu'on en soit arrivées là… et qu'il ait suffi de ça pour qu'elle entame aussi vite les démarches. Est-ce que je l'ai empêchée de vivre la vie qu'elle voulait ? Est-ce qu'elle a sauté sur l'occasion une fois qu'elle était totalement détachée de moi ? Est-ce que… Sa voix se brisa, et elle ne put en dire davantage. Un sanglot secoua ses épaules. Je suis une si horrible personne ?

Lena serra doucement le bras de Maggie, ancrant son regard dans le sien. Non, Maggie, tu n'es pas une horrible personne. Sa voix était ferme, sans la moindre hésitation. Et pour être honnête, Alex n'a pas attendu la signature des papiers pour entamer les démarches. Ce n'était pas une décision soudaine ou une réaction à votre divorce…

Maggie releva brusquement la tête, les yeux brillants d'émotion, mais Lena leva aussitôt une main, anticipant la suite. Mais tu n'as rien entendu de tout ça, parce que je ne suis pas censée te le dire.

Un silence lourd s'installa entre elles. Maggie détourna les yeux, inspirant profondément pour contenir les larmes qui menaçaient de surgir. Lena resserra doucement sa prise sur son bras. Je sais que ça fait mal. Ce que vous avez vécu, c'était intense. Mais vous avez essayé, vous en avez parlé… Votre décision a été prise.

Maggie ferma les yeux un instant, luttant contre l'émotion qui montait. Je sais… Elle marqua une pause, un sourire amer effleurant ses lèvres. Et pourtant, parfois, je me demande si je n'ai pas baissé les bras trop vite. Si j'avais essayé, juste une fois de plus… Mais j'avais peur à l'époque, et maintenant… je regrette tellement de l'avoir perdue.

Lena lui lança un regard empli de compassion, mais aussi d'une certaine perplexité. C'est normal, Maggie. Ce que vous aviez comptait. Je comprends que tu regrettes, vraiment. Mais si tu laisses ce regret te freiner, tu ne pourras pas avancer.

Maggie hocha doucement la tête, le regard perdu dans le vide. Elle me manque… murmura-t-elle enfin.

Oh Maggie… souffla Lena en la serrant un peu plus fort contre elle.

J'ai plusieurs fois commencé à lui écrire, mais… Reniflant, Maggie reprit : Je n'ai jamais réussi à lui envoyer quoi que ce soit. La dernière fois qu'on s'est parlées, c'était chez toi.

Lena se souvint de la dernière fois où Alex et Maggie s'étaient vues chez elle. La situation avait été tendue, Alex furieuse et Maggie complètement mal à l'aise. Elle se rappelait parfaitement comment Alex s'était énervée contre Maggie, et comment cette dernière, rongée par la culpabilité, n'avait eu qu'une envie : s'éclipser. Elle se sentait tellement désolée, mais incapable de trouver les mots pour réparer ce qui semblait irréparable. Lena savait que ce moment avait laissé des traces profondes.

Elle resta silencieuse un instant, réfléchissant à ce qu'elle pouvait dire ensuite. Elle avait l'impression que Maggie se noyait dans ses regrets sans oser agir. Lena sentit qu'elle devait poser une question qui avait son importance. Maggie, pourquoi tu n'essayerais pas d'envoyer ce message à Alex ? Si tu tiens à elle, si elle te manque tant, pourquoi ne pas faire ce pas, même si c'est difficile ?

Maggie sursauta légèrement, surprise par la question. Elle se détacha un peu de Lena, serrant les bras autour de ses genoux comme pour se protéger. Parce que… elle ne voudra jamais me reparler. Parce qu'elle m'a sans doute bloqué et que, de toute façon, je ne saurais même pas par où commencer. Ça fait trop longtemps, Lena. C'était… C'est trop douloureux.

Lena prit une profonde inspiration, cherchant les bons mots. Mais peut-être qu'elle attend que tu fasses le premier pas.

Maggie secoua doucement la tête, un rictus amer sur les lèvres. Si elle est déjà dans les démarches d'adoption, je pense que c'est l'inverse. Elle a vraiment tiré un trait sur nous. Elle est passée à autre chose. J'ai laissé passé ma chance.

Lena la regarda intensément, ses yeux emplis de bienveillance. Ce n'est pas parce que tu as pris cette décision qu'il n'y a pas de place pour un pardon, ou même pour une discussion. Tu ne sauras jamais si elle est prête à entendre ce que tu as à dire si tu ne lui donnes pas cette chance. Regarde-moi, regarde où on en est avec Alex. Elle, c'est la seule qui est prête à entendre ça. Tu la connais assez pour savoir ça.

Maggie se mordillait la lèvre, les émotions se bousculant en elle. Elle savait que Lena avait raison, mais l'idée même d'écrire à Alex la paralysait. C'était une porte qu'elle n'avait pas encore osé ouvrir.

Est-ce que tu veux que je t'aide ? suggéra Lena doucement, brisant le silence. Je sais que je ne suis pas la mieux placée et je ne t'en voudrais pas si tu me dis non.

Maggie resta silencieuse, son regard fixé sur l'horizon, comme si elle cherchait une réponse quelque part là-bas. Et si elle ne me répond pas ? chuchota-t-elle enfin.

Lena posa doucement sa main sur son épaule, un geste rassurant. C'est une possibilité. Mais tu ne le sauras que si tu essaies. Et au moins, tu auras essayé. Tu sauras vraiment où tu en es, au lieu de te torturer comme ça.

Maggie ferma les yeux un instant, ses pensées en tourbillon. Elle savait que Lena avait raison, mais elle n'était pas prête à franchir ce pas. Pas encore. Je ne sais pas, souffla-t-elle. Je crois que je préfère attendre. Je… je ne suis pas encore prête.

(...)

Les jours suivants, Lena fut accaparée par son travail et par la nouvelle directrice. Mais chaque soir, en rentrant chez elle, elle ne pouvait s'empêcher de repenser à son échange avec Maggie. Elle savait que ce n'était pas à elle d'intervenir – elle l'avait appris à ses dépens – mais cela n'atténuait en rien la tristesse qu'elle ressentait. Alors, elle lui envoyait plus de messages, tentant d'être plus présente.

C'est ainsi qu'elle apprit que Maggie avait noyé son chagrin dans des relations sans lendemain jusqu'à la nouvelle année, où elle s'était enfin arrêtée pour réfléchir. Désormais, elle traversait une phase de regrets et d'amertume, pleine de « et si ». Lena essaya de lui changer les idées, mais leurs emplois du temps rendaient cela compliqué.

Lors de sa semaine à Los Angeles, elle n'avait vu Alex et Andrea qu'à un déjeuner, et c'était tout. À son retour à Boston, elle s'était sentie soulagée – non pas de fuir ses problèmes, mais parce que chaque séparation avec Sam lui pesait. Après avoir passé un mois entier à Boston, une simple semaine loin d'elle lui avait paru interminable.

Janvier défila à une vitesse folle, et ce ne fut qu'en recevant le faire-part d'Alex annonçant la naissance du bébé que Lena réalisa qu'elle n'avait pas pris beaucoup de nouvelles de Maggie ces dernières semaines.

Elle resta un instant figée devant le mail, jusqu'à ce que Sam, qui l'avait sans doute observée, se pencha par-dessus son épaule pour lire rapidement sur l'écran. Oh, ça y est ! dit-elle en se redressant pour reprendre ce qu'elle était en train de faire. Elle doit être aux anges.

Elle doit être débordée surtout, j'imagine, répondit Lena en ouvrant l'image du faire-part. Lena sourit en découvrant le message soigneusement rédigé.

"C'est avec une immense joie que je vous annonce l'arrivée de Jameson "Jamie" Danvers, né le 3 février. Il est déjà le roi de la maison et me rappelle chaque jour pourquoi j'ai fait ce choix. J'ai hâte de vous le présenter."

Une photo était attachée.

Un nourrisson emmitouflé dans une couverture bleu nuit dormait paisiblement, une petite main serrée en poing contre sa joue. Ses cheveux noirs et épais contrastaient avec la douceur de sa peau, et même en photo, il semblait déjà avoir une sacrée présence.

Oh, regarde-le ! murmura Lena, attendrie.

Sam se pencha à nouveau par-dessus son épaule et sourit. Il est adorable. Et il a déjà plus de cheveux qu'Alex, plaisanta-t-elle.

Lena esquissa un sourire, mais son esprit dériva un instant vers Maggie. Elle savait que cette naissance l'avait perturbée. Elles n'avaient pas eu le temps d'en parler réellement, mais Maggie n'avait pas besoin d'en dire plus pour que Lena le devine. Elle se demandait si Maggie avait finalement envoyé son message à Alex. Elle lui avait dit qu'elle comptait le faire, qu'elle voulait lui souhaiter du bonheur sans arrière-pensée. Mais Lena savait aussi combien c'était difficile pour elle. Jameson… répéta-t-elle, pour sortir de ses pensées.

Jamie, corrigea Sam. C'est classe, mais je ne suis pas étonnée. Alex n'allait pas choisir un prénom banal.

Ça sonne bien, admit Lena, en faisant défiler le mail du bout du pouce.

Ça fait un peu nom de futur grand leader, genre "Jameson Danvers, magnat de l'industrie", ajouta Sam en croisant les bras.

Lena hocha la tête, amusée, mais une part d'elle restait ailleurs. Tu penses qu'elle lui a écrit ? demanda-t-elle à voix basse.

Sam n'avait pas besoin de demander "qui". Elle savait. Peut-être. Mais si ce n'est pas le cas, ce n'est pas grave.

Ça l'est pour elle.

Maggie doit gérer les choses à sa façon, et Alex aussi. Elles finiront par se retrouver si c'est ce qui est censé arriver. Et sinon… elles se trouveront autrement.

Lena tourna la tête vers elle. "Autrement" ?

La vie a une drôle de façon de ramener les gens là où ils doivent être. Si tu m'avais dit qu'on se rencontrerait par l'intermédiaire de Kara et d'un ordinateur, je t'aurais probablement prise pour une folle… Mais regarde où on en est maintenant. Alors, qui sait ce que l'avenir réserve à Maggie et Alex ?

Lena sourit légèrement à cette réflexion. Tu as raison, dit-elle en se détendant un peu. La vie a des manières bien à elle. Elle jeta un dernier regard à la photo du bébé. Jamie Danvers, murmura-t-elle.

Elle tapota doucement sur l'écran du téléphone et commença à rédiger un message.

"Félicitations, maman Alex ! Jamie est parfait, et il est déjà tellement adorable. J'espère que tu tiens le coup et que tu trouves un peu de temps pour souffler. On fête ça très bientôt !"

Elle montra le message à Sam, qui acquiesça. C'est parfait, confirma-t-elle.

Lena appuya sur "envoyer", un léger sourire sur les lèvres.

On pourrait y aller pendant les vacances ? proposa Sam, brisant finalement le calme. Je pose quelques jours, et on fait l'aller-retour pour le voir ?

Lena hocha la tête, mais son regard était déjà ailleurs. Pourquoi pas. Je pourrais en profiter pour passer à L-Corp et voir où en sont les progrès avec Caroline.

Sam la regarda un instant, avant de secouer la tête avec un sourire moqueur. Donc, tu pars en vacances… pour travailler ? Elle se tourna pour la fixer, un sourcil levé. Tu te souviens de ce qu'on avait dit pour les grandes vacances ?

Lena souffla, un léger sourire sur les lèvres. Mais là, ce n'est pas vraiment les grandes vacances… tenta-t-elle de justifier, mais Sam ne la laissa pas passer.

Ce qui a été décidé pour les grandes vacances compte aussi pour les petites, répondit Sam avec fermeté, croisant les bras. N'essaie pas de te défiler. Les vacances, Lena, sont des vacances. Pas du travail.

Lena sourit doucement, cherchant à alléger l'atmosphère. Juste une demi-journée. Rien d'autre ? tenta-t-elle, un air de défi dans les yeux.

Sam la fixa, un sourire en coin, croisant les bras. Si tu passes une demi-journée à ton travail, tu vas vraiment devoir bien t'y prendre pour te faire pardonner après, répondit-elle, un brin taquine.

Lena posa alors son téléphone sur la table, un geste mesuré, et se leva lentement, s'approchant de Sam avec une intensité nouvelle dans son regard. Elle s'arrêta juste devant elle, son souffle se mêlant à celui de Sam, avant de murmurer doucement. Tu sais que je sais très bien me faire pardonner.

Sans laisser le temps à Sam de répondre, Lena se pencha légèrement en avant, l'air à la fois hésitant et sûr d'elle. Puis, dans un geste tendre et délicat, elle embrassa Sam, un baiser doux, comme une manière de réparer, de se faire pardonner, mais aussi de raviver ce lien qui semblait plus fort à chaque instant.

Il y a des mineurs ici ! lança une voix derrière elles.

Lena se recula, un sourire aux lèvres, tandis que Sam levait les yeux au ciel d'un air faussement agacé. Tu sais soigner tes entrées, remarqua Lena, amusée.

Ruby haussa les épaules. Il paraît. Tant que vous restez habillées, je devrais réussir à m'en remettre.

Ruby ! protesta Sam, légèrement mal à l'aise.

Maman, enchaîna Ruby sans transition, tu sais que je dois être au foot à 14 heures, hein ?

Je t'y emmène, répondit simplement Lena prête a y aller.

Ruby soupira dramatiquement. Vivement que j'aie mon permis…

Lena haussa un sourcil. Je conduis si mal que ça ?

Non, c'est juste que la dernière fois, quand tu m'as emmenée, Jason m'a posé… plein de questions.

Lena échangea un regard intrigué avec Sam. Quel genre de questions ?

Ruby haussa les épaules, l'air faussement désinvolte. Oh, tu sais… des trucs. Il voulait juste savoir ce que tu faisais, où tu bossais, si t'étais mariée…

Lena plissa légèrement les yeux. Mariée ?

Oui, enfin, c'était une question parmi d'autres. Ruby fit un vague geste de la main, espérant que ça passe inaperçu.

Sam, elle, ne lâchait pas l'affaire. Et pourquoi est-ce que Jason s'intéresse autant à Lena ?

Ruby détourna le regard. Aucune idée… Il est curieux, j'imagine.

Sam esquissa un sourire en coin. Hm. Curieux, ou alors…

Ruby sentit le piège arriver et se redressa légèrement. Ou alors quoi ?

Ou alors il essaie de se rapprocher de toi en s'intéressant à Lena… dit Sam avec un ton faussement innocent.

Ruby cligna des yeux. Hein ? Non. Non, non, non. Elle secoua la tête avec force. C'est pas ça du tout.

Sam ne se démonta pas. Ce qui nous laisse l'autre option…

Ruby fit mine de ne pas comprendre, mais son expression crispée la trahit. Quelle autre option ?

Sam la fixa, amusée. Qu'il ait un crush sur Lena.

Ruby grogna et cacha son visage entre ses mains. Oh mon Dieu, maman, pourquoi tu dis ça à voix haute ?

Lena, elle, était partagée entre l'amusement et l'étonnement. Attends, attends… Jason a un crush sur moi ? Ce Jason qui joue au foot avec toi ? Il a quel âge déjà ?

Ruby soupira. Il a seize ans. Et c'est hyper gênant.

Lena grimaça légèrement. Hm, je suis flattée, je suppose… mais aussi un peu inquiète.

Sam rit doucement. Et qu'est-ce que tu lui as répondu, quand il t'a posé toutes ces questions ?

J'ai dit que t'étais procureure et que tu foutais des gens en prison. Ruby haussa les épaules. Ça devrait calmer ses ardeurs, non ?

Lena sourit. Bonne réponse.

Sam tapota l'épaule de sa fille, toujours amusée. Bon, au moins, maintenant vous savez à quoi vous attendre quand vous arriverez.

Ruby se leva précipitamment et attrapa son sac. Génial. Maintenant, je vais devoir changer d'équipe, de nom et peut-être déménager dans un autre État.

Sam arqua un sourcil, faussement pensive. Ou alors…

Ruby se figea, méfiante. Ou alors quoi ?

Un sourire taquin étira les lèvres de Sam. Je viens avec vous. Et quand on arrive, j'embrasse Lena.

Ruby la fixa, bouche bée, avant de s'exclamer avec horreur : Non mais ça va pas ?!

Lena, qui tenait déjà ses clés en main, éclata de rire. Honnêtement, ça pourrait être drôle.

Ruby secoua vivement la tête. Non. Hors de question. Il est déjà assez relou comme ça, pas besoin de lui donner plus de raisons pour m'ennuyer.

Lena reprit son sérieux et jeta un regard à Sam. Mais d'ailleurs, ce serait pas mieux que ce soit ta mère qui t'emmènes ?

Ruby haussa les épaules, hésitante. Je sais pas…

Sam s'appuya contre le dossier du canapé, observant sa fille avec curiosité. Ça t'embête que les gens sachent ?

Ruby soupira avant de s'asseoir sur l'accoudoir. C'est pas ça… Mes amies proches savent déjà. Elles viennent à la maison, elles voient bien comment vous êtes ensemble. Mais au foot, c'est différent. C'est un peu… bruyant. Si je dis quelque chose, tout le monde le saura en moins d'une journée.

Lena hocha lentement la tête. Donc tu préfères rester évasive ?

Ruby hésita un instant. Je sais pas ce qui est mieux. J'ai rien à cacher, mais… j'aime pas que les gens se mêlent de ma vie.

Sam croisa les bras et sourit doucement. Dans ce cas, continue comme tu le sens. T'es pas obligée d'expliquer quoi que ce soit.

Lena acquiesça. Et si jamais quelqu'un devient trop insistant, tu peux toujours lui rappeler que je fous des gens en prison.

Ruby laissa échapper un rire. Ouais, je vais faire ça. Ça devrait suffire.

Sam passa un bras autour des épaules de sa fille et lui déposa un baiser sur la tempe. Allez, filez. Je vous promets que je serai sage en vous attendant.

Ruby lui lança un dernier regard sceptique avant de se diriger vers la porte. Mouais. Vous n'êtes jamais sages quand je suis au foot.

Lena et Sam échangèrent un sourire complice, bien conscientes que Ruby n'avait pas complètement tort.