Le lendemain, l'équipe décide de se séparer. Pendant que Skoll commence son ascension de l'impressionnante falaise qui le sépare du sommet de Noctilum, les trois autres explorent les berges du fleuve qui s'écoule vers le sud depuis le lac de la cascade.

Après avoir réussi à éviter plusieurs géants sylvestres – que Mimir a fini par nommer « sylooths » – ainsi que quelques ciniculas géantes, les trois amis arrêtent leurs skells en début d'après-midi au sommet d'une nouvelle cascade, plus petite que celle en amont.

« On voit tout Noctilum d'ici ! s'émerveille Baldr. C'est de là-bas qu'on vient, non ?

- Exactement, répond H. Lin. Nous pouvons voir la chaîne de montagne séparant Primordia et Noctilum depuis ici, ainsi que tout le chemin que nous avons parcouru, jusqu'aux plaines bleutées.

- Et par là on dirait qu'il y a un moyen de descendre en véhicule, indique Mimir en désignant une énorme racine qui descend à l'ouest de la cascade.

- Ça me parait accidenté… commente H. Lin. Je ne suis pas sûre que le skell de transport puisse passer par ici.

- Il ne reste qu'une seule sonde, non ? demande confirmation Baldr.

- En effet, répond H. Lin. Celle de la forêt de Permobscur.

- Si c'est le cas, on peut la confier au skell de combat et laisser le coffre de transport au skell de transport, propose Baldr. Avec cette répartition des charges utiles, les deux devraient pouvoir se transformer en forme humanoïde et enjamber les obstacles sur la branche.

- … C'est tout à fait faisable, en effet, approuve H. Lin.

- Donc on peut rentrer en passant par là ! s'enthousiasme Mimir. Plutôt que de bêtement faire demi-tour ! Ce sera l'occasion de continuer à explorer. Il doit y avoir un paquet de nouvelles créatures le long du fleuve en plus ! Sans parler de la flore !

- Ne nous emballons pas trop vite, tempère H. Lin. Ce n'est pas forcément une mauvaise idée de suivre un autre itinéraire pour le retour, mais nous devons bien le planifier pour nous assurer qu'il ne comporte aucun risque.

- D'ici nous pouvons déjà repérer une bonne partie du trajet, remarque Baldr. Déjà, on voit qu'une fois en bas on a l'option de revenir aux plaines bleutées en traversant le fleuve et en continuant vers l'est.

- Ou bien nous pouvons continuer plus au sud en direction de la cascade suivante, ajoute H. Lin. Il semblerait qu'il y ait un accès à l'ouest de la cascade… »

Maintenant qu'elle les a lancés sur l'étude topographique de la région, sujet qu'ils vont mettre du temps à épuiser, Mimir va avoir tout le temps qu'elle veut pour répertorier les espèces vivantes de la zone, et il y a de quoi faire !

Les zones humides et chaudes ont toujours été riches en espèces végétales, et donc animales. Sur Terre en tout cas, c'était le cas, et Mira semble suivre la même logique. Sur le plateau sur lequel ils se trouvent il fait peut-être un peu moins chaud que dans le reste de Noctilum, à cause de l'altitude, ce qui explique probablement qu'il ressemble plus à une plaine qu'à une jungle luxuriante, mais il n'en reste pas moins pourvu d'espèces aux formes et aux caractéristiques variées.

Les sylooths sont au sommet de sa liste de priorités. Ces géants sylvestres de plusieurs dizaines de mètres de haut sont presque aussi grands que les millésaurs de Primordia. Leur forme humanoïde ajoute au mystère : ils sont biologiquement beaucoup trop proches des humains pour que ce soit une simple coïncidence. Elle doit à tout prix réussir à prélever des échantillons d'ADN pour un séquençage complet.

Cela dit… Mira toute entière est trop proche de la Terre pour que ce soit une coïncidence… Elle n'en a pas vraiment parlé aux autres, mais les ressemblances avec la Terre sont très nombreuses. Une température similaire, des biomes semblables, une atmosphère respirable… Certes elle est plus petite et possède un champ magnétique plus fort, mais ces différences auraient pu être plus marquées.

Avec un peu de chance, une meilleure compréhension de l'écosystème miran l'aidera à mieux comprendre la planète elle-même…

Tiens ? Cet arbre en forme de flèche parsemé de boules blanches… ce serait pas un cotonnier ?

Mimir s'approche de l'arbre qui pousse paisiblement au bord de l'eau, puis cueille une boule de fibres blanches.

C'est bien du coton. Très similaire à celui qui se trouvait sur Terre, d'ailleurs… Elle a déjà entendu parler de ce type de coton, dont l'arbre pousse en flèche comme ça, mais qui lui en a parlé ? Sullivan ? Non. Comment elle aurait pu le savoir ? Elle a jamais mis les pieds en Noctilum. Ou alors c'est cette ancienne universitaire, là… Vera ? C'est comme ça qu'elle s'appelle, non ? Mais elle a pas beaucoup discuté avec elle… C'était il y a pas si longtemps en plus ! C'était qui… ?

« Koukou ! » s'écrie-t-elle en se souvenant de la conversation avec la Nopone de la caravane de la grotte de l'Évent de la Baleine au début de leur expédition. C'était une des ressources que Koukou voulait bien échanger ! C'est ça ! Mais maintenant qu'elle y pense… ça aussi c'est étrange : comment ont-elles pu communiquer alors qu'elles sont de deux espèces différentes… ?

« Tu as trouvé quelque chose ? lui demande Baldr en s'approchant d'elle aux côtés de H. Lin.

- Ah ! sursaute Mimir.

- Un cotonnier ? s'étonne H. Lin.

- Heu… Ouais, répond Mimir. Les Nopons en sont friands apparemment.

- Alors nous devrions récolter tout le coton que nous pouvons, propose H. Lin.

- C'est exactement ce que je me disais, répond Mimir.

- Les géants ont pas l'air d'avoir bougé, commente Baldr. On devrait pouvoir suivre le même chemin pour les éviter au retour.

- C'est une bonne nouvelle, répond H. Lin.

- N'empêche… c'est dingue à quel point les créatures miranes sont immenses, commente Baldr. Même les insectes peuvent être super grands. Il y avait pas d'animal aussi grand sur Terre.

- Sur terre, peut-être, mais dans l'eau si, nuance Mimir. Mais c'est vrai que les êtres vivants d'ici sont globalement plus gros.

- C'est vraiment déroutant… commente Baldr.

- Ah bon ? s'étonne Mimir. C'est pourtant logique.

- Vraiment ? s'étonne H. Lin. Peut-on savoir pourquoi ?

- Ben… Mira est moins lourde que la Terre, explique Mimir sur un air d'évidence.

- Et… ? demande H. Lin sans comprendre où Mimir veut en venir.

- Ben du coup la gravité est plus faible. Et qui dit gravité plus faible dit moins de forces de compression et plus de facilité à grandir. Ajoute à ça un taux d'oxygène plus élevé dans l'air, et les créatures deviennent naturellement plus grandes parce qu'elles ont besoin de moins d'énergie pour maintenir un corps aussi grand debout. C'est logique.

- … Si tu le dis. » répond H. Lin.

Coton harnenga : Un cotonnier qui a la forme d'une flèche quand il pousse. Ce matériau de la meilleure qualité est très prisé par les Nopons.

Exploration de Mira : 14,76 %