En passant : X) j'avais prévu qu'il mette un peu plus longtemps avant d'être suspect, mais j'ai pas réussi...
Melynee : Roooooh, ça fait plaisir de te revoir ! Je pense que vu la longueur de mes chapitres, il vaut mieux en lire plusieurs d'un coup quand on a le temps, en effet (même si 30, ca fait masse, quand-même X,D)
Contente que le sort de Lucius te satisfasse ! C'est un peu trop doux pour ce qu'l a fait subit à Drago, mais je ne voulais pas non plus qu'il connaisse un sort trop horrible et que son fils se sente coupable. Là, il est très (trop) gentiment torturé par Rosier et les elfes, et c'est pire pour son amour-propre XD Drago peut l'ignorer et se concentrer sur sa propre reconstruction.
Yza : 24h ?! Je note ca dans mon petit calepin XD ca me parait à la fois énorme et rien du tout par rapport au temps que ca prend à écrire
Merci de ton commentaire, et j'espère que la suite te plaira !
Ce matin-là, Drago se réveilla avec la sensation de ne pas s'être senti aussi bien depuis une éternité. Il avait l'impression d'être un autre. Un jeune-homme normal, qui aurait un logement ordinaire, un emploi banal, une vie sociale tout à fait classique. À l'abri des rideaux de son baldaquin, il pouvait rêver que sa cellule n'en était pas une, qu'il vivait dans un coquet petit loft douillé, et qu'il retrouverait rapidement son petit ami une fois au travail. Que Kieran Price puisse être un tantinet jaloux de Potter n'était pas un problème, et par ailleurs, qui ne le serait pas ? Lui-même enviait continuellement son pouvoir et sa puissance… Non, tout allait pour le mieux.
Son sourire se crispa puis disparut quand il réalisa qu'une fois de plus, Harry Potter avait fait irruption dans ses pensées sans y avoir été invité.
Il ferma les yeux, évoqua rapidement un tableau à deux colonnes et deux lignes et y dressa la liste des qualités et défauts de Kieran Price opposées à ceux de Potter. L'activité le frustra rapidement quand il réalisa que les entrées du côté du Survivant ne manquaient pas, alors qu'il ne trouvait pas grand-chose de positif ou négatif à dire sur l'architecte.
Il grogna de déception, puis sortit de son lit, fit sa petite toilette quotidienne, passa une robe propre, et se rendit sur la plage comme à son habitude.
En observant Potter se déshabiller sur le ponton et plonger, il loua mentalement la magie de Lucile qui le rendait invisible aux yeux des résidents de l'île. Il imaginait facilement ce que les gens tireraient comme conclusions de le savoir venir ici chaque matin pour se rincer l'œil.
Il tourna la tête vers celle qui l'accompagnait et grimaça devant l'expression dégoutée qu'elle revêtait pour observer son visage depuis un moment.
« Je sais que tu me trouve hideux, Lshl', grinça-t-il en levant les yeux au ciel. Mais penses-tu être capable de ne pas le montrer si ouvertement ?
– Ça se prononce Lshl', répéta-t-elle machinalement. Et je n'y peux rien ! C'est de pire en pire. Pourquoi as-tu fait ça ?
– Pourquoi ai-je fait quoi ? Je ne sais même pas de quoi tu parles…
– Ton visage, accusa-t-elle.
– Oui, et bien ? À quoi ressemble-t-il, cette fois ?
– Il a l'air idiot. »
Drago ricana.
« Dois-je comprendre que mon visage véritable est sensé avoir l'air intelligent ?
– Tu n'es pas quelqu'un de stupide, Malfoy-Drago-Malfoy. »
Il fallait croire que si. Comme toujours quand il fallait prendre son courage à deux main, Drago louvoyait, hésitait et reportait la chose. Son absence aux cours de Patronus avait rapidement cessé d'être un divertissement pour les Surveillants, mais il n'avait pas encore osé mettre les choses au clair avec Potter concernant les repas en provenance de Londres.
Et c'était stupide, car plus il attendait, et plus difficile ce serait de se justifier sans admettre que ce dernier avait eu raison sur toute la ligne.
Il avait espéré que Potter vienne le provoquer une nouvelle fois et pouvoir utiliser cette excuse, mais le Directeur d'Azkaban s'était tenu à carreau et avait fait son travail sans se permettre aucune familiarité…
Jusqu'à la veille au soir, quand enfin, la page de l'agenda magique avait doucement commencé à se couvrir de texte :
« Bon, puisque tu n'aimes pas notre gastronomie nationale, je te propose qu'on reprenne notre petit tour du monde demain ! On a pas mal visité l'Asie, alors »
Drago s'était hâté de tracer les mots avant de trop réfléchir et de fuir à nouveau :
« Je ne mangerai pas avec toi demain soir. »
Ensuite, il avait observé la page inerte de longues minutes, affreusement conscient du bruit de sa respiration, attentif au moindre son, au moindre mouvement, entièrement concentré sur le papier blanc, attendant une réaction.
Il n'y avait rien eu.
Quand il avait quitté son bureau, au soir, il avait bien eu l'impression qu'il faisait particulièrement froid dans le couloir, mais il n'avait pas fait le rapprochement.
Aujourd'hui, il le faisait.
« Je ne pense pas qu'il viendra ce matin, l'accueillit Lucile quand il débarqua sur la plage. Il a déjà nagé toute la nuit.
– Toute la… Quoi ? »
Elle l'observa un moment, puis un sourire cruel et vorace apparut tout doucement sur ses lèvres.
« Allons, Malfoy-Drago-Malfoy, je suis sûre que même toi, tu peux le sentir… »
Drago poussa un soupir consterné avant de supposer :
« Le désespoir et le mal d'amour, à nouveau ?
– Bien sûr, le désespoir et le mal d'amour. Ça empeste encore à travers les vagues. » Elle laissa passer quelques secondes, puis, sans le regarder, elle précisa : « C'est dans ces cas-là qu'ils sont le plus facile à attraper, tu sais ? On pourrait croire que l'émotion abîme le goût, mais ce n'est pas le cas. De toute façon, ils sont toujours soulagés de mourir, avec moi.
– Je m'en souviens, oui », grinça-t-il en examinant tout de même la côte.
Les tentatives de meurtres de Lucile semblaient remonter à une autre vie, mais difficile de les oublier pour autant. Il était toutefois vrai qu'elle, au moins, avait eu la délicatesse de faire ça sans violence, et même en accédant à toutes ses requêtes. La Selkie avait beau être devenue une espèce de camarade, elle restait un animal dangereux, et Drago frissonna. Et puis il pensa de nouveau à Potter et à son désespoir qui empestait les flots.
« Tu ne comptes pas le manger, j'espère ? Il n'a pas de robe ou de baguette quand il nage, mais…
– Bien sûr que non, je ne vais pas le manger. Morrigan a besoin de lui pour gagner de l'argent.
– Tu le reconnais, n'est-ce-pas ? C'est simple, c'est le seul qui nage et… »
Il s'interrompit devant le regard condescendant de la Selkie.
« Je sais reconnaître les humains qui portent leur propre visage…
– À moi aussi, il donne de l'argent, se justifia Drago en se sentant rougir. C'est pour ça. »
Lucile haussa les épaules, faisant rebondir ses seins et attirant sur eux l'œil légèrement dégoûté de Drago.
« Tu n'as pas à te justifier avec moi, Malfoy-Drago-Malfoy. Je sais que les humains sont inconstants en matière de sentiments. »
Les réunions du jour furent toutes annulées. Drago reçut l'information, comme les autres, par un petit post-it plié en forme d'avion asymétrique. Quand il parvint enfin à attraper l'engin qui volait en cercle sans parvenir à atterrir sur son bureau, il reconnut l'écriture brouillonne et devina l'état d'esprit de Potter, qui espérait probablement l'apitoyer. La lecture confirma la première impression :
« Ai dû avancer mon départ pour Londres. Si besoin, joignable par Patronus. »
Un léger sortilège d'investigation lui apprit que le Directeur d'Azkaban n'avait même pas pris la peine de rédiger plusieurs missives. Mullan et Runcorn avaient probablement reçu le même message reproduit par un sort de duplication. Pas étonnant que l'avion obtenu soit à moitié débile.
Si le but avait été que Drago se sente coupable, le résultat fut exactement l'inverse : Il annonça fièrement à Nguyen avoir toute l'après-midi à consacrer aux potions, et put s'occuper seul de préparer la distillation d'aconit, une étape préparatoire à la réalisation de la potion Tue-Loup.
Au milieu de l'après-midi, la clochette indiquant un malade ou un blessé tinta. Nguyen poussa un soupir avant de mettre un sort de stase sur son chaudron et de s'éloigner sans un mot. Cela faisait longtemps qu'il n'interdisait plus à Drago de se trouver seul sur place. Ce dernier comptait consciencieusement les gouttes qui tombaient du bec de la cornue : les douze premières étaient toujours de moindre qualité.
« Monsieur Malfoy ? »
Il redressa la tête sous l'interpellation de l'infirmier, et réalisa que celui-ci était revenu accompagné de Kieran Price. Il sentit immédiatement une douce chaleur lui monter au visage au souvenir des baisers et des caresses échangées la veille. Il aurait toutefois préféré être surpris en meilleure posture qu'affublé de la blouse de Potioniste et les cheveux rassemblés dans un chignon pratique mais inélégant.
« Ki… Je… Monsieur Price ? bafouilla-t-il.
– T'as un moment ? »
Ses yeux se rabaissèrent d'un coup vers son alambic. Il avait été inattentif pendant moins de cinq secondes. Il avait peut-être raté une goutte, mais pas plus.
« Et bien… Pas vraiment, avoua-t-il. Enfin, pas tout de suite. Pas si ce n'est pas urgent. »
Il attendit de voir la nouvelle goutte se former et tomber avant de relever furtivement les yeux. Il avait quelques nouvelles secondes avant la prochaine.
Kieran Price n'avait pas bougé, et les lèvres pincées ainsi que les sourcils dressés de Nguyen indiquaient assez bien son agacement pour la situation. Personne n'aimait voir un amateur dans son laboratoire.
« Je… » Drago accorda de nouveau son attention à l'alambic, et vit la nouvelle goutte tomber. Il calcula : les douze gouttes, la récolte du filtra, le maintien à température ambiante dans le flacon oxygéné, rien de tout cela ne pouvait être abandonné à mi-parcours. En revanche, il pourrait garder le distilla en stase pour poursuivre sa potion plus tard. Il avait aussi une décoction de millepertuis qui réduisait sur le feu. Peut-être que… « D'ici une demi-heure, je pense que je pourrais…
– D'accord. »
Une goutte. Drago releva les yeux.
« Monsieur Price, intervint finalement Nguyen. Je vais vous raccompagner à la sortie. Certains produits ici réagissent mal à la présence d'un trop plein d'ondes magiques.
– Ah ? Ah, oui, d'accord. Non, pas besoin, je vais y aller, dans ce cas. Drago, je t'attends dans le couloir, d'accord ?
– Je me dépêche », promit Drago avant de baisser de nouveau le regard pour voir une goutte glisser le long du bec.
Il y eut du mouvement à la lisière de son champ de vision, puis Drago put de nouveau se concentrer sur sa tâche. Après quelques secondes, la voix basse de Nguyen résonna à nouveau :
« Je vous prierai de ne pas inviter vos amants dans mon laboratoire ou mon infirmerie, Monsieur Malfoy. Ma tolérance à votre égard ne va pas encore jusque-là. »
Drago lui adressa un bref regard courroucé, mais l'infirmier était concentré sur son propre chaudron. Il garda donc le fond de sa pensée pour lui et se fit la réflexion qu'il pourrait vider son sac lors de leur prochaine séance de psychologie moldue.
Il referma le flacon contenant les douze – peut-être treize ou quatorze, mais pas plus – gouttes de distillat et l'étiqueta soigneusement, en silence. Ensuite, il augmenta légèrement le feu et releva le ballon de deux centimètres pour poursuivre l'opération comme il se devait. Il n'était pas du genre à laisser ses émotions le détourner d'une potion réussie.
Trente minutes plus tard, il avait achevé ce qui devait l'être et interrompu ce qui le pouvait. Il rinça son matériel, le sécha d'un coup de baguette, le rangea, et sortit du laboratoire en adressant un hochement de la tête à l'infirmier mais sans prononcer un mot.
Kieran Price était adossé au mur du couloir, occupé à consulter un magazine magique musical qu'il referma et fourra dans sa poche à l'arrivée de Drago. Il lui sourit et vint lui effleurer la hanche. Le prisonnier releva la tête vers lui, ferma les yeux et reçu un baiser furtif sur les lèvres. Ils se séparèrent rapidement en se regardant d'un air complice, puis se mirent en marche vers leur petite salle habituelle.
« J'ai appris que tu étais off, cette après-midi, commença Kieran Price. Tu aurais pu venir me voir.
– Je n'ai pas non plus rien à faire. Quand il n'y a pas de réunions, il reste le courrier, les recherches d'emploi, les demandes d'interview, les factures… Et puis, ça faisait un moment que j'avais envie de tenter de nouveau cette potion, et c'était l'occasion parfaite. »
Quand le Seigneur des Ténèbres était au pouvoir, c'était bien-sûr le professeur Rogue qui avait le droit et l'honneur de préparer la potion Tue-Loup, mais Drago avait pu l'assister plusieurs fois. De bons souvenirs, jusqu'à ce qu'il apprenne que l'homme était un traitre à la cause. Il soupira.
« L'infirmier… Tu t'entends bien avec lui ?
– Nguyen ? Pas spécialement. Je ne crois pas qu'il apprécie réellement les relations sociales. On est amenés à travailler ensemble, c'est tout.
– Souvent ? »
Drago hésita sur la réponse à apporter. Il ne voulait vraiment pas que Kieran Price lui invente une relation avec Nguyen. L'infirmier n'avait jamais eu le moindre geste déplacé à son égard. Il se rappelait encore ses investigations après que Drago eut été violé dans les cuisines. Ses examens froids, cliniques, désintéressés, à la fois rassurants et humiliants au possible…
« Tous les jours, avoua-t-il. J'ai toujours aimé l'art des potions et de l'alchimie. »
Kieran Price ne répondit pas immédiatement, et Drago le regarda de côté, nerveux. Sa mâchoire inférieure était plus proéminente qu'à l'ordinaire. On voyait qu'il luttait contre lui-même pour ne pas surréagir.
« Ne t'inquiète pas pour lui, chuchota presque Drago. Je suis presque sûr qu'il est cent pour cent hétéro.
– Je pense pas que quiconque puisse rester cent pour cent hétéro avec toi, ricana Kieran Price. »
Ils arrivèrent devant leur petite cachette habituelle et Kieran Price ralentit sa marche. Ce fut donc Drago qui posa sa main sur la clenche et poussa la porte.
Il resta médusé devant le spectacle.
Il ne restait rien des murs sordides, du sol froid, de la table de torture. Disparues Les pierres grises, les poutres poussiéreuses et les toiles d'araignées.
La pièce avait au moins doublé de taille, et une odeur saine d'écorce et de papier s'en exhalait. Un parquet roux, chaleureux et lustré s'accordait à merveille avec les murs ornés d'un délicat papier peint blanc et doré. Des tentures réchauffaient l'atmosphère, habillaient les murs et venaient se rejoindre au plafond ou elles se couvraient de petits lampions colorés qui assuraient une lumière tamisée. Et au bout de la pièce, sous la petite fenêtre qui laissait voir la mer et qui était la seule à n'avoir pas changé, un lit imposant qui n'attendait qu'à être occupé.
SUBTILITAY
