Melynee : éhéhé, tu connais le cliché comme quoi on déteste chez les autres ce qu'on déteste chez soi ? Ben Drago c'est complètement ça : "Potter est un insupportable pseudo héro en quête de notoriété" - C'est ça, mon vieux... En fait, il cherche constamment à satisfaire qqun pour se sentir légitime... Sa mère, puis son père, puis Voldy, puis Harry... Maintenant Price, mais bon... On va se débarrasser de lui un peu plus facilement que les précédents, n'est-ce pas ?!
Ahahah, au vu de ta remarque sur Lucile, tu vas teeeeeeellement me détester sur ce chapitre ^^

Eiilys : Mallheureusement, on ne peut pas brûler les personnes de fic. Je sais, j'ai essayé...

En passant : Pour être honnête, il me déçoit un peu aussi, sur le coup...

Oznela : Merci à toi 3 Il avait déjà des soucis à comprendre ce qu'était une relation "normale" en prenant l'exemple de ses parents, alors maintenant qu'Azkaban l'a fucked up...


Drago regagna sa cellule dans un état second. Il ne regrettait rien de ce qu'il avait fait, mais était déçu de constater qu'il n'en avait pas non plus tiré de grand plaisir. Il n'avait pourtant rien à reprocher à Kieran Price, à son hygiène intime ou aux bruits qu'il faisait. Kieran Price ne lui avait pas forcé la main, ne lui avait pas fait de chantage à l'affection… C'était simplement que Drago n'avait pas spécialement été d'humeur cette fois-là.

Il s'arrêta devant chaque porte de son couloir pour reconstituer ses petits tas de sel destinés à révéler le passage d'un intrus, sans trop savoir pour quelle raison, mais sans hésiter une seconde.

Il pénétra ensuite dans sa cellule et poussa un soupir profond en constatant la présence d'une feuille de parchemin sur sa souche. Il alluma sa lampe et prit le temps de se laver et de déshabiller avant de s'emparer du papier et de le déplier, à demi assis sur son lit :

« Désolé,
Je ne viendrai plus ici, je te le promets. Tu peux ramener qui tu veux.
Je te jure que je fais des efforts, je sais que c'est pas assez.
Je suis vraiment désolé. »

Il avait souligné trois fois le « vraiment » et s'était abstenu d'agrémenter le message de ses petits autoportraits ratés.

Drago regarda longtemps le papier, regrettant l'élégante calligraphie de Lucius Malfoy qui pouvait laisser deviner l'humeur de son propriétaire grâce à d'infimes tremblements où à l'inclinaison des italiques. Celle de Potter avait toujours l'air énervée.

Drago se laissa tomber sur son lit sans faire attention à s'il se trouvait dans le sens de la largeur ou de la longueur.

Potter lui faisait de la peine, sincèrement, mais il n'y avait rien qu'il était en mesure de faire pour lui. Démêler ses propres pensées et gérer ses propres problèmes lui prenait déjà toute son attention. Une nouvelle fois, il s'enfuit dans les souvenirs du Détraqueur, là où il était si impuissant qu'il n'avait besoin de se poser aucune question.

Le lendemain, en début d'après-midi, ils avaient une de ces réunions bi-hebdomadaires où le retard accumulé était commenté par chacun et que Potter et Runcorn considéraient comme des pertes de temps à ajouter au reste.

Potter aurait tout aussi bien pu rester à Londres plutôt que de livrer la performance de ce jour-là : il passa presque l'entièreté de la séance à le fixer des yeux, gênant au-delà du possible et pitoyable.

À l'issue de cette réunion, Drago prit son temps pour rassembler ses affaires, puis attendit ostensiblement que la salle se vide. Potter dut comprendre le message puisqu'il se rassit et baissa le nez sur ses propres papiers, comme un enfant pris en faute.

Une fois que Runcorn eut poussé les derniers retardataires vers la sortie, Drago effectua un geste de sa baguette et la porte se ferma.

« Je suis désolé », articula Potter avant même que Drago n'ait tourné son visage vers lui.

Il l'observa d'un air sévère un moment, puis il se lança :

« Potter. Hier, j'ai été arrangeant avec toi.

– Oui, je sais, je suis vraiment désolé, je…

– Potter, le coupa Drago. Est ce que les choses seraient plus faciles pour toi si on arrêtait de travailler ensemble ? »

Il resta silencieux, bouche bée, quelques secondes puis s'alarma :

« Non ! Je croyais que tu aimais ce job !

– En effet, mais je peux m'occuper autrement si c'est plus simple pour toi. Nguyen serait…

– Non ! Non, je vais me reprendre, je te jure.

– On ne va pas s'en sortir si tu confonds ma politesse avec de l'intérêt.

– C'est pas le cas ! Je sais que c'est complètement mort. Je suis juste… C'est juste que j'ai été surpris, j'étais paniqué, j'ai réagi sans réfléchir, je suis désolé. »

Agir sans réfléchir était la façon de faire habituelle de Potter, et la technique était utile en cas de danger. Un instinct presque animal. Il était logique qu'il ait agi en ce sens en détectant un intrus dans son couloir. Il était toutefois parvenu à conserver un calme relatif, ou en tout cas, à n'attaquer personne, ce qui était davantage surprenant. Drago doutait qu'une baignade quotidienne ait pu suffire à lui apprendre la tempérance, et il était évident que Potter avait beaucoup travaillé sur lui pour obtenir ce résultat somme toute misérable.

Tout ça pour rien.

« Ce serait probablement plus simple pour toi si on se voyait moins, affirma Drago.

– Non, ça serait pas du tout plus simple. »

Sous ses paupières gonflées, ses yeux étaient légèrement exorbités, et les veines rouges juraient contre les iris verts. Le regard était décidé, toutefois.

« Tu es sûr de toi ?

– Certain. »

Il répondait rapidement. Trop rapidement. Comme toujours.

Drago soupira en regardant ailleurs. La réponse l'arrangerait, au final. Il se leva, et tout en rassemblant ses papiers, demanda :

« Y-a-t-il autre-chose que je puisse faire ? »

Potter cligna des yeux plusieurs fois avant de répondre :

« Je… Nan, je crois pas…

– Je vais faire en sorte que Kieran Price ne vienne plus dans mon couloir, indiqua Drago.

– Ah ? Non, ne t'inquiète pas pour ça. je vais virer les sortilèges de cafardage, je…

– Tu peux laisser les sortilèges de cafardage en place.

– Ah… »

Drago s'était attendu à ce que l'autorisation fasse jubiler Potter. Ce dernier se contenta d'avaler nerveusement sa salive.

Son stress palpable rendait Drago mal à l'aise. À présent debout et surplombant Potter, il se faisait l'impression d'être un parent exigeant devant un petit enfant pris en faute. Une sensation déplaisante.

Il souhaita une bonne journée à l'intéressé et partit s'occuper de la sienne.

Les jours passèrent et la jalousie de Kieran Price devint franchement encombrante. Voir Drago rembarrer Potter l'avait rassuré un temps, et puis il avait recommencé à exiger moins de promiscuité entre eux. Drago ne savait pas trop comment réagir à la demande. Il avait réduit à un strict minimum les occasions où il croisait la route du Survivant. Il refusait les réunions sans une tierce personne, lui interdisait de fermer la porte de son bureau quand il venait le voir et avait aussi voulu l'empêcher de s'asseoir dans ces cas-là : il ne voulait pas que Potter prenne ses aises, juge l'endroit confortable et accueillant et reste une seconde de plus que nécessaire. Potter avait refusé. La porte ouverte, d'accord. Rester debout, non.

La mort dans l'âme, Drago avait remisé au grenier le fauteuil destiné à accueillir les visiteurs.

Là, le Seigneur des Ténèbres l'attendait pour lui susurrer tous sortes d'horreurs à l'oreille :

« Que croyais-tu, Drago Malfoy ? Tu pensais qu'un homme normal serait capable de s'intéresser à toi ? Bien-sûr que non, Drago Malfoy. Tu n'attireras jamais que les détraqués et les pervers. Pourquoi crois-tu que Moi, aie posé les yeux sur ta répugnante personne ? Tu nous attires. Tu nous obsèdes. »

Au moins, ce n'était pas Potter.

Drago ignora l'apparition et abandonna son chargement.

Kieran price n'avait rien d'un détaqué ou d'un pervers. Il n'exigeait rien en terme de sexualité et ses demandes concernant la promiscuité de Drago avec « son ex » était logiques et compréhensibles. Il n'avait jamais levé la main sur lui et à peine haussé le ton. Peut-être qu'il n'aurait même pas insisté si Drago avait refusé de lui obéir. La crainte d'obtenir la mauvaise réponse à cette question empêchait à Drago de la poser franchement. La certitude de connaître la réponse était la seule chose qui lui permettait de tenir.

Jusqu'à la dispute suivante.

Comme chaque matin, Drago était sorti surveiller la séance de natation de Potter, et comme chaque matin, Lucile était là pour l'accueillir, le nourrir et lui offrir pendant quelques minutes la protection de son charme de dissimulation. Ce jour-là, elle avait ramené un requin gigantesque, avec des dents énormes, coupantes comme des rasoirs, et avait insisté pour que Draco fasse des réserves et conserve certains morceaux. Comme toujours quand ses proies dépassaient la taille d'un bambin, les créatures de l'île voulaient profiter du festin : les albatros étaient tous là et parvenaient à voler un morceau du cadavre, chacun leur tour, quand Lucile était occupée à chasser les autres. À chaque pas, elle écrasait sous ses orteils des petits crabes malchanceux que leurs congénères n'hésitaient pas à venir achever. Le bord de mer était agité de remous, les poissons attirés par l'odeur du sang. Quand Potter traversait le banc, il ralentissait un moment et relevait la tête, comme s'il était interloqué par le phénomène, et puis il reprenait sa route, débouté par la magie de la Selkie. Quand il sortit de l'eau, il resta un moment sur le bord, les pieds dans l'eau, mais Lucile augmenta la puissance de son fredonnement et il rentra au château.

Draco avait fait apparaître des bocaux de verre de la taille de tonneaux et ceux-ci trônaient sur les pierres en attendant qu'il en fasse Merlin seul savait quoi. Une chose était sûre : les choses qui marinaient à l'intérieur ne toucheraient jamais ses lèvres.

Quand elle fut satisfaite de leur travail, Lucile se redressa, souriante, joyeuse et couverte de sang. Les poings plantés sur les hanches, elle s'exclama :

« Voilà ! Avec tout ça, tu devrais avoir de quoi tenir quelques jours ! »

Drago grimaça en observant l'amoncellement d'abats et de chair sanguinolente, puis ses pensées rationnelles rattrapèrent leur retard sur son ouïe :

« Quelques jours ?

– Oui, je vais repartir un moment. Il faut que je trouve la peau de Morrigan. Je sais qu'elle est proche. »

Ces histoires de peaux mettaient Drago affreusement mal à l'aise. Autant il s'était habitué à Lucile et à ses extravagances, autant il avait du mal à admettre que la Surveillante Major d'Azkaban se transformait chaque jour un peu plus en une créature cannibale.

Il fut rappelé à la réalité par un doigt sur son front et un regard sévère.

« Tu vas penser à manger, n'est-ce pas ? J'en ai assez de devoir tout recommencer de zéro avec toi, à chaque fois !

– Je vais y penser, oui », marmonna Drago en chassant sa main. Il ne promit en revanche ni de le faire, ni d'associer les offrandes de la Selkie à ses pensées.

Elle pencha la tête sur le côté et pinça ses lèvres pulpeuses.

« Je vais manger, assura-t-il en grognant. Tu sens le mensonge, aussi ?

– Non. Je sens tes petits moments de fierté quand tu te penses intelligent. » Puis, tandis que Drago maugréait, elle dénoua la peau qui ceignait ses hanches pour s'en revêtir. « Bien ! Je ne serais pas longue ! Moins d'une année ! Tu devrais encore être en vie quand je reviendrai ! À bientôt, Malfoy-Drago-Malfoy ! »

Et sur ces adieux, son corps adipeux de phoque s'effondra sur le sol, ondula à toute vitesse vers l'océan, et s'enfonça dans l'eau sans provoquer une vague, mais en faisant fuir les poissons. Quelques secondes après qu'elle eut disparu, Drago commença à sentir le charme de dissimulation faiblir puis ses oreilles se débouchèrent d'un coup et il se retrouva visible sur la plage, devant le cadavre sanguinolent d'un requin et entouré d'une dizaine de bocaux répugnants. La simple idée de leur lancer un sortilège de lévitation pour les déplacer lui soulevait le cœur.

Il se força, pourtant. L'idée que cet animal soit mort pour rien le dérangeait, et ce, bien qu'il soit effrayant et monstrueux. Quand Medwin Welbert sortit sur la plage pour fumer sa cigarette matinale, il lui demanda de veiller sur la dépouille tandis qu'il amenait les bocaux à l'infirmerie de Nguyen. Il l'informa que le reste du cadavre l'attendait sur la plage : les poumons, les branchies, les dents… Que des ingrédients frais ! Pendant que le potionniste confirmé allait prélever ce qu'il pouvait, Drago se chargea de ranger ce qu'il avait déjà récupéré en doutant du bien fondé de l'opération. Les viscères, par exemple, n'entraient dans la composition d'aucune recette de sa connaissance.

Il avait presque fini d'étiqueter les bocaux quand il entendit un raclement de gorge dans son dos qui le fit sursauter. Il se retourna, et Kieran Price était là, à le regarder d'un air contrarié. Pire que contrarié, en fait : belliqueux.

Drago fut si surpris qu'il ne sut pas trop comment réagir et resta sans voix.

Ce fut donc Kieran Price qui prit la parole :

« T'as pas l'air très heureux de me voir, grinça-t-il.

– Si… Si. » Drago secoua la tête, se reprit et demanda : « Tu es là depuis longtemps ?

– Pourquoi ? Ici aussi, tu as quelque chose à cacher ? »

Drago se mordilla les lèvres.

Le lieu, le ton… La situation lui rappelait une scène qu'il avait déjà vécue. Avec Potter. Ou l'Épouvantard. Il n'était plus sûr. Le souvenir était flou et douloureux, et Drago savait donc qu'il s'agissait d'un moment teinté de bonheur.

« L'infirmier aussi, tu te l'es tapé ?

– Pardon ? »

Drago se redressa, fronça les sourcils, ouvrit la bouche pour répliquer, mais Kieran Price fut plus rapide :

« Putain, mais ça t'amuses de te foutre de moi, ou quoi ?! »

Il se retrouva d'un coup comme des mois plus tôt, incapable de réagir, incapable de répondre. Il resta là, inerte, la bouche béante, arrondie autour d'un mot qu'il était incapable de prononcer, dont il était même incapable de se rappeler.

« Tout le monde de fout de ma gueule, merde ! Tout le monde se fout de ma gueule parce que je m'intéresse à toi ! »

Kieran Price lui agrippa le bras pour le secouer et Drago baissa la tête pour voir sa belle main aux longs doigts fins se refermer comme une serre sur la manche de sa robe.

« Mais ça, tu t'en fous, pas vrai ?! Ça te fait marrer, même ?! Jusqu'où il est prêt à aller, ce con ?! Et bien va te faire foutre, Malfoy : j'arrête les frais ! Tu peux bien aller te faire sauter par qui tu veux, je m'en cogne ! Je…

– Monsieur Price. »

Ils se tournèrent tous les deux devant celui qui venait de prendre la parole. Nguyen était là, calme, mais la baguette sortie. Une expression de haine déformait ses traits.

Il y eut un silence, puis l'infirmier reprit la parole :

« Sortez immédiatement de mon laboratoire, s'il vous plaît, Monsieur Price. Ce lieu n'accueille pas les visiteurs. »

Drago sentit la main sur son bras se crisper une dernière fois, puis l'architecte le lâcha et quitta les lieux en râlant dans sa barbe.

L'air pénétra de nouveau ses poumons, si épais qu'il donna à Drago l'impression de se noyer. Tout s'était déroulé si vite s'il n'était pas bien sûr de ce qui venait de se passer.

« Monsieur Malfoy ? »

Drago resta silencieux.

« Monsieur Malfoy, je vais informer le Directeur Potter de…

– Non ! »

Si Potter apprenait que…

« Non, je… Vous n'avez pas assisté à toute la scène, vous n'avez pas compris ce qu'il s'est…

– Monsieur Malfoy, cet homme...

– Je vais le faire ! Je vais le lui dire. Oubliez cette histoire ! »

Drago fixa Nguyen jusqu'à ce que celui-ci détourne les yeux :

« Je ne lui cacherai rien ni ne lui mentirai, Monsieur Malfoy. Si vous tenez à présenter les choses à votre façon, alors je vous suggère de faire cela rapidement. »