Lorsque Chris a évoqué pour la première fois l'idée de se remémorer le camp, ils avaient tous ri, mais maintenant, sans caméras filmant dans l'intimité de la chaude nuit d'été, illuminée par la chaleur rayonnante du feu de joie, le sujet était revenu sur le tapis, et cette fois, ils se sentaient beaucoup plus à l'aise et ouverts pour partager leurs meilleurs moments au camp.
Gwen commença : « C'était le jour de la finale, toute cette journée et cette nuit, je ne sais pas, ça m'a rendue si heureuse et pleine de vie. L'excitation et l'enthousiasme qui montaient jusqu'à ce défi final, et à quel point j'étais proche du million, je crois que je n'ai jamais eu autant l'impression de vivre l'instant présent. » Elle termina avec un sourire mélancolique et satisfait.
« Et jeter Chris dans le lac, mec, c'était la cerise sur le gâteau », a ajouté DJ.
Duncan sourit à ce souvenir : « Je peux encore voir l'expression de son visage. »
Le feu crépitait tandis qu'ils se remémoraient ce jour-là.
« Ce que j'ai préféré dans cette journée, c'est de trouver toutes sortes de moyens de te saboter », sourit Heather.
Bon sang, pourquoi Heather ressentait-elle encore le besoin d'être méchante et de gâcher un moment de bonheur parfait ? Cette habitude était tenace.
« Et mon moment préféré de la journée, c'était de t'enfermer dans les toilettes extérieures », Leshawna n'allait pas laisser Heather s'en tirer avec ce commentaire. « Et remontons plus loin, comme quand on t'a enfermée dans le frigo, c'était le bon moment. »
Gwen intervint : « Je sais, n'est-ce pas ! Et quand tu t'es fait raser la tête. Je n'arrive pas à croire que j'ai vu ça de mes propres yeux. Je jure qu'à ce moment-là, le temps a ralenti. » Elle et Leshawna échangèrent un sourire. « Sans parler de la fois où j'ai versé la fourmilière rouge d'Harold dans ton lit. » Gwen jeta un coup d'œil à Harold.
« Ne me mêle pas à ça, mon Dieu ! » Harold était parfaitement satisfait de rester à l'écart de cette pauvre conversation qui dégénéra en un échange d'insultes. De plus, il avait perdu sa chère fourmilière rouge dans cet incident, ce n'était donc pas vraiment un bon souvenir pour lui.
Gwen l'encouragea de manière suggestive : « Je suis sûre que tu as de bons souvenirs avec Heather. »
Elle n'avait pas tort, mais Harold refusait de s'immiscer dans cette querelle entre les anciennes filles de Screaming Gopher. Il regarda Heather et, à sa surprise, découvrit qu'elle avait les genoux contre sa poitrine, les bras croisés, seuls ses yeux perçants les fixant. Il l'avait déjà vue ainsi, sur la défensive.
Heather leva la tête. « Oh, tais-toi, petite gothique bizarre. Je n'ai pas peur de relire ton journal. Je suis sûre que tout le monde est curieux de connaître ta relation avec Duncan – oups, je voulais dire Trent. »
« Ne me mêle pas à ça non plus ! » Ce fut au tour de Duncan d'intervenir.
Heather ne fit que l'entraîner davantage : « Admets-le, Duncan, tu aimes bien Gwen depuis un moment. Je me souviens de ton regard quand je lui ai arraché sa jupe pendant l'épreuve d'escalade. »
« Et comment tu m'as laissé tomber à cause de ça », a ajouté DJ.
Duncan lui lança un regard blessé : « Mec, je pensais que tu étais de mon côté. »
DJ resta sur ses positions : « C'est vrai. » Duncan fronça les sourcils. DJ céda : « Eh bien, tu as aussi ramené Bunny. » Le visage de Duncan s'adoucit.
« En parlant de vêtements déchirés, Heather… » Gwen revint vers elle, « …Harold ? »
Déjà échauffé par le feu, Harold sentit son visage s'échauffer encore davantage. Gwen essayait sans doute de le convaincre de son côté, et il n'allait pas prendre parti ni humilier Heather. Tout ce qu'il voulait pour la soirée, c'était se détendre sur la plage et savourer son poi. Il supposait qu'il essaierait de diriger la conversation vers un sujet plus positif.
« Eh bien, un de mes moments préférés, c'était quand j'ai été éliminé. Leshawna, t'embrasser sur le quai ce soir-là a été le moment le plus marquant de mes 16 années de vie. » Son regard croisa celui de Leshawna, mais il était sûr de déceler une certaine gêne dans le sien.
Bien sûr, Duncan a dû tout gâcher. « Mais toi et Heather, vous avez complètement séché la première base. » Duncan haussa les sourcils, ou plutôt les sourcils. « Tu te souviens quand j'ai pris tous tes vêtements et que j'ai porté ton lit jusqu'au quai ? Et toutes les filles… »
« Oh non non non », le coupa Leshawna en plissant les yeux.
Personne d'autre ne semblait trouver cela drôle non plus.
« Allez, DJ », murmura Duncan, « il faut que tu me soutiennes. » Mais DJ était parti. Tous les regards se tournèrent vers l'emplacement vide où il se trouvait quelques instants plus tôt. Tiens, DJ semblait disparaître souvent. C'était un peu suspect, mais Harold n'était pas trop inquiet, même s'il devrait garder un œil sur lui à l'avenir.
Harold sentit une occasion de retourner la conversation contre Duncan. « J'ai adoré inverser les votes pour éliminer Courtney. J'aurais pu facilement me débarrasser de toi, mais te débarrasser d'elle a été une torture pour toi et t'a vraiment fait souffrir. » Harold pouvait être vengeur, et il était sacrément doué pour ça. Pour être honnête, cela lui donnait un sentiment de puissance, mais il savait qu'il ne fallait pas céder à ce pouvoir. Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités , et tout ça. « Je n'arrive pas à croire que tu aies pensé que c'était Heather qui avait fait ça. »
« Fais gaffe, Doris. Tu veux que je raconte à tout le monde, en détail, chaque farce que je t'ai faite ? »
Harold le défia : « Vas-y. Ça montre à quel point tu es grossier et mesquin. »
Ils se fusillèrent du regard depuis l'autre côté du feu. Harold imagina Duncan brûler vif dans les flammes.
« J'adore ce poi, surtout le goût d'ananas », a déclaré Heather en brisant le silence avec une autre pique à Leshawna.
Quel dommage que Leshawna ait dû se passer du poi à cause de son allergie. Harold aussi était allergique, alors il a eu beaucoup de compassion pour elle. Le poi était délicieux. Sans compter que c'était un super aliment.
« Avoir cette éruption cutanée à cause de l'ananas valait la peine de t'enfermer dans le réfrigérateur », rétorqua Leshawna.
« Tu as de la chance, j'aime manger ma nourriture plus que la jeter. »
Mon Dieu, si seulement sa dame et son amour pouvaient s'entendre.
Gwen intervint en visant Duncan : « La petite amie de quelqu'un aimait bien jeter de la nourriture. »
Oubliez ça. Si seulement toute son équipe pouvait s'entendre.
DJ semblait penser la même chose. « Les gars, on pourrait au moins essayer de s'entendre ? » Attendez, quand est-il revenu ? « Partageons des souvenirs qui n'impliquent pas la souffrance de quelqu'un d'autre, d'accord ? » DJ se concentra sur Heather et Gwen, mais lança des regards sévères à tout le monde, y compris à Harold lui-même.
« Et le week-end où les garçons sont allés en croisière et en hôtel ? Cette masseuse savait exactement ce qu'elle faisait. Et tous ces desserts ; je n'arrivais même pas à prononcer le nom de chaque chose. Oh, et ma peau n'a jamais été aussi douce qu'après ce voyage. Duncan ? »
« Oh ouais, si – non, quand – je gagne le million, je vivrai comme ça. » Duncan était d'accord avec DJ. Cependant, Duncan ne savait pas quand s'arrêter, et il devait absolument parler des filles. « Mais revenir et voir à quel point elles s'entendaient mal m'a rappelé à quel point nous, les gars, étions proches. »
DJ soupira, sa tentative de conversation agréable contrecarrée.
Harold allait maintenant tenter de jouer les pacificateurs. « On est tous d'accord pour dire que la Playa Des Losers était vraiment géniale ? » Rien de grave ne s'est passé là-bas, n'est-ce pas ? Bon, il a été agressé par Courtney et rejeté par Leshawna à quelques reprises, mais ce n'était rien comparé à l'ensemble. Comment était-il si résilient ?
Heureusement, Heather l'a soutenu : « Honnêtement, c'était le seul vrai bon moment que j'ai passé la saison dernière. Enfin quelques jours où je n'avais pas à interagir avec des gens qui ne m'aiment pas. »
Au moins, elle n'a pas donné de noms.
« Alors, tout le monde ? » se moqua Gwen.
Non, pas tout le monde . Harold la fréquentait parfois. Il l'attendait devant sa chambre et demandait sans cesse à entrer pour discuter, même si Heather lui fermait la porte au nez. Finalement, après quelques heures d'attente, elle le laissa entrer, disant qu'il avait l'air pitoyable assis devant sa porte et qu'elle ne voulait pas que d'autres le voient près de sa chambre. Harold ne comprenait pas vraiment pourquoi Heather ne voulait pas être vue avec lui. Il pensait qu'il était un chouchou des fans et généralement apprécié. De plus, avoir un ami, quel qu'il soit, valait mieux que pas d'ami du tout. Mais il fit ce qu'elle voulait et garda leur amitié pour l'essentiel privée.
Heather n'était pas aussi méchante qu'elle le paraissait, et Gwen n'était pas aussi gentille qu'elle le paraissait. Harold supposa que Gwen se sentait insultée en insultant Heather. Gwen était solitaire, mais n'importe qui, quelle que soit sa position sociale, avait le don d'être méchant.
Harold n'a pas eu besoin de se porter garant pour Heather, car DJ l'a devancé. « Allez Gwen, Heather est descendue chercher mes sandwichs et elle m'a complimenté sur ma cuisine. Elle est même revenue plus tard pour en reprendre. »
« Ouais », acquiesça Harold. « Des tiers, en fait », corrigea-t-il mentalement. Quand Harold alla dans la chambre d'Heather cet après-midi-là, elle ne le laissa pas entrer s'il ne lui apportait pas un autre sandwich. Lorsqu'il lui demanda pourquoi elle n'en avait pas pris un deuxième, Heather répondit qu'elle en avait déjà pris un deuxième et qu'elle ne voulait pas passer pour une truie en en prenant plus. Ils finirent par partager le sandwich.
S'il avait vraiment répondu à Gwen lorsqu'elle lui avait demandé de lui parler de ses bons souvenirs avec Heather, cela aurait été sa première préoccupation. Harold n'arrivait pas vraiment à cerner ce sentiment, mais il y avait quelque chose de très intime à partager un repas avec quelqu'un.
Gwen parut surprise que les Gaffers se retournent contre elle et soutiennent Heather, mais Harold estimait qu'elle le méritait pour avoir constamment provoqué le conflit et tenté de l'impliquer dans la conversation. Peut-être qu'une partie de la haine de Heather pour Gwen déteignait sur lui.
La gothique se leva pour partir, tapant du pied avec ses bottes et soulevant du sable alors qu'elle se dirigeait vers l'endroit où Trent l'attendait.
« Tu vas filer dans les bois et embrasser Trent comme tu l'as fait avec Duncan tout à l'heure ? » lui cria Heather.
« Hé ! On ne s'embrassait pas tout à l'heure ! » hurla Duncan en réponse à l'accusation d'Heather, assez fort pour que Gwen et Trent l'entendent.
« Et tu n'as pas aidé non plus tout à l'heure », marmonna Harold. Duncan avait la curieuse habitude d'être à la fois le membre le plus inutile et le plus serviable de l'équipe. Il ne faisait presque rien pendant la majeure partie du défi, mais il était pourtant essentiel à la victoire.
« Mm hm », acquiesça Leshawna. « Mais tu n'aidais pas non plus à relever le défi plus tôt. » Elle répéta les pensées d'Harold. Contrairement à lui, Leshawna pouvait gérer un défi direct avec Duncan.
« Mais j'ai gagné la première partie ! Je crois que j'ai bien mérité une petite pause. »
Leshawna rétorqua : « Mais nous aurions pu gagner la deuxième partie aussi si toi et Gwen aviez réellement aidé. »
« Ouais, en plus, on n'aurait pas eu à voir Leshawna danser, beurk », a ajouté Heather.
« Ah oui ? Eh bien, ma danse a remporté le tie-break. »
« Et tes mouvements étaient épiques, Leshawna. »
« Merci, je suis contente que quelqu'un apprécie ma danse », sourit Leshawna à Harold et fit battre son cœur.
Dans ce duel d'esprit entre sa dame et son amour, son amour aura sa faveur.
Cependant, sa dame et son amour semblaient le mépriser avec le même dédain, ne le prenant pas vraiment au sérieux - ni ses atouts ni lui en tant qu'atout pour l'équipe.
Il a commencé la journée avec un refus de Heather :
« Ça te dérange ? Je parlais à mon pauvre type. »
Il a lancé le premier défi en étant ignoré par Leshawna :
« En parlant d'abdos en béton, as-tu déjà vu mes tablettes de chocolat ? » Elle n'a même pas regardé !
Et il a terminé le premier défi avec des insultes de la part des deux :
« Ton butin a une opinion ? »
« C'est un gros travail pour une petite chose si flasque et triste... et par « fans féminines », il entend sa mère ! »
Harold était convaincu qu'après la perte de son derrière parfait, sa femme et son amour seraient assis aux premiers rangs, en deuil et en larmes, lors des funérailles. Ils voudraient prendre la parole à la tribune, mais seraient trop submergés par l'émotion pour prononcer un discours digne de ce nom.
Ou pas. Un homme comme lui pourrait rêver et imaginer que ses sentiments seraient réciproques avec la même intensité.