Le lendemain matin, une odeur alléchante de bacon grillé et de croissants beurrés s'élevait dans le bunker, s'infiltrant jusque dans les chambres. Le grincement lointain d'une spatule raclant une poêle et le bruit du café coulant dans la cafetière donnaient à l'endroit une atmosphère presque paisible.
Bobby était debout depuis l'aube. Il s'était levé avec l'intention de nourrir cette bande d'idiots qui ne prenaient jamais le temps de bien manger. La veille avait été longue, tendue, et il savait que tous avaient besoin de récupérer — autant physiquement que mentalement. Alors, il s'était mis aux fourneaux.
Sur la grande table en bois, il déposait déjà les assiettes garnies d'œufs au plat, de bacon croustillant et de croissants faits maison. Une vraie merveille, réchauffée au four après les avoir pétris la veille. Il servit deux grands mugs de café noir avant de croiser les bras, jetant un coup d'œil vers le couloir.
— Bon sang, combien de temps ils comptent dormir, ces gamins ? marmonna-t-il.
Comme s'il avait invoqué l'un d'eux, Dean apparut dans l'encadrement de la porte, vêtu d'un tee-shirt froissé et d'un pantalon de pyjama. Ses cheveux étaient en bataille et ses paupières mi-closes trahissaient son manque de sommeil.
— Qu'est-ce qui sent aussi bon ?
— Le petit-déj', idiot. Assieds-toi et bois ça avant de poser des questions, dit Bobby en lui tendant une tasse.
Dean la prit sans protester et s'assit lourdement. Il humecta ses lèvres en voyant les croissants, légèrement dorés, prêts à être dévorés.
— T'es un saint, Bobby.
— Ouais, ouais. Mange avant que ça refroidisse.
Quelques minutes plus tard, Sam fit son apparition, suivi de Kevin, qui bailla bruyamment avant de se laisser tomber sur une chaise. Tous deux murmurèrent un remerciement à Bobby en voyant la table bien remplie.
Mais Dean ne pouvait pas se concentrer entièrement sur son assiette. Son regard se posait sans cesse sur la porte du couloir, attendant l'apparition d'une silhouette bien particulière.
Finalement, Castiel fit son entrée, visiblement fatigué. Son teint était encore plus pâle que d'habitude, ses yeux cernés de bleus. Il cligna des yeux en percevant l'odeur du repas, visiblement surpris. Bobby haussa un sourcil.
— Tu comptes rester là planté comme un piquet ou tu vas venir t'asseoir ?
Castiel cligna des yeux, avant de s'avancer lentement vers la table. Dean le suivit du regard, scrutant ses moindres gestes. Il avait l'air épuisé, mais il était debout, c'était déjà ça.
— J'ai préparé du café et de la bouffe. T'as intérêt à en avaler, lui dit Bobby en lui déposant une assiette.
Castiel fixa la nourriture devant lui. Depuis qu'il avait perdu sa grâce, le fait de devoir manger restait une habitude difficile à intégrer. Pourtant, il savait que son corps en avait besoin. Il prit donc un croissant entre ses doigts et en déchira un morceau avant de le porter à sa bouche.
Dean, lui, ne cessait de l'observer. Il attendait de voir si Cas allait lui parler de la veille, s'il allait essayer de se justifier ou de prétendre que tout allait bien.
Finalement, Castiel posa son regard sur lui. Ce dernier n'était ni fuyant ni rempli de honte. Juste une détermination tranquille, comme s'il savait déjà ce que Dean voulait lui dire.
— On parlera après le petit-déjeuner, souffla Castiel.
Dean haussa un sourcil, surpris par l'initiative, mais hocha la tête.
— D'accord, mon ange.
Castiel cligna des yeux à l'entente du surnom, mais ne dit rien. Il se contenta de reprendre un autre morceau de croissant, sous le regard discret mais attentif de Dean.
Sam et Kevin, eux, relevèrent la tête en même temps, interloqués.
— "Mon ange" ? répéta Kevin, les sourcils haussés.
— T'appelles Castiel comme ça, maintenant ? ajouta Sam en fixant son frère.
Dean leur lança un regard en coin tout en mâchant son bacon, l'air de dire "et alors ?".
— Ouais, et alors ? répliqua-t-il finalement en haussant les épaules.
Kevin ouvrit la bouche, puis la referma sans trouver quoi répondre. Sam, lui, secoua lentement la tête avant de reprendre une gorgée de café, clairement intrigué mais préférant ne pas insister.
Bobby, en revanche, ne semblait pas du tout surpris. Il se contenta de lever les yeux au ciel avant de retourner s'occuper du café.
— Bande d'idiots, marmonna-t-il pour lui-même.
Dean ignora les regards curieux et reporta son attention sur Castiel. Ce dernier, après un instant d'hésitation, attrapa enfin sa tasse de café et en but une gorgée. Il n'était peut-être plus un ange, mais au moins, il faisait encore partie de cette famille déglinguée.