Chapitre 24 : Compte à rebours.
RAR :
Lassa : Hé hé. Voui. Merci !
Titre du 20/08/2021 : Compte à rebours
Sagittaire : Tyrion Lannister (GOT)
B : Brienne de Tarth
Ça allait être un désastre.
Non, vraiment, Tyrion ne voyait aucune autre manière dont cette journée pouvait se terminer.
Il allait devoir faire un discours, parler devant toute la cour, parler devant le roi, la reine, et une foule de gens qu'il n'avait pas le moins du monde envie de voir.
Il se souvenait de son procès, et si il se rappelait principalement des trahisons de Varys et de Shae, il n'avait surtout jamais oublié que personne dans l'assemblée n'avait bougé alors qu'on le condamnait pour un crime qu'il n'avait pas commis.
Personne ne l'avait aidé, personne n'avait plaidé sa cause, personne ne l'avait défendu, personne n'avait cru un seul instant qu'il pourrait être innocent.
Il avait sauvé ces gens, il les avait tous sauvés, et pourtant, ça n'avait pas compté.
Il avait risqué sa vie pour eux, et pourtant, malgré tous ses efforts, ça n'avait pas été suffisant.
À croire que ça ne le serait jamais.
Méritaient-ils réellement qu'il se batte pour eux à nouveau, méritaient-ils véritablement d'être sauvés de la ruine et de la destruction ?
C'était une question à laquelle Tyrion craignait de trouver la réponse, parce qu'elle risquait d'être un peu trop déplaisante à entendre.
Et oh comme il était magnifiquement ironique qu'il repense à la bataille de la Néra alors là même qu'il amenait à Port-Réal celui qui en avait été la cause autrefois.
Il espérait juste que cette fois-ci, Stannis et lui seraient dans le même camp et n'auraient pas à s'affronter à nouveau.
L'amertume l'envahit alors qu'il repensait à tout ce sang versé inutilement, à toutes ces vies perdus dans ce conflit pour le trône de fer, pour un trône qui ne serait bientôt plus utile à personne.
C'était principalement parce qu'il n'avait pas envie d'en repasser par là, parce qu'il savait qu'ils allaient bientôt probablement tous commencer à s'écharper les uns les autres, qu'il ne voulait pas faire ce discours.
Si l'Histoire devait inexorablement se répéter, pourquoi même essayer de sauver qui que ce soit ?
« Vous avez un air bien sombre lord Tyrion, lui lança Brienne, le sortant momentanément de ses pensées.
- Je ne vais même pas vous contredire Ser Brienne, à vrai dire, je n'ai aucune répartie spirituelle ou amusante qui me vienne à l'esprit là tout de suite.
Un léger sourire apparut sur le visage de la chevaleresse.
- Je peux comprendre pourquoi… Vous avez le trac ?
- Non. Je pense pouvoir affirmer que ce n'est pas cela le problème, parler en public n'a jamais été un problème pour moi, et si jamais ça a été le cas, ça ne l'est plus depuis longtemps… surtout quand les enjeux sont élevés comme ils le sont actuellement… Non le problème c'est que… J'ai le sentiment que tout cela ne servira absolument à rien.
Elle se tourna vers lui.
- Tyrion… Je ne peux pas vous promettre que tout se passera bien, mais… Je suis sure d'une chose… Vous allez y arriver. Vous savez parler aux gens, vous maniez les mots comme personne… Vous êtes noble et vous êtes influent.
- Je suis aussi un nain, et pour l'instant, dans cette version de l'histoire, ce que j'ai pu faire dans la guerre des cinq rois pour prouver ma valeur… ce n'est pas arrivé.
- Mais cela ne veut pas dire que vous êtes redevenu celui que vous étiez autrefois, vous savez que vous et moi, nous avons été tous les deux bien trop marqués par ce qui est arrivé pour que nous puissions être les mêmes personnes qu'il y a sept ans. Celles qui ignoraient tout ce qui allait se passer. Maintenant nous savons, et ça vaut quelque chose.
- Je suis le nain, le lutin, pourquoi diable m'écouteraient-ils ? Parce que je suis le frère de la reine ? Le frère du Régicide ? Le fils de Tywin Lannister ?
- Non. Ils vous écouteront parce que c'est ce que vous savez faire de mieux, convaincre les gens. Peut-être ne vous croiront-ils pas, mais à vous seul, vous pouvez changer les choses. Sans vous, la bataille de la Néra aurait été perdue, je le sais, j'en ai parlé avec lord Varys.
- Pour ce que ça m'a aidé de risquer ma vie pour cette bande d'ingrats, marmonna-t-il.
Une lueur de compréhension apparut dans les yeux de Brienne.
- Alors c'est pour ça ?
- La dernière fois, nous avons failli être anéantis parce que personne n'a écouté les avertissements de la garde de nuit… et j'ai peur que l'Histoire ne se répète. Que personne ne veuille nous écouter et qu'ils préfèrent détourner les yeux. J'ai aussi le sentiment… c'est affreux, et je le sais, mais j'ai parfois l'impression que ces gens ne méritent pas d'être sauvés… qu'ils ne méritent pas notre aide.
- C'est peut-être vrai, lui rétorqua Brienne, et le nain sursauta.
- Pardon ?
- Je suis bien moins naïve qu'autrefois, je sais que les monstres existent, je sais dans quel monde nous vivons, et je sais aussi qu'il y a des gens à Westeros qui ne méritent sans doute pas d'être sauvés… mais je sais également que les innocents existent, et que si nous devons anéantir les marcheurs blancs et sauver la vie du plus de monde possible, c'est parce que c'est la bonne chose à faire. Et je pense que vous le savez aussi.
Tyrion acquiesça.
- Robert m'enverra promener, et il ne croira pas un mot de ce que je dirai, à moins d'avoir une preuve, ça, c'est certain… Jon Arryn en revanche… Peut-être doutera-t-il, peut-être se posera-t-il des questions, et peut-être parviendra-t-il à faire entendre raison à ce cerf entêté.
- Cela fait beaucoup de peut-être, lui fit remarquer la blonde.
- Et trop peu de certitudes, approuva-t-il en soupirant. Malheureusement, c'est tout ce que nous avons pour l'instant… Et je ne peux pas y changer grand-chose.
- Qui pensez-vous convaincre ? Avant d'avoir à aller dans le Nord et au-delà du Mur je veux dire.
- Je n'en sais rien, avoua-t-il. Peut-être des Nordiens, mais ils sont rares à la cour, encore que, même Ned Stark ne croyait pas au retour des marcheurs blancs si je me souviens bien de ce que son fils Bran m'a dit, grimaça-t-il. Jaime peut-être, ou du moins il sait que j'y crois sincèrement. Pour ce qui est de Cersei et de Joffrey, je n'espère rien, quant à Tommen et Myrcella, même si ils y croyaient, ils n'ont malheureusement pas d'influence pour l'instant…
- Autrement dit, personne ?
- Je le crains, oui… Comment savoir ? Les gens sont si imprévisibles… Je ne vois que Jon Arryn pour avoir assez de bon sens pour prendre la menace au sérieux. Et au moins essayer d'obtenir des renseignements à ce sujet.
- Autrement dit, nous devons tout faire pour empêcher sa mort.
- C'est exact. À moins que Bran Stark ne parvienne à convaincre son père et que ce dernier se comporte moins stupidement que la dernière fois. Stannis y croira peut-être, mais il n'est pas roi contrairement à Robert, et les gens ne l'aiment pas comme ils aiment Renly…
- Mais nous nous savons. Et il n'est pas encore trop tard, nous devons juste…
- Aller au Mur, oui… J'ai hâte d'aller m'y geler les miches, ça va être merveilleux d'y retourner, ironisa le lion, tandis que Brienne se mettait à nouveau à sourire.
- Vous y arriverez Tyrion. Je crois en vous. »
Et par les Sept, il avait tellement envie qu'elle ne se trompe pas à ce sujet.
§§§§
Ce n'était pas la première fois qu'il retournait dans la salle du Trône, mais en revanche, c'était la toute première fois depuis son retour dans cette réalité qu'il avait l'impression que l'ambiance qui y régnait ressemblait à s'y méprendre à celle qu'il y avait lorsque son procès s'était tenu.
À la différence que bien sûr, cette fois-ci, aucune condamnation à mort ne l'attendait à la fin.
Il leva les yeux vers le trône de fer, y vit Robert Baratheon, et ne put s'empêcher de se dire qu'il n'était pas certain d'avoir gagné au change finalement.
Certes, aujourd'hui ce n'était pas son père qui le scrutait avec froideur, haine et mépris, et cette fois il ne mettait pas sa vie en jeu, mais Robert sur le trône, en plus de ne pas être une bonne chose en soit, cela signifiait aussi que Joffrey était vivant.
Et il y avait beaucoup de choses provenant du futur qu'il voulait pouvoir changer, mais la mort de son vicieux de neveu n'était définitivement pas l'une d'entre elles.
Au moins, se consola-t-il, ce n'était pas le blond insupportable qui était actuellement sur le trône.
C'était déjà ça.
Il n'aimait pas Robert, et Robert ne l'aimait pas non plus, mais au moins, le royaume était en paix et pas à feu et à sang.
Pas encore en tout cas…
Il prit une profonde inspiration.
Joffrey était là, bien entendu, et il dut retenir tout son être qui ne rêvait que d'une seule chose, pouvoir l'étrangler, il y avait Cersei aussi, ainsi que Jaime, et ce fut sur lui qu'il se concentra, ainsi que sur Tommen et Myrcella.
Eux l'aimaient, il le savait, ils étaient sa famille, et ils méritaient d'être sauvés.
Brienne lui envoya un sourire d'encouragement, de même que Shireen, tandis que Stannis, lui, restait complètement imperturbable, comme à son habitude et alors qu'il regardait autour de lui, il se figea en tombant sur Petyr Baelish, en grande discussion avec Lysa Arryn.
Comment avait-il pu ne rien voir venir à l'époque, il se le demanderait toujours, peut-être qu'une part de lui savait que Littlefinger et la Tully avaient une aventure ensemble (après tout, il était si évident qu'elle était amoureuse de lui), mais il n'avait jamais réalisé à l'époque à quel point le geai moqueur pouvait être dangereux.
Comme quoi, les oiseaux eux aussi pouvaient faire mal.
Ou plutôt, il le savait, mais il n'avait jamais imaginé à quel point, et encore moins ce qu'il était prêt à faire pour pouvoir arriver à ses fins.
Il ne referait plus jamais la même erreur.
« Bien, fit Jon Arryn, lord Tyrion, nous vous écoutons.
Tandis que Robert, lui, semblait s'ennuyer comme un rat mort, et ne faisait même pas d'effort pour le cacher, et bordel de Dieu, par les Sept, après six ans sans le côtoyer, le nain avait fini par oublier à quel point le cerf pouvait être insupportable.
Et il n'avait encore pas dit un seul mot !
Comment Cersei avait-elle fait pour le supporter pendant aussi longtemps, de même que Stannis, et Lancel, pour ne citer qu'eux ?
Là tout de suite, il les admirait sincèrement, et il dut se rappeler que au moins, Robert n'était pas un roi fou lui contrairement à son soit-disant fils…
- Votre majesté, seigneur main, mesdames et messieurs, je vais être bref… Notre monde est en grand péril, et ce à cause d'un ennemi qui s'apprête à refaire surface et qui risque bien de tous nous anéantir si nous ne faisons rien pour l'arrêter… Les marcheurs blancs. »
Les premiers rires commencèrent à résonner dans la salle du trône, et Tyrion n'en fut même pas surpris.
Lui aussi aurait sûrement ri à l'époque, il le reconnaissait aisément, mais aujourd'hui, ici et maintenant, alors qu'il se souvenait du Mur qui était tombé, et du froid glacial qui avait envahi chacun de ses os alors qu'ils faisaient tous face à la menace de l'hiver éternel, il n'avait pas la moindre envie de rire, bien au contraire.
Non, il voulait hurler, leur dire qu'ils avaient tort, tous tort, eux, se croyant à l'abri, bien au chaud dans leurs riches et luxueuses bâtisses, eux qui croyaient que l'hiver ne viendrait jamais pour eux, et que l'été durerait éternellement.
Hé bien ils se trompaient lourdement, l'hiver venait, là-dessus, les Stark avaient eu raison, ils avaient toujours eu raison.
Si Jon Arryn restait sérieux, Robert, lui, ne se privait pas pour rire aux éclats, Stannis restait grave comme toujours (mais à vrai dire, Tyrion n'était pas vraiment sûr qu'il soit capable de rire), et ceux qui savaient gardèrent la même expression.
Il vit Cersei froncer les sourcils, perplexe, et il eut du mal à déterminer si c'était parce qu'elle considérait sérieusement la menace ou parce qu'elle ne comprenait pas ce qu'il entendait par là.
Et il la comprenait, c'était de la folie après tout.
Écoute-moi je t'en supplie, voulu-t-il l'implorer, alors qu'il sentait le désespoir l'envahir de plus belle, s'il te plaît, par pitié, par les Sept, Cersei, pour une fois dans ta putain de foutue vie, écoute-moi !
La dernière fois, ça n'avait pas marché, et elle les avait tous laissés à leur mort, elle les avait abandonnés, elle les avait laissés tomber, et Jaime était mort.
Il avait envie de croire que cette fois-ci, peut-être, les choses seraient différentes, que cette fois, elle l'écouterait.
Mais il avait aussi cru à une époque qu'elle pourrait peut-être l'aimer un jour, et ce n'était jamais arrivé, alors à quoi bon espérer ?
À quoi bon croire en l'impossible ?
Il se força à sourire, parce qu'il n'avait pas le droit de pleurer, il ne pouvait pas s'effondrer, pas encore.
Il n'était pas temps.
« Oui, je sais ce que vous devez actuellement vous dire, dit-il en feignant l'amusement, et il jouait si bien la comédie qu'il parvint presque à se convaincre lui-même, mais comment, de quoi nous parle-t-il, les marcheurs blancs ? Mais comment cela serait-il possible, aurait-il perdu la raison, lui qui avait déjà si peu pour lui avant ? Comment, des marcheurs blancs et après quoi, va-t-il nous annoncer le retour des dragons aussi ?
Les rires continuèrent de plus belle, et il cacha son cynisme derrière un sourire faussement amusé.
Oh, si ils savaient, se dit-il en repensant à Rhaegal, Viserion et Drogon, qui n'étaient pas encore nés à l'heure actuelle.
Une farce…
Ils pensaient tous qu'il ne s'agissait que d'une simple farce…
Son sourire se crispa, et il le força à nouveau, au point de risquer de se faire mal.
Les rires ne se taisaient toujours pas, et il sentit quelque chose monter en lui pour risquer ensuite d'exploser.
- Silence ! Tonna-t-il alors, laissant son sourire enfin disparaître, et alors que tous se taisaient, guère habitués à ce qu'il explose de cette manière, il les regarda avec tout le sérieux du monde. Sachez, poursuivit-il, que je suis totalement sérieux et que je ne dis que la stricte vérité.
- Les marcheurs blancs ont disparu il y a des siècles, lui rétorqua alors Robert, semblant enfin prendre tout cela au sérieux. Et quant bien même, le Mur et la garde de nuit sont là pour nous protéger.
- Il est vrai, votre majesté, mais la garde de nuit n'est plus que l'ombre d'elle-même, lui répondit Tyrion, elle est exsangue, manque de soldats et appelle à l'aide depuis déjà des années ! Et personne ne l'a jamais écouté !
- Si cela te tient tant que cela à cœur petit frère, tu n'as qu'à aller la rejoindre, cette Garde de nuit que tu chéris tant, ne put s'empêcher d'ironiser Cersei.
Nouveaux éclats de rire.
Tyrion encaissa la pique sans broncher, il avait l'habitude avec elle à force.
- Je suis navré chère sœur, mais j'aime bien trop la vie que je mène actuellement pour vouloir l'abandonner, tu devras donc supporter ma présence à tes côtés durant, je l'espère, encore un grand nombre d'années. Ce que je veux est très simple… J'ai bien conscience que je n'ai absolument aucune crédibilité pour ce qui est de prouver ce que j'avance… En revanche… je sais que plusieurs personnes se sont renseignées dernièrement sur les propriétés du verredragon, et il s'agit d'une des armes permettant de tuer des marcheurs blancs.
- Et alors ? Lui répondit le roi.
Tyrion se retint de lever les yeux au ciel.
Ça non plus ça ne lui avait pas manqué, les intrigues de cour, les manigances, oh, il aimait cela, mais pas lorsque le temps pressait comme ça.
Pas alors que le compte à rebours avait déjà commencé, et les narguait en permanence.
- Alors cela veut dire que les gens commencent à se poser des questions… Et je voudrais être envoyé dans le Nord, au Mur, accompagné d'autres personnes, afin d'aller voir par moi-même ce qu'il s'y passe… et passer par Winterfell afin de leur faire passer le message.
Oh entre la présence de Theon Greyjoy et de Bran Stark, ils devaient déjà l'avoir depuis longtemps.
Robert n'eut à discuter que quelques secondes avec Jon Arryn pour prendre sa décision, et Tyrion savait qu'elle serait facile à prendre.
Il n'avait rien à perdre et tout à gagner, et ainsi, il pouvait éloigner loin de lui un des Lannister, lui qui détestait tant les lions.
- Accordé, brama-t-il, et Tyrion soupira de soulagement. »
Le mois de trajet vers Winterfell allait être terriblement long.
A suivre…
