Je ne possède aucun des personnages des films ou des livres.

Un recueil de textes courts sur l'univers de Tolkien et de la Terre du Milieu nous plongeant dans un instant ou une pensée des protagonistes de l'histoire.

Ce texte a été écrit pour l'anniversaire de Hugo Weaving

En espérant que cela vous plaise

Bonne lecture

PS : Au fait j'ai commencé à faire du tri et à remettre de l'ordre dans mes publications en faisant une sorte de table des matières dans mon profil alors n'hésitez pas à y faire un tour ;)


La douleur de Lindir

Lindir se tenait droit dans la grande salle de Fondcombe, son regard posé sur les elfes rassemblés pour le repas du soir. Les lumières douces des chandeliers dansaient sur les murs de pierre, tandis que l'odeur du pain frais et des herbes parfumées emplissait l'air. Il serrait son luth entre ses mains, essayant de se concentrer sur les notes qu'il devait jouer. Mais depuis quelques heures, une douleur sourde s'éveillait dans son épaule gauche, une ancienne blessure qui, bien qu'oubliée la plupart du temps, semblait aujourd'hui renaître avec une violence qu'il n'avait pas anticipée.

Son bras gauche lui paraissait lourd, chaque mouvement lui coûtait plus d'effort que d'ordinaire. Pourtant, Lindir se forçait à sourire, à ignorer les élancements qui montaient le long de son épaule jusque dans son cou. Il était un elfe musicien, après tout, et son rôle était d'apporter sérénité et douceur à ceux qui l'entouraient. Il ne pouvait pas se permettre de céder à la douleur ; mais lorsqu'il tenta de placer ses doigts sur les cordes pour commencer à jouer, une vague de souffrance lui traversa l'épaule, irradiant jusqu'à ses doigts. Il vacilla légèrement, ses genoux faillirent fléchir, mais il se reprit rapidement, clignant des yeux pour chasser les points noirs qui dansaient devant sa vision.

Elrond, assis à la tête de la table, lui parlait. Les mots parvenaient jusqu'à lui comme un écho lointain, et bien qu'il essayât de tendre l'oreille, la douleur était devenue si intense qu'elle couvrait presque tout le reste. Il savait qu'il devrait répondre à son seigneur, mais sa bouche resta close, incapable de former une réponse cohérente.

- Est-ce que tout va bien, Lindir ? Demanda Elrond, ses yeux perçants scrutant le visage du musicien.

Lindir hocha faiblement la tête, luttant pour conserver une apparence de calme. Il inspira profondément et commença à jouer quelques notes, chacune d'entre elles comme une lutte contre la douleur qui gagnait du terrain. Il sentit son épaule se contracter, son bras devenir raide. Pourtant, il continua de jouer, les sons qu'il produisait devenant mécaniques, vides de l'âme qu'il y mettait habituellement.

Après quelques minutes, il posa délicatement le luth, sa main gauche tremblante comme une feuille au vent. La douleur était devenue insupportable. Il ne pouvait plus ignorer les élancements qui se répandaient maintenant dans tout son corps, comme si chaque mouvement, chaque souffle réveillait un mal profond et ancien. S'excusant à voix basse, il quitta la salle de banquet d'un pas précipité. À peine avait-il franchi les portes que la douleur explosa. Il se plia en deux, une main pressée contre son épaule gauche, luttant pour ne pas crier. Il savait exactement ce qui se passait. Cette blessure, infligée par une lame orque empoisonnée des siècles plus tôt, n'avait jamais complètement guéri et maintenant, comme un mal insidieux, elle se réveillait.

Lindir atteignit son appartement en titubant, sa vision se brouillant davantage à chaque pas. Il sentit la sueur perler sur son front, et ses jambes se dérobaient sous lui. Il parvint à refermer la porte derrière lui avant de tomber à genoux, haletant, son épaule en feu. Il tâcha d'atteindre son lit, mais avant même de pouvoir s'allonger, un spasme violent le secoua. Sa main tremblait si fort qu'il ne parvenait plus à l'arrêter. Il se sentait faiblir rapidement. Ses pensées se désorganisaient, et un froid glacial envahissait lentement son corps. Il était de nouveau là-bas, dans ce champ de bataille, entouré des cris et des hurlements des orcs. Il pouvait sentir à nouveau la lame empoisonnée pénétrer sa chair, tournant dans la plaie comme si le temps s'était figé à cet instant maudit.

La douleur était si atroce qu'il ne pouvait plus bouger. Ses forces l'abandonnaient, et il savait qu'il était à deux doigts de perdre connaissance. Il entendit des bruits de pas dans le couloir, quelqu'un approchait, mais le voile noir s'épaississait devant ses yeux. La porte s'ouvrit brusquement. Elrond se précipita dans la pièce.

- Lindir… appela-t-il, sa voix empreinte d'une urgence inhabituelle.

Il s'agenouilla auprès du musicien, posant délicatement une main sur sa taille pour le soutenir. Lindir ne répondit pas, son corps tremblant de manière incontrôlable, ses yeux à moitié fermés, fixant un point invisible devant lui.

- Je suis là, murmura Elrond, attrapant doucement Lindir pour le redresser et l'allonger sur le lit. Tout ira bien.

Toutefois, quand il défit la tunique de Lindir pour examiner son épaule, un frisson glacé parcourut le Seigneur de Fondcombe. La peau autour de la blessure, qui autrefois n'était qu'une cicatrice pâle, était devenue noire, comme si le poison d'autrefois avait ressurgi. Les veines autour de l'épaule se teintaient d'un noir profond, s'étendant lentement vers son cœur, un réseau de corruption s'étalant sous la peau pâle de l'elfe.

Le souffle de Lindir était faible, à peine perceptible. Elrond comprit rapidement qu'il s'agissait d'un sortilège ancien et puissant, un mal insidieux que même les herbes curatives ne pourraient traiter à elles seules. Le cœur de Lindir battait irrégulièrement, et Elrond savait que le poison qui circulait dans son sang était bien plus mortel qu'il ne l'avait cru.

- Je ne te laisserai pas mourir, murmura Elrond avec détermination.

Il posa une main ferme sur la poitrine de Lindir, puis ferma les yeux, appelant à lui des incantations qu'il n'avait pas prononcées depuis des siècles. C'était une ancienne magie, transmise à lui par les plus grands guérisseurs de l'ancienne époque, mais même elle pourrait ne pas suffire contre un poison aussi perfide.

Alors qu'il récitait les paroles sacrées, une lueur blanche commença à émaner de sa main, s'infiltrant dans la peau de Lindir, cherchant à contrer le mal qui le rongeait. Le visage de Lindir se tordit sous la douleur, mais il resta inconscient, emporté dans un sommeil fiévreux.

Le processus dura toute la nuit. Elrond, concentré et inébranlable, maintint la lueur de guérison jusqu'au matin. Le soleil se levait à peine lorsque la couleur des veines de Lindir commença à redevenir normale, lentement mais sûrement. Lorsque tout fut enfin terminé, le seigneur de Fondcombe, épuisé mais soulagé, s'assit lourdement à côté du lit. Son ami respirait de nouveau plus régulièrement, son visage détendu malgré la pâleur qui marquait ses traits.

Lindir était encore en vie, sauvé de justesse, mais Elrond savait que cette blessure ne disparaîtrait jamais complètement. Elle était le témoignage d'un passé sombre, d'une bataille ancienne contre les orcs et d'une magie noire qui refusait de mourir, alors il resterait auprès de lui, veillant sur son rétablissement, tout en sachant que ce genre de malédiction ne se dissipait jamais totalement.