L'Empereur ne faisait rien à la légère. Chaque action, chaque décision, chaque détour dans la galaxie répondait à un calcul dont nul n'osait même essayer de saisir les ramifications.
Le transfert d'Illaoï vers son croiseur personnel n'échappa pas à cette règle.
Elle fut sortie du sarcophage de Kolto dans le plus grand secret, maintenue dans un coma profond, transférée dans un caisson blindé d'émeraude opaque. Les systèmes médicaux accompagnaient son souffle artificiel, les électrodes contrôlaient son rythme musculaire. Le vaisseau, baptisé Absolution, attendait au-dessus de Dromund Kaas, aussi silencieux qu'un cimetière orbital.
Scourge était du voyage.
Il n'avait pas contesté. Il n'en avait pas eu besoin. L'Empereur lui avait ordonné de superviser le rituel. Et Scourge, comme toujours, avait obéi.
Mais à présent, seul dans ses quartiers, ses mains croisées dans le dos, le regard fixe sur l'espace noir taché d'éclairs, il s'interrogeait. Depuis combien de temps son maître savait-il ? Depuis combien de temps soupçonnait il cette trahison longuement mûrie, celle qu'il fomentait depuis trois siècles ?
Était ce un piège subtil, une façon de sonder ses failles ? Ou n'était ce qu'un jeu d'esprit, destiné à maintenir la peur ?
Scourge enrageait intérieurement de ne pas savoir.
Mais ce qui l'agaçait encore plus, c'était cette attirance. Ce lien ténu avec l'étrangère. Cette sensation d'avoir laissé derrière lui quelque chose d'inachevé lorsqu'il était parti pour Quesh. Ces sensations revenaient à mesure qu'il se rapprochait d'elle. Elles n'étaient pas aussi fortes qu'avant, mais elles étaient là. Latentes. Et cela… l'agaçait profondément.
Il s'était toujours cru au-dessus de ces choses. Immortel, détaché, vidé.
Et pourtant.
Il revint à l'essentiel.
La mission.
Arrêter l'Empereur. Coûte que coûte. L'alliance avec le Jedi était la clef. Mais il fallait frapper au bon moment, pas trop tôt. L'échec serait irrémédiable. Le rituel visant à soumettre l'étrangère prendrait du temps… mais pas une éternité. Il ne pouvait pas agir seul. Il devait attendre.
Si seulement ce fichu Jedi pouvait réapparaître…
Comme si la pensée avait invoqué le destin, les alarmes hurlèrent.
Scourge releva la tête, les yeux plissés. Des sirènes rouges baignèrent le couloir d'une lumière sanglante.
— Intrusion détectée. Secteur 3. Hangar C. Bataillon ennemi à bord.
Il n'avait pas besoin de plus d'informations.
Le Jedi était là.
Avec lui, son équipage, et des membres du Conseil Jedi. L'attaque était en cours. Le destin se précipitait, comme une marée déchaînée.
Et Scourge ne savait pas s'il devait s'en réjouir… ou paniquer.
Était-il prêt ?
Connaissait-il seulement l'ampleur du pouvoir de l'Empereur ?
Ou tout cela allait-il s'achever dans le sang et l'oubli ?
Pas le temps de réfléchir davantage.
Il se mit en route. Il devait être là. Aux côtés de l'Empereur. Comme l'ombre fidèle qu'il était censée être.
Les portes s'ouvraient devant lui à chaque pas. Il traversait les ponts et les couloirs comme un projectile. Des soldats furent projetés contre les murs, des techniciens piétinés, sans qu'il ne s'arrête ni ne ralentisse.
Puis. Un souffle. Un murmure. Faible et Lointain.
— Le moment n'est pas encore venu...
Il s'arrêta. Juste une seconde. Son cœur – ou ce qu'il en restait – sembla suspendu dans l'écho.
Elle. Elle l'avait senti. Et elle le savait.
