Le couloir central menant à la salle du trône du croiseur Absolution résonnait des pas déterminés des Jedi.
Loewen en tête, suivi de Maîtres expérimentés, des figures fortes du Conseil Jedi venues de leur plein gré, conscientes du risque. Ils avançaient en silence, les sabres à la main, les regards fermes.
L'équipage restait en retrait, dans les hangars arrière. Kira, Doc, Rusk, T7 — tous prêts à fuir ou à extraire les blessés si la situation tournait mal. Mais sous aucun prétexte ils ne devaient intervenir. Pas sans ordre.
La lourde porte noire s'ouvrit dans un souffle presque cérémoniel.
Ils entrèrent.
Le trône était là, massif, obsidienne brute et symboles anciens. L'Empereur s'y tenait, impassible. Devant lui, en chien de garde silencieux, le Seigneur Scourge.
— Empereur Vitiate, lança Tol Braga d'une voix claire, vous êtes en état d'arrestation pour crimes contre la galaxie. Rendez-vous sans résistance.
Le silence dura une longue seconde.
Puis l'Empereur sourit.
Un rictus presque… amusé. Un rire profond, calme, presque paternel. Mais glacial. Déshumanisé.
Et l'instant suivant, le monde explosa.
Des éclairs jaillirent. Une marée d'énergie pure. La vague s'abattit sur les Jedi, les projetant à terre. Certains furent assommés sur le coup. D'autres hurlèrent, submergés.
Loewen, encore debout, sentit l'ampleur de la force en face. Et comprit.
Ils avaient fait une erreur.
Grave. Irraisonnée. Aveuglée par l'espoir, la croyance naïve que l'Empereur était un tyran parmi d'autres, que leur nombre, leur union, suffiraient.
Mais il n'était pas un homme. C'était un gouffre.
Un puits sans fond. Et ils y tombaient tous.
Le désespoir gronda dans son esprit. Mais il le repoussa.
Il inspira. Se recentra. Ferma les yeux.
La peur mène au doute. Le doute mène à l'échec.
Il ouvrit les yeux, auréolé d'une lumière vive, presque tangible. Et se rua à l'assaut.
Scourge se dressa.
Les sabres s'entrechoquèrent. Pas dans une déflagration anarchique, mais dans un ballet parfaitement orchestré, chaque coup parant l'autre dans une suite de mouvements presque trop harmonieuse pour un champ de bataille.
Scourge avançait comme une marée noire, sa stature colossale ne ralentissant en rien la rapidité de ses enchaînements. Il alternait les frappes circulaires, imprévisibles, d'une précision millimétrée, martelant avec une puissance brute nourrie par des siècles de combats. À chaque mouvement, la Force vibrait autour de lui comme un écho furieux.
Loewen, quant à lui, esquivait, pivotait, s'enroulait autour des attaques comme une liane en pleine tempête. Son style était souple mais rigoureux, une discipline née de longues heures de méditation et de pratique. Il ne se laissait jamais entraîner par la colère ou la panique, et sa concentration était telle que chaque geste semblait prévu une seconde à l'avance.
Leurs sabres traçaient dans l'air des lignes de lumière, rouge et bleu se mêlant dans un crépitement incessant. Ils tournoyaient l'un autour de l'autre, dans une spirale de violence contenue. Les pas martelaient le sol, les murs vibraient. Le trône derrière eux restait figé, témoin silencieux de la danse.
Chacun d'eux pensait, entre deux parades, à la rareté d'un tel affrontement.
Scourge, malgré lui, ressentait un frisson qu'il n'avait pas connu depuis une éternité : le plaisir d'un adversaire digne.
Loewen, dans sa concentration la plus pure, ne pouvait s'empêcher de reconnaître la grandeur du monstre devant lui : un mur de technique, d'expérience, et de rage parfaitement domptée.
Et pourtant, ni l'un ni l'autre ne dominait. Ils étaient comme deux versants d'une même montagne. La lumière contre l'ombre. Le mouvement contre la masse. Le souffle contre le roc. L'affrontement ne trouvait aucun point d'équilibre, aucune faille durable.
Et s'il n'y avait eu autour d'eux que silence et ciel clair, cela aurait pu ressembler à une forme d'art. Une danse brutale, magnifique dans sa sauvagerie, presque poétique dans l'équilibre instable qu'elle trouvait à chaque seconde.
Jusqu'à ce qu'enfin…
Une faille.
Le sabre de Loewen entailla profondément le bras droit de Scourge. La lame écarlate tomba au sol. Le bras pendait, inerte. Nerfs sectionnés.
Scourge, toujours impassible, recula.
Il savait qu'il guérirait. Mais pas tout de suite.
Et, dans un éclair de lucidité, il se dit que peut-être… l'heure était enfin venue.
Loewen bondit, accompagné de Tol Braga et Kiwix, sabres levés vers l'Empereur.
Mais il n'y eut aucune rencontre.
Le monde sembla ralentir. L'air se contracta.
Et tout s'effondra.
Une pensée.
Une infliction dans la Force.
Les trois Jedi furent projetés au sol, évanouis. L'Empereur entra dans leur esprit comme un ver dans une pomme mûre. Il les plia, les tordit, les imprégna de sa volonté.
Scourge s'agenouilla.
— Maître. Pardonne ma faiblesse. Votre victoire est totale.
Il ne montra rien. Pas le trouble. Pas la fatigue. Pas la honte brûlante. Pas le vide.
Il se leva, quitta la salle.
Son bras se régénérait lentement. Il lui faudrait plusieurs jours. Peut-être moins. Ce n'était pas ce qui l'inquiétait.
Les corps des soldats Jedi encore inconscients furent exécutés sans cérémonie.
Les Maîtres survivants furent emportés dans les recoins du croiseur.
Non pas pour être tués.
Mais pour être convertis. Et servir l'Empereur. À jamais.
