Parfois, tout se résume à un geste fou. Une étincelle qui met le feu aux poudres. Trop d'attente, trop de frustration contenue depuis des siècles — sans même la grâce de la ressentir pleinement pour pouvoir la libérer.
Scourge savait. Il n'y aurait plus de retour possible. Pas de rédemption impériale. Pas de porte de sortie. Il serait un traître, un paria, une cible vivante pour toutes les bêtes féroces du trône noir. Qu'ils viennent. Qu'ils osent. Il les attendrait.
L'idée d'une retraite paisible ne l'avait jamais effleuré.
Et maintenant ? Même pas en rêve.
Il traversa les couloirs comme un typhon silencieux. L'Absolution dormait. Son équipage ronflait dans les berths. Les systèmes tournaient en mode nocturne, les lumières atténuées, les gardes peu attentifs, confiants dans la routine de leur propre domination.
Erreur fatale.
Il entra dans la cellule de Loewen. L'ancien Jedi ouvrit les yeux, lentement. Son regard n'était plus aussi vide qu'avant. Un éclair y brillait. Fugace, mais là.
— Tu te souviens de moi ? demanda Scourge d'un ton égal.
Loewen ne répondit pas, mais hocha lentement la tête.
— Bien. Lève-toi. On a une guerre à finir.
Il n'attendit pas de réponse. Il enchaîna.
Une à une, il réveilla les âmes mortes. Tol Braga. Kiwix. Les chaînes mentales avaient été rongées de l'intérieur par une lumière persistante qu'Illaoï avait insufflée sans même qu'ils ne s'en aperçoivent. Un frémissement. Une faille. Et maintenant, Scourge n'avait qu'à frapper au bon endroit.
Ils n'étaient pas totalement guéris. Mais ils avaient le choix.
Et ça suffisait.
Quand tous furent réunis, armes en main, doutes au cœur mais résolution dans l'âme, il lança :
— Je sais que je ne suis pas en ode de sainteté parmi vous. J'ai tué des vôtres. J'ai servi votre cauchemar. Mais aujourd'hui, je suis votre unique chance de ne pas finir comme des trophées de laboratoire.
Silence tendu.
— Alors si quelqu'un veut me planter un sabre dans le dos, qu'il s'exécute maintenant. Sinon, suivez-moi.
Personne ne bougea.
— Parfait. Maintenant… offrons leur un souvenir inoubliable.
Et ce fut le chaos.
Scourge n'avançait pas. Il démolissait.
Les portes explosaient avant même que les alarmes ne se déclenchent. Les droïdes de sécurité furent démembrés, les officiers pulvérisés contre les murs. Il modifia les codes des sas, court-circuita les hyperpropulseurs, fit exploser trois générateurs secondaires pour faire diversion. Chaque salle traversée devenait un champ de ruines, une signature vivante de son passage.
Tol Braga et Kiwix menaient les Jedi revenus à eux dans une frappe coordonnée contre les laboratoires d'endoctrinement. Ils libérèrent des prisonniers. D'autres partisans de la République, oubliés là depuis trop longtemps.
Dans les hangars, les sirènes beuglaient, les klaxons hurlaient leur défaite. Des soldats tentaient de réagir. Trop tard.
Scourge s'approcha de Loewen.
— Il en manque une.
— Qui ?
— Viens.
Il s'élança dans les couloirs. Comme un fou furieux.
Ils descendirent vers les niveaux interdits. Là où le silence faisait office de murs.
La salle de stase était gardée. Mais mal et surtout, plus pour longtemps…
Scourge ne tua pas. Il anéantit. Il ne restait des soldats qu'une rumeur de douleur et de métal écrasé.
Loewen le regarda sans comprendre.
— Tu risques tout pour… elle ?
Scourge entra. Le cylindre de Kolto palpitait doucement.
— Ce n'est pas une question de sentiment. C'est une question d'équilibre.
Il ouvrit la cuve.
Elle glissa dans ses bras, inconsciente. Le souffle si faible qu'il crut un instant qu'il arrivait trop tard.
Mais non. Elle vivait. Juste assez.
Ils remontèrent. La jeune femme dans les bras de Scourge, une fureur glaciale dans ses yeux. Loewen couvrait ses flancs.
Les Jedi tenaient le vaisseau. Ils l'attendaient.
— On décolle ! hurla-t-il en chargeant dans le vaisseau annexe.
Une, deux, trois secondes...
Puis ils passèrent en hyperespace.
Et au moment précis où les étoiles s'étirèrent en lignes de lumière, la galaxie hurla.
L'Empereur sentit leur fuite. Une déflagration de rage traversa le vide, un cri mental si violent que les parois du vaisseau gémirent. Mais il ne les rattraperait pas. Pas ce soir.
Scourge ferma les yeux.
Et enfin, après trois cents ans… il sourit.
— Direction… n'importe où. Tant que ce n'est plus ici.
