Le Grand Conseil de Tython s'était réuni en session restreinte dans la haute salle de la Citadelle. Une lumière douce filtrait à travers les vitraux, dessinant des ombres colorées sur le sol en pierre polie. C'était un lieu ancien, empreint de sagesse, de silence… et aujourd'hui, de tension contenue.

Illaoï s'y tenait, droite, vêtue d'une tenue sobre, ses cheveux relevés, ses yeux clairs levés vers les Maîtres Jedi qui la scrutaient du haut de leurs sièges circulaires. Satele Shan siégeait en son centre, le regard perçant mais juste.

— Nous vous devons notre gratitude, dit Satele calmement. Sans vous, je doute que nos esprits auraient retrouvé leur clarté. Nous n'avons pas l'habitude de devoir notre liberté à quelqu'un qui vient de si loin… et dont nous savons si peu.

— Je comprends, répondit Illaoï avec un calme absolu. Et je ne suis pas là pour être jugée. Mais je répondrai à ce que je peux.

Dans l'ombre d'un coin reculé de la salle, une tentative d'observation mentale effleura l'espace autour d'elle. Une présence massive, familière, aux angles de l'esprit affûtés et impatients. Scourge. Il cherchait à écouter. À sonder. À comprendre.

Et se heurta à un mur de glace.

Littéralement.

Un souffle glacial claqua dans sa conscience comme une gifle invisible. Le lien se referma. Il n'avait même pas eu le temps d'entrevoir quoi que ce soit. Rien. Le silence. Absolu.

Dans la salle, Illaoï n'avait même cillé. Mais un coin de sa bouche s'était imperceptiblement étiré. Privé, ça veut dire privé.

Les questions vinrent, claires, méthodiques. Et à chacune, elle choisit ce qu'elle livrerait.

Son nom. Illaoï.

Son âge. Environ vingt-huit cycles galactiques standard.

Son origine. Une autre galaxie, une planète oubliée, que personne ici ne connaissait.

Des dons similaires parmi les siens ? Oui. Elle n'en dit pas plus.

Depuis combien de temps était-elle ici ? Une décennie, environ.

Pourquoi ?

— Pour réparer mes erreurs passées. Et poser sur le monde un regard sans haine.

Des regrets ?

— Un seul.

Elle ne précisa rien de plus. Le ton neutre, laissa place à un silence froid. Le doute flotta : était-ce une douleur ? Un remords ? Une perte ? Ou bien… une menace ?

Quand on évoqua l'assassinat d'un Seigneur Noir du Conseil Sith, elle haussa à peine les sourcils.

— La guérisseuse existe. Celle de l'ombre aussi. Les deux récits sont vrais.

— Pourquoi ce seigneur en particulier ? demanda un Maître. Il n'était pas le plus influent, mais son poste touchait à l'expansion galactique. Une cible curieuse…

— Peut-être, répondit-elle, peut-être pas. Le silence est parfois une réponse plus juste que le mensonge.

On lui demanda une démonstration. Un Maître blessé fut conduit à elle.

Elle posa les mains. L'eau afflua de l'air, douce, précise, vivante. La chair se referma. Mais au-delà des tissus… c'était l'âme qu'elle toucha. Une paix s'installa chez le Maître, profonde, ancienne. Il se redressa avec des larmes dans les yeux, incapable de prononcer un mot.

— Je n'ai pas d'armée, ni de sabre laser, ni d'allégeance. Mais j'ai mes dons. Et si votre but est la chute de l'Empereur, alors je vous suivrai. En tant qu'alliée. Rien de plus. Rien de moins.

Le Conseil débattit en silence après son départ.

Elle ne serait pas retenue. Mais elle serait surveillée.

Elle pourrait circuler librement, mais sous l'œil attentif de ceux qui savaient ce que le silence peut cacher. Loewen serait responsable d'elle… et aussi de Scourge. Deux autres Jedi seraient assignés à la tâche. Une garde légère, mais constante.

À l'annonce de cette décision, Scourge émit un son très proche du râle d'un rancor pris de migraine.

Illaoï, elle, sourit à peine. Avant de quitter la salle, elle s'inclina et dit :

— Je ne suis pas votre ennemie. Mais je ne partage pas vos dogmes. Je les respecterai. Comme on respecte ses hôtes.

Et la porte se referma derrière elle dans un murmure de Force.