Depuis leur départ de Tython, plusieurs jours s'étaient écoulés à bord du vaisseau, dans un calme presque étrange. Après le spectacle d'adieu au village Twi'lek, l'atmosphère avait changé. Illaoï, par sa grâce, sa chaleur et son étrange pouvoir de lier les cœurs sans avoir besoin de mots, avait su effacer les doutes les plus tenaces. Même le Conseil Jedi, pourtant connu pour sa prudence austère, avait laissé tomber une partie de sa méfiance.
À bord, chacun réagissait à sa présence à sa manière.
Kira, bien sûr, s'était imposée comme une tornade affectueuse et déchaînée. Illaoï, bien que discrète et peu habituée à une telle effusion, s'était laissée gagner par la joie simple de cette amitié sincère. L'ex-Sith était bruyante, excessive, parfois un peu trop… mais terriblement attachante. Et quand elle riait, on oubliait les guerres.
T7, lui, s'était littéralement transformé en fan inconditionnel. Il bippait, enregistrait, répertoriait. Il connaissait déjà les premières partitions jouées sur la harpe miniature et avait codé des tags pour ses mélodies préférées. Il lui collait aux roues — au grand dam de Doc.
Doc, justement, n'abandonnait pas. Il s'appliquait à chaque repas, chaque mission, chaque croisement dans un couloir pour tenter une phrase, un compliment, une petite remarque pleine de sous-entendus. Mais Illaoï, souriante et bienveillante, semblait ne tout simplement pas comprendre où il voulait en venir. Cela l'agaçait autant que ça le désarmait.
Loewen, lui, méditait. Beaucoup. Il méditait parce qu'il n'avait pas le choix. Parce qu'un gouffre s'était creusé en lui. Une faille. Une étrangère à la voix calme et au regard infini qui s'était installée dans ses pensées sans jamais vraiment en ressortir. Et s'il lui arrivait parfois de perdre de vue un padawan lors d'un entraînement, ou de détourner un instant son attention lors d'un briefing tactique… c'était uniquement pour vérifier, presque malgré lui, où elle se trouvait.
Ce n'était pas raisonnable. Ce n'était pas permis. Et pourtant…
Rusk, pour sa part, restait Rusk. Méthodique. Froid. Professionnel. Mais Illaoï avait pris un malin plaisir à discuter tactique avec lui. Des scénarios simulés, des hypothèses de sièges ou de guérilla. Et il dut bien admettre qu'elle possédait un esprit d'analyse redoutable. Leurs échanges étaient devenus fréquents, presque réguliers. Elle gagnait son respect. Et pas seulement celui du soldat.
Scourge, quant à lui, restait en retrait. Il n'y avait entre eux aucun mot. Peu de gestes. Mais ils partageaient un espace. Et c'est dans le silence que le Sith avait appris le plus.
Il la voyait. Les réveils agités. Les cauchemars muets. Les pleurs contenus. Les nuits passées à griffonner dans ses carnets, ou à contempler les étoiles sans un bruit. Elle dessinait tout. Tous. Et il avait découvert son propre visage sous le trait délicat et sûr de sa main. Un Scourge qu'il ne connaissait pas. Un Scourge vu autrement. Moins dur. Presque humain.
Et cela l'avait troublé.
Alors il avait entrepris sa propre enquête. Et, à force d'attention, il avait commencé à déceler des motifs, des répétitions, des racines communes dans son écriture inconnue. Il ne comprenait pas encore. Mais il en approchait.
Il s'était même permis… une alliance.
Un marché passé avec T7.
— Tu m'aides à comprendre ce qu'elle écrit, et je t'offre tout ce que je trouve sur elle. Vidéos. Sons. Images. Enregistrements. Marché équitable ?
Le petit droïde avait bippé frénétiquement, puis accepté avec une joie démesurée. Ainsi, l'étrange duo s'était formé. Le Sith et la boîte à musique.
Les rêves aussi avaient repris. Plus nets. Plus partagés. Les sensations s'intensifiaient, bien qu'aucune parole ne soit jamais échangée. Elle l'évitait. Toujours avec élégance, avec politesse, avec cette douceur qui n'était jamais soumission.
Et lui attendait.
Parce que tôt ou tard, il le savait… il y aurait une conversation. Et peut-être… une vérité.
