Loewen
Il était dans le couloir avant même que le cri n'ait entièrement résonné dans l'air.
La Force… la Force s'était recroquevillée sur elle-même, comme si un éclat de lumière venait de se fissurer.
Ce qu'il avait vu dans sa méditation — ou était-ce une vision ? — ce n'était pas un souvenir, ni un pressentiment. C'était maintenant.
Il avait vu l'homme contre elle. L'étreinte.
La douleur dans ses yeux. La mort dans ses bras.
Et à ses côtés… il avait vu Scourge.
Non. Pas vu, ressenti. Comme un lien en tension.
Comme un feu qu'on refusait de nommer.
« Tu ressens. »
Il n'avait jamais autant haï ce mot. Ce que cela sous-entendait. Ce que cela trahissait de lui.
La jalousie avait mordu. Brutale.
Sourde.
Sournoise.
Mais il n'eut pas le temps de s'y attarder. Le couloir avait cédé à l'urgence.
Illaoï avait été portée, et Loewen… était impuissant.
Salle d'examen — Doc, Kira et le silence
Elle reposait sur la table. Son visage avait perdu sa lumière.
Doc, torse trempé de sueur, masquait sa panique derrière des gestes mécaniques.
« Poumons effondrés… lésion cardiaque active… mais comment elle… putain, comment elle tient debout avec ça ?! »
Il passa le scanner dorsal. Une brûlure circulaire, à peine visible, sur la colonne thoracique.
« Double pénétration. Une lame. Elle a été empalée… et le tissu ne s'est jamais refermé. »
Kira, à ses côtés, n'arrivait pas à s'arrêter de pleurer.
Mais ce n'était pas de la faiblesse. C'était de la colère, de la peur… et de l'amour.
Pas l'amour romantique.
Un lien humain pur.
Elle fit sortir tout le monde. Même Loewen.
Quand elle croisa son regard, elle y vit autre chose.
Quelque chose qu'elle n'avait jamais vu chez son maître.
« Tu ne peux pas te permettre ça… pas toi… » souffla-t-elle, douloureusement lucide.
Scourge
Il était dans les quartiers. Assis.
Droite. Dos raide. Poing serré.
Devant lui, le carnet.
Des pages et des pages d'énigmes en prose. De métaphores. De paysages intérieurs qu'il avait cru commencer à comprendre.
Mais ce soir… il était perdu.
Il relisait les mêmes vers. Encore. Et encore.
« Il y a des douleurs qui chantent en silence, et des cœurs qui battent à contre-mort… »
Aucune explication.
Aucune mention de cette blessure.
Rien. Que du silence, enrobé de beauté et de souffrance voilée.
Il sentit une présence. Un clic timide.
T7-O1.
Le petit droïde le regardait avec ses lentilles brillantes.
Il semblait hésiter.
« Je suis venu… pour savoir si… »
Scourge le coupa net d'un ton sec, presque brutal :
« Sors. »
Le droïde recula d'un mouvement, visiblement choqué.
« Sors, T7. Maintenant. »
Le petit bip plaintif qui suivit lui fit presque regretter ses mots.
Presque.
Mais il ne pouvait pas gérer ça. Pas maintenant.
Il n'était pas fait pour gérer le vide.
Sergent Rusk
Il observait les caméras, l'état du vaisseau, les décharges, les protocoles de sortie.
Mais rien ne l'absorbait vraiment.
Dans un coin de son esprit, une variable, une donnée, revenait sans cesse.
Son amie.
Probabilité de survie : 27%.
Probabilité de traumatisme moral en cas de décès : 87%.
Probabilité d'agitation au sein de l'équipe : 94%.
Il soupira.
Elle avait su l'écouter. Lui parler. Rire même.
Il n'avait pas vu ça depuis… très longtemps.
Doc (plus tard, seul avec elle)
Elle était toujours inconsciente.
Il n'osait même plus la toucher.
Il avait placé tous les supports nécessaires : injection de stabilisateurs, modules respiratoires internes, et un léger champ de maintien moléculaire sur la poitrine pour éviter l'ouverture spontanée de la plaie cardiaque.
Mais elle saignait encore.
Pas en surface.
À l'intérieur.
Comme si son cœur refusait de se refermer.
« Qui t'a fait ça, princesse ?... Et surtout… pourquoi tu n'en as jamais parlé ? »
Il serra les poings.
Il n'était peut-être qu'un toubib coureur de jupon…
Mais il savait reconnaître un sacrifice jamais avoué quand il en voyait un.
