Pour Illaoï, il n'y avait pas de doute possible : c'était un stop technique. Absolu. Pas un pas de plus, pas un ordre de mission supplémentaire, pas un élan vers le but. Pas dans cet état.

Le sol glacé d'Hoth avait été témoin d'une scène trop violente pour être ignorée. Les regards, les tensions, les silences... tout était désormais fissuré. Rien ne pouvait fonctionner si les fondations de l'équipage, déjà fragiles, éclataient en mille morceaux.

Illaoï fut la voix de la raison, ferme mais calme. Elle sortit le communicateur et appela Satele Shan, une urgence dans la voix, rare pour elle. Elle demanda des renforts. Immédiatement. Elle précisa qu'il fallait aussi Maitre Tol Braga… et un autre Maitre, impartial, dont les jugements ne seraient pas pollués par les sentiments ou les histoires passées.

Ils raccompagnèrent Leowen au vaisseau. Il ne parla pas. Il ne pleura pas. Il ne s'excusa pas.

Il ne bougea plus.

Un vide total, opaque, remplaçait désormais la lumière qui avait habité son regard. Un gouffre intérieur.


Le lendemain matin, l'air était toujours coupant de froid, mais plus vif encore que la morsure du vent fût l'arrivée de la navette Jedi. Le vaisseau glissa dans le ciel polaire avec la retenue des choses importantes. À son bord, Maitre Satele Shan. Droite. Présente. Inquiète. Elle n'était pas venue seule : Tol Braga, au regard perçant et grave, et un autre maître plus jeune, plus silencieux, observateur.

Ils descendirent de la rampe dans le calme. Pas un mot.

C'est Illaoï qui prit la parole, devant eux, face au ciel bleu glacé. Et elle ne cacha rien. Rien.

Elle leur raconta tout. Le mutisme sur Tatooine, le feu dans le regard de Loewen après ce qu'elle avait tenté là-bas. Le baiser. L'émotion qu'elle n'avait pas voulu voir. Sa propre peur. Et la rage. L'explosion. Le combat fratricide sur la glace. Le vide.

Kira tenta d'intervenir, d'adoucir un peu l'angle, de sauver ce qui pouvait l'être — mais trop tard.

Illaoï avait tout déballé, crûment, sans détour, parce qu'elle savait que si Loewen voulait guérir, il lui fallait de l'honnêteté, pas des demi-vérités. Pas cette fois.

Kira resta pétrifiée. Elle savait ce que cela signifiait. Loewen n'était pas n'importe qui. Il avait été promis à une place au sein du Conseil Jedi — un avenir tout tracé, presque prophétique. Et là… tout cela semblait réduit à néant.

Tol Braga serra les dents. Il voulut accuser, accuser le Sith, accuser Scourge d'avoir corrompu le cœur du Jedi, de l'avoir dévié. Mais il croisa son regard. Et se tut.

Quelque chose avait changé. Profondément.

La Furie de l'Empereur n'était plus tout à fait l'être dévoré d'obscurité qu'il avait connu. La noirceur était là, certes. Mais elle était différente. Moins dévorante. Une chaleur étrange, lointaine, mais réelle, pulsait sous les cendres de son aura.

Illaoï s'avança d'un pas. Elle ne supplia pas. Elle demanda.

« Je vous demande de lui laisser du temps. De lui offrir du soutien. Pas des jugements. Pas des sentences. Il a tenu bon plus longtemps que bien d'autres. Il n'a pas besoin d'une cage, ni d'un sermon. Il a besoin de retrouver son centre. Donnez-lui cette chance. »

Satele l'écouta sans l'interrompre. Et acquiesça.

Kira, elle, fit un pas vers Illaoï. Un moment suspendu. Puis la prit dans ses bras. Un vrai contact, de ceux qui disent plus que les mots. Elle murmura un « merci » à peine audible, avant de monter dans la navette avec son maître.

Ne restait plus que Doc — grelottant, les bras croisés et le nez gelé.

Le Sergent Rusk gardait le silence, analysant chaque détail, calculant probablement les probabilités de réussite pour les prochaines missions, maintenant que l'équipe avait perdu son leader.

T7 roulait nerveusement d'avant en arrière, ses circuits montrant des signes de gel partiel.

Et Scourge. Immobile. Comme toujours.

Mais au fond de lui, sous la glace, quelque chose tremblait.

Le vide laissé par Loewen n'était pas que tactique. Il avait été un point fixe dans un monde instable. Un pilier. Et même Scourge, dans le silence de la nuit, dut admettre que l'ordre de mission suivant ne se ferait pas à trois, ni à deux.

Il leur faudrait retrouver l'équilibre. Ou apprendre à vivre sans.