Chapitre 5
Dans la pénombre apaisante de son bureau, Albus Dumbledore roulait soigneusement un parchemin, un petit sourire satisfait éclairant son visage. La plume élégante de Madame Maxime révélait des informations intéressantes sur la mystérieuse épouse de son maître des potions.
"Elle n'a jamais intégré Beauxbâtons. Malgré des aptitudes évidentes, son père a utilisé ses relations au sein du Ministère de la Magie français pour l'écarter du système éducatif magique," rapportait la directrice de l'académie."Un choix surprenant, surtout venant d'un homme attiré par l'idéologie de Voldemort. Mais il semble que cette décision soit moins liée à ses convictions qu'à un profond ressentiment envers sa fille depuis le décès de sa femme. Brittany s'est murée dans le silence après cette tragédie, mais cela ne semble pas être une conséquence directe du traumatisme. Plutôt une stratégie réfléchie pour se protéger des conflits constants avec son père et des attentes toxiques de son entourage. Cette jeune femme n'est pas seulement discrète : elle est observatrice et dotée d'une intelligence fine, bien que dissimulée sous une façade effacée."
Les écoles moldues où Brittany avait été inscrite témoignaient également de ce paradoxe. "Ses professeurs la décrivaient comme une élève réservée, mais exceptionnellement brillante. Ses devoirs révélaient une réflexion plus poussée que celle de ses camarades. Beaucoup ont été surpris de la voir quitter la France pour retourner en Grande-Bretagne sans poursuivre d'études supérieures."
Enfin, un détail crucial retint son attention : "Malgré l'environnement idéologique dans lequel elle a grandi, elle n'a jamais manifesté d'adhésion aux convictions anti-moldus de sa famille. Au contraire, ses gestes attentionnés envers autrui, qu'ils soient moldus ou sorciers, laissent entrevoir une forme d'empathie sincère, bien que soigneusement dissimulée."
Dumbledore glissa le rouleau dans un tiroir de son bureau et le ferma à clé. Discrète, empathique et intelligente... Une alliée potentielle, pensa-t-il. Brittany Pearson, ou plutôt Brittany Rogue, était peut-être exactement ce qu'il fallait à Severus. Non seulement pour alléger sa propre charge émotionnelle, mais aussi pour offrir un avantage stratégique à l'Ordre. Son apparence passe-partout et son talent pour se fondre dans l'ombre en faisaient une candidate idéale pour collecter des informations, notamment dans les cercles de Mangemorts où elle serait perçue comme inoffensive.
Un éclat de lumière dans l'âtre interrompit ses pensées. Les visages familiers des membres du personnel de Poudlard commençaient à apparaître dans la salle de réunion de pré-rentrée. Se levant, il arrangea sa robe et quitta son bureau pour les rejoindre.
ooooo
La grande salle de réunion résonnait doucement des voix des professeurs échangeant des nouvelles de l'été. Severus Rogue entra à son tour, et Dumbledore remarqua immédiatement sa démarche plus lourde qu'à l'accoutumée, l'ombre plus marquée sous ses yeux. Alors qu'il s'installait en silence à la table, une odeur subtile de whisky pur feu flotta jusqu'au directeur.
Dumbledore patienta, laissant la réunion suivre son cours jusqu'à ce que les derniers sujets soient abordés et que le groupe commence à se disperser. Il fit alors un geste discret en direction de Severus.
— Un mot, si vous le voulez bien, Severus.
Rogue soupira mais acquiesça. Ils s'éloignèrent des autres, jusqu'à un coin plus tranquille de la salle.
— Vous avez bu, constata doucement Dumbledore. Ce n'est pas dans vos habitudes avant une réunion.
— Avec tout le respect que je vous dois, Albus, je n'ai pas besoin d'un sermon.
Dumbledore l'observa en silence un instant, son regard perçant tempéré par une compréhension presque paternelle.
— Je ne suis pas ici pour vous juger. Mais vous savez aussi bien que moi que votre rôle est essentiel. Satisfaire le Seigneur des Ténèbres, maintenir votre couverture... tout cela repose sur votre capacité à contrôler vos émotions. Y compris dans votre vie privée.
Rogue serra les poings.
— Ma vie privée ? Elle est inexistante, Albus ! Cette... farce de mariage est une catastrophe. Vous n'imaginez pas ce que cela implique.
Dumbledore hocha la tête, incitant Rogue à continuer.
— Je ne la connais pas. Je ne sais rien d'elle, si ce n'est qu'elle n'est pas celle qu'elle prétendait être. Elle parle. Elle m'a menti. Elle pourrait être des leurs, fouiller ma maison, découvrir mes véritables allégeances et les révéler à Voldemort. Elle pourrait être des nôtres, tout raconter par inadvertance à quelqu'un lors d'une soirée ou, pire, être si maladroite et effrontée qu'elle provoquerait la colère du Seigneur des Ténèbres… et j'en paierais les conséquences. Je n'ai même pas pensé vérifier, j'ai pourtant une armoire pleine de veritaserum et je suis legilimens. Albus … je n'y ai même pas pensé, répéta t-il en insistant sur les mots. Je ne contrôle plus rien.
Sa voix se brisa légèrement, et il détourna les yeux, accablé par son propre aveu.
J'ai commis une erreur monumentale en l'épousant sans vérifier qui elle était.
Dumbledore posa une main rassurante sur l'avant-bras de son maître des potions.
— Severus, je ne pense pas qu'elle ait eu le temps de voir qui vous êtes, de quel côté vous êtes. Calmez-vous. Il est vrai que ce mariage vous a été imposé, mais il est aussi une opportunité. Brittany est peut-être bien plus précieuse que vous ne le pensez.
Severus le dévisagea, incrédule. Une alliée ? Brittany ? L'idée lui semblait à la fois absurde et déconcertante.
— Que savez-vous que je ne sais pas, Dumbledore ?
- Il ne faut surtout pas décevoir Tom en ce moment, vous devez conserver votre place auprès de lui. Les renseignements que vous pourriez nous fournir sont trop importants. Il n'est pas question d'annoncer votre divorce à la prochaine réunion, continua Dumbledore sans prendre la peine de répondre à la question de Rogue.
- … Merci pour cette brillante analyse Albus, répliqua sèchement Rogue, amer.
Dumbledore le fixa un petit instant, un sourire aux lèvres.
- Conviez Brittany ici, au château.
Rogue éclata d'un rire sans joie.
— Convier Brittany ici ? Pour quoi faire? Et vous pensez qu'elle viendra gentiment ? Elle m'évite comme la peste. Elle n'a aucune envie de se retrouver enfermée à Poudlard avec moi, encore moins de jouer la parfaite petite épouse.
Dumbledore haussa légèrement les sourcils, comme s'il considérait une évidence que Rogue refusait de voir.
— Alors, donnez-lui envie.
— Lui donner envie ? répéta Rogue d'un ton incrédule.
Dumbledore sourit, sa voix aussi légère que menaçante dans son insistance.
- Séduisez-la.
Rogue afficha alors un sourire carnassier.
- Vous avez raison … Je vais la séduire …
- N'y songez même pas Severus. Vous n'utiliserez aucun sortilège ni aucune potion.
- … Vous plaisantez j'espère ? demanda un Rogue qui s'était à nouveau raidit sur son siège.
- Absolument pas, répondit Dumbledore, impassible.
La porte du bureau claqua. Il est définitivement dingue, fulmina le Maitre des Potions en descendant à toute allure les marches en colimaçon.
Dumbledore se tourna légèrement vers la fenêtre, observant les nuages lourds qui s'amassaient à l'horizon. Un sourire indéchiffrable étira ses lèvres. Il était temps de voir si Brittany Rogue pouvait devenir bien plus qu'un simple pion dans cette partie d'échecs mortelle.
La porte se rouvrit quelques minutes plus tard sur une Minerva hystérique.
- Albus ! Je … Severus ! Il sentait l'alcool à plein nez lorsqu'il est arrivé à la réunion ! Et il n'est que 11H!
- Je sais Minerva, je sais … Lui répondit-il, un sourire malicieux aux lèvres.
