Chapitre 25

Andréa avait empilé des dossiers urgents sur son bureau, comme elle le faisait avec ses gobelets de café vides. Ces dernières semaines, Rodney l'avait fortement sollicitée sur des projets cruciaux et depuis elle n'avait pas eu un moment de répit. Le temps avait filé à une telle vitesse, qu'elle venait seulement de prendre conscience que deux semaines la séparaient de la vie civile. Elle repensait à l'entretien qu'elle avait eu avec Carter des mois plus tôt. La physicienne avait tout de suite tenu Radek au courant, mais avec Evan c'était une autre paire de manche. Elle ne savait pas comment lui annoncer son départ d'Atlantis et ça lui trottait dans la tête.

Elle avait pourtant essayé à de nombreuses reprises de lui parler, mais elle n'avait pas trouvé le bon moment. Leur amitié en avait pris un coup et les seuls échanges qu'ils avaient étaient strictement professionnels. Il avait l'air de ne pas en souffrir, du moins son attitude ne dépeignait pas un homme blessé. Andréa avait repris les activités qu'elle faisait avant l'explosion et elle s'était détachée peu à peu du travail. Même si Rodney la poussait à en donner davantage, la physicienne avait levé le pied. Aucune information concernant son départ n'avait fuité, et elle s'en était étonné.

Affalée sur sa chaise depuis des heures, elle avait effectué un rapide saut au mess pour se ravitailler en boisson énergisante. En retournant au laboratoire, elle s'était arrêtée à l'entrée, curieuse de savoir ce qui pouvait bien donner une teinte rose-violette aux murs. Après quelques pas, elle avait vu un cristal qui trônait au centre d'une table. En y regardant de plus près, elle avait identifié ça comme un groupe de cristaux, nichés sur le tronc. Radek avait remarqué la fascination de son amie et il s'était approché d'elle.

«Nous ne savons pas encore ce que c'est. On dirait une sorte de… euh, croissance cristalline. Rodney l'a ramené ce matin d'une planète éloignée. ». Andréa s'était penchée pour admirer les couleurs vives qui émanait de l'objet scintillant. Elle s'était sentie attirée comme un aimant et sans s'en rendre compte, elle avait levé la main pour l'atteindre. Radek lui avait crié de ne pas le toucher, mais il était trop tard. Ses doigts avaient à peine effleuré l'objet, qu'une étincelle avait fait reculer le Tchèque. Andréa avait été projetée à plusieurs mètres dans les airs et elle s'était retrouvée sur le dos en gémissant.

Radek était déjà à ses côtés, soulagé qu'elle n'ait rien. Il avait été intrigué lorsque les cristaux s'étaient assombris. «Ça va?». Elle avait simplement hoché la tête, avant de se relever. «Je ne sais pas ce qui s'est passé. C'était vraiment bizarre. C'est comme si ce truc m'appelait.». Elle avait vivement épousseté son uniforme, avant de regarder Radek. «Je vais bien, ne t'inquiète pas.». Leur regard s'était de nouveau porté sur le cristal, dont ils ne pouvaient pas en dire la même chose.

Le Tchèque l'avait forcée à se rendre à l'infirmerie, et le docteur Keller avait confirmé que la physicienne était en parfaite santé. Andréa avait remercié Radek d'être resté avec elle, sans savoir qu'une simple pression sur son bras venait de lui transmettre une sorte d'énergie. Keller avait préféré la congédier pour les quelques heures qu'il lui restait à travailler. La journée avait été longue alors elle ne s'était pas fait prier pour regagner ses quartiers. Une bonne nuit de sommeil allait l'aider à oublier ces quelques heures.

Sur Terre, les médecins lui avaient préconisé une pratique régulière du sport pour se remuscler, alors elle essayait de l'appliquer aussi souvent qu'elle le pouvait. Même si sa jambe était guérie, elle sentait quelques douleurs dans le haut de sa cuisse. Elle connaissait ses limites mais elle voulait toujours en faire plus. Quinze minutes avaient suffi à réveiller une douleur, mais elle avait tenu bon. Son muscle commençait à lui tirer et elle s'était arrêtée quelques minutes plus tard. Elle s'était pliée pour poser ses mains sur ses genoux, mais elle avait fini par s'assoir pour que le mal passe.

Evan avait eu la même idée et il avait reconnu la silhouette d'Andréa au fil de ses foulées. Elle se massait la cuisse en grimaçant, alors il s'était arrêté de courir en comblant les derniers mètres en marchant. «Tout va bien?». Elle avait levé la tête dans sa direction en lui souriant timidement. «J'ai peut-être un peu trop forcé.». Il n'avait pas l'air inquiet mais elle avait été surprise quand il s'était accroupi pour poser ses mains sur ses genoux. «Tu devrais suivre les consignes du médecin.». Sa voix était d'un tel calme, que cela l'avait déroutée.

Il avait pris ses mains dans les siennes et l'avait aidé à se lever. «Merci.». Ils avaient attendu un moment en se fixant du regard. «Tu veux que je t'accompagne à l'infirmerie ?». Elle lui avait dit que tout allait bien, alors il avait rompu le contact, sans pour autant bouger. Cette conversation avait quasiment été la plus longue qu'ils avaient eu depuis des semaines. Ils étaient tous les deux l'un en face de l'autre et l'embarras planait dans les aires, au point qu'elle avait baissé la tête.

En voyant qu'elle n'était pas bavarde, il commençait à s'éloigner mais elle l'avait interpellé. «Evan! Attends!». Sa main avait instinctivement rejoint sa parole en se plaçant autour de son poignet et le signe de tête d'Evan lui avait fait lâcher prise. «Je suis désolée, je n'aurais pas dû passer mes nerfs sur toi l'autre jour. J'étais en colère contre moi-même et je l'ai reportée sur toi.».

« J'ai eu tout le temps de réfléchir ces derniers mois et tu avais raison. J'ai eu peur et je me rends compte que je n'ai pas tourné la page. Je me rends aussi compte que c'est trop tard et que je n'ai pas été exemplaire, mais je n'ai pas tous les tords comme tu peux le penser. ». Elle était contente de pouvoir enfin lui parler sans avoir à crier, mais ce n'était pas le bon moment pour lui dire qu'elle allait partir.

« Tu m'as demandé pourquoi je n'étais pas venu avec toi sur Terre. Tu m'as fait comprendre que c'était fini, il y a eu l'explosion et je n'étais qu'un étranger à ton réveil, alors tu voulais que je fasse quoi ? Et puis un rapatriement ça s'organise et j'ai su cinq minutes avant ton départ que tu avais retrouvé la mémoire. Elle savait qu'il avait raison. Elle peinait à trouver ses mots mais elle s'était donnée du courage en soufflant longuement. «Trois mois c'est long… tout ce qui s'est passé avant l'explosion m'a monté à la tête. Je t'ai jugée alors que je ne suis pas mieux…».

Les larmes commençaient à monter mais elle se retenait du mieux qu'elle pouvait. « On a mis un terme à notre relation mais pas à notre amitié. Ce serait dommage de tout gâcher, on est des adultes responsables après tout, hein ?». Elle savait qu'en temps normal il l'aurait prise dans ses bras mais il était visiblement passé à autre chose. « C'est toi qui as choisi d'y mettre un terme et je t'avoue que ça m'a fait mal Andréa, alors je ne te promets rien.». Ce n'était pas forcément ce qu'elle voulait entendre, mais c'était un bon début.

Elle l'avait blessé et elle en avait eu la certitude en le regardant s'en aller. Elle était restée là, seule sur la passerelle, à ruminer intérieurement. Elle savait que cela prendrait du temps pour qu'il lui pardonne, mais il lui en restait peu. Elle s'était dirigée vers le transporteur pour regagner ses quartiers, et prendre une douche. Elle longeait les murs en pensant à Evan et en se demandant comment elle allait lui annoncer son départ. Plus elle attendait, plus c'était dur. Elle avait beau se passer en boucle le speech qu'elle comptait lui faire, le scénario qu'elle s'imaginait changeait tout le temps et elle n'aimait pas ça.

Radek sortait de ses quartiers lorsqu'il avait vu son amie. Il venait dans sa direction et semblait perdu dans ses pensées. Andréa avait observé son visage et les cernes sous ses yeux l'avaient mise sur la piste que son sommeil n'avait pas été récupérateur. Après quelques banalités, il lui avait confié qu'il se rendait à l'infirmerie, après avoir passé sa nuit à faire des cauchemars plus qu'inhabituel.

Il s'était revu en tenu de cosmonaute, lorsqu'il avait dû réparer les cristaux avec Sheppard, aux abords de la Cité. Il avait été blessé par un micro-astéroïde, et tout correspondait à la réalité, jusqu'à ce qu'elle ne soit altérée. Son souvenir s'était transformé en cauchemar lorsqu'il avait vu son amie derrière le Colonel. Radek lui tendait la main, mais au lieu de l'aider en agrippant sa main, elle avait coupé la corde qui le reliait à la ville. Andréa n'avait pas su quoi lui dire sur le moment et ils s'étaient séparés ainsi dans le couloir.

Andréa avait passé une journée de plus, sans avoir eu la force de parler à Evan. Elle s'était assise à son bureau et quand elle avait vu Radek, elle s'était empressée de lui demander s'il avait mieux dormi. «Keller m'a donnée des médicaments, ça m'a assommé comme un cheval.». Ils avaient continué à travailler dans la bonne humeur jusqu'à l'heure du déjeuner. Andréa avait croisée Jennifer dans le couloir menant au mess et elle s'était inquiétée en la voyant bâiller. «Vous avez mal dormi vous aussi?».

Le médecin avait sursauté en voyant la physicienne au dernier moment. Keller ne faisait jamais de cauchemar, du moins, aucun qui paraissait si réels. Elle lui avait raconté que Teyla l'avait appelée en pleine nuit pour des douleurs à l'estomac et qu'Andréa était présente. Elle se tenait en retrait et avait une attitude étrange. «D'un coup, une bestiole est sortie du ventre de Teyla et… je ne pouvais rien faire.J'ai vraiment cru que c'était réel! ». La physicienne pouvait encore lire le traumatisme que ce cauchemar avait provoqué en elle.

«Heureusement, ce n'était qu'un cauchemar. Je vais vérifier, si ça se trouve il y a un alignement de plusieurs lunes qui jouent avec vos nerfs.». Jennifer avait souri et lui avait souhaité un bon appétit. Elle était sur le point d'aller se reposer dans ses quartiers sur son heure de pause, alors elle avait préféré couper court.

Andréa l'avait saluée avant de continuer sa route. Comme à son habitude, elle avait rejoint Reed et Liam à la table qu'ils s'étaient appropriée. Elle avait tout de suite remarqué que quelque chose avait changé sur le visage de Reed, alors elle lui avait demandé. «J'étais réveillé tôt ce matin et le Major aussi, alors on s'est entrainé et… disons que j'ai baissé ma garde.». Ce n'était pas la première fois qu'on lui vantait les exploits d'Evan et elle commençait à se demander s'il allait aussi bien qu'il le prétendait. Il s'agissait surement d'un accident, mais même s'ils les cumulaient, elle allait lui laisser le bénéfice du doute.

Le lendemain, Reed avait été lui aussi victime de cauchemar, qu'il avait qualifié auprès d'Andréa, de dérangeant. Il était sorti de l'infirmerie et il s'était retrouvé seul dans la cité. Il avait ouvert une porte et il s'était étonné de voir une forêt. Il avait brièvement raconté qu'il était pourchassé par des Geniis, jusqu'à ce que l'un d'entre eux ne lui bloque le chemin. Il avait dû s'arrêter parce qu'il y en avait tout autour de lui. Il avait vu plus loin Andréa, habillée en Genii, s'approcher de lui et elle n'avait pas hésité à lui tirer dessus.

Andréa avait trouvé ça bizarre qu'elle apparaisse dans tous les cauchemars de ceux qu'elle avait croisé et il s'agissait bien plus d'une coïncidence. Et c'était souvenu que cela avait commencé depuis qu'elle avait touché le cristal dans le laboratoire. Elle devait en faire part au Colonel Carter, alors elle s'était dirigée vers son bureau sans attendre. Elle s'apprêtait à traverser un hall, lorsqu'elle avait vu Evan se diriger vers elle d'un pas pressé.

Elle avait senti le danger en le toisant rapidement. Ses cheveux étaient en désordre, ses yeux reflétaient une haine qu'elle n'avait jamais vu, il était pied nu, mais c'était surtout en voyant son arme de service à la main qu'elle avait tiquée. «Reste où tu es!». Il n'avait pas l'air de vraiment savoir ce qu'il faisait, mais elle avait levé les mains en voyant qu'il pointait son arme sur elle. «Evan! Qu'est-ce que tu fais?». Il clignait anormalement des yeux et sa nervosité lui faisait peur.

Reed avait observé toute la scène et il n'avait pas hésité à dégainer son arme, face au comportement agressif de son supérieur. Il avait alerté le Colonel Carter par radio, et s'était prudemment avancé derrière lui. «Baissez votre arme, Monsieur!». Ils avaient eu la certitude qu'il n'était pas conscient de ses actes lorsqu'il avait demandé au Lieutenant de lui apporter une arme anti-réplicateur. «Pourquoi faire, Monsieur?».

«Mais vous ne voyez pas que s'en est un!?». Andréa ne comprenait pas ce qui lui arrivait, alors elle n'avait pas bougé d'un millimètre en voyant qu'il s'agaçait. Carter et Sheppard avaient dévalé les escaliers et s'étaient placé aux côtés d'Andréa, qui peinait à garder son calme. «Evan, s'il te plait, pose ton arme. On va discuter, hein?». Le fait de lui parler aggravait les choses et Sheppard lui avait fait un signe pour lui faire comprendre qu'ils allaient gérer la situation. «Que quelqu'un aille chercher une arme anti-réplicateurs, tout de suite ! Tirez-lui dessus !».

Il y avait maintenant un attroupement et une dizaine de Marines braquaient leur supérieur. Le docteur Heightmeyer avait tenté une approche en lui demandant de lui parler, mais cela n'avait pas l'air de fonctionner. «Fais-le ! D'accord ? Qu'est-ce qu'il y a de mal ? Enfin, si elle est humaine, ça ne lui fera pas de mal, n'est-ce pas?». Sheppard avait regardé la physicienne qui avait du mal à rester immobile. «De quoi il parle, doc.?». Elle n'en avait aucune idée, mais cela avait forcément un rapport avec le cristal trouvé sur M3X-487. «Ne lui parlez pas! C'est un Réplicateur!».

«Major, pourquoi ne baisseriez-vous pas votre arme ?». La situation devenait critique et la tension était bien présente auprès de tous les membres présents. Andréa était de plus en plus nerveuse mais elle avait espoir de le raisonner. «Écoute, Evan, je ne sais pas ce qui t'arrive, mais tu dois m'en parler. On a déjà surmonté pire tous les deux, hein?». Elle avait tendu sa main en espérant qu'il lui donne son arme, mais au lieu de ça, il avait raffermi sa prise dessus. «Je vous dit que c'est un Réplicateur ! Si vous ne me croyez pas, je vais lui tirer dessus. Vous verrez.».

Ronon s'était posté sur un des balcons et en voyant qu'ils n'arriveraient à rien avec Evan, il lui avait tiré dessus avec son arme incapacitante. Andréa avait sursauté en apercevant Evan se crisper, puis tomber au sol inconscient. Elle avait tourné la tête vers Ronon, avant de reporter son attention sur Evan. Le docteur Heightmeyer était déjà près de lui et vérifiait son pouls, lorsqu'Andréa s'était agenouillée auprès de lui en se demandant ce qui avait bien pu se passer dans son esprit pour qu'il en vienne à la menacer. Reed s'était approché à son tour et avait saisi le Beretta du Major, qu'Andréa venait de lui tendre.

Jusqu'à ce qu'ils ne découvrent ce qui avait poussé Evan à se conduire comme ça, Carter avait placé en quarantaine tous ceux avec qui il avait été en contact et avait suspendue toutes les explorations. Evan avait été placé en salle d'isolement et questionné à son réveil, mais il ne se souvenait de rien. Carter avait envisagé la possibilité que ce soit l'œuvre d'une entité, ce qui avait fait réfléchir Andréa. Keller avait alors supposé que l'entité pouvait se transmettre par le toucher, alors ils avaient creusé de ce côté.

Rodney et Radek avaient été autorisé à se rendre sur la planète dont été issu le cristal, afin de découvrir sa nature exacte et découvrir comment elle fonctionnait. Rodney avait sa petite idée sur la question, mais il avait attendu d'être rentré sur Atlantis et d'avoir examiné le cristal avant de tirer des conclusions. L'objet avait besoin d'un matériau conducteur pour se déplacer, alors quoi de mieux qu'un être humain. Il était persuadé que le cristal actif allait permettre de calibrer les capteurs, pour ainsi détecter les signatures énergétiques associées. Cette action allait à coups sûr les aider à découvrir qui était le porteur de l'entité.

Il leur avait fallu quelques heures pour les calibrer et Radek s'était empressé en salle d'isolement, pour le tester sur Evan. Après l'avoir scanné, le militaire avait été soulagé qu'elle ne soit plus en lui. Les recherches de Rodney avaient démontré qu'elle pouvait se déplacer via les câbles électriques de la Cité, ce qui voulait dire qu'elle pouvait se trouver dans n'importe qui. Andréa n'avait pas bougé de son laboratoire, et elle essayait d'aider les deux hommes comme elle pouvait. Son esprit était encore perturbé par le canon de l'arme d'Evan. Elle s'était vu mourir dans ce hall et cette idée l'avait conforté dans son choix de pas avoir renouvelé son contrat.

Elle était assise à son bureau, lorsque les haut-parleurs de la cité avaient laissé place à la voix de Sam. «Ici le colonel Carter. Si vous pouviez me prêter attention, s'il vous plaît. Je suis désolée de devoir vous annoncer la perte d'un membre précieux de l'expédition aujourd'hui. Le docteur Kate Heightmeyer comptait beaucoup pour nous tous. Elle s'est éteinte dans son sommeil et sa mort est tout simplement tragique. Je suis également désolée de devoir vous annoncer que la menace à laquelle nous sommes confrontés, est toujours présente et que, jusqu'à nouvel ordre, le protocole de confinement complet reste en vigueur. Essayez de garder votre calme. Nous faisons tout notre possible pour assurer la sécurité de tous et résoudre cette situation rapidement. Merci.».

Radek avait attendu la fin de son discours pour lui montrer sa tablette. «Euh… Colonel Carter ? Je crois que j'ai réussi à calibrer les capteurs de la ville.». Il paraissait nerveux alors elle n'avait pas attendu avant de lui demander s'il avait une idée de la personne qui portait l'entité. «Oui, si ça fonctionne correctement, vous savez. On a eu des problèmes avec le… euh… on a une lecture positive.».

Andréa avait espéré être elle-même plongée dans un cauchemar, mais cela n'avait pas l'air de s'en approcher. Elle était restée un moment, avachit sur sa chaise, à réaliser qu'elle ne la reverrait plus. Des images lui revenaient sans cesse, celles de Kate, celles de Carson. Elle avait eu l'impression de revivre l'enfer. Son oreillette s'était mise à grésiller et elle avait longuement soufflé avant de répondre à Radek. Elle ne savait pas pourquoi, mais il lui avait demandé de se rendre en salle d'isolement. Elle était encore abasourdie par ces informations, alors elle n'avait pas posé de question et s'était exécuté.

En arrivant près de la porte, Radek lui avait demandé de la suivre dans la tour d'observation, d'où elle avait une vue imprenable sur la salle d'isolement. Elle s'était étonnée de voir qu'Evan avait été de nouveau enfermé. «Je ne comprends pas, je pensais que l'entité n'était plus en lui.». Le Tchèque l'avait scanné à plusieurs reprises pour s'assurer que les détecteurs fonctionnaient, mais il ne se trompait pas. À court de mots, Carter et Sheppard affichaient un air de circonstance en regardant le commandant en second quelques mètres plus bas. «La chambre d'isolement a été recouverte d'un matériau isolant pour empêcher l'entité de se transférer hors de lui, et dans quelqu'un d'autre.».

Il fallait trouver un moyen pour la faire sortir de son corps et de son esprit, mais ils commençaient à être à court d'idée. Ils avaient tous échangé un regard en se demandant ce qu'ils savaient sur le fonctionnement de cette technologie. Sheppard s'était demandé s'il y avait un moyen de raisonner l'entité en lui. «Bon, disons une seconde que vous pourriez communiquer avec lui. Qu'aviez-vous prévu de dire ?». Carter essayait de creuser la théorie du Colonel, mais il n'avait pas été si loin dans sa réflexion.

Il fallait éviter à tout prix qu'Evan ne s'endorme, du moins, pas tant qu'ils n'avaient pas trouvé la solution. «Nous savons que l'entité se nourrit de peur. Si elle se sent piégée, ou pire, si elle aime le frisson de tuer son hôte… eh bien, il faut saisir cette dernière chance.». Andréa comprenait où elle voulait en venir mais elle ne pouvait pas la laissée faire. Elle regardait Evan en contrebas et leur regard s'étaient croisés. Evan avait lu dans ses yeux que ça ne sentait pas bon pour lui, alors il s'était laissé tomber sur sa chaise en expirant longuement. Elle avait de la peine, mais rien n'était encore joué. «Et si on lui donnait l'occasion de rentrer chez lui?».

Tous les regards s'étaient tournés vers Andréa, qui n'avait rien dit jusque-là. « Il faudrait qu'il soit dans un état proche du sommeil pour ça.». Keller leur avait confié qu'elle maîtrisait cette partie du plan et qu'elle pouvait lui administrer un sédatif. «Vous voulez qu'il affronte une créature apparemment capable de manipuler son subconscient?». La physicienne avait simplement hoché la tête en suggérant que quelqu'un l'accompagne, pour être certain de la faire partir. Il était clair qu'il n'y arriverait pas seul, vu son comportement plus tôt, alors Andréa s'était portée volontaire sans attendre.

Radek et Keller avaient enfilés une tenue de protection pour éviter tout contact, pendant qu'Evan s'allongeait sur un des brancards qui avait été amené plus tôt. On lui avait vaguement expliqué ce qu'ils allaient prévu de faire, et bizarrement, le militaire n'était pas rassuré. Le Colonel Carter se tenait dans la tour d'observation avec Sheppard, et elle lui avait expliqué qu'ils allaient se servir d'une technologie découverte dix ans auparavant, sur une planète où les survivants d'un holocauste vivaient entièrement dans un monde virtuel créé dans leur esprit.

Ils avaient réussi à la modifier pour qu'elle serve d'entraînement en réalité virtuelle des membres de l'équipe SG. Il n'avait fallu à Radek et Rodney, que quelques ajustements mineurs pour l'adapter à l'activité subconsciente. Evan les regardait installer des moniteurs et du matériel qu'il ne connaissait pas, et il s'interrogeait encore sur la fonction de chacun. Il y avait tellement de mouvements autour de lui, qu'il venait juste de remarquer le deuxième lit. «Radek, pour qui est celui-là?».

Le Tchèque s'était arrêté en se demandant comment il allait lui dire qu'Andréa allait entrer dans sa tête, mais il n'avait pas eu besoin d'émettre un son. La physicienne venait de passer la porte et s'était installée en silence. Evan ne l'avait pas lâchée du regard et il voyait Keller lui poser des électrodes. «Alors tu vas vraiment entrer dans mes rêves!?».

La jeune femme avait tourné la tête en lui souriant. Carter avait quelques doutes concernant la manière dont la machine allait traduire les rêves du Major et elle espérait qu'Andréa trouve un moyen de les comprendre et d'interagir avec le militaire. Ils avaient su que c'était le moment fatidique en voyant que la pièce avait commencée à se vider de son personnel. Keller les avait informés qu'elle était prête et Evan s'était tourné vers Andréa. «Tu n'es pas obligée de faire ça.».

«Ne dit pas de bêtises!». Elle n'allait pas le laisser affronter seul ses démons, alors elle avait simplement hoché la tête vers Jennifer. Evan s'était endormi quelques minutes après avoir reçu une dose de sédatif. La physicienne avait attendu qu'il commence à rêver avant d'être happée à son tour dans un sommeil profond.

Evan s'était retrouvé dans une pyramide qu'il connaissait bien. Ce n'était pas la première fois qu'il s'y rendait depuis qu'ils en étaient revenu, avec Andréa. C'était comme s'il était de nouveau coincé dans ce Temple. Il avait beau regarder autour de lui, il n'y avait personne. Il s'était rappelé les murs tapissés d'inscriptions en tous genres et il faisait glisser ses doigts sur les parois, comme pour se prouver qu'il pouvait sentir les stries. Il se sentait perdu car son dernier cauchemar avait été complètement différent. Il n'avait aucune idée de la marche à suivre, mais son instinct l'avait fait avancer jusqu'au tombeau qui trônait au centre de la pièce.

Il allait poser une main dessus, lorsqu'il avait entendu un bruit derrière lui. «Evan?». Soulagé, il avait longuement expiré avant de lui indiquer sa position. Elle avait couru dans sa direction et s'était arrêté à quelques centimètres de lui en regardant autour d'elle. «Alors c'est ça ton cauchemar?». Il avait marqué un temps avant de lui confier que cette mission lui avait laissée un goût amer. «Il ne peut rien nous arriver, là. On est d'accord?». Il avait hoché la tête, mais le sol s'était mis à trembler sous leurs pieds. Il n'avait pas attendu avant de lui prendre la main et de l'attirer vers les escaliers qu'ils ne connaissaient que trop bien. «Pas par-là Evan, c'est un cul-de-sac!».

Les murs tremblaient de plus en plus et de la poussière s'échappait des pierres qui les entouraient. Ils étaient arrivés dans la pièce exiguë, où Andréa l'avait vu mourir, impuissante. Les tremblements s'intensifiaient et leur équilibre venait à manquer. Evan n'avait pas hésité à s'allonger sur elle pour la protéger de son corps. Ils attendaient patiemment que le vacarme ne cesse mais il semblait s'empirer. Evan ne savait pas vraiment si sa dernière heure avait sonné, alors il avait cherché à tâtons le visage d'Andréa pour l'embrasser une dernière fois, jusqu'à ce qu'il ne sente des pierres de la pyramide s'effondrer sur eux.

Andréa s'était réveillée en sursaut et elle avait reconnue presque immédiatement la salle d'isolement. «Que s'est-il passé ?». Elle était en sueur et elle peinait à reprendre ses esprits, mais les bips du moniteur cardiaque lui avait fait comme un électrochoc. «Dégagez!». Elle avait tourné la tête en entendant les mots de Jennifer. Elle avait vu le trait plat sur l'écran, mais le pire avait été d'entendre les décharges du défibrillateur. Son ami s'était tourné vers elle, impuissant. «Il est en arrêt cardiaque.». Malgré l'évidence de la scène, elle ne pouvait pas s'y résoudre.

Elle avait enlevé d'un coup sec les électrodes placées sur ses tempes, en espérant que Jennifer lui donne une bonne nouvelle. Voir le corps d'Evan se soulever par l'impulsion électrique et s'écraser lourdement sur le matelas quelques secondes plus tard, lui était insupportable. Elle s'en voulait tellement mais rien n'était perdu. La physicienne restait suspendue aux lèvres du médecin. Il allait vivre, il le devait. Le coup de massue était tombé presque immédiatement. «Je suis désolée, je n'ai rien pu faire.».

Ces mots raisonnaient encore en elle. Non, pas lui, ce n'était pas possible. Elle avait eu son lot tout au long de cette folle année, alors elle n'était pas prête à entendre ces mots. Le trait plat à l'écran lui indiquait pourtant le contraire mais elle ne voulait pas y croire. La physicienne ne savait plus comment elle était arrivée là, mais elle arpentait les allées désertes de la Cité, sans réel but précis. Elle était perdue et voulait simplement réfléchir, alors elle s'était dirigée vers un transporteur pour pouvoir se réfugier sur n'importe quel balcon qui donnait sur la mer.

Elle avait perdu la notion du temps, alors elle n'avait pas été surprise de croiser Radek au détour d'un couloir. En quête de réconfort, elle allait s'approcher de son ami pour l'étreindre, mais il l'avait violement repoussée. «C'est ta faute s'il est mort!».

Elle voulait se défendre mais aucun mot ne voulait sortir. Elle n'avait pas la force de l'affronter alors elle avait continué jusqu'au transporteur. Les portes s'étaient refermées sur elle et elle s'était étonnée de ne pas avoir eu besoin de taper sa destination sur l'écran. Les portes s'étaient de nouveau ouvertes et c'était à ce moment précis qu'elle avait pris conscience que l'entité était en elle. Elle s'était demandé comment elle avait pu croire que Radek lui parlerait ainsi.

Elle n'avait pas compris ce qu'il venait de se passer. Pendant une minute elle se tenait dans un transporteur et celle d'après, elle était dans une salle qu'elle craignait de reconnaître. Andréa venait de plonger dans un cauchemar sans nom. Elle avait gardé ce secret pendant si longtemps, l'enfouissant aussi profondément qu'elle avait pu. Elle se retrouvait maintenant dans cette pièce sombre, seule, assise sur cette chaise qu'elle haïssait. Elle s'était raidit en entendant un cri qui lui avait glacée le sang. Elle avait reconnu cette voix qu'elle pensait ne jamais plus entendre, alors elle avait tendu l'oreille pour savoir d'où elle provenait.

Elle avait couru dans ce labyrinthe fait de couloirs similaires, jusqu'à ce qu'elle ne s'arrête devant une porte entrouverte. Elle avait eu l'impression de tourner en rond en parcourant les dizaines de couloirs, et elle peinait à reprendre son souffle, essayant de calmer son cœur qui battait à un rythme anormal. Elle avait placé sa main sur la poignée, en marquant un temps d'arrêt, de peur de découvrir ce qu'elle allait y trouver. Son courage l'avait incitée à pousser la porte. Elle avait fait quelques pas et se tenait à présent debout dans la pièce vide.

Ses yeux avaient parcouru la salle du sol au plafond et elle avait cru mourir en voyant quelqu'un d'assis. Son cœur avait de nouveau fait des siennes en voyant qu'une silhouette venait d'apparaître comme par enchantement. Il était là, vivant plus que jamais. Un Wraith se tenait face à lui, et son sourire lui confirmait qu'il était rassasié. Il avait volontairement fait pivoter le siège vers elle, pour qu'elle puisse voir le visage d'Evan. Un cri lui avait échappée en voyant qu'il était trop tard. Elle avait eu beau hurler son nom, comme elle le faisait dans chacun de ses cauchemars, rien n'y faisait. Ses jambes refusaient de bouger et elle était tétanisée sur le seuil de la porte. Elle perdait tout contrôle sur son corps qui refusait de lui obéir, incapable de l'aider.

Une voix l'avait tirée de cet état de catatonie et elle avait été soulagée de voir Evan. «Ce n'est pas réel, Andréa ! Il n'est pas moi !». Elle avait marqué un temps d'arrêt, en essayant d'analyser la situation. Elle s'était jetée dans ses bras en fermant les yeux. Cela n'avait duré que quelques secondes et ils s'étaient étonnés du silence qui venait de s'installer. La pièce était de nouveau vide. Son cœur avait retrouvé un rythme correct, pensant avoir mis un terme à tout ça. Soulagée elle s'était tournée vers le vrai Evan qui se sentait, quant à lui, attristé et coupable à la fois. «C'est de ça dont tu as le plus peur !? ». Il ne s'était pas imaginé qu'elle pouvait encore penser à lui. Elle n'avait rien rétorqué, alors il avait pris son temps pour essuyer les traces que ses larmes avaient laissées sur ses joues.

Personne ne pouvait les voir. Tout cela n'était que le fruit de l'imagination d'Andréa, invitant son ami à voyager avec elle dans ses tourments. Lorsqu'ils s'étaient séparés, Andréa avait été intriguée quant au fait d'être toujours au même endroit. «Euh… On ne devrait pas être réveillés ?».

Le militaire avait balayé des yeux son environnement et il lui avait pris la main en l'emmenant vers un couloir lumineux. Une nouvelle porte se dressait devant eux, laissant s'échapper sous la porte, un faisceau de lumière blanche qui les éblouissaient. Une fois devant, Andréa s'était arrêtée en sentant la peur l'envahir. Elle avait serré la main de l'homme qu'elle tenait toujours, effrayée à l'idée de franchir le seuil. «Tout va bien se passer. Rappel toi que rien n'est réel.».

Evan avait lentement tourné la poignée, jusqu'à ce qu'ils ne soient éblouis par la luminosité intense. Le brouillard s'était dissipé pour laisser place à un paysage différent. Ils étaient au beau milieu d'une fête foraine. Elle pouvait sentir l'odeur typique des pommes d'amour qui la faisait frémir. Cela lui rappelait tellement de mauvais souvenirs. Evan ne comprenait pas ce qu'ils faisaient là, mis à part le fait qu'il s'agissait d'un de ses cauchemars. «N'aie pas peur, je suis là.». Elle essayait pourtant de se contrôler, mais elle s'était agrippée à son bras pour faire cesser ses pensées obscures.

La musique lancinante lui rappelait les pires films d'horreur qu'elle avait pu voir. Son mode de survie avait donné l'ordre à ses yeux de se fermer pour pouvoir faire le point. Après tout, elle était en sécurité, tant qu'Evan était présent. Un battement de cil avait suffi à tout changer et elle se trouvait maintenant seule dans cet enfer. La musique s'était arrêtée pour laisser place au sifflement du vent, qui provoquait des grincements métalliques sur les attractions vétustes.

La chaleur corporelle d'Evan avait disparue en un instant. L'oxygène venait à lui manquer et elle n'était pas loin de la crise de panique. Sans savoir pourquoi, elle avait eu envie de se réfugier dans une bâtisse qu'elle imaginait rassurante, mais une fois à l'intérieur, elle avait immédiatement reconnu l'attraction en question, la faisant frissonner inconsciemment. Il y avait des miroirs partout, laissant refléter sa silhouette sur tous les murs. «Evan ?». Elle cherchait une issue mais elle se trouvait seule face à elle-même. Le fait de se voir partout la dérangeait, alors elle avait baissé les yeux pour fuir son propre reflet.

Elle avait beau se répéter qu'elle allait se réveiller, rien ne changeait. Elle n'avait apparemment aucun pouvoir de décision, face à l'entité qui contrôlait ce qu'elle vivait. Un détail l'avait intriguée. Elle était persuadée d'avoir vu une ombre passer derrière elle. Andréa scrutait chaque miroir en cherchant une anomalie, jusqu'à ce qu'elle ne voie un de ses reflets bouger anormalement derrière elle.

La physicienne avait tout de suite compris ce qui allait se passer, rien qu'en observant son sourire. Elle allait se retourner pour lui faire face mais l'entité l'avait anticipée. Andréa avait senti ses pieds décoller du sol et elle avait été projetée contre l'un des miroirs. «Ce n'est pas étonnant qu'il ne veuille plus de toi !». Alors qu'elle reprenait ses esprits, son double tournait lentement autour d'elle comme Kolya l'avait fait, alors qu'elle était clouée au sol.

«Tu es faible !». Ses mots continuaient de l'atteindre, frappant plus fort son égo et détruisant petit à petit sa confiance en elle. Elle avait essayé de les ignorer, mais cela devenait trop intense, au point de se couvrir les oreilles. «Tout le monde t'abandonne ! Tu n'es pas digne de faire partie de cette expédition !». Cela la touchait d'autant plus que ces mots sortaient de sa propre bouche. «Tais-toi ! Ça suffit ! ». Elle s'était redressée pour se mettre à genou et priait pour que tout s'arrête, en raffermissant la pression sur ses oreilles, espérant qu'elle se taise. «Tu as pris la bonne décision. Tu aurais déjà dû partir depuis longtemps!».

Alors qu'elle commençait à perdre pied, Andréa avait senti une main se poser sur son épaule. Elle n'arrivait pas à y croire. Evan était revenu. «Bats-toi ! Rien de tout ça n'est vrai !». Il avait passé une main sous son bras pour qu'elle se relève et il avait vu son visage changer. Elle paraissait plus sereine et s'était plantée devant son double qui avait cessée de parler. La présence d'Evan lui avait donné des ailes et elle se sentait prête à défier son double. Son impuissance avait laissé place à la colère. Evan avait été surpris quand il l'avait vu se jeter sur elle.

Elle avait emmené Andréa dans sa chute et elles étaient maintenant livrées à un combat rapproché déloyal. Andréa sentait qu'elle perdait l'avantage, alors des larmes commençaient à couler m sans qu'elle ne puisse les contrôler, jusqu'à ce que le décor ne change une nouvelle fois.

Elle était assise au premier rang d'un wagon, avec une vue imprenable sur le circuit à venir. Elle détestait les grands huit et son corps n'avait pas manqué de le lui rappeler. Dans un cliquetis métallique, un poids s'était abattu sous ses côtes, oppressant ainsi ses organes avoisinants. Elle avait bien essayé de pousser la barre de sécurité devant elle, mais l'attraction

S'était mise en route et la rame dans laquelle elle se tenait, avait entamé sa course. «Evan !». Son estomac se tordait à mesure que le train avançait. Andréa avait hâte que tout se termine. En une fraction de seconde, Evan était assis à ses côté. «Il ne peut rien t'arriver !».

«Où étais-tu ? Tu es censé m'aider !». L'entité le tenait éloigné à chaque changement de décor et il lui était difficile de retrouver son amie dans cet environnement aléatoire. «Fait quelque chose, bon sang !». La jeune femme voyait qu'Evan essayait lui aussi de se dégager de l'emprise de la barre, alors que l'appareil entamait une longue montée. La descente était proche et Andréa ferma les yeux en attendant l'inévitable. La rame descendait trop rapidement et le train allait dérailler. Andréa criait à plein poumons, jusqu'à ce que le wagon ne quitte les rails et ne vienne s'écraser quelques mètres plus loin, en emportant ses hurlements dans les flammes.

Ces poumons cherchaient de l'oxygène à tout prix. Elle avait eu le sentiment d'être emmenée dans un tourbillon d'eau. Andréa avait pris une grande inspiration et s'était étonnée d'y avoir réchappé. Sa première impression avait été de cligner des yeux pour s'acclimater à la vive lumière du plafond. Elle avait faiblement tourné la tête en souriant légèrement, lorsqu'elle avait reconnu Radek. «Que s'est-il passé ?».

Elle avait tout de suite décelé de l'inquiétude dans ses yeux et elle avait vu juste quand elle avait senti sa main se poser sur son épaule. «Ton cœur s'est arrêté.». Elle paraissait confuse, jusqu'à ce qu'elle ne tourne la tête de l'autre côté. «L'entité est dans le Major.». En voyant les gouttes de sueur perler sur son front, Andréa pouvait aisément voir qu'il essayait de lutter dans son sommeil. Le son du moniteur cardiaque commençait à s'agiter, tout comme le militaire. «Peut-on le débrancher ?». «Ça le tuerai à coup sûr !». Andréa venait de vivre l'enfer, mais il fallait qu'elle l'aide. «Reconnectez-moi à lui !».

Evan avait toussé un moment et se sentait faiblir. Il ne pouvait pas abandonner. Andréa était partie et il fallait l'accepter, mais pas avant d'avoir tué l'homme qui se faisait passer pour lui. «Tu n'as pas pu la sauver !». Evan se trouvait en salle d'embarquement, anormalement vide pour que cela ne soit réel. L'entité lui avait donné quelques coups, dont le militaire peinait à se remettre. Il s'approchait de lui alors qu'il essayait de se redresser, mais la douleur le freinait. «Encore une que tu n'as pas su garder!».

S'en suivit une attente de longue haleine, se fixant l'un et l'autre pour deviner quels seraient les prochains coups. La tristesse commençait à s'immiscer en lui, faisant inconsciemment trembler ses mains. Il avait serré les poings pour évaluer la force qui lui restait et s'était relevé pour faire face à son double. «Elle est morte par ta faute ! Ça ne serait jamais arrivé si Jones avait été là !». S'en était trop pour Evan. Il était prêt à se battre et il n'allait pas ménager ses efforts.

«Je ne suis pas morte !». Andréa avait souri face au visage troublé de son ami. Andréa descendait les escaliers pour le rejoindre, mais l'entité avait changé de cap et s'était précipitée vers elle, bien décidée à finir ce qu'elle avait commencé. Sa prise d'étranglement allait porter ses fruits lorsque du courant électrique l'avait stoppée nette, la forçant à tomber au sol.

Evan ne comprenait pas ce qui se passait, jusqu'à ce que son amie ne lui avoue que l'électricité provoquée par le défibrillateur lui avait sauvée la vie et conduit l'entité à changer de corps. Même si elle faiblissait, elle semblait résister. La physicienne avait vu l'arme anti-réplicateur au sol et elle avait donné un coup de pied pour la faire glisser à ceux d'Evan. Il l'avait ramassé en un rien de temps et avait tiré sur son double, plus vite que Lucky Luke lui-même.

Le soulagement se lisait sur leur visage lorsque l'entité s'était désintégrée. Andréa avait comblé les quelques mètres qui la séparait de son ami en courant. «Tu n'as rien?». Il avait hoché la tête en accueillant sa silhouette dans ses bras encore frêles. «Étrange expérience hein ?». Evan s'était repassé le fil des événements et quelque chose le gênait. «Dis-moi, qu'est-ce que ton double voulait dire par ; tu as bien fait de prendre la décision de partir ?».

Andréa s'était détachée en le fixant. «Je ne savais pas comment te le dire.». C'était le moment fatidique qu'elle repassait en boucle dans sa tête et elle ne pouvait plus reculer. «Je m'en vais Evan. Je n'ai pas renouvelé mon contrat avec le SGC. Je rentre définitivement sur Terre dans neuf jours, je suis désolée.». Cette annonce l'avait laissé perplexe et il n'avait rien dit, jusqu'à ce que tout devienne noir.

Radek avait interrompu la connexion et débrancher les appareils. Ils étaient tous les deux en vie et c'était tout ce qui importait. Evan et Andréa s'étaient tous les deux fixé un long moment, réalisant que leur cauchemar était bel et bien terminé. Ils étaient restés un moment allongé en attendant que la pression ne redescende. Andréa avait senti les larmes monter. Elle s'était mise à sangloter sans retenue en posant ses mains sur ses yeux.

Les mouvements de Radek étaient limités dans sa combinaison, alors Evan n'avait pas hésité à s'asseoir sur son lit. Il avait retiré les électrodes avant de l'attirée vers lui et de la bercer doucement. Personne ne pouvait imaginer ce qu'ils venaient de traverser. Le cumul d'une année s'écoulait sur ses joues. Elle était à bout alors elle s'était laissé aller sans retenue.

Evan se tenait aux côtés d'Andréa devant la salle d'isolement. Elle semblait désorientée et complètement perdue. «Tu veux que je te ramène à tes quartiers?». Sa voix l'avait sortie de ses pensées et Andréa avait frénétiquement secouée la tête. Elle était épuisée mais elle craignait de devoir s'endormir. Evan l'avait conduite au mess en sachant qu'une boisson chaude allait l'aider. Sur le chemin, ils n'avaient pas échangé un seul mot, mais il était là et la soutenait du mieux qu'il pouvait. Ils s'étaient installés à une table et lorsqu'elle avait saisi la tasse fumante qu'Evan lui avait tendue, Andréa avait refait surface. «Est-ce que tu m'en veux?».

«Ce n'est pas comme si tu ne m'avais pas prévenu.». Il était déçu mais il s'en était douté. Il ne voulait pas la retenir contre son gré, même s'il le pouvait. « Je suis désolée Evan. Je n'ai jamais signé pour ça, tu sais… Mon boulot c'est d'analyser des données, pas de jouer avec ma vie.». Il ne pouvait que comprendre de quoi elle voulait parler. Ils avaient passés un moment à discuter, comme si leur amitié n'avait jamais été ébranlée, jusqu'à ce que la curiosité ne vienne piquer Evan. «Pourquoi as-tu autant peur des manèges?».

«On m'a oubliée dans une fête foraine une fois… Je devais avoir cinq ans.». La physicienne n'avait pas voulu épiloguer et ressasser de vieux souvenirs, alors elle lui avait simplement sourit. Ils venaient de vivre une expérience hors normes, qui confortait Andréa quant à son choix de partir. Ils avaient tous les deux étés surpris de voir Sheppard déposer un plateau repas et s'assoir avec eux, mais ils l'avaient accueilli avec plaisir. «Je n'arrive pas à dormir.».

«Oui, nous non plus.». Chacun se repassait les évènements en boucle et ils ne pouvaient pas s'empêcher d'avoir une pensée pour le docteur Heightmeyer. «Rodney et moi venons de déposer le cristal sur sa planète d'origine.». Même s'ils ne craignaient plus rien, ils allaient tous mettre du temps à s'en remettre. Après plus d'une heure, Evan et Andréa avaient compté plus de dix membres autour de la table. Cette histoire les avait tous marqué, chacun à leur manière.

TBC…